[rp] Seyda Nihyn
#201
Posté 20 septembre 2007 - 07:09
Le jeune Bréton n'avait pas mis longtemps à comprendre que le comportement misanthrope de Suetius était sans doute dû à sa propre haine de lui-même. Il avait suffisamment voyagé et fréquenté de gens pour s'en rendre compte. La plupart noyait cette haine dans l'alcool. Mais pas Suetius. Il avait honte de quelque chose, très probablement ce qui lui avait donné le surnom infamant de Nefans, que Dolvane était résolu à percer à jour, et il conservait sa haine près de lui, comme une vieille compagne de route.
Le barde savait que sa chance était perdue s'il laissait l'Impérial partir. Il pouvait toujours réussir à gagner Aëana, peut-être même Malicia, à sa cause et les accompagner mais Suetius refuserait à jamais de lui parler et de lui accorder la moindre confiance s'il lui forçait encore la main. Il serra les dents et fit ce qu'il n'osait jamais en temps normal. Il tendit sa main gantée en avant et saisit l'épaule du légionnaire.
"Ecoutez-moi, insista-t-il. Vous avez rencontré Umbra, messer Suetius. Vous avez traversé tout Tamriel ou presque. Mais ça ne peut pas vous suffire, parce que vous ne vous êtes jamais pardonné certaines actions. Si vous reprenez votre chemin maintenant, sans moi, sans me raconter votre histoire, vous errerrez jusqu'à la fin de votre vie comme une âme en peine. Vous ne cherchez pas la célébrité, mais ce n'est pas le but de ma saga que de vous faire connaître..."
Il relâcha son étreinte sur l'épaule du vieil homme, conscient que cela serait dangereux de la maintenir plus longtemps.
"Il y a un vieux dicton, sur ces terres... La plume est plus forte que l'épée. La rédemption que vous cherchez, que votre épée n'a jamais pu vous offrir... elle se trouve peut-être dans ma voix, dans mes instruments... Je ne peux pas vous le garantir, je n'ai moi-même aucune certitude, sinon celle-là : sans vous je suis condamné à l'échec."
Le barde se pinça les lèvres de dépit.
"Je n'ai jamais reconnu cela devant personne. Je me suis toujours efforcé de paraître n'avoir besoin d'aucune aide."
Il se passa le bras sur le front pour balayer les grosses gouttes de sueur qui menaçaient de couler dans ses yeux. Ses traits se contractaient contre sa volonté et il fit un violent effort pour en reprendre le contrôle.
"Si vous prêtez attention à ce qu'on dit sur moi, on vous dira que je bois trop, que je suis insolent, que je me moque de tout le monde dans mes chansons. C'est... la plus pure vérité. Mais il n'en demeure pas moins que je suis le meilleur chanteur à l'est de Cyrodiil. Quand je joue, quand je raconte les vieux contes en m'accompagnant de mon luth, mon public se sent mieux, soulagé. Je crois qu'une saga avec vous peut accomplir cela mieux que n'importe quel autre chant. Et pas en prétendant que vous êtes invincible. Ce n'est pas ce qu'est un héros."
Sa respiration était presque sifflante et il n'y pouvait rien. Le légionnaire devait se faire une bien piètre opinion d'un homme tel que lui, incapable de maîtriser ses passions et ses élans.
"Un héros, c'est la peur au ventre, la peur, tout le temps. La peur de mal faire, de ne pas avoir pris la bonne décision au bon moment, celle qui peut coûter la vie à d'innombrables personnes ou à quelques-unes seulement, mais qui lui sont chères. Un héros, c'est l'impression de ne pas être à sa place, de ne pas être le meilleur pour la tâche à accomplir, et la certitude pourtant qu'il est trop tard pour faire appel à un autre. Une certitude qui le ronge, qui le détruit à petit feu... Qui vous tue, légionnaire Suetius, sans que vous vous en rendiez compte. Et pourtant, vous continuez toujours, comme les autres héros, plutôt que d'abandonner. Est-ce que c'est ça, votre lâcheté ? Est-ce que vous êtes lâche parce que vous avez sauvé le reste de votre patrouille dans les marais drès ? Parce que vous protégez ces deux jeunes femmes pour je ne sais quelle raison ? Que vous étiez toujours parmi les plus exposés dans les abordages ? Est-ce que vous êtes lâche parce que vous cherchez la mort ? Parce que vous n'avez plus de raison de vivre ?
Je vous ai dit que je ne savais pas ce que je pouvais faire pour vous. Mais c'est une offre comme une autre. Que perdez-vous à l'accepter ?"
#202
Posté 20 septembre 2007 - 18:27
D'un geste vif, avec une poigne qui surprit le barde malgré les rumeurs collectées dans les tavernes à soldats, les cours de caserne et les sous-sols dévolus aux archives, le vétéran saisit Dolvane Philor par le col de son vêtement et tira son visage à quelques pouces seulement du sien.
D'un ton glacial, Gnaeus déclara, ses yeux rivés sur ceux du freluquet:
« Ne vous risquez pas à juger de ma personne ou de ma vie et ravalez plutôt vos prophéties à quatre sous; vous pencher sur quelques pages d'archives n'a pas fait de vous un moine de la Phalène Ancestrale, loin de là. Je ne sais ce que valent les chansonnettes dont vous vous flattez, mais pour ce qui est d'interpréter les coeurs, vous n'êtes pas à la hauteur.
Je ne tolérerai pas plus longtemps votre glose malvenue. Un mot sur moi encore, un seul, et je saurai vous faire regretter votre indélicatesse. »
Cela dit, il repoussa fermement, quoique sans violence inutile, le skald et le relâcha avant de verrouiller la porte de sa chambre et d'entreprendre de traverser la salle bondée. Il se montrait indifférent aux regards noirs et aux murmures réprobateurs des clients qui avaient assistés à l'échauffourée déroulée sur le seuil sans en saisir la teneur exacte, mais qui prenaient instinctivement le parti de Dolvane Philor puisque sa compagnie était infiniment plus agréable que celle du revêche Impérial.
#203
Posté 23 septembre 2007 - 10:16
« Tu devrais pas faire la fine bouche, collègue, lança Hrisskar à l’attention de Suetius, presque sorti de l’auberge. C’est pas Elone, mais c’est le mieux qui s’invitera dans ta chambre dans le coin ! »
L’assistance éclata en rires gras. En temps normal, Dolvane se serait joint à elle et aurait même chanté quelques vers impitoyables à l’adresse du légionnaire. Mais il se sentait vidé de toute raison d’être... Etait-ce cela que l’Impérial ressentait en permanence ? Cet abîme terrifiant sans barrière pour se retenir tout au bord ? Dieux, quelle vie épouvantable cela devait être !
« Arrile, foutu vendeur de bibine frelatée ! beugla encore le colosse nordique au pied plat. Qu’est-ce que tu m’as servi comme tord-boyaux ? Je vois pas les cheveux de mon ami Dolvane de la même couleur que tout à l’heure ! »
Le jeune homme écarquilla les yeux, affolé. Si un ivrogne comme Hrisskar pouvait se rendre compte du changement, d’autres l’auraient aussi sûrement remarqué... et ne manqueraient pas de le répéter quand ils seraient à Cœurébène. Sa vie serait à nouveau compromise et il n’y aurait plus moyen d’user de teintures différentes : le stratagème révélé serait sa perte.
Pris de panique, Dolvane poussa une porte au hasard et se retrouva dans la chambre des deux jeunes femmes que Suetius accompagnait. Il ne s’en aperçut que trop tard. Il s’affala sur le sol lourdement.
« J’ai tout manqué, làcha-t-il, exaspéré contre son comportement stupide. Je ne suis qu’un de ces pauvres abrutis qui régalent d’airs les clients des tavernes et je n’ai jamais rien été d’autre. Je ne mérite que ça et je devrai m’en contenter à jamais. »
Son impuissance lui faisait horreur. D’un geste rageur, il arracha la guimbarde pendue à son cou et la jeta à travers la pièce. Elle rebondit et arriva aux pieds d’Aëana avec un faible tintement.
#204
Posté 23 septembre 2007 - 17:09
Arrille se demanda si les deux Bretonnes arrivées en même temps que lui allaient également repartir en sa compagnie, mais il n'estima pas utile de le demander à son client taciturne: après tout, il suffisait d'attendre quelque peu pour voir si l'autre chambre se libérerait également.
Le vétéran s'arrêta sur le seuil de la porte, tira une carte de sa manche et la consulta quelques instants. Alors que le tumulte de l'étage reprenait son volume et son rythme habituel, il revint vers le commerçant:
« A la réflexion, j'aurais sans doute besoin de quelques vivres. De quoi tenir durant deux ou trois jours de marche. Et de l'eau.
- Pour combien de personnes? glissa l'Altmer, saisissant l'occasion de satisfaire sa curiosité.
- Pas plus de trois, j'espère. » répondit énigmatiquement son interlocuteur « mais prévoyez tout de même une outre d'eau supplémentaire » ajouta-t-il avec fatalisme.
Ayant acquis plusieurs pains, des racines comestibles, du crabe séché et quelques fruits, le vétéran les rangea dans son havresac à l'exception d'une pomme déjà un peu blette et quitta l'établissement.
Une fois à l'extérieur, il adressa un dernier regard à l'attention des tours tarabiscotées de la Guilde des Mages en regrettant intérieurement de n'avoir pu faire toute la vérité sur le rôle probable de l'archimage Mortimus dans cette affaire. Mais, qui sait? peut-être aurait-il l'occasion de s'entretenir encore avec cet énergumène avant que cette histoire ne soit tout a fait terminée.
Gnaeus haussa les épaules et mordit dans son fruit avant de tourner les talons pour traverser le ponton qui le conduisait à l'extérieur du village. Nulle part il ne voyait trace de Salizar ou de sa compagne, ce qui n'était pas pour lui déplaire. Il marcha jusqu'au carrefour et consulta les poteaux indicateurs rongés par la mousse en recrachant de temps à autre un pépin dans une mare avoisinante.
#205
Posté 23 septembre 2007 - 18:41
"Vous savez... convaincre Gnaeus relève de l'exploit. Et... vous semblez avoir touché une corde sensible."
Elle s'avança vers Dolvane et lui tendit son instrument.
"Je ne comprends pas vraiment ce que vous cherchez... Un barde avec autant de talent que vous n'a pas besoin d'une source d'inspiration telle que Gnaeus. N'importe quel chant prend une autre dimension si elle sort d'entre vos lèvres."
Aëana savait sa tentative de réconfortement maladroite. Cependant il était vrai que les motivations de Dolvane lui semblaient obscure, et sa réaction face à son échec un peu excessive...
#206
Posté 23 septembre 2007 - 19:17
"Merci beaucoup pour ces quelques mots, douce Aëana. Si vous savez guérir les maux du corps aussi bien que ceux de l'âme, vous pouvez sans doute sauver des mourants."
Il enfila de nouveau la ficelle dans la guimbarde et la repassa autour de son cou en serrant légèrement le nœud.
"Je me sens plus apaisé maintenant que vous avez passé du baume sur mon cœur... Mais si vous avez surpris ma petite conversation avec votre compagnon pas très expansif... vous aurez également entendu qu'il n'y a plus beaucoup de héros, de nos jours. Je regrette de ne pas pouvoir vous témoigner plus longtemps ma reconnaissance pour la teinture, mais je vais devoir m'en aller."
Il se tourna vers Malicia et inclina la tête.
"Mille excuses si je vous ai importunée, damoiselle. Vous n'aurez plus à souffrir ma présence. Je pars immédiatement pour le sud, vers Cœurébène. Je présume que vous irez vers le nord, à Balmora ?"
#207
Posté 23 septembre 2007 - 19:46
-Bonsoir Mesdemoiselles ! J'espère que je ne vous ai pas trop manqu...oh ! Milles excuses ! Je n'avais pas vu que vous aviez invitées un de vos soupirant !
Il pouffa de rire puis reprit :
-Et bien camarade, me ferez vous l'honneur de déclinez votre identité ? A moins que vous ne préferiez rester discret
Sur son visage se dessina son éternel sourire malicieux
Modifié par Salizar d'Ombrelune, 23 septembre 2007 - 19:49.
#208
Posté 23 septembre 2007 - 20:08
-C'est cela même, à Balmora que nous allons.
Au fond elle n'était pas du tout convaincue, au contraire de cela, une crainte grandissait, celle d'aller à Coeurébène, après tout ils n'avaient plus rien à faire à Balmora, les autres trous du coin ne les intéressaient pas, ce n'était pas encore l'heure de retourner à Pélagiad et Vivec n'était pas une destination logique, au contraire de Coeurébène, là où il y a un grosse partie de l'administration impériale du duché.
Une expression de crainte fugace traversa les yeux de la brétonne, ils risquaient encore de se croiser.
Sans ménagement ni compassion à la blessure de Dolvane, Malicia reprit sans autre forme de procès:
-Nous aussi partons sur le champ, alors adieu.
Puis elle lança un regard à Aëana, lui intimant silencieusement de ranger ses affaires.
Du moins c'est ce qu'elle aurait sûrement fait si, si seulement! Salizar!
Malicia se fit violence pour ne pas crier et ne se fit pas prier pour détourner son regard de l'elfe, étudier la forme des plis des draps du lit d'Aëana devint subitement une activité fort intéressante.
#209
Posté 23 septembre 2007 - 22:05
"Le soupirant que vous avez sous les yeux n'est plus bon qu'à soupirer, hélas."
Il plissa les yeux, cherchant à se souvenir s'il avait déjà rencontré l'elfe ou un membre féminin de sa famille. Après un court examen, il tira la conclusion qu'il ne l'avait jamais vu nulle part et pouvait lui faire confiance pour le moment. Il était d'ordinaire plus prompt à se présenter, mais ses mésaventures l'avaient quelque peu échaudé.
"Dolvane Philor, skald."
Pour une fois, le chanteur coupa court à ses effets de style. Les deux jeunes femmes l'avaient déjà entendu et seraient sans doute agacées par un nouveau numéro. A défaut de composer sa saga, il pouvait toujours se distinguer un peu de la foule des autres rimailleurs en se montrant moins exubérant. Même si cette résolution avait peu de chance d'être tenue, sourit intérieurement le Bréton, elle ne pourrait lui faire que du bien pour les jours à venir.
"Je suis arrivé cette nuit et je repars aujourd'hui vers le sud, comme je le disais déjà à vos amies avec qui j'ai fait connaissance ce matin-même."
Pas la peine de mentionner l'incident Suetius. Le Dunmer l'apprendrait bien assez tôt.
"Je vais à Cœurébène. J'ai entendu dire que le prochain navire de ravitaillement amenait quelques instruments de musique intéressants que j'aimerais examiner, voire acquérir. Ce serait plus facile si j'étais noble comme vous, ajouta Dolvane en désignant la chevalière passée à son doigt, mais je devrais me contenter de ma qualité de roturier."
Il avait presque craché les derniers mots, à son grand étonnement. Il n'avait jamais fait une histoire de sa basse extraction ou même de sa bâtardise, mais les derniers événements et la bonne humeur affichée de l'elfe, son interpellation bonhomme lui portaient sur les nerfs. Décidément, Suetius ne se contentait pas de lui faire partager son désarroi, il lui avait aussi transmis son caractère difficile. Dolvane s'ébroua pour faire disparaître la désagréable sensation qui le gagnait.
"Je dois être étourdi, je n'ai pas saisi votre nom."
#210
Posté 23 septembre 2007 - 22:36
Il fit une discrète révérence...
Mais ne desespérez pas pour ce qui est de vous procurer ces instruments de musique, car je suis homme de nombreux talents, et il se trouve que l'un d'entre eux consiste à euh...me procurer divers articles, ainsi que divers ennuis...
... puis adopta son air de gamin pris en faute...
Bref bref bref, ne parlons plus de cela, vous me voyez ravi de faire votre connaissance. Est-ce que par hasard l'un de vous trois saurais où se trouve notre joyeux compagnon impérial ? J'ai besoin de parler à ce farceur de Gnaeus...
... et ne parvint pas à retenir un sourire en évoquant le riant légionnaire en ces termes.
Modifié par Salizar d'Ombrelune, 24 septembre 2007 - 11:44.
#211
Posté 24 septembre 2007 - 08:13
“Il est sorti de l’auberge, je crois. Il est sans doute allé se poster sur la route pour vous attendre, dans quelque direction que vous alliez.”
Le skald n’avait pas d’opinion arrêtée sur les voleurs. Bon nombre de ses spectateurs faisait sans doute partie de la Guilde et l’argent qu’il recevait avait souvent quitté la poche d’un client un peu riche de l’assemblée, empalmé par un gaillard agile, puis déposé dans son chapeau. Mais oser insinuer que lui-même ne reculerait pas devant le vol pour obtenir des instruments de musique... C’était choquant. Ce Dunmer ne remontait pas dans son estime. Dolvane eut un reniflement méprisant.
“Voler des pièces uniques de lutherie ? Il faut être en Morrowind pour entendre des âneries pareilles ! A supposer que vous parveniez à déjouer la surveillance de la Compagnie, comment pourrais-je jamais utiliser ces instruments en public ? Vous voulez me faire pendre ?”
Sans attendre de réponse, il fit une profonde et dernière révérence à Aëana, laissa tomber un “Adieu” un peu étranglé, tourna les talons et claqua la porte derrière lui. Il récupéra ses sacs dans sa chambre, les passa par-dessus ses épaules et sortit de l’auberge. Il s’était arrangé avec Arrille en arrivant pour ne pas avoir à payer en échange d’égayer un peu sa salle et le commerçant ne pouvait que s’en féliciter : Elone ne cessait de remplir les coupes à une heure pourtant creuse d’ordinaire.
Une fois qu’il put respirer l’air encore frais du dehors, Dolvane se sentit mieux. Il s’était probablement comporté injustement envers Salizar, mais vraiment, qui lui aurait reproché son emportement cette matinée-là ?
Ses pas le menèrent jusqu’à la route impériale assez bien entretenue. Une silhouette se détachait nettement, non loin de là. Dolvane sentit sa colère revenir. Suetius l’avait à mi-mot accusé de ne pas en savoir plus sur la musique que le premier imbécile venu. Eh ! bien, il allait voir ce dont il était capable, ce vieux barbon. Bien qu’il n’aimât guère risquer d’abîmer ses instruments avec l’humidité du dehors, il sortit son luth et s’assit en tailleur, le calant sur ses genoux.
Il porta sa guimbarde à sa bouche et l’y coinça solidement. De la main droite, il pinça les cordes de son luth, tandis que de la main gauche il le maintenait au niveau de la tête et bloquait les cordes. Redressant le tout le plus possible vers son menton, il fit claquer les lamelles de sa guimbarde avec son auriculaire gauche. Juste avant de se mettre à jouer un ricercar de son invention, il cria à l’adresse du légionnaire :
“Salizar d’Ombrelune est à l’auberge et veut vous parler !”
#212
Posté 24 septembre 2007 - 13:57
A cet instant précis, la voix de Dolvane Philor l'apostropha.
« Salizar d'Ombrelune est à l'auberge et veut vous parler! » annonça-t-il avant d'entreprendre un morceau qui, rapidement, lui valut l'attention des badauds et des enfants qui, cessant leurs jeux, accoururent du village jusque devant le ménestrel. Gnaeus, pour sa part, ne prêtait aucune attention à la musique, quelque belle qu'elle fût, accablé qu'il était par cette nouvelle.
Quelle mouche avait donc piqué Salizar que de le faire mander par un tel crieur public? Quel besoin de s'entretenir, par ailleurs, dans l'auberge, un lieu public, de la suite de leur périple? Ils étaient, paraît-il, poursuivis, pourchassés. A quoi bon, dès lors, s'attarder encore sur place? A quelle fin rendre leur départ plus remarquable encore en multipliant les allées et venues?
Le vétéran chassa rapidement l'idée de prendre seul la route et de gagner Coeurébène par ses propres moyens en se figurant Malicia, laissée seule à la merci de ses sentiments pour l'odieux dunmer. Les dents serrées, il se résolut à rebrousser chemin et à regagner le village.
Il fallut au vétéran essuyer à nouveaux quelques quolibets de la part de l'assemblée avant de pouvoir se camper devant Salizar dans la discrétion, à présent toute relative, de la chambre des Bretonnes.
#213
Posté 24 septembre 2007 - 19:27
A ce moment précis, la porte s'ouvrit, dévoilant un Gnaeus de forte méchante humeur
Vous êtes arrivé bien vite, ne me dîtes pas que ce...ooooh par les sacs d'Almalexia, c'est lui qui s'est permis d'aller vous chercher ... ne me dîtes pas qu'il a crié ne me dîtes pas qu'il a... MAIS BIEN SUR QU'IL A CRIE !
Et à ce moment précis, Salizar perdit un peu de son flegme exemplaire.
Quel imbécile de triple buse d'oiseau de mauvaise augure ! "Méfie toi des voleurs et des bardes" que me disait ma mère, j'aurais dû l'écouter, bravo pour la discrétion...je vais le retrouver et lui mettre sa guimbarde là où le soleil ne brille jamais, je vais lui donner une saga à écrire : L'histoire du rossignol qui fit le tour de Vvardenfell à coup de pied au derrière !
Il était même franchement furibond.
#214
Posté 24 septembre 2007 - 20:44
Faisant des yeux le tour de la pièce, il constata avec amertume que les deux Bretonnes n'étaient pas encore tout à fait prêtes au départ: sur une table traînaient de nombreuses fioles et un creuset attendait d'être nettoyé. Avec déplaisir, Gnaeus songea qu'il eût idéalement fallu quitter le village à l'aube et qu'il était déjà près de midi.
#215
Posté 25 septembre 2007 - 17:34
"Comptez-vous vous acharner sur ce pauvre Dolvane encore longtemps ? Pourquoi nous devrait-il d'être discret, alors que VOUS, Gnaeus, l'avez jeté comme un tas de déchets ? Et TOI Salizar, pourquoi ne pas l'égorger aussi ? Après tout, n'es-tu pas un monstre, au fond ?"
Elle leur tourna le dos et commença à ranger ses affaires.
#216
Posté 25 septembre 2007 - 18:48
« Je vous demande bien pardon, mais je crois m'être montré plus que civil avec cet énergumène, magicienne.
Que diriez-vous si vous appreniez que, depuis quelques années, un parfait inconnu s'est indélicatement renseigné sur vous, qu'il nourrit le rêve absurde de faire de votre personne son égérie, qu'il a la prétention d'exposer votre vie tout entière, vos faits et gestes voire même les mouvements de votre âme dans une ballade qu'il compte ensuite aller jeter aux quatre vents? »
Il y avait indéniablement dans sa voix et ses paroles quelque chose qui rappelait la plaidoirie d'un avoué. Ce soin mis à se justifier contrastait assez fortement avec les habitudes du vétéran, qui aurait pu ignorer la question ou la chasser d'un haussement de sourcils.
« Peut-être, poursuivait-il, votre ego serait-il flatté par l'offre, mais en ce qui me concerne je ne me considère pas tenu de me soumettre aux délires d'autrui. Aussi lorsqu'après un refus poli, le drôle revient à la charge et fait mine de vous forcer la main, il ne me semble pas disproportionné que de l'envoyer paître.
Si pour votre part vous briguez la place de muse, je vous en prie: précipitez-vous vers lui! Vous saurez bien le convaincre que vous êtes la personne qu'il lui faut. Pour ma part, j'ai à mener des affaires sérieuses qui ne souffrent pas que je m'encombre d'un ménestrel. »
#217
Posté 25 septembre 2007 - 19:39
-Je plaisantais, dame d'Althée...croyez moi, si j'étais un monstre les choses se seraient passées différement. Bien que d'après ce que je viens d'entendre de la bouche de Gnaeus, il aurait bien mérité ce genre de traitement...et j'aimerais bien savoir, ma Dame, ce que me vaut celui que vous m'infligez...
Il pouffa de rire puis reprit :
-Mais toute cette histoire est bien fâcheuse...vous savez comment sont les bardes, bavards comme les pies dont ils partagent le chant, et bientôt tout Vvardenfell saura qui nous sommes et ce que nous faisons...il faut trouver un moyen de le faire taire...de préférence en évitant de répandre ses organes à travers Seyda Neen, ce qui ferait un peu désordre dans un si gentil village.
Puis à Gnaeus :
Quand à ce que je voulais soi-disant vous dire...je voulais simplement m'assurer que nous ayions toute les provisions nécessaires, rien qui ne necessitais que vous vous déplaciez, je comptais vous trouver vous même...
#218
Posté 25 septembre 2007 - 20:17
Gnaeus, quant à lui, était agaçant, à toujours avoir raison ! Même si ses arguments étaient convaincants, elle ne parvenait pas à soutenir ses actes. Elle se tourna pour lui faire face et répondit :
"Magicienne ? Elle a un nom, la magicienne. Apprécieriez-vous que je vous appelle vieillard ?
Ce que je pense de cette histoire, moi, c'est qu'elle ressemble étrangement à l'histoire d'une magicienne dont vous avez tenté de vous débarasser, vieillard. Mais dites-moi, celle-ci n'aurait-elle pas... Sauvé vos vieux os ?"
#219
Posté 25 septembre 2007 - 21:10
Il prit toutefois la peine de répondre au voleur qu'il avait pris sur lui d'acquérir des vivres pour deux à trois jours de marche pour trois personnes, ainsi que quatre outres d'eau.
« N'étant pas bien sûr de votre réapparition, j'ai préféré ne pas m'encombrer avec davantage de nourriture. Je présume que ses marais qui nous entourent ne borderont pas notre route jusqu'à Coeurébène et que, partant, il sera assez aisé d'améliorer notre ordinaire. »
Estimant n'avoir perdu que trop de temps, il se retourna ensuite et posa la main sur la poignée de la porte.
« Je ne reviendrai pas sur les motifs qui m'ont poussé à me séparer de vous à Fort Phalène ajouta-t-il à l'attention d'Aëana. Pour ce qui est de ce Dolvane, demandez-vous s'il serait vraiment charitable de lui permettre de nous accompagner: des gens sont, aux dires de Salizar, prêts à tout pour s'emparer d'un objet qui n'est pas en notre possession. Pensez-vous qu'il soit dans l'intérêt de votre compatriote que de se trouver impliqué dans une affaire dont il ignore les tenants et les aboutissants mais qui pourrait lui être fatale? »
Il poussa la poignée et lâcha: « Pour le reste, soyez rassurée: je suis tout à fait conscient du fait que je vous dois la vie. Je saurai de mon côté me souvenir que vous ne perdez pas de vue cette dette, Aëana. »
#220
Posté 26 septembre 2007 - 12:32
Encore une fois, elle avait dérapé. Comment Gnaeus faisait-il pour toujours cacher ses émotions ? Celles d'Aëana étaient toujours en surface, visibles, actives. Elles ne lui laissaient jamais le temps de réfléchir.
Elle n'avait réussi qu'à se ridiculiser. Elle avait tenté d'attaquer Gnaeus par les sentiments, ce qui, en plus d'être méchant, s'avérait bien souvent inefficace contre lui, qui les enterrait si profond.
Elle écoutait trop son coeur...
... Mais lui, n'était-il pas un peu sourd ?
Enfin, elle s'empara de son arc et demanda :
"Où allons-nous ?"
#221
Posté 28 septembre 2007 - 16:14
De son pas vif, il regagna l'extérieur et reprit, sysiphéen, la direction du carrefour où, espérait-il, il pourrait enfin prendre la route de Coeurébène.
C'est là-bas que devaient se trouver les survivants de l'escorte du Chevalier Encele. Là-bas qu'immanquablement, se trouvaient les réponses aux questions que Gnaeus se posait. Pourquoi l'escorte du Chevalier de la Lampe provenait-elle, contre toute logique, de Coeurébène et non de Pelagiad? Comment interpréter le silence du Chevalier Gordjus à propos de Laniel Encele, alors qu'il ne pouvait ignorer sa mission, puisque quatre de ses hommes avaient formé son escorte?
Tournant et retournant ces questions dans son esprit, le vétéran passa devant Dolvane.
#222
Posté 29 septembre 2007 - 12:22
"Si ce voleur de vos connaissances est le dernier membre de votre petit groupe, vous allez avoir du mal à quitter la ville."
#223
Posté 29 septembre 2007 - 17:40
« Si vous avez de quoi prouver que cet individu est un criminel, ne vous en privez pas; rien ne me ferait plus plaisir que de le savoir moisir au fond d'une geôle ou se balancer au bout d'une corde. »
Il jeta un coup d'oeil à l'auberge d'Arrile, par-dessus la tête du Breton. Les autres n'arrivaient toujours pas. Il reporta les yeux sur le skald et conclut d'un ton acerbe:
« Pour ma part, je n'ai aucun élément permettant de le faire appréhender... et je crains que m'être désagréable ne soit pas reconnu comme un délit au regard de la loi impériale. »
#224
Posté 29 septembre 2007 - 17:49
"Il m'a proposé d'acquérir un ou deux objets pour mon compte. Aucune preuve valable, ça n'était un aveu que si on considérait qu'il usait de cette merveilleuse tournure que nous autres skalds appelons implicite."
Le Bréton savait pertinemment que le légionnaire était imperméable à l'humour, mais il valait mieux lui montrer qu'il ne lui tenait pas grief du refus de sa proposition. Du moins, pas en apparence.
"Vous ne pouvez pas partir de Seyda Nihyn, non parce que vous êtes malhonnête, mais parce que d'autres le sont. Des brigands ont été repérés pas loin d'ici, une bande brutale et dangereuse. Le bureau des taxes vient de faire placarder un message selon lequel il faut être au moins cinq pour emprunter les routes. La Légion va mener battue et n'accompagnera pas les voyageurs en nombre insuffisant."
#225
Posté 05 octobre 2007 - 15:53
Elle s'élança hors de la chambre, traversa l'auberge et en sortit sans prêter attention à ses occupants. Elle commença à suivre le chemin emprunté par Gnaeus à grandes enjambées, mais ralentit en apercevant Dolvane. Elle arriva bientôt près des deux hommes, suivie de près par Malicia, et demanda timidement :
"Que se passe-t-il ?"
0 utilisateur(s) li(sen)t ce sujet
0 membre(s), 0 invité(s), 0 utilisateur(s) anonyme(s)