Assassin et Mentor [2]
La silhouette du mage telvanni se découpait dans le ciel rouge de la lumière du soleil levant. Le visage d'Ez'Riil était ravagé par de profondes marques de fatigue, il se trainait sur la route de terre, le regard résolument fixé sur les tours de pierre grise de Tel Vos, qu'on pouvait apercevoir entre les cimes des arbres.
Il avançait inexorablement malgré la fatigue qui l'accablait, une volonté de fer repoussant toujours un peu plus le moment où il s'écroulerait, épuisé, par la perte d'énergie causée par son combat contre le bosmer, assassin de la Morag Tong, qui avait tenté de le supprimer. Il ne croisa guerre sur la route que quelques marchands de guar et quelques sans-le-sou qui, tous, le dévisageaient comme le premier des mendiants. Il finit par en conclure qu'il devait avoir une mine des plus affreuses
Au bord de l'épuisement, le telvanni aperçus enfin l'arche de racines noueuses qui marquaient l'entrée du domaine de son ancien mentor et amis. Il observa avec une lueur d'apaisement dans le regard les formes biscornues du gros champignon tentaculaire qui trouaient les impénétrables murs gris de l'ancien fort impérial. Au centre, il y avait le bulbe du champignon, le cœur de la tour de là où partait toutes les racines, tiges et autres branches qui composent l'incroyable structure organique de la tour du Seigneur-mage Aryon de la Maison Telvanni.
Ez'Riil détourna les yeux de l'endroit qui s'apparentait le plus à un foyer pour lui. Il passa le porche de pierre et les gardes dans leurs armures d'ossement, qui le saluèrent, et leva à nouveau les yeux vers la tour de son maître. Parvenu au centre de la cour, il ferma in instant les yeux et tenta de mobiliser les vestiges de son pouvoirs. Après quelques minutes d'effort intenses il commença à s'élever lentement vers le cœur du champignon, là où résidait son maître.<br />Soudain, a bout de force, Ez'Riil ne put se maintenir en lévitation pus longtemps, il perdit connaissance alors qu'il s'était élevé de plusieurs mètres au dessus du sol. Son corps inconscient chuta brutalement au sol. Il ne vit même pas les gardes se précipiter vers lui, ni les pas affolés d'une servante partie prévenir le maître.
Ez'Riil se réveilla entre les murs végétales de la tour d'Aryon, dans les quartiers qui étaient les siens depuis presque quarante années de services. C'est donc au milieu d'un fouillis de parchemins, de livres et de bibelots magiques, que le mage émergea de l'inconscience dans laquelle il était plongé depuis d'interminables heures.
Après avoir repris ses esprits il finit par se lever et se dirigea vers les quartiers de son ancien maître. Marchant d'un pas trainant, il entreprit de gravir vaillamment les quelques marches et le long couloir sculpté dans la paroi du champignon qui le séparaient encore de son but. Il finit par arriver dans les appartements de Maître Aryon, exténué et tremblant. Ce dernier était habillé d'une longue robe bleu nuit où des entrelacs de fils d'or dansaient aux extrémités de ses manches. Toutes son attention était pour l'instant retenue par un lourd grimoire qu'il compulsait calmement. Il arrêtait fréquemment sa lecture pour noter quelques mots sur une liasse de parchemins posés à côté de lui. Aussi il ne remarqua pas tout de suite l'entrée de celui qui fut son élève pendant presque quarante ans
Après quelques instants il fini par se retourner vers Ez'Riil et se leva de son bureau. Tout deux se dévisagèrent longuement. Aryon le regardait droit dans les yeux, ne pouvant oublier que la personne qui se tenait devant lui était partie comme un ingrats, prétextant le besoin de voler de ses propres ailes, cependant son regard s'arrêta sur les nombreuses entailles que collectionnait a présent Ez'Riil, il les contempla quelques minutes tristement. Ez'Riil, lui fuyait se regard tout aussi interrogateur qu'accusateur, le regard de l'homme qu'il avait choisi de quitter quelques mois plus tôt pour tenter sa chance seul, et ce sans un remerciement. Il finit par le regarder avec une lueure d'excuse dans le regard et un peu joie aussi. Un silence pesant s'était installé entre les deux mages et aucun des deux ne semblait près a franchir le gouffre qui les séparait à présent.
Aryon décida cepandant de prendre la parole pour rompre la glace :
_ Raconte moi ce qui te fait revenir en ces lieux, commença t-il d'un ton grave, toi qui a été si prompt à quitter l'abri de ma tour.
Après un soupir Ez'Riil entreprit de lui raconter les faits un peu comme à l'époque où il devait lui rendre compte d'une mission. Il parla tout d'abord de la séance du Conseil où il s'était emporté et avait défié l'Archimage et son héraut. Puis alors qu'il volait en direction de Tel vos depuis Sadrith Mora, en quête de conseil, il raconta l'attaque des trois assassins et sa fuite désespérée au Temple de Vos par magie. Et ensuite il narra ses vaines tentatives pour retrouver la piste de ses agresseurs, et la découverte d'un quatrième assassin, un argonien, a qui il avait arraché les informations dont il avait besoin et où il avait appris que le commanditaire du meurtre était Senise Thindo, la disciple de Gothren. Il termina par sa confrontation avec le dernier des assassins à avoir survécu, un bosmer retord, celui qui l'avait obligé à fuir jusqu'à Vos, qu'il avait pu retrouver et tuer grâce aux souvenirs arrachés à l'argonien. Il observa aussi dans quel état de faiblesse il s'était trainé jusqu'à Tel Vos et s'était effondré, sans force. Pendant le récit du mage, le visage d'Aryon se fit de plus en plus grave, et ces yeux flamboyaient littéralement de colère envers Gothren, son rival de toujours et envers Ez'Riil et son manque de prudence consternant. Ez'Riil garda le silence et scruta le visage de son mentor, perdu dans ses réflexions houleuses. Celui-ci avait le regard perdu dans le vague, les yeux remplis d'inquiétude. Les révélations d'Ez'Riil avaient fini par remplacer la colère par un masque soucieux. Il revint rapidement à lui et posa ses yeux couleurs de braise sur Ez'Riil. Il prit enfin la parole, pesant chacun de ses mots comme s'ils portaient le poids du destin.
_ Pour commencer, je ne te félicite pas pour ta précipitation et ton manque de discernement aberrant, ce n'est pas digne de mon enseignement. Ez'Riil baissa la tête en signe de soumission, attendant la suite. Il ne sert a rien que je revienne sur tes échecs, continua le mage, tu les as suffisamment payés. Ensuite comme tu t'en ais rendus compte l'Archimage en a après ta personne, la situation est périlleuse. Il te faudra agir vite et bien. Que comptes-tu faire, questionna le mage.
_ Je ne sais pas encore, répondit Ez'Riil, mais je compte me venger, continua t-il, les yeux rougeoyant de haine. La résignation s'empara du visage d'Aryon :
_ Oui, je me doutais que tu dirais cela, déclara Aryon, mais tu n'es pas assez fort pour te mesurer à Gothren !
_ Je n'en avais pas l'intention, dit-il, je m'en prendrais a sa disciple, pour tout ce qu'elle m'a fait subir. Mais avant je dois me retirer de la circulation un moment pour restaurer mes forces et devenir plus puissant pour abattre ma rivale, déclara Ez'Riil avec un calme surprenant.
_ Soit, déclara Aryon, mes ressources sont a ta disposition, si je peux t'être d'une quelconque aide n'hésite pas.
Ez'Riil, déclina l'offre et répondit :
_ Non, je ne resterais pas ici, j'ai investi la tour vélothi, d'Odirniran, après m'être occupé de Milyn Faram, qui a trahi sa maison en conduisant des expériences de nécromancie sur des sujets de sa propre race. J'ai réussi à prendre le contrôle de ses gardiens mort-vivants, ils sont désormais sous mon autorité et assureront ma protection contre les intrus, ainsi que celle des quelques personnes qui sont sous mes ordres. Toutes mes affaires y sont déjà et mes gens m'y attendent depuis déjà deux jours.
_ Je vois que tu as pris un peu d’avance, déclara Aryon avec une once d’admiration, c’est bien, comme ça tu n’es pas démunis. Que comptes-tu faire ensuite.
Ez’Riil se demanda s’il pouvait confier la suite de ses plans à son mentor. Le plan en question recelait une grosse part de hasard et une, beaucoup plus grosse, de risque. Il décida d’être franc cependant.
_
J’ai découvert dans d’obscurs textes dwemers l’existence d’un puissant artefact, commença-t-il
, s
on pouvoir premier à été détourné et souillé par un nécromancien ancien, qui en a fait le réceptacle d’une magie impie très puissante. Il conférerait à celui qui le détient des pouvoirs considérables, ceux de tous les clans de vampires de Morrowind réuni, peut-être même ceux des Vampires Originels.
Aryon observa la lueur presque démente dans le regard d’Ez‘Riil avec une nuance de peur. Etait-il vraiment près a se damner pour vaincre Gothren, qu’allait-il faire de toute cette puissance, peut être s’en prendrait-il a tout être en travers de son chemin. Tant de pouvoir dans une seule personne ne pouvait assurément apporter que la ruine, et il risquait fortement d’entrainer toute la Maison Telvanni dans sa chute et sa folie. Il tenta de l’en dissuader.
_
Un artefact de cette nature ne peut exister sinon il aurait déjà été utilisé, de plus celons la légende les malédictions qui entourent un tel objet seraient si puissantes qu’elles dissuadent les plus entêtés.
Aryon se tu, il venait de se trahir et reconnaître l’existence, même légendaire de l’objet. Une lueur de triomphe éclaira le visage d’Ez’Riil qui pressa son maître de lui en dire plus :
_
Alors vous savez ! S’écria-t-il, dites m’en plus je vous en conjure !
_ Je ne te dirais rien cette chose est trop dangereuse, si tu l’utilise trop souvent tu risques la damnation, déclara Aryon, décidant de ne pas nier.
_
Dites moi au moins comment se nomme cet artefact, supplia le mage,
et puis il ne s’agit que d’une unique fois pour me venger de Gothren et je le détruirais.
_ Le détruire ! L’artefact a consumé tous ceux qui ont essayé et a absorbé leur âme. Et lorsque tu l’auras utilisé tu ne pourras te contenté d’une seule fois tellement sa puissance est enivrante et tu l’utiliseras de nouveau et ses gardiens te retrouverons et te tueront. La vengeance n’ait assurément pas le meilleur motif pour utiliser un tel pouvoir. Je ne sais rien de son nom , mais même si je le connaissais je ne dirais rien, pour le salut de ton âme et de ta Maison.
Ez’Riil le pria encore et fini par s’emporter :
_
Très bien gardez vos secrets je n’ai pas besoin de vous pour le trouver, s’époumona le mage,
j’ai des ressources je finirais par metre la main dessus croyez-moi. Moi qui comptais faire de vous le nouvel Archimage une fois que j’aurais vaincu Gothren, je vois à présent que la seule personne en qui je peux placer ma confiance c’est moi !
Comme a son habitude la colère d’Ez’Riil déchaina ses pouvoirs a son insu et alors qu’il vociférait sur son maître les flammes des nombreuses bougies de la pièce se transformèrent en véritables colonnes de feu brulant le plafond végétal au passage. Des verres et des chopes explosèrent, les portes des meubles et de la pièce se mirent à trembler violemment et une vieille tapisserie prit feu en quelques secondes. Alors qu’une magie sauvage et primitive se déchainait dans la pièce, Ez’Riil se détourna de son mentor ne lui laissant même pas le loisir de répondre et se dirigea vers la porte du couloir . . . presque complètement brulées par des flammes invisible et qui dégageait par la même une effroyable odeur de champignon calciné. Ez’Riil se dirigea a pas rageurs vers les appartements où il avait été soigné et récupéra son bâton de bois sombre, dérobant par la même occasion une grande gemme spirituelle de laquelle il sentait se dégager un puissant pouvoir. Il embrassa une dernière fois la pièce du regard et se jura de n’y revenir que lorsqu’il aurait défait Gothren et qu’il pourrait afficher son triomphe. Une fois son serment intérieur proféré, il ferma les yeux et commença à réciter la trame d’un sort, qui a chaque mot l’arrachait peu a peu a l’endroit où il était. Et c’est lorsque son corps finissait de se transporter dans un autre endroit qu’il aperçu son mentor, droit et la mine sévère dans l’encadrement de la porte, le regard posé sur celui qu’il savait perdu à sa cause.
Modifié par Merwyn le Mage, 28 octobre 2009 - 19:33.