A, le 17 juin 2010 - 15:40, dit :
En parlant de mods anachroniques et de mêlanges des univers vidéoludique, y'a quand même une question que je me pose depuis un petit bout de temps: d'un point point de vue purement légal (du point de vu des goûts je rejoins Cotin, personne ne nous force à télécharger ce qu'on aime pas), comment est perçu le fait de réutiliser certains éléments de jeux vidéo dans d'autres jeux ? (Les personnages d'un Final Fantasy dans Oblivion par exemple).
Le phénomène peut paraître banal, n'empêche que c'est quelque chose qu'on voit (à mon avis) de plus en plus sur les sites de modding. Du coup si on parle de l'évolution des modules, on peut peut-être en dsicuter.
Il faut distinguer l'état du droit et la pratique. (La suite est un peu schématique, mais tant que vous ne pinaillez pas, c'est une base juridiquement exacte
)
- Au niveau du droit, chaque pays a ses propres législations en matière de propriété intellectuelle, même si on tend à une uniformisation. En France, il y a d'un côté le droit de la propriété industrielle (notamment dessins et modèles) et de l'autre, le droit d'auteur (qui comprend toute création de l'esprit, et donc peut parfois se recouper avec la propriété industrielle, même s'il y a une segmentation assez marquée en général).
La propriété industrielle nécessite, pour être efficace, de déposer les éléments que l'on veut protéger devant une autorité administrative (l'INPI). Donc des dessins et modèles, s'ils ne sont pas expressément déposés en France, sont normalement réutilisables. Attention, il est question de dessins et modèles (sens juridique du terme) et non de textures et meshes ! En gros, vous avez le droit de recréer dans votre jeu une architecture ressemblant à celle des Telvannis, mais vous n'avez pas le droit de prendre directement le mesh (qui relève du droit d'auteur).
Il y a également le droit d'auteur, qui protège automatiquement à partir du moment où l'on peut prouver une antériorité (en gros : "je l'ai fait avant, personne n'y touche"). Ca concerne les textes, les sons, les musiques, les textures, les meshes, etc.
La question peut se poser pour les noms et les personnages. En France, un auteur a un droit de propriété morale sur sa création, et peut donc à tout moment dire : "ça, ce n'est pas conforme à l'image de mon personnage, donc je m'oppose". Il faudra prouver un lien direct entre les deux personnages. Mais il existe aussi un droit à la parodie ("sous droit" de la liberté d'expression) : vous pourrez donc inclure un personnage "ressemblant" à un personnage connu ("Wiwec, le Dieu-poète à voiture jaune et rouge") sans que personne ne trouve rien à redire (en théorie en tout cas, après, il faut voir ce qu'en font les juges, de moins en moins rigoureux juridiquement [mais en même temps, avec l'ouverture du concours de l'ENM à des sciences po au lieu d'être l'apanage des vrais, nobles et valeureux jurist... euh bref, je m'égards, ce n'est pas le propos ^^]). Bref, ça va dépendre des juges.
Là où ça se complique :
- Il y a la loi, mais il y a ce qu'en font les juges. Parfois ça jouera en faveur du copiste ("nan, mais sérieux, 15 millions de dollars pour avoir inclus le 36e sermon de Vivec, vous y allez un peu fort les mecs"), parfois, non ("tiens, on sait qu'on ne pourra pas avoir tous les contrevenants, faisons un exemple !").
- Il y a la loi, mais il y a le problème de l'internationalisme : les droits ne sont pas toujours défendus de la même façon dans les différents pays. Ainsi aux Etats-Unis, ce n'est pas notre droit d'auteur qui s'applique, mais le copyright, plus souple de manière générale. Et il faut prendre en compte les particularités de chaque législation selon les modeurs en présence. De manière générale, la protection est regardée du côté de celui qui contrevient : ainsi pour savoir si quelque chose est légal en France, il faut regarder si ce que vous voulez utilisé est protégé en France, même si c'est un dessin animé japonais. Tant qu'il n'est pas protégé par le droit français, vous pouvez y aller, l'infraction ne peut pas être constituée à cause d'un droit étranger au vôtre.
- Il y a surtout le fait que, concrètement, les sociétés de jeux vidéo ne s'amusent que rarement à traquer les utilisations de leurs modèles. Déjà, parce que c'est difficile de les repérer, et d'autre part, parce que ça revient à tirer sur les moddeurs qui font vivre le jeu. Ce n'est pas une garantie absolue, surtout quand on sait que si les développeurs et éditeurs prennent l'habitude de laisser passer, les juges pourront ensuite être moins rigoureux le jour où une action sera intentée : "vous avez laissé faire jusque là, pas de raison qu'on soit sévère cette fois". Les maisons travaillant dans le jeu vidéo sont particulièrement attentives à ceux qui vendent des produits contrevenant à leurs droits, mais il faut savoir que la gratuité de l'oeuvre mise à disposition ne protège absolument pas d'une action en justice, contrairement à ce qu'on peut lire ça et là.
Voilà, désolé si c'était un peu long et pas totalement dans le sujet, mais il me semble important de rappeler ça ("nul n'est censé ignorer la loi", tu parles... Encore faut-il qu'elle soit intelligible !).