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[rp] Cité Impériale


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284 réponses à ce sujet

#226 Arakis

Arakis

Posté 21 décembre 2010 - 00:28

Des Cliques et des Cloaques

21 Soirétoile 3E431, 13H25


Ca fait plaisir de voir que l'on vous écoute. Ce fut la seule chose qui traversa le cerveau de Saerileth alors qu'elle s'éloignait du jardin. Contrairement à bon nombres de mercenaires elle n'avait aucun goût pour le meurtre de ses semblables, elle n'avait pas outre mesure de remords pour des animaux ou une quelconque créature hostile mais un être humain (ou félin ou reptilien dans certains cas) ... Ca bougeait comme vous. Ca respirait comme vous. Ca mangeait et buvait comme vous. Ca aimait et détestait des choses comme vous. Ca avait des rêves comme vous. Ca avait des amis comme vous. Ca avait peut être une famille. Ca ....

Elle secoua la tête, cherchant à oblitérer de sa mémoire ce meurtre, elle avait un goût de bile au fond de la gorge. Elle ne tiqua même pas quand Maelicia lui saisit le bras avec force. En d'autre circonstances la bretonne aurait reçu un "ta gueule" ferme suivit peut être d'un coup plus ou moins fort dans l'épaule ou la mâchoire mais pas là.

" Écoutez moi bien, Saerileth ; si j'bourlingue depuis des mois avec cette mission, c'est pour empêcher qu'des gens dans vot'genre en assassinent d'autres. On en r'parlera plus tard, mais fourrez vous ça dans la caboche : si vous tenez à vot' paye et à rester valide, vous tuez plus personne, d'accord ?

Elle laissa échapper un grand soupir, comme si elle essayait de se remettre d'une journée de tension.

-Ecoutez Maelicia, je tue jamais par plaisir, j'aime pas jouer les sadiques, j'aime pas faire couler le sang que c'est pas nécessaire et j'aime pas bosser avec des putains de psychopathes. Ce que je viens de faire à ce type je l'ai fait parce que j'avais pas le choix, et si j'avais eu une autre solution qui m'aurait permis de pas coller une encoche de plus à mon arbalète j'aurais pas hésité une seconde. Mais j'ai pas pu, y'a des fois des situations de merde comme ça où on c'est nous ou eux. Ca me fout la gerbe mais j'ai préféré nous. Tout ce que j'ai à dire sur le sujet."

Elle tourna à peine la tête quand l'argonien la complimenta sur son tir, le reste de sa phrase se perdit dans les méandres de son cerveau. Elle gommait méthodiquement la sensation qu'elle ressentait à chaque détente de gâchette de sa mémoire. C'était cette oblitération de souvenir ou une perte totale de sa concentration, chaque mort la hantait comme les quatre démembrés qu'elle se refusait d'oublier. La remarque de Drem sur les charmes féminins arriva à point nommé pour lui changer les idées. Suivant sa suggestion elle délaça le haut de son gilet et tira sur sa manche de chemise dévoilant une peau de clavicule bronzée et qui d'après son expérience était plutôt attirante au yeux du sexe opposé, quand on avait des atouts autant en profiter non ?

Modifié par Arakis, 02 avril 2011 - 10:03.


#227 Trias

Trias

Posté 29 décembre 2010 - 18:35

Vivats

21 Soirétoile 3E425, 13H55




Le capitaine Darno se redressa, son regard cherchant à percer le nuage de poussière secondaire à l'effondrement. Il ne restait rien, rien du traqueur, du fou psychopathe... et surtout rien du terrifiant colosse de métal. Ils avaient disparu, quelque part au fond du cratère, lorsque cette explosion violette avait retenti.

Malgré la douleur de son bras, il sentit une bouffée de joie sourdre en lui. Il leva sa lame de sa main restante :

— CYRODIIL ! tonna-t'il. JERASELM, HÉROS DE CYRODIIL !

Son cri de victoire se répercuta dans dans la terre du cratère, dans le granit des ruines, sur l'écorce de la forêt alentours.

— CYRODIIL ! mugirent en réponse les gardes survivants, dans une immense clameur de victoire.

Alors les vivats guerriers retentissaient, un seul demeurait silencieux, prisonnier de ses pensées. Galaad, penché sur le bord de la combe, scrutait les décombres : acclamaient-ils un mort, ou un vivant ?




ж ж ж
Inconnu familier

21 Soirétoile 3E425, 13H55




Jeraselm tombait, à présent sans plus d'autre perception qu'une vertigineuse et terrifiante sensation : la chute. La claire lumière du cratère avait laissé place à une aveuglante obscurité, doublée d'un vacarme assourdissant. Il ne sentait plus la main qui l'avait aggripé.

Et toujours, la chute. Terrifiante chute vers l'éternité tandis que les secondes s'égrénaient. Leur mort à tous deux semblait certaine.

Il se sentit soudain compressé, comme saisi par un bras gigantesque et invisible, puis percuta violemment le sol et perdit connaissance.


ж ж ж

14H00



La douleur.

Le corps tout entier du traqueur n'était plus qu'un océan de douleur, abolissant toute sensation comme si sa peau et ses os n'était plus désormais qu'une surface abrasée criant sa torture. Puis revînt le toucher : la dureté froide et lisse de la pierre. Un claquement lourd et régulier, lointain.

Le bréton entrouvrit un œil : une galerie immense lui apparut, parcourue de colonnes majestueuses régulièrement agencées, à perte de vue. Dans la pénombre souterraine, le calcaire des chapiteaux ouvragés palpitait d'une lueur rougeâtre, intermittente. Des motifs inconnus se révélaient sur la pierre sculptée, rougeoyant avant de se dérober à nouveau, dans l'obscurité.

Jeraselm se remit d'aplomb : le berzeker, et surtout le géant d'ébonite devaient être proche. Eux aussi avaient traversé les fondations, sans doute percées par le poids insensé du métal volcanique dont était constitué le monstre. Il aurait dû mourir sur le coup, songea-t'il en scrutant une voûte trop haute pour être distincte.

— Ahh, donc notre jeune héros est sur pieds... c'est remarquable... fit une voix chaude, quoique légèrement éraillée, dans son dos.

Le traqueur sursauta, faisant volte face par réflexe : un vieillard se tenait là, accroupi sur un éboulis, caressant tranquillement une courte barbe. Les palpitations ocres malsaines de la galerie faisaient prendre un aspect sanglant à son bouc, mais procurait une teinte sombre au capuchon de sa robe, rabattu sur son visage.

— Qui êtes vous ? répondit sèchement Jeraselm, tout en ramassant prestement sa lame, qui gisait à son côté

Le vieil homme ôta sa main de son bouc, découvrant une moustache amplifiée par un vaste sourire. Ses yeux pétillèrent de malice.

— Combien de réponses voulez vous que je donne à cette question, jouvenceau ? éluda-t-il, en l'observant.
— La bonne et tout de suite ! éclata Jeraselm, en pointant la gorge de son interlocuteur.

Le sourire du vieillard s'élargit encore.
— Sinon vous allez occire l'ancêtre qui vous a sauvé la vie ! Diantre, quel ingratitude...

Jeraselm crut qu'il allait exploser : il avait mis en déroute un monstre invulnérable et un guerrier frénétique, survécu à une chute certainement mortelle, et tout ça pour se faire railler par un vieux fou sorti d'on ne sait quel trou ? Il leva sa lame, puis arrêta son geste... Il avait survécu à une chute mortelle ?

— C'est vous qui avez amorti ma chute ? demanda-t'il enfin, en restant sur la garde.
— Précisément, répondit enfin le vieillard, en contemplant la pointe de Vipérine d'un air intéressé.
— Pourquoi ?
— Parce que je me sentais solitaire, fit l'ermite, en souriant une fois de plus. Et parce que j'aimerai bien que vous rendiez un service...

Jeraselm hésita quelques secondes. Puis d'un coup sec, il amena sa lame à quelques centimètres des yeux du vieillard. Celui ci n'esquissa pas l'ombre d'un frémissement.
— Vous n'avez pas peur de moi ? demanda-t'il.
— Non. Et vous ? répliqua le vieil homme, sans sourciller.
— Pourquoi aurais-je peur ? rétorqua virilement Jeraselm.
— Parce que vous ignorez qui je suis, mon cher traqueur. Et que les mammifères craignent l'inconnu...

Jeraselm tiqua. Comment ? Comment ce pauvre diable savait-il ? Quelque chose lui disait que ce vieillard, si sûr de lui, n'était pas ordinaire. Il n'avait pas bougé d'un millimètre lorsqu'il l'avait menacé de sa lame. Était-il simplement fou à lier, ou desespéré ? Son calme le perturbait. Il cachait quelque chose.

— Ah ! s'exclama l'encapuchonné, on cogite enfin, jouvenceau ! Je commençais à désespérer !
— De quel service parliez vous, l'ancêtre ? demanda enfin le blond bréton, après quelques instants.
Les lèvres de son vis à vis se retroussèrent.

— J'ai besoin de vos talents... diplomatiques
, répondit-il sobrement.




ж ж ж
Quitte ou double

21 Soirétoile 3E425, 14H05




Briséadius revint à lui. Il se trouvait dans une galerie immense, jonchée de colonnades à perte de vue. Une lame appuyait sur sa gorge.

— Ne bouge pas, misérable ! lui ordonna Jeraselm : le traqueur, debout à côté de sa tête, tenait son épée elfique tout près de sa gorge. Au moindre mouvement, il trancherait les carotides de l'impérial. Une lueur rougeâtre étrange palpitait, se réfléchissant par intermittence sur l'armure et la chevelure sévère du bréton. Son visage ne l'était pas moins.

— Te rends tu compte de ce que tu as fait, Danselame ? Traître à ta caste ! Occire ses propres compagnons d'armes... Jeraselm secoua la tête. Ta responsabilité... t'en rends tu compte ??

Le traqueur n'attendit pas la réponse du guerrier, et enchaîna.

— Je devrais te tuer, ici et maintenant. Mais même là, ton péché ne serait pas pardonné....

Puis après quelques secondes, il continua, pointant une direction de sa main libre :
— Tu vois, cette lumière, là bas, au fond. Elle ne te rappelle pas quelque chose ?

La lueur rougeoyait, puis s'évanouissait.

Ombre.

Lumière rougeoyante.

Ombre.

Lumière rougeoyante.

Une ombre massive, fantomatique, se reflétait sur les murs, tout près de la source de lumière.

— C'est ton épée, Danselame, ta maudite épée. J'ignore comment tu l'as foutue là, et je m'en fiche pas mal. Mais si tu es vivant à l'heure qu'il est, c'est parce qu'un vieux fou a amorti ta chute. Et il veut qu'on la récupère, ta lame, et qu'on la fiche quelque part dans cette satanée armure géante.

Il haussa un sourcil , et augmenta légèrement la pression de Vipérine sur sa gorge.

— Et comme j'ai pas envie d'être maudit, c'est toi qui vas le faire. Tu m'as compris, Danselame ?

Modifié par Trias, 29 décembre 2010 - 18:46.


#228 nood

nood

Posté 30 décembre 2010 - 18:41

Acte I, scène 1

21 Soirétoile 3E431, 14h00


La sympathie est ma nature première. Ne serait-ce de déplorables préjugés raciaux, nul doute que je pourrais organiser une grande farandole ou nous danserions de concert en devisant gaiement.

L'elfe sourit : "des préjugés raciaux..." que ce fut conscient ou non, il ne put s'empêcher de prendre la remarque pour lui. Drem ne pouvait nier être né dans un pays esclavagiste, dans lequel la norme était justement ce genre d'a priori sur tout ce qui n'est pas un elfe noir. Mais il ne pouvait pas nier non plus que son passage dans la Légion avait ébranlé ses conviction en matière de hiérarchisation des différentes peuplades intelligentes qui foulaient le sol de Tamriel. Non pas qu'il n'ait plus aucun préjugé racial (ceux-ci semblent intimement liés au caractère fort des Dunmers) : mais il avait appris à apprécier la cohérence, l'esprit et les aptitudes particulières des Argoniens à leur contact. Dans le même temps, il avait perdu toute confiance dans les Impériaux.

— Déplorables, en effet, tu as cent fois raison... finit-il par lâcher pensivement.

— Mouais, reprit Maelicia. Ben moi j'voudrais juste préciser qu'veux pas retrouver d'autres gens innocents dans la rubrique nécro du Cheval noir, ou vous s'rez pas payés. Cette mission doit servir à éviter qu'des gens meurent, pas l'inverse... La première chose qu'y faut qu'on fasse, c'est accéder au registre des entrées. Y sera soit au bureau des entrées, soit dans celui du chambellan. Notre lascar est au moins là depuis le quinze sombreciel, ça nous aidera a rapetisser un peu le champs de recherche. On y va ? Drem, on vous laisse faire...

— Les registres d'entrées ? interrompit Danse-Mot. Nous n'aurons pas à nous inscrire sur des registres, n'est-ce pas? Car j'ai... une crampe aux doigts. Qui m'empêche d'écrire. Et... Risquons nous d'être fouillés?

- Reste calme, répondit Drem. Tu m'as l'air un peu trop tendu pour quelqu'un qui se travestit et change aussi aisément de nom. N'est-ce pas, Danse-Mot ? ou peut-être est-ce Hume-les-Bolets , ou Mate-Peste ? On s'y perd... fit-il, ponctuant sa tirade d'une tape amicale sur l'épaule de l'Argonien. Allez, ça va passer tout seul.

Drem avisa une dernière fois leur petite troupe. Saerileth semblait arborait son visage impassible qui collait parfaitement bien à son rôle de garde du corps. Il s'attarda quelques instants sur l'appétissante épaule dénudée, puis jaugea de la crédibilité de La Brétonne. Habits propres, binocles rondes de savante, mine de rat de laboratoire. Excellent. Et pour finir, Danse-Mot. Apparence et accent exotiques à souhait. Il épousseta ses épaulières un dernière fois, puis rangea sa pipe, non sans une certaine nervosité.

- On arrive. Je m'occupe des premiers gardes, ensuite on avisera sur le moment. Maelicia, j'espère que tu sais où l'on va, parce que j'ai jamais eu le loisir de passer le premier point de contrôle.

Longeant le mur incurvé du palais, les quatre compagnons finirent par rejoindre une entrée secondaire, haute porte de bois sombre renforcée de gravures de bronze, surmontée d'une voute d'une quinzaine de pieds de haut. Dans les postes de contrôle située de par et d'autre de l'entrée, les trois gardes en faction ne tiquèrent même pas à la vue de l'ordre de mission. Après un rapide salut militaire et un inspection du sceau de cire, mais sans le moindre mot, ils frappèrent trois fois sur le battant gauche de la porte, qui s'ouvrit vers l'intérieur, manipulé par deux autres hommes. Drem pénétra le premier dans le sas de l'entrée suivi par sa petite troupe bigarrée.

- Hola, Légionnaire, fit une voix masculine alors que la porte se fermait dans un bruit sourd. Contrôle des autorisations d'entrée.

Drem plissa les yeux, le temps que ceux-ci s'habituent à l'obscurité. Un capitaine de la garde, Impérial nibennais au plus haut point dans ses traits de visage et dans son accent, vêtu d'une rutilante armure de la garde, blanche, sang et or, s'était approché en direction des visiteurs. L'elfe lui fit un rapide salut militaire.

- Légionnaire Serethi, de la garnison du quartier du Port. J'accompagne ces messieurs-dames. C'est un délégation spéciale dépêchée d'urgence par le service sanitaire des douanes, mon capitaine. Capitaine ?

- Capitaine Gratius, second optione du lieutenant-colonel de la garde du palais. Bizarre, on a pas été mis au courant d'une délégation qui devait venir aujourd'hui. Z'avez la paperasse ?

- Tenez, mon capitaine, répondit Drem en lui tendant le papier. Ils ont bricolé l'ordre de mission dans l'urgence, c'est normal que vous ayez pas encore été avertis.

Le capitaine Gratius parcourut rapidement le document "officiel" des yeux. La tension artérielle de l'elfe grimpa d'un cran. Comme il s'y attendait, les gardes du Palais étaient un peu plus consciencieux, sagaces et suspicieux que ses collègues habituels. Peut-être s'étaient-ils jeté directement dans la gueule du loup. Il se doutait bien que l'entrée et l'épluchage du document contrefait serait le moment le plus critique.

- "Un risque élevé de contamination de mycose tropicale" ? Ce serait bien la première fois qu'on verrait ça au Palais, fit-il tout en lisant. "Veuillez accorder l'accès des spécialistes et de leur escorte aux zones du palais qui leur seront nécessaires pour identifier et confiner les lots incriminés..." et vous êtes que quatre pour fouiller tout le palais ?

Vite, vite, une réplique plausible.

- Ils auront surtout besoin de consulter les registres administratifs pour repérer si les marchandises dangereuses ont été distribuées dans le bâtiment, et si oui, où elles sont.

L'Impérial le tança d'un regard dont Drem peina à identifier la signification. Était-ce de l'incrédulité, de la curiosité ? Nouveau soubresaut de la tension dans le corps du Dunmer.

- C'était quoi, ces marchandises ? Des produits venus du Marais Noir ?

- Certaines caisses en contenaient, des produits artisanaux venus de Lilmoth par bateaux - du linge exotique, des chandelles en cire d'abeille des marais, des épices - et d'autres venaient de la vallée du Bas-Niben, qui contenaient des produits moins exotiques. Mais il y a un risque que la moisissure se soit propagée dans ces caisses par contact prolongé. Parait qu'il y a plusieurs membres d'équipage du navire à qui on a du offrir une jambe de bois ou un crochet, là aussi à cause d'un contact prolongé... La perspective d'une nécrose d'un membre est un bon argument, pensa Drem.

- Erk, finit par lâcher le capitaine avec un certain rictus.

Il sembla hésitant sur la conduite à tenir. Le cœur de Drem n'en finissait plus de chercher à bondir. Qu'est-ce qui avait bien pu lui passer par la tête quand il avait imaginé ce plan complétement bancal ? Drem se fit un note pour lui-même qu'il se jura de suivre, dans un hypothétique futur : ne pas faire de plan d'infiltration en buvant quatre pintes de bière. Gratius sortit de son interminable silence, Drem étant pendu à ses lèvres.

- Ils commencent sérieusement à me courir sur les nerfs, au Port. Pas foutus de faire un papier correct ! Ils ont pas du user beaucoup d'encre pour le pondre, cet ordre de mission. Il n'y a même pas le nom de vos spécialistes !

Drem se gratta la nuque et se tourna rapidement vers ses coéquipiers, avec un regard qui cherchait du support et de l'aide dans le leur. Peut-être seraient-ils plus convaincants que lui, qui était à cours de bonnes idées.

Modifié par nood, 03 avril 2011 - 11:23.


#229 Trias

Trias

Posté 31 décembre 2010 - 15:11

Le dur métier d'officier

21 Soirétoile 3E425, 14h00




Les fentes oculaires de Danse-mot s'étrécirent, accompagnées par un soudain rehaussement de ses écailles frontales que Typhaine perçut du coin de l'œil. L'argonien n'était pas le premier de ses pairs que Maelicia avait croisés, mais bel et bien le spécimen qu'elle avait côtoyé de plus près : se moquait-il d'elle ? Un léger fard teinta ses joue : quoi, qu'est-ce qu'il y avait de si drôle dans sa révision vestimentaire ? Il ne pensait quand même pas qu'elle allait se fendre publiquement d'un plongeant, surtout plein hiver, non ?

Mais le ton alarmé du lézard l'interrompit :

— Les registres d'entrées? Nous n'aurons pas à nous inscrire sur des registres, n'est-ce pas? Car j'ai... une crampe aux doigts. Qui m'empêche d'écrire. Et... Risquons nous d'être fouillés?

Ca y était, il recommençait. Ce fut au tour de la brétonne de sourire, mais le légionnaire fut plus véloce à répondre.

— Reste calme, rétorqua-t'il, sans se douter de la parfaite inefficacité de sa réplique sur le lézard. Tu m'as l'air un peu trop tendu pour quelqu'un qui se travestit et change aussi aisément de nom. N'est-ce pas, Danse-Mot ? ou peut-être est-ce Hume-les-Bolets , ou Mate-Peste ? On s'y perd... fit-il, ponctuant sa tirade d'une tape amicale sur l'épaule de l'Argonien. Allez, ça va passer tout seul.

Puis, ouvrant la marche d'un pas qui se voulait ferme, il les mena résolument vers l'objet de toutes leurs angoisses : l'entrée du palais. N'empêche, l'elfe noir avait finement analysé l'argonien, qui s'était peut-être montré un peu trop facilement versatile. Tout en trottinant à côté de Danse-mot, Typhaine ne put s'empêcher de le tancer gentiment son compagnon :

— Au fait, sussura-t'elle en étrécissant les cils, comment voudrez vous qu'je vous appelle, devant le procureur ?

Puis elle partit dans un éclat de rire digne d'une lycéenne en cour de récréation, et ils poursuivirent leur périple.


ж ж ж



Cependant, au fur et à mesure de leur approche, l'oppression écrasante de l'immense portail d'entrée s'imposait graduellement, dissipant toute hilarité. Alors que le majestueux dragon d'acier se séparait par la moitié, et que les vantaux crissaient, Typhaine ne put retenir une pensée admirative devant la démesure de l'architecture Septim.

Pensée aussi intense qu'éphémère : le sas d'entrée Est ne brillait ni au propre, ni au figuré. La pierre nue crasseuse des sols foulés quotidiennement par des centaines de bêtes, l'attention spartiate portée à l'aménagement interne (des murs immenses et cracras, divers mécanismes dégoulinants de graisse non moins hygiénique), ne modifiaient en rien cette impression. Une autre porte, pareillement colossale, fermée devant eux leur rappelait la vocation filtrante de l'édifice. N'était la timide illumination assurée par quelques rares meurtrières, on se serait cru sous terre. Son ami lézard devait véritablement avoir l'impression d'entrer dans un centre de détention : elle s'en voulut d'avoir ironisé sur le sujet.

Mais déjà, un impérial dont l'armure polie avec soin contrastait avec la ferraille rustique des gardes ordinaires s'avançait vers eux. Et à en juger par sa mine patibulaire, il ne faisait pas partie de l'office du tourisme...

Hola, Légionnaire, l'interpella-t'il sans amabilité. Contrôle des autorisations d'entrée.

Dans un grondement pesant, les portes se fermèrent dans leur dos. Le point de non retour... presque malgré elle, Typhaine sentit sa surrénale s'emballer : le stress était monté d'un cran. Avaient-ils signé leur propre condamnation en rentrant ici ? Jamais sa guilde n'avait prévu qu'elle en arriverait à de telles extrémités ! Elle pria pour que l'elfe noir ne commette pas d'impair irréparable.

A son soulagement, ce ne fut nullement le cas : sous la pression de l'interrogatoire, Drem donna la réplique de manière plutôt convaincante. Mais pas encore assez aux yeux du capitaine, dont le scepticisme prudent s'avérait trop coriace pour le seul légionnaire. Il lui fallait prendre les devants... mais prudemment, le sujet étant à la fois méfiant, entouré, nibénéen et probablement intelligent. L'influence directe ne serait peut-être pas possible dans ces conditions. Peut-être même était-il entraîné contre ce genre de sortilège ? Il allait falloir jouer finement.

Tout au long du dialogue, Maelicia riva son attention sur le capitaine. De ses pupilles anormalement élargies, elle scruta sa mimique, capta ses émotions, et analysa ses répliques. Mépris envers fonctionnaires, intéressant. Consciencieux, imbu de sa responsabilité... peut-être serait-ce exploitable. Un coup d'œil observateur sans le moindre égard à son attention.... peut-être était-il misogyne aussi. Elle révisa aussitôt la hiérarchie fictive de l'expédition

— Ils commencent sérieusement à me courir sur les nerfs, au Port. Pas foutus de faire un papier correct ! Ils ont pas du user beaucoup d'encre pour le pondre, cet ordre de mission. Il n'y a même pas le nom de vos spécialistes !

L'elfe leur adressa un regard qui signifiait plus que cent S.O.S. Le moment était venu de l'épauler.

— Comment ! s'exclama Maelicia, vous voulez dire que le nom du docteur n'est même pas cité ?

Tous les regards se tournèrent vers elle. Super. Ne pas rougir, ne pas rougir, ne pas...

Elle se tourna vers l'argonien, et roula des yeux indignés :
— Docteur Mate-peste, ils n'ont même pas mis votre nom !

— Docteur... comment ? demanda calmement le capitaine, en examinant l'argonien d'un oeil critique.

Maelicia le fixa à nouveau. Lentement, il fallait qu'elle aille plus lentement si elle voulait pouvoir tisser son Narsis. Endormir la vigilance était une étape cruciale pour réussir l'implantation d'une illusion. Elle se donna donc quelques secondes, faisant signe à l'argonien de ne pas intervenir.

— Laissez, docteur, je m'en charge. Puis, revenant vers l'impérial, plus posément : il s'agit du grand docteur Mate-peste, de la guilde de Gidéon, de la cité de Galpus, au marais noir. C'est un éminent spécialiste argonien du GRAVE — Groupement Régional Antimycoses Varioliformes Exotiques —. Sa visite est prévue depuis des semaines ! Comment est-il possible que vos services n'le mentionnent pas ?  

— On se le demande... rétorqua l'officier en fixant Drem d'un regard peu amène.

Du mépris, excellent, excellent ; il rejetait la responsabilité sur ses collègues. Typhaine se composa une mine condescendante à l'attention du légionnaire. Puis enfin, s'adressa à nouveau au personnage qui semblait être la clef de voûte de la sécurité locale :

— Écoutez capitaine, j'me nomme Melissa Melleandra, j'suis guérisseuse et correspondante locale du GRAVE. Voici donc le Docteur Mate-peste, et son agente qui nous l'a ramené du marais noir, Carina Flèche. Nous avons une mission de la plus haute importance, prévue depuis des semaines... On peut pas tout annuler à cause de fonctionnaires incompétents !

Le capitaine la fixa quelques secondes, détournant son regard du pauvre légionnaire (admirablement mortifié). Mouise alors, il avait vraiment le chic pour vous mettre mal à l'aise ce type, songea Maelicia alors qu'il la dévisageait, énigmatique.

— Écoutez, mademoiselle Melleandra, mes ordres sont simples : je dois assurer la sécurité de l'empereur Uriel Septim. Sans ordre PARFAITEMENT en régle, nominal, daté, signé et scellé, je ne peux vous laisser entrer pour quelque raison que ce soit. Vous pourriez aussi bien être une illusionniste brétonne, avec une tueuse de la Morag-tong et un empoisonneur argonien. Vos dires, sont invérifiables ! D'autant que vous la voyez où, cette infection contagieuse et grave ? fit-il en écartant largement les mains.

Typhaine se contenta de fixer les mains du capitaine, comme pétrifiée. Gratius, interloqué, abaissa les yeux puis poussa un juron.

— Ventrebleu !

Le bord des jointures des gantelets semblait s'être discrètement élargi. En fait on aurait dit que le cuir noir remontait sur le bord des phalanges d'acier doux, un peu comme de la suie... ou des moisissures. Et Typhaine se doutait qu'un détail pareil n'échapperait pas à un type aussi méticuleux (à peine si son armure ne faisait pas miroir). Même les rivets semblaient attaqués.

Il saisit vivement son gantelet.

— Ne le jetez pas par terre ! s'écria très professionnellement Maelicia. Mettez les plutôt dans un sac, en lin de préférence...

Gratius s'interrompit.

— Demetrius ! aboya-t-il. Un sac ! Puis, en se tournant vers la prétendue guérisseuse : bon, vous vous allez repasser par le bureau des douanes, au port, et m'obtenir une autorisation d'entrée dans les règles. Vous reviendrez pour le 28.

Maelicia prit un air affolé.
— Capitaine, savez vous combien de temps il nous a fallu pour obtenir ces autorisations ?! Il nous a fallu des semaines !
— Et alors ?
— Et alors, le docteur Mate-peste est appelé vers Bravil dès demain !

L'auditoire put sentir la tension interne que dissipait l'officier. Sa mâchoire se crispa, ses tempes palpitèrent, ses mains se fermèrent puis se rouvrirent convulsivement. Puis il éclata :

— SACREBLEU D'INCAPABLES ! hurla-t'il en pointant Serethi, LÉGION DE MES DEUX ! SOLDATS DE SECONDE ZONE ! C'EST QUOI CE DÉTACHEMENT PORTUAIRE ? PAS MÊME CAPABLES DE ME PONDRE UN FOUTU FORMULAIRE CORRECTEMENT, NOM DE TALOS ! ET MAINTENANT C'EST A MOI D'ASSUMER VOS CONNERIES !

Il reprit sa respiration, devenu rouge comme un pivoine. Maelicia se demandait comment avaient fait ses subordonnés pour ne pas s'envoler, parce que ça décoiffait.

— Capitaine, l'interpella-t'elle gentiment, que signifient quelques noms sur un bout de papier alors que c'est la sécurité de l'empereur qui est en jeu, des nobles, et j'parle pas d'vos hommes. Vous imaginez le chancelier contaminé par un garde ?

Ce fut la pique finale, les épaules du capitaine s'affaissèrent, capitulant.


ж ж ж



Très bien, concéda-t'il, vaincu. Combien de temps vous faut-il ?
— Entre trois et quatre heures, pt'être plus en fonction de l'extension des lésions...

L'officier soupira.
— Ce n'est pas correct ce que vous me faites faire, mademoiselle, j'espère que vous en êtes consciente : tenez vous à carreau, et ne me le faites pas regretter !
— Vous pouvez dormir sur vos deux oreilles, répondit Maelicia, la bouche en coeur.

Gratius secoua la tête.
— Si vous le dites... très bien, vous allez inscrire vos noms sur le registre du bureau des entrées, c'est un bâtiment derrière cette porte. On vous y donnera un passe pour la journée, pour accéder aux zones principales. Sergent ! prenez deux hommes, vous les accompagnez là bas. Optione ! prenez moi cet ordre de mission et apportez moi ça à la douane au port, pour vérification. Vous leur donnerez un parchemin de ma part, avec, je me sens l'envie d'écrire...

Il s'en alla vers la porte interne, puis frappa cinq coup à une cadence toute particulière. Il y eut moult grincements puis les battants pivotèrent, lentement... dévoilant sous leurs yeux éblouis ce qui semblait être une petite cité imbriquée dans l'autre, aux bâtiments   d'une blancheur éclatante, surplombés par la Tour impériale.

Alors qu'ils en franchissaient le seuil, le capitaine ajouta.
— Il y a une consigne dans le bureau des entrées. Nul autre que le légionnaire qui vous accompagne n'a besoin d'armes ici, est-ce que c'est clair ? Et à titre exceptionnel, le personnel civil sera fouillé...

Puis il leur tourna le dos, et accompagna son optione, les laissant en compagnie des trois gardes... au sein du palais impérial.

Modifié par Trias, 31 décembre 2010 - 16:29.


#230 Darkhammer

Darkhammer

Posté 05 janvier 2011 - 00:46

Rouge sang

21 Soirétoile 3E425, 14h00



http://img193.imageshack.us/img193/8917/aenerian4.png



"Et comme j'ai pas envie d'être maudit, c'est toi qui vas le faire. Tu m'as compris, Danselame ?" Dit l'homme qui lui faisait face, pressant agressivement sa lame contre sa gorge

Brise avait mal au crâne, non dû à la chute mais à l'envoutement dont il avait été victime plus tôt. Il ne comprenais pas très bien ce dont le traqueur lui parlait, mais il acquiesça d'un signe de la tête sans mots dire.

L'impériale se leva peu à peu, les membres quelques peu engourdit, alors que Jeraselm abaissait Vipérine.

Brise scruta les environs haguard...

'Un vieil homme au milieu de ces ruines? La chute ne t'aurait-elle pas fait délirer?"

Puis Brise observa quelques instants la lumière rouge fluctuant au loin dans les couloirs.

"Cela ressemble aux ruines d'Aenerian mais... Elles sont bien loin d'ici... Trop loin... Et pour l'épée... Je l'ai entérée profondément au pied d'un vieux chêne à un ou deux kilomètres de la ville, comment se serait-elle retrouver ici? Tout cela n'a aucun sens..."

Il observa quelques instants le traqueur...

"Et pourtant... Elle est bien ici... Je la sent... Mais pour je ne sais quel raison, quelque choses à changer... j'ai un mauvais pressentiment..."

Il réfléchit quelques instants puis emboita la pas au traqueur en direction de la lumière fluctuante...

Tout en marchant à travers les ténèbres, Brise dit alors : "Je ne sais pas exactement ce qu'il s'est passé entre notre arrivé sur les lieux des ruines du fort et l'instant de mon réveil... Mais quoi qu'il s'est passer, oublie cela pour l'instant, si nous désirons sortir vivant d'ici, entraidons-nous... Tu aura tout le temps de lever Vipérine contre moi lorsque nous seront sortit d'ici..."

Modifié par Darkhammer, 05 janvier 2011 - 00:47.


#231 Trias

Trias

Posté 08 janvier 2011 - 19:32

Le pacte

21 Soirétoile 3E425, 14H00




Les yeux de l'impérial errèrent un instant, hagards, longeant l'immensité des colonnes calcaires, perdues dans la pénombre. Partiellement révélé par de sanglants reflets, son visage, souillé par la poussière et les coups, prenait des aspects torturés. Mais nulle autre folie ne s'y lisait plus que celle de l'incrédulité, comme le dormeur brutalement tiré d'un profond sommeil.

Le blond impérial émit un bref signe de tête, tout en exposant bien ses mains à la vue du traqueur : il avait compris. Jeraselm dégagea sa lame puis fit deux pas en arrière, observant avec méfiance le guerrier se relever.

« Un vieil homme au milieu de ces ruines ? l'interrogea celui-ci, fouillant toujours la galerie du regard. La chute ne t'aurait-elle pas fait délirer ? »

— Moi, non, rétorqua Jeraselm, avec une hostilité à peine voilée.

Mais le guerrier semblait absorbé par la contemplation des colonnes, dont l'antique ouvrage évoquait quelque civilisation perdue de jadis.

— Cela ressemble aux ruines d'Aenerian mais... reprenait-il, songeur. Elles sont bien loin d'ici... Trop loin... Et pour l'épée... Je l'ai enterrée profondément au pied d'un vieux chêne à un ou deux kilomètres de la ville, comment se serait-elle retrouvée ici ? Tout cela n'a aucun sens...

Le traqueur s'abstint de répondre. Comment un homme qui avait personnifié la folie il y a seulement quelques minutes de cela pouvait-il se permettre de statuer sur ce qui avait ou non un sens ?

— Et pourtant... Elle est bien ici... Je la sens... Mais pour je ne sais quel raison, quelque chose a changé... j'ai un mauvais pressentiment... conclut Briséadius, qui continuait à scruter les alentours tout en lui emboitant le pas, comme s'il craignait l'irruption de quelque spectre malfaisant.

— Toute cette opération pue la mort depuis le départ, lâcha agressivement Jeraselm, en s'arrêtant. C'est un miracle qu'on soit encore en vie malgré tes actes insensés ! Alors épargne moi tes pressentiments, Danselame !

La violence de sa réplique interpella l'intéressé, qui resta quelques instants bouche bée.

— Je ne sais pas exactement ce qu'il s'est passé entre notre arrivée sur les lieux des ruines du fort et l'instant de mon réveil... expliqua enfin l'impérial. Mais quoi qu'il s'aie passé, oublie cela pour l'instant ; si nous désirons sortir vivant d'ici, entraidons-nous... Tu aura tout le temps de lever Vipérine contre moi lorsque nous serons sortis d'ici...

Jeraselm hésita quelques instants : quel tour lui jouait-il là ? Plaidait-il l'amnésie ? L'irresponsabilité ? Quoiqu'il en soit, l'homme qui lui parlait semblait perdu, comme cherchant son chemin parmi les ruines de sa propre existence. Lui même était passé par ce genre d'errances, avant de trouver sa voie au sein de l'Ordre. L'Ordre de la Wyverne, l'ordre auquel il avait dédié sa vie...

— Bien parlé, Danselame, concéda-t-il enfin, en reprenant la marche. Nous règlerons cette affaire plus tard. En attendant, le vieux de la galerie veut troquer notre sortie contre la tête du monstre.

Le traqueur rengaina son épée.
— Il prétend aussi que maintenir la lame suffisamment longtemps dans le démon lui permettrait de le détruire. Un plan simple, non ? ironisa-t'il. Du suicide ! Comme si pareil colosse était facile à approcher...

Il ajusta ses gantelets à ses poignets, puis entreprit de vérifier l'état multiples dagues harnachées sur ses cuisses, ainsi que de diverses bourses à son ceinturon.

—  Alors voilà, Danselame : je ferais diversion, ce qui devrait te donner une à deux minutes, guère plus. C'est le temps que tu auras pour récupérer ta lame et la coincer quelque part dans l'armure. Passé ce temps là, je me replierai, que ce soit avec, ou sans toi, ajouta-t'il en haussant un sourcil. Et pas d'entourloupe cette fois, compris ?




ж ж ж
Le Jagannâta

21 Soirétoile 3E425, 14H10




Dissimulé derrière une colonne, le traqueur se pencha précautionneusement sur le côté. En quelques secondes, il fouilla la salle du regard : une vaste plateforme se dévoilait devant lui. Cathédrale souterraine, ses parois latérales étaient doublées de coursives rocheuses, elles mêmes creusées de sièges innombrables. Au centre de cette funèbre assemblée, rayonnant d'un feu sombre et sanglant, trônait Aenerian Syndaerone. Suspendue dans les airs par quelque charme maléfique, elle surplombait la galerie depuis une froide chaire de pierre, cerclée de colimaçons. L'épée maudite attendait son prêtre, celui qui célébrerait à nouveau son rite sanglant.

Rougeoyant d'un écarlate malsain, d'intermittents éclairs s'échappaient de l'antique claymore, zébrant la galerie de leurs reflets carmins. Dans ces brefs instants, l'obscurité reculait pour dévoiler les aspérités du sol poussiéreux. Diverses anfractuosités et autres dalles mobiles, typiques de l'architecture ayléïde se révélaient alors, chargées de menace.

Mais le regard de Jeraselm s'était déjà fixé, transi d'effroi : une forme sombre et massive se découpait dans ce brasier rougeoyant. Plus haut que trois hommes, plus large qu'un ogre, la massive armure d'ébonite se tenait à leur gauche, à une trentaine de pieds de là. Chacun de ses énormes gantelets se refermait sur un colossal espadon, dont la pointe reposait au sol, comme abandonnée.  Soutenu par de larges épaulières, son casque semblait abriter quelque mystérieux néant dans la noirceur de sa visière. Noirceur qui semblait les scruter, immobile, attendant son heure.

http://img718.imageshack.us/img718/5996/lejagannata.jpg


D'antiques chants revenaient à l'esprit du traqueur, souvenirs d'anciens textes de la Wyverne.

« Voici le Sombre champion, au cœur d’ébonite,
Spectre faucheur de vies, guerrier mort de granite... »


Le désespoir s'empara de Jeraselm. Cette quête n'aboutirait qu'à leur mort ; c'était du suicide. Comment combattre face à un tel adversaire ? Comment la chair pouvait-elle défaire le métal ? Comment le vivant pourrait-il vaincre la mort ? Comment atteindre le spectre à travers l'ébonite ?

« Bourreau des hommes, il moissonne, fléau des armées,
Hommes vivants, le puissant Jagannâta, fuyez... »


Il se rétablit vers l'impérial, qui attendait derrière la colonne.

— Nous y sommes, Danselame, murmura-t'il dans un souffle. L'heure de la gloire, ou de la mort. Prends garde aux pièges, et n'oublie pas que c'est un spectre. Ce sont peut-être nos derniers mots... Que la gloire soit notre, guerrier !

Puis il dégaina silencieusement Vipérine, sa lame elfique. Dans le magma rougeoyant, elle prenait des éclats sanglants. Se ramassant sur lui même, il s'écarta précautionneusement de la colonne. Le colosse se dessinait toujours on loin de là, d'un immobilité parfaite, comme endormi. À pas de loup, profitant des instants d'obscurité pour se faufiler discrètement de colonne en colonne, il contourna le monstre, jusqu'à se trouver à sa gauche, presque dans son dos.

Non loin du géant d'ébonite se dessinait quelque plaque, à demi-dissimulée par la poussière des siècles. Le bréton n'était désormais plus qu'à vingts pieds du démon, mais l'espace qui les séparait était découvert, formant comme une nef pour l'immense cathédrale. L'heure n'était plus à la tergiversation.

Jeraselm, se détendit brutalement, fonçant de toute la vitesse de ses membres sur le géant. L'armure se redressa, dans un crissement assourdissant, dominant l'humain de plus de deux fois sa taille. Interposée entre lui et la lumière sombre d'Aenerian, Jeraselm ne voyait plus désormais que la massive silhouette, porteuse de mort, emplissant son champs de vision.

« Car parmi les cinq disciples indéfectibles
Seul le Silence est unique, car indestructible... »



Les lames colossales filèrent vers lui, dans un souffle épouvantable.

— WYSS ! hurla Jeraselm, en décochant un projectile magique droit vers le heaume du géant, illuminant d'un coup les sombres épées, avant que l'arcane n'explose en plein sur l'arête de la visière. Tous deux aveuglés, Jeraselm sentit plus qu'il ne vit les lames passer au dessus de lui, avec un mouvement d'air terrifiant qui manqua de le déséquilibrer alors qu'il roulait. Mais Jeraselm était trop aguerri pour se laisser déstabiliser : il acheva sa roulade sur la plaque qu'il avait localisée, puis sauta de toutes ses forces loin de celle-ci.

Dans un horrible sifflement, un immense objet en forme de demi-lune se décrocha de quelque part au dessus d'eux, décrivant un funeste arc de cercle en direction de l'épaule du géant. Il y eut un crissement lorsque la lame du piège percuta l'ébonite de l'armure, avant de ricocher, et de se vriller dans les airs, forme tournoyante gigantesque au dessus des yeux horrifiés de Jeraselm.

Par réflexe, le traqueur esquiva le fracas de la lame d'une détente vers l'arrière, dans un vacarme assourdissant. Mais sentant plusieurs éclats pénétrer sa chair lors de l'impact, il peina à se rétablir. La demi-lune avait dû exploser au contact de l'ébonite, comment pouvait-il le prévoir ?

Avec un grondement retentissant, le démon d'ébonite décrivit un dantesque pas, puis un second, couvrant de son ombre son désespéré assaillant.

— DANSELAME,  GROUILLE ! cria Jeraselm, alors que le géant métallique était presque sur lui.

Modifié par Trias, 08 janvier 2011 - 22:19.


#232 Darkhammer

Darkhammer

Posté 08 janvier 2011 - 22:20

L'ombre de l'âme

21 Soirétoile 3E425, 14H15



Briséadius Danselame, tel était le nom de l'homme dont le coeur était désormais emplit de noirceur, mais pas n'importe laquelle... Les ténèbres qu'apporte l'épée maudite s'encre à l'intérieur du corps, corrompant esprit, buvant la vie de son propriétaire, le rendant assoiffé de sang, mais ne pouvant étancher cette soif, comme si tout plaisir commun aux mortels n'avait plus aucun impacte, on n'obtient pas le pouvoir sans sacrifice... Peut-être était-ce le destin du mercenaire que de trouver l'épée, ce même destin était-il de vaincre cette abomination? Mais à quel prix?
La perte de son âme? Sa place auprès des siens? Peut-être même son humanité tout entière... L'épée avait faillit l'engloutir une fois, cela allait encore recommencer...

"Vient à moi Danselame... Vient à moi mon porteur! Cesse donc de résister..."

Une voix sans comparaison, emplie de malveillance résonnait dans la tête de l'Impérial.

"Je...ne..."

Brise était emplit de doute, tout se bousculait dans sa tête, il ne voulait plus être à nouveau cet être sans vie, assoiffer de sang...

"DANSELAME, GROUILLE !" cria Jeraselm

L'Impérial secoua la tête, il ne pouvait abandonner le traqueur...

Il se mit à courir vers l'épée profitant de la distraction du Titan d'ébonite...
L'épée flottait devant l'Impérial, une épée asymétrique et pourtant semblant parfaite, ouvrage resplendissant d'un ancien temps où la magie était sans limite...
La main de Brise tremblait à mesure qu'il l'approchait de l'épée, alors qu'il allait la toucher, il eu un mouvement de recule.

"Prend ma garde! Brandit moi! Et terrasse tes ennemis, unis à jamais, le pacte noir est graver à jamais dans tes entrailles, c'est ton destin, tu ne peux y réchapper!"

Brise hurla "Je suis maître de mon destin!" Puis d'un ton plus calme alors que sa voix avait attirer l'attention du Jagannâta, il ajouta, "Mais je ne puis reculer à présent... C'est déjà trop tard..."

Fermant les yeux un instant, il se saisit soudain la garde de l'épée, à cette instant une douleur intense parcourra le corps de Brise alors qu'une lueur étrange jaillit des yeux et de la bouche de l'Impérial, il poussa un hurlement tellement inhumain que même la mort elle-même n'aurait pût produire.



http://img534.imageshack.us/img534/8113/illustrationrp7.png



Des flashs traversèrent l'esprit de Brise, des fragments de souvenir, ses précédents combat, tout ce temps à parcourir le monde en compagnie de ses compagnons de fortunes, ses victoires, ses défaites, ses amis... Maelicia... Tout ces souvenirs s'évanouissant au fur et à mesure que l'épée reprenait contrôle de l'Impériale, le sang de Brise semblant devenir noir, une ombre maléfique incroyalbe semblait engloutir celui qui fut un homme jadis.

L'armure d'ébonite avait elle-même stopper tout mouvement, de même que le traqueur, tout deux absorber par ce qui se passait non loin d'eux, la pièce jadis rouge sombre, était désormais illuminée d'un rouge écarlate comme si mille torches était allumées dans cette même pièce, soudain les hurlements se turent...

L'obscurité s'installa de nouveau dans la salle, mais cette fois plus oppressante, même véritablement inquiétante... Une seule source de lumière était désormais visible, les runes de l'épée maudite brillaient d'une lueur, tantôt rouge, tantôt blanche... Ces même runes semblaient désormais gravée sur la chair du maudit...
L'Impérial émit alors un rire dément

"Oui! C'est ca! Oui! La pouvoir est à nous! J'ai de nouveau possession de moi-même et cette fois, rien ne libérera cet idiot!" dit-il d'une voix double.

Jeraselm l'avait peut-être pas encore comprit à cet instant précis, mais l'être qui se dressait désormais face au Jagannâta était désormais au moins aussi humain que l'armure d'ébonite...

"Cette fois je t'ai sceller Brise, nous ne formons plus qu'un, ou plutôt désormais... Je suis toi!"

Son rire dément repris de plus belle...


http://img593.imageshack.us/img593/6403/illustrationrp6copie.png


Aenerian fit volte face, et mesura ses adversaires quelques instants, le traqueur ne serait guère un ennemi plus dangereux qu'un galopin affamé invoquer par un sorcier débutant, mais l'autre était une vieille connaissance, il connaissait la nature de son adversaire et l'avait d'ailleurs combattu il n'y a pas si longtemps que cela.

"Mmmmh... Jagannâta n'est-ce pas? Nous avons été interrompu la dernière fois..."


L'être runique lécha sa lame dans un sourire narquois.

"Bien, cette fois ce sera différent, un seul d'entre nous sortira vivant de mon antre."

Il regarda autour de lui et leva les bras tel un prêtre parlant à ses paroissiens.

"Oui! Bienvenue chez moi mes chers amis, ce lieu sacrer fut battit en mon honneur, puis l'on m'arracha à cet endroit et on m'enferma dans les abysses, sceller dans l'épée maudite, je suis Aenerian Syndaerone, l'ombre écarlate, seigneur d'un ancien temps, et je vais vous terrasser jusqu'au dernier, seul ceux qui plieront le genou face à moi auront le droit de vivre!"

Il sourit d'un air dément

"Les temps auraient bien changer si quelqu'un en ce monde se croit assez fort pour me terrasser! Moi que les neuf bannirent jadis! Me scellant, me laissant traverser les âges de ce monde, impuissant! Mais les neufs vous ont abandonner il semblerait! Ma venue en est la preuve... Mon pouvoir est loin de ce qu'il était, mais il n'en est pas moins grand..."

Il se remit à rire soudainement tandis qu'il levait son épée en l'air. Jeraselm put alors le distinguer correctement malgré l'obscurité grâce à la lumière produite par la lame... Sa peau d'ébène entre-illuminée par des runes maléfique arborait un visage sans âme et dément, une apparence plus terrible encore que le plus sombre des drémoras, un être des ténèbres incarné dans ce qu'il reste d'un impérial déchu, Brise n'était pas totalement disparut, mais son âme semblait désormais sceller dans les ombres chaotiques de ce corps corrompu, seul l'esprit d'Aenerian était désormais possesseur de ce corps. Sa voix était celle de Brise, mais était doublée d'une seconde voix décharnée, vicieuse et semblant presque hors du temps tant le son qu'elle émettait semblait impossible à produire.

L'être runique se rua vers le Jagannâta d'un bon et d'une vitesse hallucinante, fendant l'air en direction de son opposant


Modifié par Darkhammer, 08 janvier 2011 - 23:07.


#233 Trias

Trias

Posté 09 janvier 2011 - 20:33

Combat de Titans

21 Soirétoile 3E425, 14H15




L'homme et le monstre s'interrompirent, interdits. Non loin de là, une forme humaine hurlait toutes les agonies de l'enfer : Briséadius Danselame. Du moins, ce qu'il en restait : tandis que des langues de feu s'échappaient de son visage, sa peau semblait noircir, se racornissant comme sous l'effet d'une intense et douloureuse combustion interne.Il y eu un flash écarlate, puis plus rien.

Plus rien que les palpitations rougeoyantes d'Aenerian Syndaerone, désormais réincarné.

Jeraselm était abasourdi : pareil maléfice était inconcevable. Alors que le possédé exultait, le traqueur comprenait mieux à présent la véritable nature de sa malédiction. Danselame n'était plus qu'un pantin dévoré par quelque esprit dément ; il n'était plus en rien maître de ses actes. Et malgré tout, il s'était offert une deuxième fois à Aenerian. Jeraselm serra le poing : son compagnon s'était sacrifié pour qu'ils puissent vaincre le Silence de Sh'éam.

Ledit Silence s'était tourné vers l'être démoniaque qui paradait devant eux, jubilant devant sa liberté retrouvée. Le vieil homme de la galerie savait-il vraiment ce qu'il faisait en conjurant un tel démon ?

Le colosse, parfaitement immobile quelques instants plus tôt, avança d'un pas, qui résonna dans les ruines tel un tonitruant coup de tonnerre.

« Oui ! reprenait la créature, ouvrant de grand bras vers les deux combattants. Bienvenue chez moi mes chers amis ! Ce lieu sacré fut bâti en mon honneur ! Puis, l'on m'arracha à cet endroit et on m'enferma dans les abysses, scellé dans l'épée maudite...

Je suis Aenerian Syndaerone, vociféra-t'il, l'ombre écarlate, seigneur d'un ancien temps ! Et je vais vous terrasser jusqu'au dernier, seul ceux qui plieront le genou face à moi auront le droit de vivre ! »

Le golem d'ébonite fit un pas de plus, ébranlant la galerie.

— Pour quelqu'un qui vient de passer quelques siècles en conserve, cet individu m'a l'air passablement pédant, fit une voix rocailleuse à côté de Jeraselm.

Le bréton sursauta : à sa droite, le vieux de la galerie, qui se caressait son bouc comme si de rien n'était !

— Êtes vous fou, l'ancêtre ?! C'est dangereux ici !!
— Sans doute... oui, répondit distraitement le vieil homme, tout en observant Aenerian discourir.

Le traqueur crut qu'il allait éclater :  il en avait la confirmation, cet ancien était fou à lier ! Il se jeta sur lui, et d'une main agrippa fermement par le col. Ou plutôt, par ce qui aurait dû être son col : la main du traqueur traversa le cou de sa victime comme s'il s'était agi d'un reflet, n'empoignant nulle autre chose que de l'air dans ses doigts surpris.

Jeraselm s'écarta d'un bond. Le vieil homme était immatériel ! Celui-ci se fendit d'un large sourire.
— Alors, jouvenceau, ça cogite ?

Il aurait fallu quelques minutes au traqueur pour se remettre du choc, mais le mystérieux individu ne les lui laissa pas.

— Les explications viendront, jeune éphébe. En attendant, concentrez vous sur ce qui se passe là devant, fit-il en pointant Aenerian : il ne faudrait pas que votre ami aie le dessous...

Or le démon qui s'était emparé de Danselame semblait se perdre dans un ricanement sardonique, ignorant totalement le colosse, qui se rapprochait maintenant rapidement. Soudain, l'être abject s'immobilisa, la face déformée par un sourire ignoble, et abaissa des yeux fuligineux sur le danger, tout proche.

Brusquement, l'être chargea. Jeraselm eut à peine le temps de le voir esquisser le mouvement que le coup portait : en moins d'une seconde, la créature avait parcouru les vingts pieds de distance le séparant de son but. La lame maudite percuta l'ébonite entre l'épaule et le casque, creusant une profonde rainure dans l'invincible minérai.

Non loin, aux côtés d'un Jeraselm ébahi, le vieil homme haussa un sourcil.

Aenerian lui s'illuminait, les runes incrustées dans sa chair vibrant de leur lueur malsaine alors qu'il rebondissait sur sa cible. Il n'eut pas le temps de rebondir bien loin : un poing aux dimensions phénoménales jaillit dans sa direction, tandis que le colosse ployait. Abasourdi, Jeraselm vit les robustes jambières de métal se fléchir... avant de se détendre brutalement : le géant avait bondi ! Dans titanesque mouvement d'air, qui aspira même le traqueur, l'armure se retrouva au dessus d'Aenerian. Celui-ci se vit entièrement dominé par une masse gigantesque, tombant du ciel au dessus de sa tête, et dont les bras se refermaient sur lui...

Le colosse cherchait à se saisir d'Aenerian.

Modifié par Trias, 09 janvier 2011 - 20:43.


#234 Darkhammer

Darkhammer

Posté 11 janvier 2011 - 00:15

Les immortels

21 Soirétoile 3E425, 14H20


http://img651.imageshack.us/img651/5391/briseaenerian3copie.png



Le colosse sauta dans les airs et referma violemment ses mains autour du corps d'Aenerian, d'un air triomphant il souleva dans les airs l'être runique et resserra ses mains afin de l'écraser. Un tel châtiment aurait pût être fatal à un être mortel, mais il en était tout autre...
Aenerian sourit au colosse convulsant la tête vers l'arrière dans un rire démoniaque, il se mit à forcer sur les puissantes mains de ses bras, d'abord les pousses se déserrèrent, puis vint le tour des mains d'ébonites toute entière...
Sous les yeux ébahit du traqueur, les frèles bras du déchu avait écarter les mains du colosse, non sans difficulté, mais sans pour autant sembler insurmontable.
Aenerian Syndaerone, quel était donc cet être capable de faire face à un immortel?
D'un mouvement rapide, il attrapa l'un des bras de la créature et la fit voler derrière lui profitant de son déséquilibre suite à l'échec de l'étreinte.
Le démon runique fit volte-face et sauta sur la créature d'ébonite tranchant, tailladant le métal sombre arrachant de petit morceau de métal à chaque coups, il maintenait la créature au sol de par ses assauts répétitifs, il semblait prendre plaisir à cette danse macabre, un sourire dément aux lèvres, il avait des rictus à chaque fois que la lame pénétrait l'ébonite

"Incroyable! Incroyable! Il se régénère, je pourrais faire ca des heures! Incroyable!"

L'être runique se déchainait sur la créature accablée de coup. Lorsque celle-ci parvint à se saisir de la jambe de la créature runique, il l'envoya à travers la salle tel une balle de fusil jusqu'à ce qu'il s'encastra dans une colonne sur les estrades qui vola en éclat sur le choc avant de finir sa course dans le mur derrière arrachant un pan de mur à l'impacte d'Aenerian.
Un incroyable nuage de fumée se souleva, masquant le lieu ou avait atterrit le déchu...
La poussière vire-voletait, soudain une lueur rougeâtre reparut à travers la fumée, dévoilant une silhouette sombre alors que les derniers débris retombait...
Il était debout, ce sourire indescriptible toujours aux lèvres, il pointa sa lame maudite en direction de l'armure

"Alors? Sommes nous deux immortels destiné à se battre jusqu'au portes d'Oblivion?"

Modifié par Darkhammer, 12 janvier 2011 - 19:11.


#235 Arakis

Arakis

Posté 12 janvier 2011 - 15:41

Les Bottes Profondes





21 Soirétoile 3E431, 14h00


Saerileth ne pipa pas mot pendant le voyage jusqu'au palais. D'une part parce qu'elle n'avait rien à dire, d'une autre part parce qu'elle savait d'expérience que les gardes, quelle que soit la ville où ils officiaient, n'aimaient pas les mercenaires et qu'il suffisait d'un rien pour qu'ils vous tombent sur le dos et cherchent des crosses. Histoire d'être discrète elle remit son bandeau en place et enfonça sa main droite dans sa poche et tira sur sa manche une nouvelle fois. Normalement elle devrait passer relativement inaperçu si l'on excluait les deux épées courtes, l'arbalète, sa ceinture couverte de couteaux et de dards de lancer et la machette qui pendait dans son dos.

Quand ils entrèrent au Palais elle ne jeta qu'un oeil distrait à l'architecture. Sa sensibilité était peu développée et elle s'intéressait plus aux hypothétiques moyens de sortir en force qu'aux gravures et aux bas-reliefs qui ornaient les murs. Elle se tendit quand Drem se mit à parler avec l'officier. Visiblement tout ne se passait pas aussi bien que prévu. Elle se crispa légèrement et sentit ses doigts se diriger doucement vers sa ceinture. Cinq gardes dans la pièce, un couteau garde la première pour les deux devant elle, si ils étaient lent à la détente elle pourrait peut être en neutraliser encore un autre à distance mais avec un risque de le blesser voire tuer. Par contre les deux ou trois autres s'engageraient dans un combat à l'issue sans doute mortelle pour un camp. Elle grinça des dents et pria pour ne pas devoir en arriver là. Grâce soit rendu à une quelconque divinité sa prière fut entendue. Maelicia venait d'embobiner le bonhomme, visiblement via un tour de passe-passe magique.

Elle se relâcha pendant quelques secondes. Jusque là tout se passait d'une façon encore pas trop mal. Un seul mort, et encore un aventurier, le genre de personne dont la garde se fout éperdument. C'est ce qu'elle pensait jusqu'à ce qu'elle entende les conditions de l'officier. Pas d'armes et une fouille. Une mission pareille sans armes ça tenait presque de la folie. Bien sur elle pouvait mimer l'honnêteté en déposant ses armes les plus apparentes, elle en avait plusieurs cachées sur elle (deux poignards dans ses bottes et une petite bourse de bille en terre sèche qui entre ses mains se changeaient en autant de projectiles que nécessaire) mais au vu de la tête des légionnaires ils ne prendraient pas la fouille à la légère. Elle se mit à cogiter à toute vitesse pour trouver un moyen de dire à Maelicia de cacher quelques armes par la magie pour qu'elle puisse les récupérer ensuite.

Modifié par Arakis, 02 avril 2011 - 10:03.


#236 Trias

Trias

Posté 17 janvier 2011 - 22:09

Ombre et feu sombre

21 Soirétoile 3E425, 14H15




Avec un sourire macabre, riant à chaque coup infligé, tremblant d'excitation à chaque attaque portée, le démon de l'épée clouait son massif opposant au sol. A travers les éclats d'ébonite dansant dans les airs, l'antique seigneur connu sous le nom d'Aenerian Syndaerone menait sa besogne de destruction. Sa lame voltigeait, découpant entaille après entaille dans l'épaisseur de l'armure, dans un déchaînement sans fin.

« Incroyable! Incroyable ! Je pourrais faire ca des heures! Incroyable ! » exultait le démon de l'épée, droit debout, son arme brandie entre ses deux mains. Ce qui procura au colosse un répit bref, mais suffisant : sa main droite se referma sur les jambes de son adversaire. Et, dans un geste de colère et de haine mêlées, il les fit décoller avant de projeter son ennemi, tête la première, au travers de la première colonne venue, pour venir se ficher droit dans la paroi de l'autel.

Un nuage de poussière s'éleva sur les débris de la construction, démolie sous l'impact. Le Silence ramassa le premier de ses immenses espadons, chus à ses côtés. Tandis qu'il se rétablissait, le rougeoiement lointain reprit, découpé par une ombre à dimensions humaines : Aenerian, sa face incrustée de runes maintenant parcourue d'estafilades, le provoquait.

« Alors ? Sommes nous deux immortels destinés à se battre jusqu'aux portes d'Oblivion ? »

Le géant d'ébonite, acheva de se redresser. Et, saisissant sa seconde lame, il la brandit, puis la planta au sol, en un retentissant symbole de défi. À ce moment précis, à travers sa position guerrière, c'est alors que Jeraselm réalisa la nature du Silence : il s'agissait probablement d'un champion de jadis, dont l'esprit immortel avait été emprisonné par Sh'éam au sein de l'immense armure, pour en maintenir la cohésion.  Quelles prouesses avait-il pu accomplir pour retenir ainsi l'attention d'un mage aussi maléfique ? A quel intolérable prix avait-il acquis cette indigne immortalité ? Pire encore, quel être incommensurablement puissant avait-il pu créer pareil monstre ?

Je crois qu'il s'énerve, observa posément le vieil homme se tenant derrière lui.  

Et effectivement, l'armure maudite s'était relevée, et une aura de terreur semblait en émaner. Une obscurité plus sombre que la nuit sembla s'abattre sur les ruines, chape d'encre semblant presque étouffer le faible éclat des runes d'Aenerian. Le spectre blindé chargea, dans un vacarme plus tonitruant que tout un troupeau d'aurochs, droit sur le démon perché derrière l'autel.

— C'est mauvais, observa rapidement le vieux de la galerie. Notre estimé ami ne peut vaincre Aenerian. Néanmoins, si  cette casserole ambulante démolit tout, il peut l'ensevelir, et nous avec...

Son regard bleu vif se tourna vers Jeraselm, à travers ses sourcils broussailleux.

— Prenez ceci, intima-t'il tendant une fiole à Jeraselm. Aenerian va probablement aussi se mettre en rogne, et peut-être se décidera-t'il à planter sa lame dans le Silence. Si c'est le cas, il faudra que je redevienne matériel pour incanter, et ces deux là risqueront de devenir moins amicaux à ce moment là : vous devrez les immobiliser temporairement. Je compte sur vous, jouvenceau.

Au loin, le colosse avait presque atteint l'estrade de marbre. Brusquement, d'une impulsion de son membre métallique, il se mit à tournoyer sur lui même, ses deux lames largement écartées balayant l'air, en une mortelle hélice, telle une dantesque toupie. L'infernale tornade de métal atteignit l'autel, qu'elle pulvérisa tandis que ses lames continuaient à tourner, attirant toute chose sous l'effet d'une phénoménale aspiration.

Modifié par Trias, 17 janvier 2011 - 22:38.


#237 Ygonaar

Ygonaar

Posté 29 janvier 2011 - 16:42

Paroles, paroles, paroles...




21 Soirétoile 3E425, 13h55


— Reste calme, menaça le légionnaire d'une voix mielleuse. Tu m'as l'air un peu trop tendu pour quelqu'un qui se travestit et change aussi aisément de nom. N'est-ce pas, Danse-Mot ? ou peut-être est-ce Hume-les-Bolets , ou Mate-Peste ? On s'y perd...

Que voulait donc ce Dunmer ? Le déstabiliser ? Lui laisser entendre qu'il en savait plus sur lui ? Mais dans ce cas, pourquoi ne pas lâcher un pseudonyme qu'il n'aurait pas encore utiliser devant eux ? Critiquait-il ses divers personnages ? Avec Maelicia qui avait stupidement grillé Danse-Mot devant Saerileth il...
Dans un ralenti très cinématographique que conférait parfois la tension, le reptile voyait la main de l'elfe noir s'abbattre vers son buste. Cachait-il une aiguille dans sa paume ? Possible, il avait longuement farfouillé dans ses affaires, difficile de savoir ce qu'il avait pu manipulé. Ou voulait-il lui lancer un sort ? Une balise ? Fallait-il le neutraliser sur le champs ou le laisser se révéler...

Finalement, il resta stoïquement immobile, comptant sur sa rapidité de réaction et sa résistance aux toxines pour se sortir du mauvais pas. La main lui tomba mollement sur l'épaule, sans autre effets notables. En tout cas, sa bague restait inerte. Ce qui, curieusement, ne le rassurait guère.

— Allez, ça va passer tout seul.
— Calme ? N'ayez point d'inquiétude. Je ne vois nul motif de prendre ombrage. Sachez qu'un mage de mon rang ne perds que rarement son sang-froid. Jamais, devrais-je dire même, pour mon espèce. Répliqua le lézard en exhibant largement les crocs. Mais je crains en revanche que le tutoiement soit un peu osé de la part d'un simple légionnaire.

La troupe se mit en branle. Maelicia en profita pour s'approcher et lui murmurer d'un air caustique.

— Au fait, comment voudrez vous qu'je vous appelle, devant le procureur ?
— Vend-ses-Comparses, ce sera très bien, grouma-t-il pendant que la jeune femme s'esclaffait.

ж ж ж

Excellente approche

    21 Soirétoile 3E425, 14h00

    Une massive porte de bois ferré perçait la roche pâle de la tour Ayelide. Des gardes en faction suivaient déjà leur progression avec attention.   Paradoxalement, cette vision détendit Main-d'Ombre. Il était trop tard pour faire demi-tour, trop tard pour envisager de complexes préparatifs. Le danger était là, clairement identifié. Il n'était plus l'heure d'essayer d'anticiper quelques sournois adversaires qui cacheraient leurs actes avec maestria. Il fallait avant toutes choses surmonter cette épreuve très délicate. L'Argonien n'était jamais aussi calme et efficace que dans ses situations. Un mantra dans sa langue lui vint aux lèvres.


Nous sommes le Peuple des Racines
La Sève des Hists Anciens coule dans nos veines
Ils nous donnèrent le Don Animal pour courir le monde en leur nom
Que la Sève réveille en moi le flair infaillible du condylure étoilé
Que le monde des odeurs deviennent une seconde vue
Qu'elle parcourt mes narines, ma langue, mon palais, et les modèle selon mon Vouloir

L'entendant marmonner, la magicienne lui jeta un coup d'oeil intrigué. Un rapide coup de langue apporta de l'air frais à son organe de Jacobson. L'odeur de sa sueur lui parvenait avec une acuité de plus en plus accrue. Une sueur fraiche mais qui avait cette saveur particulière indiquant qu'un mammifère était stressé. Il ne put alors s'empêcher de remarquer son visage fermé. La jeune femme avait peur. En revanche, les glandes sudoripares de l'Aiglonne restaient étonnamment muette. Quant-à Drem, s'il avait cru déceler de l'anxiété, il essayait maintenant d'éviter de le humer car il constatait que sa lotion de charme l'affectait encore plus qu'avant.

Il croisèrent un sillon de trace olfactives. De nombreux mammifères mâles, du stress, du cuir et de l'acier. Un imposant détachement de soldat avait emprunté cette voie quelques minutes plus tôt. Certainement pour sécuriser les jardins impériaux en réponse à l'explosion. Les corps d'Aewin et du Rougegarde Sh'éamite risquait d'être rapidement découvert.

Les gardes de la porte restaient impassibles, visant avec détachement la feuille du Dunmer. Mais leur odeur, témoin toujours indiscret et volubile, trahissait là encore l'éréthisme du palais. Le reptile recherchait une odeur connue qui pourrait l'alerter, celle de Causant ou de la maladrerie, par exemple. Mais inutile d'espérer trouver autre chose que d'ancien remugles d'équidés dans ce lieu.

Dans le sas qui suivit, en revanche, les premières effluves qu'il remarqua furent le savon et l'encaustique.

Hola, Légionnaire. Contrôle des autorisations d'entrée.

Un humain massif dans une armure dont l'apparat ostentatoire ne devait pourtant pas nuire à l'efficience. Cette dernière avait été à coup sur vernissée le matin même, les bottes cirées et une furtive pointe de lavande trahissait encore une lotion de rasage. Un maniaque de la discipline et les membres de sa contubernium était olfactivement à l'avenant. Typiquement le genre de Peau-Molles à avoir des préjugés sur les Argoniens. Et la sorcière qui commençait à s'affoler...

Légionnaire Serethi, salua le Dunmer, de la garnison du quartier du Port. J'accompagne ces  messieurs-dames. C'est un délégation spéciale dépêchée d'urgence par le service sanitaire des douanes, mon capitaine. Capitaine ?
Capitaine Gratius, second optione du lieutenant-colonel de la garde du palais. Bizarre, on a pas été mis au courant d'une délégation qui devait venir aujourd'hui. Z'avez la paperasse ?
Tenez, mon capitaine. Ils ont bricolé l'ordre de mission dans l'urgence, c'est normal que vous ayez pas encore été avertis.

La sudation de Drem devenait plus importante. Il ne semblait soudain plus aussi confiant en son plan génial. Dommage, les opportunités de fuite étaient nulles en ce lieu, si l'on exceptait la téléportation de la Brétonne, bien sûr. S'il n'y avait pas de contre-sort préventif. Le capitaine, en revanche, restait d'un calme spartiate. Il fallait attendre pour voir ce que la situation allait donner. N'ayant rien d'autre à faire, le fils des Marais Noir essayait de repérer les défauts dans les cuirasses, d'estimer les angles pour les atteindre, de calculer les meilleures trajectoires pour décimer les opposants en limitant les risques de se faire stopper net. Un projet ubuesque, de toutes évidences, mais  dans le pire des cas... Et il aurait volontiers parié que Saerileth faisait exactement la même chose.

"Un risque élevé de contamination de mycose tropicale" ? Ce serait bien la première fois qu'on verrait ça au Palais, s'étonna l'officier. "Veuillez accorder l'accès des spécialistes et de leur escorte aux zones du palais qui leur seront nécessaires pour identifier et confiner les lots incriminés..."  et vous êtes que quatre pour fouiller tout le palais?
Ils auront surtout besoin de consulter les registres administratifs pour repérer si les marchandises dangereuses ont été distribuées dans le bâtiment, et si oui, où elles sont.
C'était quoi, ces marchandises ? Des produits venus du Marais Noir ?
Certaines caisses en contenaient, des produits artisanaux venus de Lilmoth par bateaux - du linge exotique, des chandelles en cire d'abeille des marais, des épices - et d'autres venaient de la  vallée du Bas-Niben, qui contenaient des produits moins exotiques. Mais il y a un risque que la moisissure se soit propagée dans ces caisses par contact prolongé. Parait qu'il y a plusieurs membres d'équipage du navire à qui on a du offrir une jambe de bois ou un crochet, là aussi à cause d'un contact prolongé...
Erk.. Ils commencent sérieusement à me courir sur les nerfs, au Port. Pas foutus de faire un papier correct ! Ils ont pas du user beaucoup d'encre pour le pondre, cet ordre de mission. Il n'y a même pas le nom de vos spécialistes !

Alors que l'Elfe Noir persistait à vendre son histoire, le factionnaire commençait à s'échauffer. Son visage restait impassible mais son odeur le trahissait subtilement. La situation pouvait certes devenir explosive, mais d'un autre coté, cela affecterait forcément, peu ou prou, ses capacités d'analyse. Il y avait donc une carte à miser sur ses instincts et ses préjugés. Une tactique qui devait échapper aux compétences de Serethi, si on en croyait le coup d'œil affolé qu'il venait de leur lancer. Même l'Aiglonne commençait à avoir une guttation trahissant l'inquiétude. La Brétonne en revanche, en bonne sorcière qui se respecte, avait un talent indéniable pour manipuler les autres. Main-d'Ombre ne fut donc guère surpris qu'elle monte au créneau.

— Comment ! s'exclama-t-elle, vous voulez dire que le nom du docteur n'est même pas cité ? Et se retournant vers lui, Docteur Mate-peste, ils n'ont même pas mis votre nom !

Elle le mettait en première ligne ! Il ne fut guère surpris cependant, c'est la base de l'illusion que de focaliser l'attention sur une chose pendant que l'on manipule une autre, et elle devait certainement en profiter pour tisser sa toile. Mais il craignait toujours ignorer un usage de base des impériaux qui mettrait sa couverture à l'eau. Il se contenta donc d'une petite ondulation de la main droite qui avait  l'avantage de lui donner une contenance et de pouvoir être interprété par l'officier comme il le voulait. Il fallait choisir  une attitude de toute urgence.

Ce soldat se considérait visiblement comme une élite morale et guerrière. Il ne devait jurer que par l'Empereur, la Légion et ses valeurs. On pouvait donc tabler sur une aversion des stéréotypes que les Peau-Molles prêtaient souvent aux Hommes Lézard le manque d'hygiène, la fainéantise, la rouerie, une civilisation arriérée... D'un autre coté, un Argonien  qui sortirait de ses archétypes pour épouser aux mieux les valeurs de Cyrodil avait de bonne chance d'en avoir à ses yeux plus de mérite et de gagner, sinon de la sympathie, au moins une once de respect.

— Docteur...  comment ? Demanda Gratius en l'observant attentivement.

La rouquine lui fit un geste, assez discret il devait bien le reconnaître, lui indiquant probablement de laisser tomber. Elle devait craindre qu'il n'interfère sur le sortilège qu'elle devait préparer. Celui lui semblait logique mais essayer d'assoir le rôle qu'elle lui avait assigné ne lui porterait certainement pas préjudice. Il se mit donc à impressionner par petites touches certains aspects de sa propre personne. Bien mettre en relief sa vêture sobre, stricte mais impeccable, associer des notions de franchise et de fierté à son regard impassible sous l'examen du capitaine, à sa posture d'une rectitude irréprochable. Superposer des notions de modestie et de responsabilité au fait qu'il transporte lui même sa hotte malgré une position officielle prééminente. Accentuer le message d'assise sociale de ses tâches de personnalité factices, même si les mammifères n'y étaient en général que peu sensible. Et surtout, il accompagnait le pouvoir insidieux du parfum attractif que lui avait fourni le Dunmer. Une idée remarquable, il en convenait.

— Laissez, docteur, je m'en charge. Il s'agit du grand docteur Mate-peste, de la guilde de Gidéon, de la cité de Galpus, au Marais Noir. C'est un éminent spécialiste Argonien du GRAVE — Groupement Régional Antimycoses Varioliformes Exotiques. Sa visite est prévue depuis des semaines ! Comment est-il possible que vos services n'le mentionnent pas ?
— On se le demande... cracha son interlocuteur en fusillant Drem du regard.

Finement joué. Elle venait de lui fournir un bouc émissaire sur qui rejeter toute sa frustration, tous ses doutes. La jeune femme confirmait bien toutes ses présomptions quant-à son aptitude à manipuler son monde. Et  peut-être abandonnerait-elle maintenant le rôle de femelle idiote qu'elle affectait régulièrement. Leurs relations deviendraient plus simple si elle affichait clairement sa nature d'éscobarde ensorceleuse. En tout cas, le respect que semblait lui porter une humaine visiblement de bonne famille renforcerait vraisemblablement la crédibilité de son personnage et son potentiel sympathie. Et ne pas s'occuper des tâches administratives pour se focaliser sur l'expertise médicale lui soulignerait sa fonction d'éminent spécialiste et lui éviterait de commettre de graves impairs aux us impériaux. Le reptile en prouvait presque de l'inquiétude, la femelle semblait déjà trop bien le connaître et tout savoir de ses faiblesses.

— Écoutez capitaine, j'me nomme Melissa Melleandra, j'suis guérisseuse et correspondante locale du GRAVE. Voici donc le Docteur Mate-peste, et son agente qui nous l'a ramené du marais noir, Carina Flèche. Nous avons une mission de la plus haute importance, prévue depuis des semaines... On peut pas tout annuler à cause de fonctionnaires incompétents !
— Écoutez, mademoiselle Melleandra,  mes ordres sont simples : je dois assurer la sécurité de l'empereur Uriel Septim. Sans ordre PARFAITEMENT en régle, nominal, daté, signé et scellé, je ne peux vous laisser entrer pour quelque raison que ce soit. Vous pourriez aussi bien être une illusionniste brétonne, avec une tueuse de la Morag-tong et un empoisonneur argonien. Vos dires, sont invérifiables ! D'autant que vous la voyez où, cette infection contagieuse et grave ? ... Ventrebleu !

C'est évidemment à ce moment là que tous remarquèrent les tâches de moisissure qui gagnaient insidieusement du terrain. Du grand art. La rosière mériterait d'être conteuse. Son histoire avait prit, comme le prouva le geste de rejet du capitaine envers son gantelet.

— Ne le jetez pas par terre ! S'exclama son assistante. Mettez les plutôt dans un sac, en lin de préférence...
— Demetrius !  Un sac ! Bon, vous vous allez repasser par le bureau des douanes, au port, et m'obtenir une autorisation d'entrée dans les règles. Vous reviendrez pour le 28.
— Capitaine, savez vous combien de temps il nous a fallu pour obtenir ces autorisations ?! Il nous a fallu des semaines !
— Et alors ?
— Et alors, le docteur Mate-peste est appelé vers Bravil dès demain !

Le docteur sus-cité fit un effort pour incliner ses paupières supérieures vers l'extérieur, mimique humaine typique qu'il avait bien identifiée, et sur laquelle il impressionna des notion d'assentiment et de contrition. La tension de l'impérial devenait maintenant clairement visible et inquiétait même ses propres hommes. Heureusement qu'on lui avait obligeamment fourni un parafoudre. Sa réaction ne tarda pas.

— SACREBLEU D'INCAPABLES ! hurla-t'il en pointant Serethi, LÉGION DE MES DEUX ! SOLDATS DE SECONDE ZONE ! C'EST QUOI CE DÉTACHEMENT PORTUAIRE ? PAS MÊME CAPABLES DE ME PONDRE UN FOUTU FORMULAIRE CORRECTEMENT, NOM DE TALOS ! ET MAINTENANT C'EST A MOI D'ASSUMER VOS CONNERIES !
— Capitaine, répondit l'armide avec amabilité, afin de maintenir sa victime dans un état de cuisson correcte sans que la sauce n'attache, que signifient quelques noms sur un bout de papier alors que c'est la sécurité de l'empereur qui est en jeu, des nobles, et j'parle pas d'vos hommes. Vous imaginez le chancelier contaminé par un garde ?
Très bien, finit-il par consentir. Combien de temps vous faut-il ?
— Entre trois et quatre heures, pt'être plus en fonction de l'extension des lésions...
— Ce n'est pas correct ce que vous me faites faire, mademoiselle, j'espère que vous en êtes consciente : tenez vous à carreau, et ne me le faites pas regretter !
— Vous pouvez dormir sur vos deux oreilles, minauda l'infâme arachnide.
— Si vous le dites... très bien, vous allez inscrire vos noms sur le registre du bureau des entrées, c'est un bâtiment derrière cette porte. On vous y donnera un passe pour la journée, pour accéder aux zones principales. Sergent ! prenez deux hommes, vous les accompagnez là bas. Optione ! prenez moi cet ordre de mission et apportez moi ça à la douane au port, pour vérification. Vous leur donnerez un parchemin de ma part, avec, je me sens l'envie d'écrire...

L'aspect administratif étant clos, il était temps que Mate-Peste reprenne ses fonctions d'éminent spécialiste.  Et peut-être pouvait-il gagner quelques précieuses poignées de minutes avant que l'estafette ne révèle leur supercherie.

— Vous permettez, capitaine?  dit-il en lui saisissant délicatement la main. Outre le timbre doux et apaisant du professionnel médical, il prit bien soin d'adopter l'accent trainant de Gidéon, afin de souligner sa valeur d'expert irremplaçable car exotique. Il inséra aussi quelques subtiles hésitations, sur lesquelles il impressionna des concepts d'étranger ne parlant pas sa langue natale mais faisant des efforts conséquents d'intégration.

— L'infection est très... superficielle? elle n'a pas transpercé l'épiderme. Vous devriez la... circonvenir ? Avec une simple décoction d'une pinte de vinaigre blanc, trois pintes d'huile de lin et deux pieds de pézize orangé ...soigneusement ? pilés. Il farfouilla dans sa hotte et tendit les deux champignons en question.   A appliquer deux fois dix minutes, vous et vos hommes, et vous ne serez plus contaminant. Quant à votre... armure ?, hélas, je crains que... Mais !? Vous avez bien protégé les rivets et ...damasquinages ? de laiton avec un vernis à base de santal rouge, de gomme-gutte et de sang-dragon ? Félicitations ! La plupart des légionnaires que j'ai traités se... contentaient ? d'une cire à base de graisse de mouton et d'huile d'oeillette. Qui est spécifique à l'acier, bien entendu, et la mycose variolique  fulminante  se ...retranche ? dans le laiton et les dorures. Si vous ne tardez pas, vous la sauverez en y appliquant le même traitement.

Durant sa diatribe, Main-d'Ombre profita que l'officier était sérieusement ébranlé pour tenter  de l'impressionner légèrement. Il essaya de consolider la crédibilité de leur histoire en démontrant son rôle d'expert, de récompenser la méticulosité du capitaine pour l'inciter à adhérer plus volontiers. A souligner l'aspect extrêmement contaminant et rapide du mycète imaginaire. A renforcer l'attachement du soldat envers son équipement et ses insignes d'autorité. Avec un peu de chance, il s'appliquerait le traitement, à lui et ses hommes, avant de prendre le risque d'envoyer une ordonnance contaminante à travers la ville. De quoi gagner jusqu'à trois quart d'heure... Difficile de savoir s'il avait touché juste, le visage de l'officier était redevenu impénétrable. En tous cas, il leur libérait l'accès vers une cours intérieure illuminée par les boutisses cristallines. Ils avaient réussis !  

  

    ж ж ж
Tare avouée à moitié pardonnée


    21 Soirétoile 3E425, 14h10


L'Argonien eut tout juste le temps de savourer la satisfaction de l'objectif atteint que le factionnaire ajouta:

—  Il y a une consigne dans le bureau des entrées. Nul autre que le légionnaire qui vous accompagne n'a besoin d'armes ici, est-ce que c'est clair ? Et à titre exceptionnel, le personnel civil sera fouillé... Avant de disparaître dans ses bureaux.

  La douche froide. Main-d'Ombre maudit Drem sur un nombre impressionnant de génération, lui qui certifiait il n'y a pas un quart d'heure qu'ils ne subiraient ni fouille, ni inscription aux registres. S'il faisait vraiment parti de la Légion, ce qui était toujours un point à vérifier, il n'y connaissait rien ! Le saurien envisagea un bref instant de se débarrasser des trois gardes restants. Avec l'effet de surprise, il était même imaginable de les occire avant qu'ils ne puissent crier, surtout si la mercenaire lui apportait spontanément son aide. Mais que faire de Maelicia qui ne manquerait pas de hurler ? Comment être certain que nul œil ne les observe? Que faire des corps ? Non, cette piste ne mènerait à rien, et il fallait donc subir les caprices du capitaine.

Son arbalète ne passerait jamais, même avec la fouille la plus négligente. Il fallait donc laisser sa hotte à la consigne. Peut-être que du coup, les gardes ne s'y intéresseraient pas trop. Sinon... La Cité Impériale était bien censée être jusque hier sous la menace de pirate Nibénéens, non ? Rien d'étonnant donc à ce que même un docteur prenne ses précautions. En revanche, ses dagues et ses dards empoisonnées risqueraient de faire tâche. Il fallait d'urgence les faire discrètement glisser dans sa hotte. La mention de champignon très toxique aurait de bonne chance de décourager quelque peu les curieux. S'il avait été averti plus tôt, il aurait put imaginer ingérer une de ses armes en usant de la Sève mais maintenant, c'était hors de question. Il lui faudrait également transférer dans ses deux fioles de poison dans son sac à dos, au cas où des gardes particulièrement méfiant lui demande de les tester sur ses comparses. Quant à ses boulettes éclairs, étant peu toxiques, il essaierait de les faire passer pour un remède. Mais il restait cette histoire de registre. Et cette bougresse de magicienne qui n'avait plus son collier magique autour du cou...

   Le docteur Mate-Peste s'approcha de sa correspondante locale, posa sa hotte, lui saisi les épaules et se pencha vers   son oreille dans l'attitude du professeur bienveillant expliquant un détail à un disciple. Il profita du mouvement pour faire glisser avec habileté une des dagues cachées sur son avant-bras jusqu'à sa main.

— Je ne sais pas écrire. Avoua-t-il à voix basse tout en laissant tomber avec maestria le stylet dans sa hotte.

Modifié par Ygonaar, 29 janvier 2011 - 18:42.


#238 Trias

Trias

Posté 30 janvier 2011 - 17:41

La Cour impériale

21 Soirétoile 3E425, 14h00




« Je ne sais pas écrire. » confia le roublard, tout en se penchant sur elle comme un maître sussure correction à son élève.

L'ombre d'un instant, la brétonne tiqua, avant de se recomposer un masque d'attention soucieuse à l'égard de son prétendument docte supérieur. Comment se pouvait-il qu'un barde aussi émérite dans l'art de faire danser les mots soit analphabète ? Sans doute les traditions orales, et le bouche à oreille étaient-ils maîtres en Argonie... après tout, les livres ne se conservaient peut-être pas là bas. La rouquine plongea un instant ses yeux dans ceux de l'argonien, et crut y lire de l'appréhension, trahie par la réduction de ses pupilles à un mince filet vertical.

— Ne vous inquietez pas, lui souffla-t'elle sur le même ton, le plus dur est passé.

Autour d'eux se dressaient les multiples annexes du palais, en autant de tours et de minarets dressés vers le ciel. D'une blancheur éclatante, les bâtisses immaculées s'amoncelaient, innombrables, reflet resplendissant d'un soleil à son zénith. Aînée dominatrice, phalange érigée dressée vers les cieux, la Tour d'or blanc ayléïde surplombait l'ensemble, de sa masse écrasante. Seule la vivace présence d'une végétation magiquement maintenue interrompait la propreté géométrique de l'omniprésent dallage.

Il se dégageait de cet ensemble une splendeur savamment entretenue, que le faste nobiliaire ne démentait pas : valets et palefreniers vaquaient, sans qu'aucun détail dans leur impeccable livrée ne trahisse la dégradante tâche qui était la leur. La garde, moins envahissante qu'aux portes, manifestait sa discrète mais sévère présence devant chaque bâtiment, chiens de faïence statufiés dans leurs armures chromées. Certains escortaient, bien sûr, de nobles gens, dont l'apparât multicolore contrastait avec l'uniformité environnante : les dames paraissaient être autant de fleurs dans leurs robes compliquées, tandis que les riches parures des seigneurs ne leur enviaient rien. La cour impériale était l'une des plus fastueuses de Tamriel, si bien que par comparaison à un tel entourage, la mise ordinaire de nos aventuriers évoquait plutôt de plébéiens rôturiers.

Nonobstant, Typhaine n'avait pour une fois que faire des comparaisons vestimentaires. Dédaignant les regards intrigués d'une famille d'aristocrates, elle sonda furtivement celui de ses compagnons. À en juger par l'oeillade alarmée que lui rendit Saerileth, l'heure n'était pas à la fête. L'arsenal militaire transporté par la boucanière n'y était sans doute pas étranger. Un rapide clin d'oeil de la part de l'ensorceleuse entreprit de la rassurer : leur escorte n'était que du menu fretin.




ж ж ж
Rose neige

21 Soirétoile 3E425, 14h10




Ils marchèrent encore quelques temps, puis bifurquèrent vers un édifice attenant à l'allée principale. De respectables dimensions quoique doté d'un seul étage, il devait sans nul doute s'agir de la consigne. Maelicia avait eu tout le temps de tisser son narsis dans l'inconscient des trois gardes : s'il n'y avait pas trop de monde dedans, ce serait du gâteau.

Nos héros en franchirent le seuil, suivis par leurs encombrants anges gardiens. L'intérieur, très correctement illuminé par les larges fenêtres de façade, se divisait en trois portions : la salle principale, constellée de casiers recouvrant l'intégralité des murs, était séparée de l'entrée par un solide grillage, uniquement interrompu par une porte cadenassée.  À leur droite, une simple cloison en forme d'angle dissimulait aux regards un petit espace, non clos : sans doute s'agissait-il de la zone dédiée aux fouilles, laissée ouverte pour éviter tout abus. Enfin, à leur gauche, attelé à son pupitre, un vieil homme en livrée impériale parcourait d'un air affairé divers ouvrages. Les registres !

La chance leur souriait : à part le garde de faction à l'extérieur, le vieux bonhomme était seul ! Ils firent halte devant le grillage, et l'un de leurs escorteurs, posant son casque, se tourna vers eux.

— Vous êtes dans la consigne impériale. Par autorité du capitaine Gratius, moi, sergent Decurus vais procéder à la fouille. Vous passerez un par un.

Avec une spontanéité étonnante, Maelicia se constitua volontaire.

— Je vous suis, Sergent Decurus, déclara-t'elle tout en faisant un pas en avant. J'tiens à prouver qu'notre déléguation n'a rien à cacher, ajouta-t'elle, tout en lui lançant une œillade sans équivoque.

Typhaine sentit tous les regards s'appesantir sur elle. Même le vieux fonctionnaire s'était interrompu, laissant sa plume darder dans le vide, interdit. Le nommé Decurus ne put s'empêcher de la considérer d'un manière un peu plus globale que prévu : pour l'avoir déjà testé, Maelicia savait que le numéro de la nymphomane était des plus déstabilisants, y compris pour les plus chastes des hommes-bêtes.

— Très bien, toussota l'officier, d'un air gêné. Passez, dame Melleandra, répondit-il, en la guidant vers le réduit.
— Appelez moi Melissa, sussura-t'elle sur le chemin, avec une rougeur qui elle, n'était pas feinte.

Après quelques pas, ils contournèrent la cloison et se retrouvèrent dans le local de fouille, cachés aux yeux de tous. A l'exception de bancs adossés aux parois, le réduit était d'une vacuité spartiate. Il n'y avait pas de fenêtres.

— Ouvrez les bras, intima le sergent, tout en tentant de dissimuler son trouble.

L'ensorceleuse s'exécuta largement, mais alors que le sergent se rapprochait pour commencer la palpation, elle referma sèchement son bras, lui fichant son index droit sur la tempe. Le malheureux s'immobilisa soudain, puis commença à se roidir, tandis que ses yeux se révulsaient.

— Sergent, pas si fort ! s'exclama-t'elle artistement, à l'attention de son « public » de la salle principale, tout en fixant son geôlier d'un air peu amène. Le pauvre homme se raidissait toujours davantage ; un rai de salive perlait même à l'une des ses commissures. Dans une puérile réminiscence de sa période écolière, Typhaine en profita pour lui tirer la langue, éhontée. De l'autre côté du mur, elle pouvait sentir la distraction des esprits, leur attention doublement détournée par son petit numéro ainsi que par le narsis tissé auparavant.

Enfin, après avoir agrémenté la prétendue fouille par quelques halètements de son cru, elle décolla son doigt de la tempe de sa victime. Decurus revint à lui, clignant des yeux comme s'il émergeait d'un profond sommeil.

— Je pense que cela suffira, n'est-ce pas sergent ? influença-t'elle.
Je pense en effet que cela suffira, répondit mécaniquement sa victime, l'air hagard. Puis il sembla revenir à lui : oui, cela suffira. Veuillez rejoindre la consigne mademoiselle, lui indiqua-t'il d'un geste bref.

L'agent et la civile sortirent du réduit. A la grande satisfaction de Typhaine, tous détournèrent le regard en la voyant : le vieil intendant chauve paraissait extrêmement absorbé par la rédaction d'une quelconque notice et  les gardes regardaient leurs pieds. Il s'installa un pesant silence.

— J'suppose que maintenant qu'on est en règle, y faudra qu'on consigne nos objets ?
— Oui vous devrez consigner vos objets. Vous êtes en règle. Parfait. Allez, consignez vos biens, vous êtes en règle civils ! sur ce, d'un geste impérieux il ordonna le retrait à ses hommes qui se retirèrent sans broncher comme si de rien n'était. Ou plutôt comme si quatre fouilles avait eu lieu.  

Intérieurement, Maelicia jubilait : sa maîtrise de l'illusion était désormais éclatante. Que de progrès effectués depuis  son séjour auprès de son ancien mentor, le trouble Illuvanar ! Les germes appris de lui avaient fructifié, pour réaliser en elle une enchanteresse émérite.

La brétonne se retourna vers le magasinier, désormais seul.

— Dors ! ordonna-t'elle, dominant l'intellect usé du fonctionnaire. Lequel s'écroula sur son pupitre, avant d'émettre un ronflement régulier.

— Vous voyez.... pas de soucis à se faire... j'vous l'avait dit ! exulta-t'elle, en se retournant vers ses compagnons, tout à coup essoufflée. Sentant soudainement la fatigue, elle commit une deuxième faute, en tendant la main vers sa gibecière à la recherche d'une pierre esprit. Typhaine interrompit brutalement son geste, en captant quelque chose d'inhabituel dans le regard de ses comparses. C'est alors qu'elle réalisa son erreur : en leur démontrant ses talents de manipulatrice, elle leur prouvait par la même occasion la menace qu'elle représentait pour eux, victimes potentielles de ses propres dons.

Elle déglutit péniblement, et pria Akatosh pour que ceux-ci ne l'interprètent pas de cette façon.

— Bon, y faudrait qu'vous posiez vot'matériel le plus voyant dans la...

Typhaine s'interrompit, stupéfaite : une enfant aux boucles dorées, vêtue d'une robe blanche, venait d'entrer dans la consigne. La blondinette, qui ne devait guère avoir plus de dix ans, et dont le teint pâle stigmatisait ses origines nordiques, trottina vers elle puis lui tendit une rose couleur de neige.

— Tiens ! déclara-t'elle, en lui présentant fièrement la fleur.

Machinalement, Maelicia se baissa et la saisit, toujours interloquée. La fillette éclata de rire, puis se sauva en courant. Typhaine suivit des yeux la blondinette à travers la fenêtre, jusqu'à ce qu'elle rejoigne d'une famille de nobles non loin. La rouquine se souvenait les avoir croisés dans l'allée : un vieux cyrodiil décrépit bardé de médailles et de dorures, escorté par deux officiers de la garde, l'enfant, et une jeune dame brétonne, revêtue d'une robe à la blancheur éclatante. Sa chevelure platine cascadait sur ses épaules, soulignées par un décolleté gracieux. Elle était d'une beauté stupéfiante, surnaturelle. La noble dame lui fit un signe de la main, accompagné d'un sourire indéchiffrable.

http://img80.imageshack.us/img80/831/semsyletkathie.jpg


Typhaine restait là, hébétée. Soudain, sous les yeux de ses camarades, elle devint blanche comme un linge, et ses pupilles s'étrécirent de terreur. Le vieux fonctionnaire parût même se réveiller, libéré du Vouloir de l'étudiante. Étouffant un cri, celle-ci courut se cacher jusque derrière la cloison de fouille, puis s'y recroquevilla, paralysée par une peur panique : la dame de l'allée... c'était S'emsyl, cinquième du clan Sh'éam...

Modifié par Trias, 07 février 2011 - 08:49.


#239 Ygonaar

Ygonaar

Posté 11 février 2011 - 23:58

Frigide?



21 Soirétoile 3E425, 14h10


«
Je ne sais pas écrire. »

Prononcer cette phrase lui faisait curieusement mal. Oh, cela ne devait guère surprendre la sorcière. Entre ses intonations de natif des Marais Noirs, son excuse des plus idiotes, tantôt, sur sa crampe aux doigts et le fait de lui avoir demander de déchiffrer son contrat de la guilde des voleurs, il y a deux mois, elle devait l'avoir déjà deviné. Mais malgré le réchauffé de l'information, avouer sans détour que oui, il était quasiment illettré, qu'il n'était qu'un rustre venant d'un des recoins les plus pouilleux, les plus barbares de Tamriel, l'humiliait. S'il n'avait jamais réussit à se débarrasser complétement de son accent, n'ayant pas entendu un mot d'Impérial avant sa seizième année, il arrivait pourtant généralement à faire illusion grâce à sa mémoire exceptionnelle des phonèmes et à son talent naturel pour les agencer. Beaucoup de ses personnages avaient une rigueur orale, voir un vocabulaire, supérieurs à nombre de ses interlocuteurs Cyrodiils. Et malgré sa médiocrité musicale, il arrivait même à se faire passer pour un barde. Évidemment, l'initiation à la versification et aux Belles Lettres enseigné par Phebus de Galliambe et l'entrainement sur la Voix que lui avait prodigué sa mère n'y étaient pas pour rien. Et Main-d'Ombre abhorrais se dévoiler.

— Ne vous inquiétez pas, le plus dur est passé. Se contenta-t-elle de lui répondre. Qu'en savait-elle, elle qui avouait la veille son incompétence crasse en matière de palais impérial ? Même le légionnaire, qui lui avait assuré exactement la même chose il n'y a pas dix minutes, c'était complètement fourvoyé. Le reptile préférait continuer ses délicats transferts d'objets compromettants lors de leur traversée de la cour impériale. Il n'était pourtant pas si facile de se concentrer. D'abord car il flottait en permanence une multitude de notes de fond des parfums de l'aristocratie, et qu'essayer d'y retrouver un autre relent relevait de la gageure. Ensuite car la Tour d'Or Blanc vous y écrasait de toute sa hauteur comme nulle part ailleurs dans la capitale. L'Argonien avait encore parfois l'impression que les plus grandes bâtisses de la cité risquaient de s'effondrer  à tout moment, ce sentiment était maintenant incroyablement renforcé. C'est à peine s'il nota la position des différents gardes de faction, et il ne s'intéressa guère, une fois n'est pas coutumes, au ballet des gentilshommes et de leurs larbins. Heureusement, ils gagnèrent bien vite un vaste appentis qui devait probablement être la consigne.


Il n'y avait quasiment plus d'effluve de parfum ici, le lieu ne devait guère être fréquenté par la noblesse. Parmi les attendus fumets de cuir, de métal et de graisse, le reptile devinait également des traces les plus diverses : nourritures, écrits, médications, sang séché et même celle d'un petit chien qui avaient curieusement du transiter sur les longs rayonnages que protégeait un grillage d'acier. Rien qui ne lui rappela la maladrerie, cependant. La place n'était certainement pas considérée comme un lieu sensible car seul un vieux tabellion en livrée grise annotait un épais registre. Neutraliser leur escorte ici devrait être envisageable, au besoin. Si l'on exceptait les indiscrètes oreilles du garde en faction devant la porte qui pouvaient rameuter ses collègues en deux minutes. Si l'on exceptait que le capitaine Gratius s'étonnerait rapidement de ne pas voir rappliquer ses troufions. Décidément, il semblait difficile de se soustraire à cette fouille.

Ce fut Maelicia qui, au grand soulagement du saurien, se porta spontanément volontaire. Avait-elle repéré le discret ballet de menus objets qu'il faisait épisodiquement transiter jusqu'à sa hotte ? Cherchait-elle à lui donner un peu plus de temps ? Elle suivit le tactile sergent derrière une cloison de bois qui isolait partiellement la zone dédiée à la palpation. Et du temps, elle lui en fournit plus que de raison. De modérément discrets halètements furent rapidement perceptibles, semblant plonger dans l'embarras les vicinaux du lézard. Et Main-d'Ombre lui même, d'ailleurs, accusait une certaine perplexité. Il semblait y avoir une scène scabreuse de l'autre coté du panneau mais il ne décelait pourtant aucune effluve de sécrétion sexuelle. Cela signifiait-il quelques pratiques inconnues de lui dans le but d'acheter leur passage ? Cela cadrait assez mal au personnage qu'incarnait généralement la sorcière mais peut-être avait-elle décidé de faire tomber le masque ?

Oui, d'un certain coté.  Lorsque le couple revint, le sergent était d'évidence sous l'influence de l'ensorceleuse. Ses deux compères aussi, d'ailleurs, car ils acceptèrent de tourner casaque sans accomplir leur mission. La jeune femme devait seulement gagner du temps afin de tisser convenablement son sortilège. Et elle ne s'embarrassa d'aucune fioriture pour imposer sa volonté au malheureux gratte-papier, qui sombra dans l'inconscience à la première injonction. Cette démonstration de force rassura l'Argonien. Il retrouvait enfin une sorcière telle qu'il les connaissait, impérieuses, dictatoriales, faisant fi des aspirations d'autrui, un type de sorcière avait lequel il avait apprit à traiter. Pas comme cette fantasque jeune humaine, source inévitable de d'imprévus, de complications et de naïve moralisation, qui semblait être son exact contre-pied. Et à laquelle il commençait paradoxalement à s'attacher. Une pente dangereuse, assurément. C'est avec un curieux rictus d'ironie, pour les spécialistes es sauroïde, qu'il fourragea son sac à dos pour récupérer ses affaires.  


ж ж ж


Cercle des confessions anonymes




21 Soirétoile 3E425, 14h25

Ce faisant, une jeune peau-molle à la mise bourgeoise fit irruption dans la salle et vint offrir une rose à la mystique. Il n'avait jamais entendu dire que les femelles visitant le palais s'y voyaient bailler des fleurs mais ses rapports avec la noblesse étaient des plus lointain, il fallait l'avouer. Cela lui rappelait la ridicule coutume de certains villages à la périphérie des Marais Noirs, de ceux qui vivaient principalement du tourisme des riches curieux, de couronner les nouveaux venus de périanthes multicolores. L'Empereur aurait donc besoin de telles veuleries envers ses sujets ? Et pourquoi oublier l'Aiglonne, à cause de son statu de mercenaire? Le symbole devait se suffire à lui-même car le tendron caracola joyeusement vers le parvis sans s'encombrer d'un laïus. Cependant, cette scène digne d'un églogue mettait mal à l'aise le roublard. Serait-ce à cause de la surprise dont faisait preuve Maelicia ? Non, c'était plutôt... une subtile odeur connue.

Il n'eut pas le temps de l'identifier que la fillette rattrapait un couple de patricien qui l'attendait. Un vieux satrape s'étant attaché une jeune beauté désargentée, probablement. L'hétaïre faisait montre d'une conscience professionnelle remarquable, arborant une toilette des plus aguicheuses malgré la température. Bien que peu sensible à la plastique des mammifères, le reptile ressentait avec une acuité peu commune le pourvoir de séduction de celle-ci. Il regrettait seulement que sa peau d'albâtre semble... parcourue de Ténèbres ? Oh, quelque chose de discret, à peine discernable à cette distance, mais ces dernières semblaient parcourir son corps comme elles les faisaient dans la chair morte, elles  ne semblaient pas expulsées par la vie. Ses forts relatifs talents de physionomiste se rappelèrent enfin à lui. S'emsyl.... La rouquine s'étrangla et couru se terrer.


La première réaction de Main-d'Ombre aurait été de mettre sa dague sous la gorge de Saerileth (en évitant soigneusement son bras artificiel), la plus immédiatement dangereuse selon lui, afin de neutraliser leurs troubles comparses et les faire avouer leur rôle dans la présence de la stryge.  Il se retint de justesse en se demandant pourquoi cette dernière s'était ainsi révélée. Pour semer la confusion, pour le moins. Afin de se donner une contenance pendant sa réflexion, il ramassa la rose blanche en prenant bien garde aux épines. Il la huma, d'abord de loin, puis de plus près. Parfum fugace, eau légèrement croupie, certainement du crottin de cheval... et sang frais. Une fleur de serre dont la pruine ne semblait contenir aucun poison, mais une épine était encore recouverte d'un fin film d'hémoglobine. Maelicia s'était certainement piquée le doigt et s'était fendue d'une petite goutte écarlate éclatée sur le sol. Une très subtile odeur de gras... La jeune femme se préparait-elle un diabète?

Reprenons à la base. La vampire et elle seule lui avait semblé être parcourue de Ténèbres. Oh, rien de comparable à ce concentré fuligineux du Sang-du-Guar, mais tout de même. Si ce n'était qu'une illusion, il fallait que le magicien soit au courant de ce phénomène, ce qui était rarissime d'après sa mère. Une simple suggestion semblait improbable, non seulement car cela n'était guère la pratique des mages impériaux, mais surtout parce qu'il ne voyait pas pourquoi son cerveau aurait spontanément imaginé un niveau d'enténébration aussi affaibli. Il fallait donc postuler que la Disciple était bel et et bien là. Ce qui voulait dire qu'a contrario des diverses légendes qu'il avait glanées, de son expérience avec les boulettes éclairs, ces créatures n'étaient point réduites en cendre par les rayons de soleil. La peste soit de Marsoric qui avait refusée de lui fournir une source d'information fiable ! Tient, le vieux semblait se réveiller...

D'un geste presque négligent, tout en observant la fenêtre du coin de l'œil, le proclamé Mate-Peste attrapa l'impérial par le cheveux, lui fourra une flasque métallique dans la bouche et compta deux déglutitions.

Il devrait dormir au moins une paire d'heure, maintenant. En revanche, le terrain n'était pas non plus optimal au monstre pour une confrontation physique. Outre la garde de faction qui interviendrait en un temps record, il devait certainement y avoir tout un bataillon de mage-lames prêt à circonvenir toutes menaces occultes. Et s'enfuir de l'agora une fois l'alerte données relèverait certainement de la gageure, même pour elle. Il pouvait donc espérer que la non-morte ne veuille pas les éliminer purement et simplement, du moins pour l'instant. Sauf si Drem et Vierge-de-Dagon étaient bien de son coté, évidement. La situation était tellement précaire qu'il fallait absolument s'assurer de ce point là...


— Je fais parti des Ombres, confessa-t-il en armant une lourde arbalète extraite de sa hotte. Je suis là pour chaperonner Maelicia dans les situations... insolites ou difficiles. Or nous sommes précisément dans une situation extrêmement dangereuse. Il extirpa un carreau qu'il étêta de son fer à l'aide de son petit glaive. Une vampire d'une puissance effrayante vient de nous reprendre dans sa nasse. Il va donc falloir nous dire maintenant pourquoi vous nous colliez réellement aux basques hier soir.

Main-d'Ombre avait arrêté de soutenir la Sève. Il avait besoin de toute la puissance de son fluide pour impressionner massivement ses comparses.  Cela se faisait au détriment de la subtilité, bien sûr, et ces derniers s'apercevraient à coup sûr d'une tentative de manipulation par la suite. Mais il avait un urgent besoin d'informations fiables. Il titillait alors la psyché de ses cibles selon plusieurs angles d'attaques radicalement opposés, afin de déstabiliser pour au moins un court moment d'éventuels conditionnements de protections mentales, comme ceux qu'il s'était lui-même forgé afin d'échapper au joug de ses sœurs. Ainsi, il mit en relief sa réelle sincérité quand à son appartenance à la Guilde des Voleurs et son rôle de soutien de la magicienne, la nécessité de s'épauler de toutes leurs forces maintenant, son sentiment d'urgence absolue et surtout toute la peur lui inspirait la stryge. Sentiment de peur qu'il renforçait même en le liant insidieusement avec des Ténèbres, son seul arsenal lourd pour affecter les esprits. Sensation de peur qu'il greffait également comme une sourde menace à son regard sanglant, à sa démarche devenue plus souple, à ses crocs luisant dans sa gueule et... à son arbalète qui pointait pour l'instant plutôt vers la fenêtre, mais qui semblait hésitante. Tout ce pilonnage ayant pour de donner une compulsion de confession immédiate, seule voie qui ne devrait pas leur sembler éminemment périlleuse. Même si ses cibles étaient des traitres avérés, leurs expressions faciales seraient certainement riches d'enseignement. Jamais il n'avait employé une telle débauche d'illusions, son assaut emphatique serait-il aussi efficace qu'il l'espérait sur tous les types de psyché ? De quel bois était ses acolytes et de quelles protections bénéficiaient-ils ? Comment allait réagir Maelicia à ce phénomène ? Il espérait que les réponses à ces questions vaudraient le risque qu'il prenait actuellement. Sans soutien, il sera maintenant incapable d'user de ses atouts pendant de longues heures... Mais à quoi bon espérer s'enténébrer en présence de S'emsyl, de toutes façons ?

Enfin, si les légendes n'étaient pas toutes caduques, la perspective de recevoir un solide carreau de bois dans le cœur la dissuaderait peut-être d'une attaque frontale.

Modifié par Ygonaar, 13 février 2011 - 00:58.


#240 Trias

Trias

Posté 12 février 2011 - 12:51


Problème élementaire
(mais pas simple pour autant)

21 Soirétoile 3E425, 14h10




Recroquevillée derrière l'illusoire abri du coin de fouille, Typhaine vivait et revivait encore la scène. La gaité et l'insouciance de l'enfant prodiguant la fleur. La propre incrédulité de son regard, remontant jusqu'à une S'emsyl méconnaissable de beauté. Sa pâle plastique, savamment exposée. Son sourire grâcieux et impénétrable, à demi dissimulé derrière une pure coquetterie d'ombrelle. Et surtout, l'aiguë douleur de son index droit lorsque la morte l'avait saluée, provoquant le pouvoir de la rose.

Car le délicat végétal était sans nul doute enchanté : quel moyen plus sûr d'assassiner qu'un objet banal innoculant sélectivement sa cible ? Quel porteur plus innocent qu'une enfant ? Et quel meilleur moyen d'épargner ladite innocente ? Typhaine n'avait pas rêvé, elle avait littéralement senti l'épine lui mordre la chair, perçant quasiment jusqu'à l'articulation, injectant sans merci Akatosh sait quel terrible poison. La brétonne avait vaguement entendu parler de ces méthodes d'assassinat ; un messager lamba tendant une enveloppe en tout point ordinaire à sa victime, laquelle était inévitablement condamnée au moment même où elle se saisissait de l'objet. Cependant, de suprêmes talents d'alchimiste étaient requis, de même que le sacrifice de pierres spirituelles extrêmement puissantes. De telles pratiques, permettant à la fois la supression de la cible et la compromission du porteur, étaient parfois pratiquées par la confrérie noire. La confrérie noire...

Typhaine se maudit pour sa bêtise : il ya maintenant bien des mois auparavant, quelle autre organisation que la confrérie s'en était pris aux aventuriers de Chorrol ? Peut-être même était-ce dans ce fécond terroir, que les disciples avaient recruté la stryge.

Les yeux de l'étudiante s'humidifièrent, et des larmes dévalèrent ses joues. Mourir ainsi, c'était trop bête.
— J'suis désolée, maître Aragir... murmura-t'elle entre deux sanglots.

« Or nous sommes précisément dans une situation extrêmement dangereuse, résonna la voix chaude du lézard, à peine étouffée par la cloison de bois. Une vampire d'une puissance effrayante vient de nous reprendre dans sa nasse. Il va donc falloir nous dire maintenant pourquoi vous nous colliez réellement aux basques hier soir... »


Maelicia sentait le venin commencer à dévorer ses entrailles, de l'intérieur. Néanmoins une calme et dernière résolution lui vint, dissipant tout doute. Jusqu'à sa sensation de manque dont elle souffrait, ce besoin compulsif de se droguer aux pierres-esprit avait disparu. La voie qui s'imposait à elle était claire.

Elle se redressa fermement, s'avança vers l'appentis principal, puis chût aussitôt au sol.


ж ж ж



L'argonien arma l'arbalète, avec la sûreté gestuelle propre à un professionnel, et l'engin cliqueta. Un lourd silence, un instant de fin du monde s'installa entre ses comparses. Chargés d'intensité, les regards se mesuraient entre eux, réévaluant intérieurement la situation après ces ultimes révélations. Main-d'ombre  venait d'enlever son masque.

Soudain, un choc sourd dans leur dos vint distraire la tension ambiante : juste au niveau du panneau de bois, Maelicia venait de choir, prise d'un accés de vomissements. Sous leurs yeux médusés, elle expulsa en de gargouillantes contractions un mélange de liquide gastrique, de sang et d'autres humeurs qui se répandit au sol.

Desserrant des bras crispés contre son abdomen, la brétonne releva vers eux un visage d'une pâleur mortelle. Visiblement prise de vertiges, elle s'avança en titubant vers le registre, à l'autre bout de la salle.

— Pas... le temps... Danse-mot, souffla-t'elle en le dépassant, telle un fantôme

Sa robe, souillée d'acide, gouttait d'immondes sécrétions sur son passage. Cependant, Typhaine n'en avait cure : il ne lui restait qu'une dernière mission à accomplir. Se jetant sur le volumineux almanach, elle se mit à en parcourir fébrilement les pages, les déchirant presque. Si son corps commençait à la trahir, son cerveau fonctionnait lui à toute vitesse.

Comme elle s'y attendait, les nobles de passage étaient distingués des autres invités par leur sceau. Le blocus n'ayant été abrogé qu'il y a quelques heures, tous étaient encore présents. Il lui suffisait donc de remonter jusqu'à ceux présents antérieurement au 15 de sombreciel, date à laquelle le mendiant Causant   avait revendu le sceptre. Restait à trier ceux dont les armoiries ressemblaient à celles décrites (proches de la livrée impériale) et le tour était joué.

'Coutez... ahanna la brétonne, dont la respiration s'était faite bruyante... y'a plus l'temps maintenant. La  Disciple va venir... et.. — elle continuait à tourner violemment les pages, froissant chacune d'entre elle de sa paume crispée — ... et si elle met la main sur le...

Une quinte de toux déchira les poumons de la rouquine, dont le front suait à présent à grosses gouttes.

—... si elle met la main sur le... Maelicia s'interrompit. Elle tourna puis retourna deux pages en avant. Ses sourcils s'étaient haussés.

Puis, elle se fendit d'un nouvel épisode de toux. Des résidus noirâtres lui vinrent dans la main, alors que l'atroce brûlure gagnait ses poumons. Pas maintenant, pas maintenant, il lui fallait vivre encore quelques secondes de plus !

Se redressant, elle reprit son analyse, comparant et recomparant les dernières des feuilles lues. Tandis qu'elle procédait, sa tignasse cuivrée exhiba des reflets étranges. En fait, il sembla même aux trois comparses que ses mèches rousses se contractaient puis se détendaient légèrement à leur base, à l'instar des  anneaux d'un serpent.

.. si elle met la main sur le sceptre *tousse*...
Déchirant l'une des feuilles parcheminées, elle tendit sa main droite pour saisir la plume du fonctionnaire. Ses ongles, longs et effilés frappèrent ses camarades. La kératine bien rose les colorant avait cédé la place à ce qui ressemblait de plus en plus à des griffes

.. ce sera la fin du monde. Maelicia releva un instant le regard vers eux. N'avaient-ils pas la berlue ? Sa crinière rousse, sempiternellement coupée à mi-cou semblait désormais dépasser ses épaules ! Et, quelle fièvre ne la possédait-elle pas : son col entier était trempé de sueur, dégoulinant par ruisseaux de son front et de sa gorge. Le faciès de la magicienne, creusé par la fatigue, semblait l'image même de la maladie.

C'est notre mission... * toux sanglante* ...depuis le début... Empêcher les disciples de Sh'éam... de récupérer leur sceptre. Autrement — même sa voix semblait se modifier, amplifiée par d'étranges  harmoniques  —  Sh'éam reviendra... et ... ce sera la fin...

Elle reporta son attention sur le livre, puis commença à entourer des noms sur la feuille auparavant extraite. C'est alors qu'elle vit sa main, et les splendides et surtout longues griffes ivoires qui les ornaient. Une demi-douzaine d'expressions se succédèrent sur son visage, dont la surprise et l'incompréhension.

— Oh !!!

Son cri de stupeur provoqua la chute d'une goutte de sueur , qui s'écrasa sur le parchemin, noyant l'un des noms. La magicienne se hâta de finir ses recoupements. Elle ne pouvait discerter sur ce qui était en train de lui arriver, elle n'en avait pas le luxe. Achevant sa sélection, elle saisit la feuille puis se dirigea vers eux, mais une nouvelle quinte l'interrompit. Même l'expression de Saerileth, habituellement si maîtrisée changea : ce qu'elle toussait, n'était-ce pas de la fumée ?

Exténuée, Maelicia finit par tendre la fatidique liste au lézard. Trois noms étaient entourés : Seigneur Orvas Ma'canu, Comte Sextus Telius et Baron Ra'Skajoman.

— Fouillez leurs appartements... l'un d'entre eux.... contient surement... le sceptre.

Alors que sa peau humide et maculée touchait les phalanges écaillées du lézard, elle eût un pâle sourire.

— C'est... *tousse* dommage... Danse-mot... j'aurais... voulu... mieux vous... connaître, avoua-t'elle finalement.

Un ultime quinte déchira le fragiles poumons de la pauvre magicienne, qui se cassa en deux, et tomba à genoux sous l'effort. Mais cette fois, elle ne parvenait plus à reprendre sa respiration. Se soutenant de ses deux bras, gisant au sol, à quatre pattes, le visage autrefois si jovial de la Maelicia qu'ils avaient connu se crispa sous l'effet d'une inhumaine souffrance. Ses yeux se fermèrent, alors qu'elle endurait, essayant de ne pas gémir dans ces derniers instants.  Drem put remarquer  les craquements du parquet, alors qu'elle y plantait ses griffes, sans même le réaliser.

Finalement, elle leva un dernier regard vers ses compagnons : et voilà que l'émeraude de ses iris avait fait place à une lueur verte, véritablement lumineuse, où nulle pupille ne venait atténuer leur éclat. Son épiderme commença lui aussi à luire, comme transformé en chatoiement doré d'intensité croissante. Sa luxuriante chevelure se dressa lentement dans les airs, comme aspirée sous l'effet d'un faisceau de chaleur que tous les aventuriers ressentirent.

Car la température de la pièce, piquée par la froideur hivernale, augmentait maintenant vertigineusement. Les traits de Maelicia, brillant d'une lueur toujours plus intense, n'exprimaient rien moins que la plus profonde incrédulité.

Typhaine toussota.

Et le moteur qui avait mis si longtemps à expulser et à transformer tout résidu hydrique de son organisme s'alluma enfin : la crinière de Maelicia s'enflamma littéralement, dansant vers les cieux comme dans l'âtre d'une cheminée.  Ses vêtements noircirent puis se réduisirent aussitôt en cendres dans un crépitement, dévoilant une peau nue à présent incandescente. La créature interloquée devant eux paraissait toute entière constituée de feu, son épiderme comparable à du métal en fusion à figure humaine.

http://img525.imageshack.us/img525/6798/maeelementaire13s.jpg


Ses gantelets et tout ce qui pendait pareillement à sa ceinture (dont sa gibecière) tombèrent derechef au sol. La petite clé que Maelicia portait dissimulée sur une chaîne, exacte réplique de celle procurée à Danse-mot au quartier portuaire, rougit brutalement.

- Fiente ! s'exclama-t'elle.

Elle arracha la clé d'un geste sec, cassant le lien sans plus d'efforts que s'il s'était agi d'un vulgaire papier ; puis la jeta à Danse-mot. Ce qui était bien sûr stupide étant donné que la clef était proche de l'incandescence. Mais l'élémentaire n'eut pas le temps de méditer à ce sujet, le parquet sous ses pieds éméttant d'inquiétants grésillements. La baraque prenait feu !

Maelicia bondit sur un autre recoin. Puis, elle réalisa qu'elle était nue. Étouffant un cri, elle protégea vivement sa pudeur de ses bras. Avant que le sol ne noircisse à nouveau.  

L'élémentaire de feu opta alors pour la seule solution viable qui se présentait à elle : la fuite. D'un bond, elle traversa la fenêtre la plus proche puis détala à une vitesse de moins en moins humaine.


ж ж ж



— Maman Clothilde, pourquoi qu'elle s'est pas transformée en cochon ?

La dame en blanc demeurait interdite, scrutant la flamme vivante disparaître dans les allées du palais. Elle, et la dizaine de nobles, les vingt gardes de faction, et les trente domestiques. Tous bouche-bée.

Il fallut quelques secondes à la garde pour qu'ils s'élancent à la poursuite de l'ardente créature. S'emsyl regarda la petite fille qui tirait sa robe. La disciple maîtrisait parfaitement le très difficile filtre de métamorphose. Une erreur était exclue. Pourquoi un élémentaire, et pas une truie comme elle méritait de l'être alors ? Soudain, elle tiqua :  La fleur d'assassinat était puissamment enchantée, de manière à garantir une efficacité absolue. Se pouvait-il que la magicienne aie absorbé l'âme qui...

— Je ne sais pas, Kathie, répondit-elle finalement, en se penchant vers la gamine. Va avec Remus maintenant.
— Sacrebleu, fit l'intéressé en observant toujours le point rouge lumineux qui disparaissait à l'horizon. Ventrebleu de sacrebleu !

S'emsyl lui jeta un regard méprisant : le vieux baron était sourd comme un pot.

— Mais je veux continuer à m'amuser avec toi ! protesta la blondinette, avec un expression boudeuse.
La vampire s'accroupit jusqu'à ce que leurs visages soient au même niveau.
— Plus tard, tu joueras aux jeux des grands, Kathie. Mais pas maintenant.

Elle l'embrassa. Capitulant, la fillette tira sur les braies du vieux noble, et partit avec lui. Scrutant la consigne, S'emsyl fronça les sourcils : de toute façon, cela ne changeait rien. L'adepte de la guilde était quand même neutralisée, et tomberait certainement sous les coups des mages-lames de la garde. La fanatique en moins, peut-être ses alliés se laisseraient-ils raisonner...

La vampire sourit. Et de s'avancer tranquillement, lentement, son ombrelle tenue d'une main faussement négligente, vers la fatidique bâtisse.

Modifié par Trias, 15 février 2011 - 14:32.


#241 Arakis

Arakis

Posté 12 février 2011 - 22:52

Réaction bravache à vertus survivalistes


21 Soirétoile 3E431, 14h25



C'est quoi ce bordel ? On pouvait résumer les pensées de Saerileth à ça, depuis une dizaine de minutes, s'enchaînaient des événements des plus farfelues qu'elle avait eu la chance de voir dans sa vie de mercenaire qui était pourtant bien remplie. D'abord entrer dans le Palais Impérial sans avoir prévu le moindre moyen de se procurer une arme là-bas et ce malgré les fouilles. Ce genre de missions ça ne s'improvise jamais, en temps normal il faut des contacts, un repérage des lieux, des graissages de pattes. Donc soit la magicienne était pressé d'entrer, soit c'était la pire des amatrices. Bizarrement elle n'aurait su trancher entre les deux options.

Pour elle ce début d'entrée en matière était déjà du grand n'importe quoi en barre de douze mais quand ils arrivèrent à la fouille elle eu presque envie de se cogner la tête contre le mur pour s'assurer qu'elle ne rêvait pas. Si ses oreilles ne la trahissaient pas (ca lui été déjà arrivé, certains sorts d'illusions ont la vie plus longue qu'on ne le croit) Maelicia était en train de se faire sauter par le garde pour avoir un passe droit. A ce point là elle ne savait plus si la magicienne était dotée d'un intellect étonnamment développé et d'une capacité d'improvisation prodigieuse, ou si tout simplement elle était aussi conne qu'un guar courrant après un morceau de pulponge. Sans doute valait-il mieux ne pas avoir la réponse à cette question ....

Elle soupira longuement quand elle vit la magicienne revenir, soit le garde était du genre précautionneux (peu probable) ou alors Maelicia avait un don caché pour bien remettre ses vêtements en ordre. Ce n'est que quand elle vit la magicienne endormir le scribe d'un ordre qu'elle compris que les choses n'étaient pas forcément aussi simpliste qu'elle le pensait. Réévaluant la situation elle jeta un regard à Drem en essayant de lui faire comprendre de garder un oeil sur la magicienne.

Déjà soulagée de ne pas devoir se séparer de ses armes elle emboîta le pas aux autres qui s'enfonçaient dans le bâtiment. Sans qu'elle sache vraiment pourquoi elle avait l'impression de s'enfoncer à l'intérieur du gosier d'une gigantesque créature. Peut être était-ce les tentures rouges accrochées aux murs, ou alors c'était peut-être simplement elle qui était trop nerveuse. Elle n'aurait su le dire et préféra reléguer cette pensée au fond de son crâne pour se concentrer sur ce qui se passait.

Et dans ce domaine elle était servit, Maelicia venait de se voir offrir une fleur par une gamine, d'ordinaire Saerileth aimait bien les enfants (chose qu'elle n'aimait guère divulguer, dans le métier ça vous ruine une réputation en moins de deux) mais la fillette qui s'éloignait lui fit une drôle d'impression, comme si elle n'était qu'à moitié présente. Elle se détourna de la fillette quand l'argonien prit la parole, curieusement il y avait quelque chose de différent dans sa voix. Comme une onde de miel doux qui se serait glissé dans cette voix grave et mélodieuse. Se sentant en confiance et qu'étant donné la situation il fallait se serrer les coudes elle pesa le pour et le contre avant de se décider à cracher le morceau. En espérant que ça ne vienne pas aux oreilles de la guilde.

« J'ai été recruté par un employeur anonyme, mais j'ai de forte raisons de penser que c'est la guilde des vol … »

C'est ce moment là que l'argonien choisit pour faire quelque chose de stupide, à savoir armer son arbalète. Qu'est-ce qu'il avait en tête ? Ils étaient dans un lieu public, ils étaient deux, si ce n'est trois face à lui (quoique Maelicia en train de se lamenter comme une chiffe molle dans son coin risquait de ne pas servir à grand-chose) et elle venait quasiment de s'ouvrir à lui. Quelque soit la cible qu'il prendrait l'autre aurait largement le temps de fondre sur lui et de le désarmer, voir de lui infliger une blessure critique qui le mettrait hors course si ça ne le tuait pas. Néanmoins ce n'était pas le moment de faire n'importe quoi, l'argonien lui donnait l'impression d'être nerveux, autrement dit un mauvais sursaut et il presserait la gâchette sans y réfléchir.  Elle jurât intérieurement de ne plus porter de bague en laiton graissé, si facile à enlever et discrète au lancer. Elle prit une grande inspiration, et cogita vite fait, elle avait les bras ballants, prêt de ses hanches, ça lui prendrait environ une seconde ou deux pour dégainer un poignard et le lancer, l'argonien était à environ deux mètres cinquante d'elle. C'était jouable mais la situation n'était pas franchement idéale pour verser le sang.

« Ecoutez, Mate-Peste, Hume Les-Bollets, Danse-Mots ou je sais pas quoi, vous allez baisser cette arbalète avant que je m'énerve et ne vous la prenne avant de vous casser la gueule avec, c'est clair ? »

Quelque chose l'empêcha de mettre ses menaces à exécution, Maelicia venait de s'écraser par terre avant de degobiller tripes et boyaux de façon pour le moins répugnante. Chose qui impressionna Saerileth elle se releva et alla fouiller le registre, cherchant elle ne savait quoi. Alors qu'elle épluchait les pages elle semblait changer à vue d'œil, son aspect devenant  de plus en plus inquiétant. Bien qu'elle ne ressentait pas une grande sympathie à l'égare de la brétonne elle ne pouvait que s'inquiéter de l'état qui empirait à vue d'œil. On aurait dit qu'une main géante enserrait Maelicia, écrasant tout, l'enduisant d'une espèce de couche noire. Elle essaya de saisir ce qu'elle disait mais ne comprenait que des bouts de phrase qui même misent bout à bout ne lui évoquait pas grand-chose.

Elle eu vraiment mal pour Maelicia quand celle-ci s'embrasa, qu'est-ce que c'est que ce bordel ? Elle n'avait jamais vu un mage faire ce genre de choses, même les boucliers magiques pyromantiques ne changeait pas à ce point ceux qui les lançaient. Il devait y avoir quelque chose de louche derrière la rose que la gamine lui avait donné. Face à la vague de chaleur qu'engendra la transformation finale elle se plia en deux, protégeant son visage des deux mains. Ce fut seulement en levant les yeux qu'elle vit que ce qui avait été Maelicia avait prit le large en laissant une pile de ce qui restait de ses affaires. Dans un élan de sollicitude elle se pencha pour les ramasser, qui sait si jamais elle revoyait la magicienne comme elle était avant elle lui rendrait, sinon elle verrait le prix qu'elle pourrait en tirer au marché noir.

Elle se retourna vers les autres, Drem ne semblait pas avoir bougé et l'argonien tenait la feuille que Maelicia avait griffonnée dans une main. Elle voulut prendre la parole mais ne sut quoi dire, les circonstances s'étaient tellement bousculées qu'elle était bien incapable de prononcer ne serait-ce qu'un mot. Puis quelque chose lui vint, deux petits mots mais pleins de sens et qui résumait parfaitement le chaos dans ses pensées.

« Allons y »

Modifié par Arakis, 02 avril 2011 - 09:59.


#242 nood

nood

Posté 14 février 2011 - 23:54

  

Le blanc et le feu.

  

  

21 Soirétoile 3E431, 14h10

  

  La démarche assurée de Maelicia. Le regard accusateur de Danse-Mot. L'air faussement calme de Saerileth. Le cliquetis des armures des trois gardes qui leur servaient d'escortes. La majesté de la tour d'or blanc, la tranquillité des jardins intérieurs du palais, peuplés de nobles et de leurs compagnes… l'impression, en entrant dans le bâtiment de la consigne, que la partie s'arrêterait dans les minutes suivantes avec comme gage un aller simple pour les cachots du palais…

  

  

***

  

21 Soirétoile 3E431, 14h15

  

  Il ne verrait plus jamais Maelicia de la même façon. Il n'était pas lui-même illusionniste, mais savait a posteriori quand une illusion avait été lancée. Le piège de Maelicia avait commencé pendant leur courte marche, pour sûr. Quelques poignées de secondes pour tisser un sortilège aussi efficacement, et sur trois cibles, de surcroit... Bien qu'étonné, il avait commencé à avoir de sérieux doutes quand la rouquine feinta une copulation lors de sa "fouille".  Elle qui avait rougi à l'extrême chez Boniface, quelques heures plus tôt, à la simple vue d'un elfe nu… Et cette façon d'endormir le vieux d'une simple apposition de l'index.

  

  Cette damnée Brétonne avait réussi à ensorceler trois gardes et un gratte-papier avec tant d'assurance. A l'avenir, il se souviendrait de rester sur ses gardes, qu'elle pourrait très bien le forcer à commettre des actes contre sa volonté, à divulguer des informations ou autre. Non, vraiment, il ne verrait plus jamais Maelicia de la même façon.

  

  

***

  

21 Soirétoile 3E431, 14h20

  

  La rose, la fillette, la jeune femme et son regard à congeler un brasier, contrairement à son physique, qui lui, aurait pu faire fondre toute la glace de Solstheim tout cela se déroulant bien trop vite. Le temps fut suspendu quelques secondes, Drem restant focalisé sur l'inquiétant contraste entre l'apparence attirante de cette femme  et son regard, sombre, calculateur, profond, sagace, imprégné d'une noblesse glauque, semblant comprendre et disséquer les choses en un instant. Drem ne détourna son regard d'elle qu'à contrecœur, bien il n'aurait su dire que ce fut par admiration pour sa beauté, par un étrange sentiment de faiblesse par rapport à cette inconnue ou encore par pure incompréhension de la scène qui venait de se jouer sous ses yeux.

  

  Ce furent les sanglots d'une Maelicia brisée et courbée qui le tirèrent de sa rêverie silencieuse. L'Argonien, non sans avoir drogué le fonctionnaire, prit la parole, avec un empressement rare.

  

  - Je fais partie des Ombres, Je suis là pour chaperonner Maelicia dans les situations... insolites ou difficiles…

  

  Toutes les bizarreries de comportements et les changements de patronymes s'emboitèrent dans la mémoire de Drem. Tout lui semblait d'une logique implacable. La rouquine chargée de récupérer son Pot-aux-Roses, l'Argonien lui emboitant le pas avec ses dons pour le transformisme, et les Daedras savent quoi encore.

  

  - … Or nous sommes précisément dans une situation extrêmement dangereuse. Une vampire d'une puissance effrayante vient de nous reprendre dans sa nasse. …

  

  Le cœur de l'elfe fit un bond sous son armure. Et par réflexe, il dégaina sa lame et se retourna pour revoir la vampire en question au travers de la fenêtre. Il craignait les vampires qu'il n'avait jamais combattu ; il n'en connaissait que ce que les voyageurs et les érudits en racontaient, et les informations contradictoires ou fragmentaires qu'il peinait maintenant à se remémorer semblaient plus relever de la légende et du fantasme que de la certitude. Par-dessus tout, une caractéristique supposée des vampires était leur intolérance à la lumière de l'astre de Magnus, pour tant la femme se tenait debout en pleine lumière. Pour que Maelicia, qu'il pensait beaucoup plus puissante que prévu, en soit réduite à se recroqueviller dans un coin sombre comme une gamine apeurée, la dame blanche devait effectivement être d'un niveau de puissance bien supérieur au sien, ou mêmes supérieur à tous leurs talents cumulés.

  

  - … Il va donc falloir nous dire maintenant pourquoi vous nous colliez réellement aux basques hier soir.

  

  Danse-Mot sembla prononcer sa tirade comme un acte désespéré de souder leur fragile équipe par un peu de bonne foi. Il était déjà occupé à se confectionner un petit pieu que Saerileth réagit :

  

  - J'ai été recruté par un employeur anonyme, mais j'ai de forte raisons de penser que c'est la guilde des vol … Ecoutez, Mate-Peste, Hume Les-Bolets, Danse-Mots ou je sais pas quoi, vous allez baisser cette arbalète avant que je m'énerve et ne vous la prenne avant de vous casser la gueule avec, c'est clair ?

  

  Drem sentit que le moment était opportun pour un petit discours rassembleur.

  

  - Restons calme. Restons efficace. Ecoute, l'Argonien, et toi aussi, l'Aigle. Je n'ai rien à rajouter sur mes motivations. Cela fait vingt putains de longues années que je fais le petit chien-chien des Impériaux et je me suis embarqué avec vous parce que j'ai besoin de changement et que je ne supporte plus d'être à la botte de ces enfoirés de Cyrodiléens - ne le prends pas pour toi, Saerileth, tu redores le blason de ceux de ta race. Hier soir, je vous filais parce qu'on m'avait ordonné de le faire. Le Bureau Impérial des Investigations Magiques, c'est eux qui m'envoient. Valens en personne m'a mis sur le coup. C'était ma première mission et j'en sais pas plus, mais c'est sûr qu'ils s'attendaient à ce que je vous tombe dessus dans le quartier des lépreux. Ils devaient pas s'attendre à ce que je leur fasse à l'envers, c'est certain, mais j'ai pas d'autres raisons à vous donner que celles-ci. Sincèrement, je me rends bien compte que je me suis foutu dans des emmerdes plus grosses que je ne le pensais, mais ma survie dépendant de la votre, j'ai plutôt envie qu'on se sorte de là. Maintenant, j'apprécierai qu'on ne meure pas tous comme des couillons en plein milieu du palais, que vous soyez de l'Ombre, de la Confrérie ou que sais-je. C'est pour ça qu'il va falloir la jouer collectif, si on veut avoir une chance de voir le soleil se lever demain mat…

  

  Maelicia fit irruption en se vidant d'une bonne livre de sucs gastriques sur le parterre de bois de la pièce. Tout s'enchaina rapidement. Les trois compères ne purent qu'assister, médusés, à la lente agonie de Maelicia qui se défaisait de ses humeurs un peu plus à chaque instant. Elle griffonna quelques mots tirés du grimoire de la consigne sur un morceau de papier, mentionnant difficilement sa "mission" et le "sceptre de Sh'éam" entre deux hoquets, puis remit péniblement une liste de noms à Danse-Mot, lui avouant une certaine forme d'amitié et de reconnaissance. Drem la voyait se transformer à chaque instant, uns insistante fragrance de sel de feu se répandant dans la pièce à mesure que la température grimpait. Elle finit par s'embraser, produisant une vive chaleur et des flammèches qui ramenèrent en souvenirs le Dunmer trente ans plus tôt, dans la petite pièce carrée en sous-sol où lui et ses comparses invoquaient des Daedras mineurs. Les odeurs et les sensations tous droit issues de l'Oblivion ne le trompaient pas : la jeune Brétonne abandonnait sa forme humaine et se métamorphosait en Atronach de feu, ou tout du moins un être étroitement apparenté.

  

  L'elfe eut un mouvement de recul quand Maelicia (il fallait bien l'appeler comme ça, pensa-t-il), passa près d'eux, traversa une fenêtre, et s'en fut à travers les jardins du palais. Elle ne lassait derrière elle que quelques babioles et de larges traces calcinés. Quelques longues secondes d'incrédulité passèrent alors que les questions se bousculaient dans la tête de Drem. Pour adopter l'apparence et les caractéristiques d'un résident de l'Oblivion, fut-ce voulu ou non, elle devait posséder une grande maîtrise de l'école de l'Enchantement pour s'imprégner des rythmes et des structures d'une telle créature, ainsi qu'un potentiel magique conséquent, en plus de dons innés dans la manipulation de l'éther brut, ou, tout du moins, une grande résistance à l'énergie magique. Il serait peut être judicieux d'interroger l'Argonien à ce sujet, plus tard…

  

  

***

  

21 Soirétoile 3E431, 14h25

  

  

  - Allons-y, finit par lâcher posément Saerileth, qui venait de ramasser le reste des effets de Maelicia.

  

  Drem ne put qu'acquiescer à cette injonction. Un rapide coup d'oeil, au travers des restes calcinés de la fenêtre, lui montra que tous les regards, gardes compris, convergeaient pour l'instant vers la silhouette embrasée qui s'éloignait dans les allées : cela leur offrait une occasion de se faufiler dans une garde désorganisée avec des chances peut-être acceptables de ne pas se faire prendre bêtement. Inspectant rapidement l'intérieur de la bâtisse dans l'espoir de dénicher une échappatoire moins risquée, il aperçut au travers de la fenêtre, la teinte blanchâtre de la vampire qui avançait d'un pas doux mais décidé droit sur eux. L'hésitation n'était plus permise ; rengainant son épée, il s'adressa fermement à Danse-Mot :

  
  - Il est largement temps de fuir ; que ce soit la vampire ou la garde, mieux vaut ne pas trainer. Puis, semblant soupeser les différentes options du regard, il ajouta : reste à savoir si tu penses qu'il est préférable que l'on s'oppose à quelques hommes en arme ou à cette... femme.

Modifié par nood, 03 avril 2011 - 11:20.


#243 Ygonaar

Ygonaar

Posté 20 février 2011 - 18:40

Des affres de la suspicion



21 Soirétoile 3E425, 14h25


Sa stratégie semblait payante. Drem et Saerileth s'étaient imperceptiblement rapprochés de lui lorsqu'il avait impressionné des sentiments d'honnêteté et de fraternité. Ils avaient subtilement redressés leur buste, le regard direct et brillant, les mains s'écartant de quelques millimètres afin de lui présenter leurs paumes ouvertes. L'aiglonne commença même à expliquer les raisons de leur rencontre, la veille :  
J'ai été recrutée par un employeur anonyme, mais j'ai de forte raisons de penser que c'est la guilde des vol …

Ils n'étaient pas hostiles, ils cherchaient sincèrement à collaborer, du moins, pour l'instant. S'ils n'étaient que des pions dans un vaste piège, ils n'en étaient pas conscients et l'on pouvait compter sur leur bonne volonté. Leurs réactions spontanées à ses influences, leurs comportements corporels si caractéristiques, pour autant qu'il en savait, chez les Peaux-Molles, tout le monde aurait été convaincu de leur sincérité.

Tout le monde sauf Main-d'Ombre. Ne pourraient-ils pas être d'habiles comédiens ayant anticipés sa manœuvre ? Ne pourraient-ils pas avoir des barrières mentales entrainant des réactions aussi factices que programmées ? Non, décidément, Main-d'Ombre ne pouvait se permettre d'accorder une once de confiance aussi facilement. Il avait décidé de balloter leurs psychés d'un sentiment contradictoire à l'autre afin de percer leurs défenses et se tint à son plan initial. Le résultat n'en fut pas forcément des plus heureux.  

Le Dunmer sembla terrorisé lorsque les Ténèbres liées à sa description lui imposèrent avec brutalité la terrible nature de S'emsyl et le danger létal qu'elle représentait. Il ne semblait plus pouvoir détacher son regard de la fenêtre. La peur le paralysera-t-elle au moment le plus crucial ? En revanche, la mercenaire y semblait complètement insensible, comme si elle ne l'avait pas écouté. Connaissait-elle déjà le monstre ? Résistait-elle à tous sentiments de peur ? Non, visiblement, car elle réagit immédiatement lorsqu'il impressionna à leur subconscient que lui-même pouvait être mortellement dangereux.  

Ecoutez, Mate-Peste, Hume Les-Bolets, Danse-Mots ou je sais pas quoi, vous allez baisser cette arbalète avant que je m'énerve et ne vous la prenne avant de vous casser la gueule avec, c'est clair ?

Ses muscles étaient tendus, prés à agir. Elle avait, consciemment ou non, fait deux pas vers lui. L'Argonien avait pratiqué le xyston, dans son enfance, et avait donc spontanément une notion de distance de sécurité assez lointaine, distance que l'impériale s'apprêtait à franchir. Plus un geste, plus un pas, Aiglonne ! Pensa intensément le saurien. Trop tard, il fallait réagir avant que l'arbalète ne soit armée. Il ne pouvait se permettre de s'exposer, surtout dans leur situation actuelle. Un frémissement de trop et la tête de l'humaine se transformerait en pastèque éclatée, quitte à voir par la suite comment gérer l'elfe noir. La tension était palpable. La jeune femme se figea... Et fidèle à son habitude, le Dunmer essaya d'aplanir les choses par un laïus nerveux.  


Une méthode efficace, il devait l'avouer. Bien qu'ils se regardassent toujours un certain temps en chien de faïence, le discours de l'elfe donnait à la jeune femme le temps d'évacuer l'oppression provoquée par les illusions du lézard et à ce dernier celui de réfléchir. Sa comparse semblait réagir d'un bloc, tant aux sollicitations positives que négatives mais avoir une résistance peu commune aux manipulations à long terme, si on en croyait son indifférence à la menace moins immédiate que représentait la vampire. Un caractère entier, un mauvais pion, donc. Se pourrait-elle n'être qu'un agent de la Guilde des Voleurs ? Main-d'Ombre concevait tout à fait que cette dernière soit curieuse des méthodes de Charbon-Agile, ce novice surgit d'on ne sait où et qui avait dénoué un écheveau où d'illustres confrères avaient du se casser les dents. Avait-elle tissé sa propre toile pour le surveiller à son insu dans cette opération tant délicate que lucrative ? L'hypothèse était des plus plausibles. Il avait lui même activé ses contacts dans le Quartier du Temple, leurs agents n'auraient eut guère de mal à remonter sa piste. Presque une collègue, en somme. Et il venait de lui révéler qu'il était un illusionniste compétent ! Non pas que la chose soit mal vue parmi les Ombres, mais il aimait garder ses atouts dans sa manche. Et ne risquait-on pas de le confronter à d'autre envoûteurs, voir de lui demander de faire de l'enseignement ? Ne risquait-on pas de deviner son affinité avec les Ténèbres ? Et il ne fallait pas complètement rejeter l'hypothèse que Saerileth soit bel et bien à la botte des Sh'éamites. Pourquoi aurait-elle spontanément abattu le mort-vivant, tantôt, si ce n'est qu'elle craignait qu'il ne brise sa couverture. Pourquoi... Décidément, Main-d'Ombre avait beaucoup de mal à accorder sa confiance.

Ce qui ne l'empêcha pas de juger probable le baratin du légionnaire. D'une part car les éléments s'emboitaient bien, que l'elfe semblait avoir pleinement réagit à ses sollicitations psychiques, mais aussi parce qu'il alimentait sa paranoïa. Il y avait bien un groupe de personnes puissantes qui enquêtaient sur sa petite personne. Il était seul lorsqu'il avait découvert la cachette de Causant dans la maladrerie. Il n'en avait parlé strictement à personne avant que Maelicia ne se retrouve devant l'entrée. Comment ce Valens, qui avait l'air si important, aurait-il put anticiper leurs présences la-bas, s'il n'avait pas déjà été filé ? Bureau Impérial des Investigations Magiques... Encore un ordre secret de mage au service de l'Empereur ? L'estomac du reptile se contracta en une masse douloureuse. Mais pour l'heure, il avait un urgent besoin d'alliés et il ne pouvait pas cracher sur ceux-là.  


ж ж ж


Consomption de la flambe



Un choc sourd. Maelicia, qui venait d'émerger de sa cachette, s'affala sur ses genoux et vida son estomac. Bien que son olfaction ne soit plus enforcie par la Sève, il n'avait nul mal à sentir le remugle des sucs gastriques, du caillé du lait qu'elle avait bu ce matin, de la noix digérée, et cette curieuse odeur de gras... L'analyse du professionnel vint dans la foulée. Vomissements, vertiges, sudation, pâleur, spasme, mydriase. Un empoisonnement. Probablement un cocktail neurotoxique et nécrosant à très court temps de latence. L'Argonien vint soutenir la jeune qui chancelait vers le bureau du tabellion. La fièvre était perceptible. Il essaya au passage d'examiner sa bouche afin d'estimer la cyanose.

— Pas... le temps... Danse-mot, le repoussa-t-elle d'un murmure.
— Ne vous inquiétez pas. Nous vous trouverons un médecin, vous redeviendrez bientôt rayonnante ! prophétisa-t-il.

Il n'en croyait pas un mot, bien sûr. Il venait de remarquer la profonde entaille sur la main de la sorcière, la chair tuméfiée autour, l'impressionnante vasodilatation du membre, et toujours cette fugace odeur de gras. L'entaille, l'odeur, la goutte de sang, la rose.... Le support du poison lui apparaissait évident, et pourtant... Et pourtant il s'était assuré de l'innocuité de la rose. Elle n'exhalait nulle odeur de toxique, c'était impossible. C'était... de la magie! Si on ajoutait que cela devait être une mixture rarissime, surtout pour mériter un vénéfice, qu'il était dans le sang et non dans l'estomac, qu'il était maintenant bien trop tard pour envisager un garrot. Non, plus grand monde ne pourrait la sauver. Excepté sa mère et ses sœurs, sûrement. Elles lui avaient rabâché moult fois que conférer temporairement le pouvoir de détoxication des Enfants des Hists à un mammifère était assez simple, grâce à la Sève. Mais jamais il n'avait réussit à inférer sur le corps d'autrui, même pour les choses les plus simple. Et il n'avait plus assez d'influx pour seulement identifier correctement les composants du poison. Il aurait fallut qu'elle se téléporte dans sa guilde, tant qu'elle en avait encore la force, quitte à se placer sous le joug de la Wyvern. Mais peut-être que la translocation était impossible dans le palais ?

Toujours est-il que la jeune femme s'acharnait à parcourir fébrilement le registre. Préférait-elle se sacrifier pour sa mission ? C'était bien possible, car elle dédaigna une incitation au silence afin d'économiser son souffle pour tenter de leur en expliquer sommairement les tenants, bien qu'elle ahanait déjà des plus misérablement. Main-d'Ombre pouvait respecter cela.

La fièvre montait en flèche. Le saurien essayait tant bien que mal d'éponger l'impressionnante sudation de la jeune femme, et de l'empêcher de choir du pupitre. Celle-ci ne se focalisait plus que sur les pages froissées du registre, réussissant à dédaigner l'horrible douleur que devaient provoquer les infâmes contorsions de ses doigts. Adieu insupportable pecque, songeait-il. Aussi curieux que cela puisse être, tu me manqueras. Que la mort ai la décence d'attendre que tu finisses ta tâche. Avait-il été écouté ? Il n'en avait cure car il méprisait Dieux comme Deadras. Mais force était de constater que S'emsyl se promenait encore lentement dans la cours, avec ses affidés. Et que Typhaine finit par lui tendre le résultat de ses recherches.    

— C'est... *tousse* dommage... Danse-mot... j'aurais... voulu... mieux vous... connaître, avoua-t-elle dans un râle abominablement rauque en se cramponnant à sa main.

Mais je n'ai moi envie que de dire au revoir
Car tant qu'il y a d'la vie, il reste de l'espoir
Mais si Arkay sourit, n'ayez pas peur du noir
Car tels des Pierres-Esprit, nous serons votre Vouloir


Chantonna Danse-Mot de sa voix la plus douce, en exhibant largement les crocs bien entendu. Il n'eut pas l'occasion de poursuivre plus avant son homélie pré-funèbre, la Brétonne s'écroula au sol dans un dernier spasme déchirant.

Elle s'asphyxiait. Les Ténèbres parcouraient déjà son épiderme mais son agonie pouvait encore être atroce. Main-d'Ombre était en général hermétique aux souffrances d'autrui, surtout des Peaux-Molles. Il réussissait avec un talent consommé à se détacher de toutes traces d'empathie. Mais il voulait au moins offrir une mort douce à celle qui lui avait rendu la vie si complexe mais au combien passionnante depuis deux mois. Il s'empara d'une petite flasque dans sa gibecière, s'agenouilla et lui saisi la tête.


ж ж ж


Et départ d'un brasier


21 Soirétoile 3E425, 14h30


Ce fut la chaleur qui lui remontait dans le bras qui le fit réagir en premier. Les Argoniens n'ont pas de système réellement efficace pour se protéger des très fortes chaleurs. S'ils n'arrivaient pas à réguler leur température interne correctement, en s'immergeant par exemple, ils risquaient le coma dès que leur cerveau atteignaient les quarante-cinq degrés. Toujours sous l'effet de sa Potion d'Hivers, Main-d'Ombre commençait à bien accumuler la fièvre de Maelicia, mais l'hyperthermie dont elle souffrait maintenant n'avait plus rien de naturel. Ce fut un réflexe, suspendant son geste miséricordieux, il bondit en arrière.

Contre toute attente, elle releva son visage cachectique. La bile, le sang et autre expectorations qui le souillaient commençaient à frémir. Elle ouvrit des yeux illuminés de cette verte lueur qui se dégageait parfois des plus puissants envoûtements. Les Ténèbres se faisaient plus abondantes. La chose n'était plus vraiment vivante mais labourait néanmoins le plancher de ses serres. Des griffes? S'emsyl qui flanochait... Une Écorchée !


Le lézard se rua sur l'arbalète qu'il avait posé un peu plus loin, afin d'éviter qu'une convulsion malheureuse ne la déclenche inopportunément. D'une rapidité attestant toute la chaleur qu'il avait accumulé, il pointa son arme vers la tête de l'ex-Brétonne. Mais au lieu de se fendre de toute part, sa peau se mit à luire. Au lieu que sa boite crânienne n'éclate pour libérer un monstrueux encéphale pulsatif, des cheveux se mirent à flotter dans l'air. Au lieu de pousser un hurlement contenant toute la douleur du monde, et déclenchant à coup sûr l'attaque de la Stryge, la Chose toussota. Et la chaleur devenait étouffante. Et l'acre odeur des sels de feu le prenait à la gorge. Elle avait encore l'air d'un jeune fille stupéfaite lorsqu'elle s'embrasa.

L'alchimiste cru une seconde qu'elle avait finalement été victime d'une potion de combustion interne, mais la Chose ne se calcinait pas, contrairement à sa robe. Elle ne semblait même plus souffrir, si tant est que l'on pouvait extrapoler les expressions faciales des humains à cette créature, qui ressemblait encore étrangement à la sorcière. Elle ne concentrait pas les Ténèbres comme un non-mort mais ne les repoussait pas non plus. La première créature daedrique qu'il voyait, une astronach de feu.


Alors que le saurien, stupéfait, reculait devant le front de chaleur, le cuir de la féminine ceinture de l'Élémentaire fini par rendre l'âme. Cette dernière ne portait plus qu'une clé portée au rouge pendue à un collier. Elle l'arracha en poussant un juron étonnamment humain et la lança dans sa direction. La deuxième clé du coffre. Il l'attrapa en plein vol, serrant les mâchoires pour ne pas hurler alors que le métal brûlant lui cuisait la paume, l'empyreume de kératine attestant à elle seule de la sévérité de la brûlure. Mais il ne fallait pas que la clé puisse être oubliée ou contestée. Mais il devait maintenant faire montre d'une détermination ostentatoire pour fédérer ses deux comparses. Et pouvoir se focaliser sur la douleur pourrait devenir salutaire si la vampire essayait de percer son esprit. En revanche, il risquait d'en baver de longues heures avant de pouvoir guérir son derme avec la Sève.

Le plancher noircissait de manière inquiétante. Si les vénérables planches de chêne présentaient une résistance des plus honorables à l'embrasement, le bâtiment entier se transformerait vite en torchère lorsqu'elles atteindraient leur point de combustion. L'être ignée se déplaça et... masqua sa « nudité » de ses bras. Main-d'Ombre était sidéré de la pudibonderie de cette réaction. Associée au paiement de sa dette et à son juron des plus bégueules, cela indiquerait-il que cette chose était toujours Maelicia ? Était-ce un truc de sorcière pour survivre à l'empoisonnement ?  Avait-elle sciemment choisie cette forme pour se débarrasser de la Disciple ? Il le cru instant lorsqu'elle sauta par la fenêtre liquéfiant au passage les éclats de verre qui retombèrent comme des bout de pâte molle. Elle accéléra de manière stupéfiante, mais pas vers la vampire.


Cette dernière s'approchait maintenant d'un pas posé vers la porte, seule. La garde semblait elle se focaliser sur l'apparition ignée. Pour l'instant, songea le lézard, mais cela ne durera pas. Il se renfonça donc vers le centre de la consigne. Saerileth ramassait la ceinture de Maelicia. Réflexe de mercenaire, probablement. Il ignorait ce que la besace pouvait bien contenir mais il ne voyait pas d'objection à ce que l'Impériale s'empare de cette prise de guerre. En revanche, il posa sa main sur les gantelets de Sul-Narsil.

Ces paumelles sont dangereuses, Saerileth, vous devriez me les confier.


Allons-y, lui répondit-elle laconiquement.
— Il est largement temps de fuir ; abonda Serethi, que ce soit la vampire ou la garde, mieux vaut ne pas trainer. Reste à savoir si tu penses qu'il est préférable que l'on s'oppose à quelques hommes en arme ou à cette... femme.
— Je ne connais point votre magie, Drem, mais il me semble que sortir dans la cours avec tout ce monde qui rapplique nous mènera au mieux dans les geôles, sinon au suicide. Armez votre arbalète, Mademoiselle. La stryge ne vous laissera pas le loisir de gâcher le moindre instant si elle en venait à attaquer. Mais ce terrain doit lui être au moins aussi défavorable qu'à nous, j'imagine qu'elle trame quelque chose de plus subtil. Protégez vos esprits autant que ce peut et... Prenez garde à sa séduction, Serethi.

Modifié par Ygonaar, 21 février 2011 - 01:09.


#244 Trias

Trias

Posté 21 février 2011 - 21:42

Newborn

21 Soirétoile 3E425, 14h25




Un souffle de nalpam, tel l'incendie filant sur l'huile, un son dont la seule perception éveille instinctivement la peur chez l'animal. L'appétit dévorant des flammes, léchant déjà la chair de leur baiser brûlant.

« Attention !! » avertit une voix d'un autre monde, curieusement féminine.

Gratius n'eut que le temps de s'orienter vers la source sonore qu'un choc violent le propulsait contre la bâtisse attenante. La chaleur insoutenable d'un four dont il serait l'objet de cuisson s'empara de lui. Recouvrant ses esprits, le garde écarquilla des yeux dont les cils se racornissaient en crépitant : une créature toute entière incandescente se rétablissait à ses pieds. Sa chevelure dansait vers le ciel, comparable à des flammes qui joueraient dans l'âtre.

— Pouviez pas regarder avant d'traverser, hein ? l'apostropha-t'elle, d'une voix où résonnèrent des harmoniques daedriques.

Gratius en resta bouche bée : de la température phénoménale, ou de la silhouette étrangement attirante de la créature, il n'aurait su dire ce qui le sidérait le plus. D'ailleurs il n'eut pas à le préciser, tant son regard parla pour lui.

La bouillante daedra décampa prestement, interrompant avant son terme l'étude d'anatomie comparée ainsi entreprise. Suivie sans tarder par une armada de gardes, dont certains des collègues de l'infortuné.

— Eh alors Gratius, tu t'fais allumer ? ironisa l'un d'entre eux, alors que l'intéressé tentait convulsivement d'ôter son plastron chauffé au rouge.  


ж ж ж



Maelicia ne tarda pas à distancer ses poursuivants : une vigueur surnaturelle semblait couler dans ses veines, embrasant son corps tout entier. Ses frêles membres de magicienne, étaient devenus légers et agiles ; lui permettant de courir avec aussi peu d'efforts que si elle était le vent lui-même. Sa force avait cru considérablement ; et ce qui n'aurait jadis été qu'un simple coupe-souffle venait à l'instant de jeter à terre un soldat cyrodiil, tout lourdement équipé qu'il soit.

Elle éprouvait avec une acuité croissante des sensations nouvelles et étranges, issues d'un autre monde. De multiples présences l'appelaient, en de silencieux et invisibles murmures, sans qu'elle puisse en déterminer précisément l'origine.

Ses réflexes, s'aiguisant au fur et à mesure, lui permirent cette fois d'esquiver un être tiède aux allures nobiliaires, puis de rouler sous la silhouette inerte de son carrosse et de rebondir avant même que l'aristocrate ne se rende compte que sa moumoute avait pris feu. La sensation de vitesse aurait presque été grisante si elle n'était dictée par un trop vital impératif : un bataillon animal, bruissant  et coassant, d'être semi-chauds à ses trousses.

Car en dépit de l'ahurissante célérité de l'élémentaire, ladite cohorte allait sans cesse croissant. Une fugitive trainée de fumée grise suivait en effet son passage, quand il ne s'agissait pas carrément d'un départ de feu dans quelque plan de verdure. La chaleur vitale  de l'atronach nouvellement née semblait d'ailleurs croître parallèlement à l'acquisition de ses capacités. Si les timides flammèches de la consigne relevaient du simple feu de cheminée, le brasier de sa seule chevelure évoquait désormais davantage le foyer d'une forge qu'autre chose.

L'élémentaire perçut brusquement comme un coup de poing dans son creux poplité, et roula sur quelques mètres, déséquilibrée. Se raccrochant au premier appui venu, un furtif coup d'œil lui apprit la nature de la perturbation : un carreau d'arbalète, déjà ramolli par sa force vitale. L'étudiante se souvint qu'à l'instar de bien des daedra, les atronachs étaient immunisés contre les armes normales. Un terrifiant cri de douleur la fit sursauter, et elle s'aperçut que le secourable appui des secondes précédentes n'était nulle autre que l'épaule d'un être tiède, fumante désormais, appelant les flammes de ses voeux. Le malheureux fut réduit au silence par la surnaturelle pression d'un coude daedrique dans son estomac, et s'effondra, inanimé.

Cependant, des représentants de l'ordre mammifère, il en arrivait de partout. Leur pâle foyer thermique central palpitait dans leur torse, traduisant l'excitation panique les animant. Écartant des civils apeurés, sabre au clair, leur simple nombre constituerait bientôt une impasse pour l'élémentaire. Un changement de stratégie semblait urgemment requis.

Typhaine leva aux cieux son lumineux regard : pourquoi ce genre de chose n'arrivait-il qu'à elle ? Sa seule silhouette provoquait le chaos. Même sa pensée commençait à s'altérer, percevant désormais comme des attiédis inachevés, comme des formes de vie imparfaites, ceux qui avaient jadis été ses pairs. Qu'avait-elle donc fait aux dieux pour que le ciel lui en veuille ainsi ? Le ciel...

Se ramassant sur elle même, l'élémentaire immature bondit soudainement, gagnant d'une détente le toit du pavillon le plus proche. Une fois au sommet, elle se hâta de décamper jusqu'au toit suivant, toutefois non sans avoir au préalable signifié sa victoire par un geste obscène à l'attention de du parterre d'homéothermes.


ж ж ж



La procédure fonctionna comme prévu, et la grouillante police de l'empereur ne fut bientôt qu'un lointain souvenir. L'élémentaire nouvellement née interrompit sa course, satisfaite. A présent encore lui fallait-il savoir où elle était et comment... Maelicia n'eut pas le temps d'achever sa réflexion qu'une douleur mordante, insoutenable, envahit son bras droit. Là, sous un bâti attenant, des attiédis cagoulés : des magelames !

Un warp caractéristique eut lieu derrière elle, lui laissant à peine le temps de rouler sur le côté qu'un souffle hostile, assassin,  la dépassait latéralement. Le néant hostile alla s'écraser sur l'une des parois immaculées du palais, la congelant de son mortel appétit. Un sortilège de glace. Par réflexe, l'étudiante tenta de se téléporter, mais rien ne se produisit. Ce qui la ramena immanquablement à sa case départ : la fuite.

Sauf que cette fois, la néo-atronach avait affaire à forte partie : qu'importe où elle bondisse, quelles que soient les feintes qu'elles multiplie et malgré sa vitesse, les crocs surnaturels de l'Hostile la prenaient toujours pour cible. Son bras droit semblait presque éteint, et tardait douloureusement à reprendre sa combustion. Maelicia avait l'impression d'être une biche, proie réduite à sa plus simple expression, fuyant éperdument devant un prédateur supérieur.

Se rétablissant après un saut particulièrement ample, elle sentit un nouveau warp à son côté, immédiatement suivi de la réapparition de l'ennemi hivernal. L'Hostile, le néant, celui qui voulait figer l'univers de sa glaciale immobilité. Instinctivement, elle, voulut renverser le mage homéotherme de sa télékinésie ; toutefois ce furent ses flammes qui répondirent, jaillissant d'elle même, luttant de leur vie contre le principe malfaisant, qui disparut. Elles partagèrent même leur élan vital avec la tunique bleutée de l'attiédi, malgré l'armure qui la protégeait.

— Bien fait pour toi, bidochon tiède ! jubila-t'elle alors que son attaquant roulait sur lui même, afin de se prémunir des brûlures. L'arrivée de nouveaux chasseurs la contraignit à fuir de nouveau.

En contrebas, deux mages de la garde prétorienne se déplaçaient avec une célérité probablement liée à un enchantement de groupe. Là où d'autres se contentaient de se téléporter (ce qui n'était possible qu'en dedans ou en dehors de l'enceinte, mais pas à travers), l'instructeur mage préférait garder une approche conservatrice de la traque. Il entretenait d'ailleurs un magelame plus jeune, qui tentait de maintenir le rythme à ses côtés.

— ... de feu. Pas un très beau spécimen d'ailleurs, typiquement * saute par dessus un obstacle* ils sont beaucoup plus grands et revêtus de roche volcanique. Celui-ci doit être un nouveau-né...
— Je ne savais pas... qu'ils parlaient, confessa Armand, nouvelle recrue du détachement, en manquant de se viander sur la réception.
— Ils parlent la langue Faă et le langage commun, répondit son instructeur, sans perdre de vue la fugitive. N'oublie pas qu'ils sont censés être intelligents. Quoique d'habitude, les insultes soient en Faă...
— Comment est-ce que cette créature a pu arriver là, maître Rodolphe ?
— Un invocateur à la con, à tous les coups... En tout cas qui que soit le dingue qui l'ait invoquée, il faut la renvoyer dans son plan avant qu'elle ne fasse trop de dégats. Même nouveux-nés, ces saloperies là sont suffisament vivaces pour te fouttre un incendie en moins de deux. L'instructeur eut un sourire cruel. Et contre une bête vivace dans ce genre,  rien de tel qu'un bon sort de zone de l'élément opposé, crois-moi...


ж ж ж



L'ignée ne vit arriver l'onde que trop tard : un véritable écran de gel, qui s'élargissait en arc de cercle gagnait sur elle. L'esquive était tout bonnement impossible. Percutée en plein saut, elle sentit son être entier frigorifié par l'Hostile, qui mordit sauvagement dans sa force vitale, et tomba. Heurtant une dalle, son feu interieur reprit presque instantanément, alors qu'elle reprenait ses esprits.  

Une dizaine, peut-être plus, d'attiédis cagoulés et couverts de mailles l'encerclait désormais.  

— Les carottes sont cuites ont dirait, murmura l'instructeur, sans même se rendre compte de l'absurde pertinence de ses propos.

Un nouvel arc de néant, hiver plus petit, mais plus concentré que le précédent la mordit dans le dos. C'était comme si sa chair se pétrifiait soudain, pour ne plus former qu'un bloc de douleur. L'élémentaire hurla alors que son épaule prenait une teinte rouge sombre, presque bordeaux. Un autre trait l'atteignit à la jambe, puis à l'abdomen et enfin à la joue, qui refroidirent pareillement. L'atronach, à genoux, gémissait, soutenant de ses mains incandescentes le rouge sombre de ses blessures. Des larmes de feu, pleurs daedriques s'écoulaient sur son visage. Même sa coiffe, qui dansait il y a quelques instants vers le ciel, paraissait choir, émettant une fumée sombre, presque comme la chevelure d'une attiédie.

— J'ai l'impression... de tuer une femme, confessa Armand à son supérieur. Ne pourrait-t'on pas... juste attendre que l'invocation finisse ?
Le lieutenant-mage Rodolphe eut un regard blasé.
— Tu dois t'endurcir, Armand, magelame de la garde prétorienne... Pour rappel, les daedra renaissent quand on les tue. Alors, achevons la rapidement, cette bête sera plus heureuse chez elle...

Et cinq des mages d'incanter de concert, unissant leurs forces en un ultime outil de mort. Tremblotant, grelottant, Maelicia sanglota de plus belle. Après tous ses efforts, c'était trop injuste. Nul manteau pour se protéger des regards. Nul abri pour se protéger de l'Hostile. Nul refuge pour se soustraire à la mise à mort. La disciple de Sh'éam avait gagné. Laissant choir ses bras aux sol, ses ongles griffus érodèrent discrètement les interstices cimentés.

Un blizzard polaire, chargé de glaces éternelles se concentrait à présent devant elle, gage mortel dans sa condition. Tout autour n'était que froideur et hostilité. L'orbe de néant lui faisait face, accusant son avidité dévorante à figer, à glacer toute vie sur son passage. Les autres mages tièdes dans son dos, lui coupant la retraite. Des imparfaits, nobles et valets, badauds, tous ridiculement thermorégulés, scrutant de loin les évènements.

De multiples et infimes présences derrière eux, susurrant, palpitant, chuchotant d'inaudibles messages d'espoir et de vie aux oreilles de l'élémentaire. Maelicia haussa un incandescent sourcil. C'était culotté... mais ça pouvait marcher. Elle planta ses griffes dans le sol, passant jusque sous une dalle à ses genoux, dont les dimensions étaient particulièrement imposantes.

Les arcanistes, repérant son changement d'attitude, déclenchèrent le sortilège : une sphère de pure froidure jaillit, et fila droit sur sa proie. L'élémentaire sentait l'Hostile, sa volonté de s'insinuer en elle, de la figer, de mettre définitivement fin à sa chaleur. Dans un dernier sursaut de vigueur, elle s'arque-bouta et souleva la dalle, s'en constituant de fait un écran. La sphère explosa contre la pierre avec violence, congelant  la roche presque instantanément, mais la propulsant également tout droit vers l'entrée de l'entrepôt voisin. L'atronach, qui s'était recroquevillée derrière, fut emportée, et se sentit presque broyée par l'impact, mais ce furent les portes qui cédèrent en premier. Le projectile vivant s'encastra dans des sacs de riz, laissant une Maelicia sonnée flamboyer sous les décombres.

— Fi...ente... mais quel plan... à la con... conclut l'étudiante, toujours affalée, alors que les grains de riz crépitaient tout autour de sa tête, fêtant la flamme de leurs vies éphémères.

Un liquide visqueux, sans doute issu d'amphores brisées par l'impact vint lui chatouiller les orteils. L'huile prit instantanément feu,  incendiant l'intégralité de ce qui constituait le troisième entrepôt de l'intendance impériale. L'élémentaire se sentit revivre, soudainement dopée par de joueuses flammèches, qui virent la caresser affectueusement. Circulant dans le brasier comme un poisson dans l'eau, elle chercha et trouva la trappe dont elle subodorait la présence. D'amicales torches devaient flamboyer, loin dans le souterrain ici dissimulé, appelant la daedra à contempler le spectacle de leur combustion..

L'élémentaire s'y engouffra, et l'incendie complice effondra presque aussitôt la charpente sur ses pas.




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Entretien avec un vampire

21 Soirétoile 3E425, 14h30




La robe immaculée, richement ornée, froufroutant et bruissant dans le vent. L'ombrelle négligemment tenue, alors que la magnifique S'emsyl s'avançait, avec une langueur étudiée, lentement mais sûrement, vers la fatidique consigne. Vers de fébriles aventuriers.

D'un seul regard, elle subjugua trois des gardes encore présents. Incapables de détacher leurs yeux de l'égérie, les inconstants mâles, hypnotisés, lui emboitèrent le pas à l'unisson. Étant donnée la situation, leur concours pouvait être utile songeait la disciple.

Parvenue à douze pas de la façade, elle arrêta ses suivants d'un geste suave, et poursuivit seule. Lentement. Posément.

Elle passa le seuil.  

Lentement, savamment, la déesse se dévoila. L'étoffe immaculée, remontant en de sublimes courbes jusqu'à son sculptural corset. L'albâtre généreux de son décolleté, dont les reflets charnels dansaient au fil de sa respiration, laissant savourer ses formes splendidement exposées, pleines de promesses. Son visage, dont la plastique parfaite encadrait des iris froides et perçantes, arborant une expression moqueuse, provocante.  

Une sensualité diffuse, surnaturelle émanait d'elle, appelant, incitant, réveillant les désirs inassouvis. A en juger par sa menue stature, il devait certainement s'agir d'une brétonne également. Seulement, contrairement aux élans chaotiques intermittents et dictés par le besoin de sa compatriote, la séduction de la vampire était assumée, savourée, et consommée avec ferveur. Là où d'académiques sortilèges influençaient les cibles de l'étudiante, sa vis-à-vis subjuguait d'une seule œillade jusqu'à l'inconscient de ses proies.  

Elle eut un fugitif battement de cils, comme par hasard à l'attention de Drem.

Les trois mercenaires l'attendaient, l'arme au poing. Le reptile au sang-froid, qui ne parvenait à dissimuler la crainte dont palpitait son cœur aux yeux de la stryge. L'hémoglobine bouillonnante d'une haute femme aux allures de pirate, dont l'expression indéchiffrable annonçait la calme résolution. Le fluide nerveux d'un elfe, dont le sanglant regard ne suffisait à masquer les désirs contradictoires qui l'animaient. La chasseresse percevait sans effort la vulnérabilité charnelle de ce dernier. Les mâles étaient si faibles...

Négligemment, elle repéra l'absence d'objets autour des braises de la naissance de l'élémentaire. Ils avaient certainement dû récupérer ses effets. D'une démarche assurée, elle gagna le fond de la salle, exposant les courbes parfaites de ses omoplates aux armes adverses. Savaient-ils seulement à quelle vitesse elle pouvait réagir, en cas d'attaque ? Effectuant une volte-face étudiée, elle aperçut de nouveau le regard avide des trois soldats charmés, à l'extérieur. Et reporta enfin ses yeux virides sur les aventuriers.

— Je me nomme S'emsyl, cinquième du clan Sh'éam, entama-t'elle enfin d'une voix suave. J'ose espérer que vous réalisez l'inutilité d'une approche violente dans un tel lieu... soyez rassurés, j'en suis moi même pleinement consciente...

Elle joua un instant de ses fines phalanges, comme pour s'assurer de la perfection de ses ongles manucurés.

— Si j'ai fait en sorte d'éloigner l'adepte de la guilde, c'est parce que son fanatisme nous aurait empêchés de converser librement. À présent nous pouvons discuter... en tant qu'adultes.

Saerileth fut frappée par les accentuations mélodiques de sa voix, charmeuse, qui lui rappela furieusement quelque chose qu'elle avait déjà entendu.

La vampire avança d'un pas vers l'aile gauche, le tintement féminin de ses escarpins résonnant sur le parquet.

— Alors, qu'est-ce que les Triamites ont bien pu vous promettre, chères choses mortelles ? questionna-t'elle à l'attention de Saerileth, tout maintenant sa voluptueuse démarche. De l'or ?

Elle passa son doigt sur le bois du guichet de l'intendant, comme pour en éprouver la poussière.

— L'ascension sociale, peut-être ? lança-t'elle dubitativement en observant l'argonien, stoïque.

Jouant distraitement de ses ongles, elle laissa malicieusement errer son regard sur les pages du registre. L'une d'entre elles était déchirée.

— La gloire ? L'amour, peut-être ? piqua-t'elle en dédiant un clin d'œil canaille au dunmer.

Modifiant la cambrure de son corps, elle se composa un sourire acerbe.

— La science ? ricana-t'elle.

Son rictus s'accentua, modulant ses traits avec étude. S'approchant de nouveau, elle reprit :

— Et s'ils ne vous ont pas achetés, et que c'est une juste cause que vous croyez servir en aidant ces monstres...  posez vous cette simple question : à quoi sert notre sceptre ?

Elle marqua une pause, puis sourit, trouvant la nuance d'incrédulité recherchée dans la mimique des aventuriers.

— Vous ne savez pas, n'est-pas ? sussura-t'elle voluptueusement. Mais ignorez vous seulement la fonction du sceptre, ou bien également pourquoi l'on vous a laissés dans l'ignorance ? Savez vous vraiment ce que les Triamites font des âmes qu'ils capturent ?  Êtes vous certains... de ne pas vous être trompés de camp ?

Elle redevint droite, hautaine, et ses iris se firent dures.

— Toute offre que le vieil homme avide et sa disciple vous aient faite, je peux vous l'offrir en double ou en triple ; Jusqu'à l'immortalité peut-être votre, si vous la désirez. Vous pourrez même sortir du palais sans encombres, ce qui vous sera impossible autrement. Alors soyez adultes, soyez raisonnables ; révélez moi où est le sceptre qu'on nous a dérobé...

Modifié par Trias, 22 février 2011 - 08:54.


#245 nood

nood

Posté 25 février 2011 - 15:40

21 Soirétoile 3E431, 14h30



  

Montée d'hormones et lavage de cerveau



  
- … Prenez garde à sa séduction, Serethi.

Et malgré la mise en garde tout à fait justifiée, l'elfe fut détruit intérieurement à la première œillade. Ce n'était pas faute de s'être préparé mentalement, pendant les quelques secondes qui avaient précédé l'entrée de S'emsyl. Quelques barrières mentales apprises de ci de là, au cours de colloques de la guilde des mages ; un verrou mental élaboré pendant son service dans la légion – pour résister aux éventuels interrogatoires, stratagème d'ordinaire plutôt solide. Tout cela vola en éclat d'un regard de l'éblouissante femme blanche. Autant endiguer un torrent printanier avec une cuillère à soupe. Son étreinte sur la garde de son épée se fit lâche, tout comme les incantations préparatoires qu'il ressassait jusque là se turent.

  
Si réussir à décrocher la mâchoire d'un légionnaire n'était pas un haut fait en soi (il suffit d'être une jeune femme âgée de moins de trente ans et d'une tenue ne serait-ce que très légèrement équivoque), la somptueuse vampire avait brillamment vaincu les (piètres) défenses mentales de l'elfe d'un coup d'œil. Et il en était conscient. Et il en était même honteux. Se savant manipulateur des arts magiques, il aurait du prévoir les insinuations du charme de cette femme. Il aurait du résister âprement, concentrer toute sa volonté ; mais il ne fit que tomber sous le charme de cette magnifique et terrible créature. Lorsqu'elle leur tourna négligemment le dos, dévoilant ses formes proches de la perfection comme une estocade supplémentaire, il soupira ostensiblement tout en adressant une tape amicale sur l'épaule écailleuse d'un très nerveux Danse-Mot, trahissant ainsi son impuissance. S'il avait été en compagnie de ses collègues, quelques jours plus tôt, il aurait certainement échangé quelques commentaires absolument pas fins sur la plastique de cette femme et les moyens d'en jouir. Oui, c'était un fait : Drem était plus au fait des méthodes d'approches de prostituées des quartiers sud que des discours élaborés de l'amour courtois avec des aristocrates. Il s'abstint de commentaires déplacés, l'heure n'étant pas à la grivoiserie.

  
Incapable de détourner son regard d'elle malgré des efforts psychologiques plus que soutenus, il n'écouta les doucereuses paroles de la dame que d'une oreille. Diverses allusions au clan Sh'éam, aux Triamites, à des âmes capturées… traversèrent son esprit et en sortirent aussi vite qu'elles y étaient rentrées, fautes de références mnésiques solides auxquelles s'accrocher ; mais aussi à cause d'un entendement embrumé par de nombreuses et libidineuses visions.

  
Il eut bientôt l'impression que S'emsyl ne s'adressait plus qu'à lui. Tous les défauts et les incohérences de Maelicia et de ses plans, obscurs et bancals, lui sautèrent à la figure. La peste soit de cette Brétonne sortie d'on ne sait où pour l'embarquer dans une mission suicide, pensa-t-il rapidement. Chacun des mots s'emboitant parfaitement à la suite de l'autre pour former un discours empli de bon sens, de compréhension et de d'espoir, il se mit à divaguer sur les promesses de son adversaire. Il se vit bientôt quitter sa misérable condition de garde de seconde zone empêtré dans une histoire à finir en cabane et s'imagina, tiré d'affaires par les arrangements avec cette plantureuse et puissante Brétonne, en puissant sorcier immortel, intégré, craint et respecté en tant que tel dans les plus hautes sphères du clan Sh'éam, partageant sa vie, son amour de la magie et sa couche avec la belle S'emsyl tout de blanc vêtue, régnant sur des compagnies entières d'hommes d'arme serviles.

  
Cette vie, entrevue l'espace d'un instant dans les filets de l'illusion de S'emsyl, lui apparaissait à portée de main. Quelques simples renseignements l'amputeraient bientôt de tous ses problèmes. Il finit par prendre péniblement la parole, s'avançant d'un pas hagard.

  
- Mad… Mademoiselle, je ne sais que peu de choses sur cette histoire où j'ai échoué presque malgré moi.

  
Les regards de ses compagnons braqués dans son dos et leurs réactions silencieuses lui imprimèrent un sentiment d'hésitation ; son regard se fit tout à coup moins sûr et il faillit revenir à lui. La vampire n'eut qu'à opérer un subtil changement de posture pour regagner de l'emprise, à l'aide d'un savant roulement de bassin sous sa robe éclatante.

  
- Mais en fonction de ce que vous pouvez me… proposer, en matière de récompenses, je serai heureux de vous révéler ce que je sais sur ces … individus – leur simple mention fit naitre un léger rictus de résistance, symbole d'un ultime tentative d'opposition au sortilège de charme – sur, … sur leurs actions ou tout autre chose que vous jugerez utile et que je sais…


Modifié par nood, 03 avril 2011 - 11:21.


#246 Trias

Trias

Posté 26 février 2011 - 23:52

Faiblesse humaine

21 Soirétoile 3E425, 14h30




— Je ne sais que peu de choses sur cette histoire où j'ai échoué presque malgré moi. Mais en fonction de ce que vous pouvez me… proposer, en matière de récompenses, je serai heureux de vous révéler ce que je sais sur ces … individus … sur, sur leurs actions ou tout autre chose que vous jugerez utile et que je sais…

L'égérie toisa l'elfe, sondant jusqu'aux tréfonds de son être, lisant dans ses yeux grands ouverts. Il ne savait rien, aucun homme ainsi subjugué n'aurait pu lui mentir. Un parfait outil pour la triamite, sans doute moins niaise qu'il n'y paraissait. Il n'en restait pas moins agréablement utilisable...

Modifiant sa cambrure, elle adossa au mur son ombrelle d'un geste gracieux. Puis, sachant l'attention posée sur ses mouvements, elle ramena avec langueur sa paume délicate vers ses hanches, longeant divinement les courbes de son corset, remontant lentement vers ses lèvres pulpeuses, qu'elle effleura du bout des doigts.

— Tout ce que vous pourrez imaginer, bel elfe, promit-elle, en une invitation à peine voilée, sentant le sang tumultueux du dunmer  se réchauffer encore, noyant son cerveau dans un déluge d'humeurs. Les derniers foyers de résistance s'effondraient chez sa victime, l'acheminant dangereusement vers une aveugle soumission.

Certes, le mental du Dunmer n'était guère comparable à celui des faibles esprits de la plèbe ordinaire. Son acuité, son intelligence était celle d'un pratiquant des arts magiques. Mais en tant que mâle, il avait une faille, une vulnérabilité que toute sa science n'avait  en rien atténuée. Et nul ne résistait à la séduction de S'emsyl.

Chacun des membres de la Main personnifiait l'un des aspects de leur tout puissant maître. La stryge était la Volonté de Sh'éam. Et tout mortel ployait devant elle...

Le désespoir était le corolaire du désir. A ce stade, la plupart des mâles se seraient retournés contre les leurs, dans une ultime tentative de satisfaire la vampire, et de mettre fin à leurs tourments. Certains n'auraient pas hésité à risquer leur vie pour souscrire au besoin impérieux qu'ils ressentaient.  

 Cependant, continua-t'elle — son regard passa du légionnaire à ses deux compagnons, avant de revenir sur Drem — il vous faudra au préalable me révéler où est le sceptre...

Les dés étaient lancés, et le destin convergeait vers nos héros. Qu'allait-il advenir de la cohésion précédente, si chèrement acquise par Main-d'Ombre ?




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Cuisante solitude

21 Soirétoile 3E425, 14h40




L'être ignée avançait, lentement, dans les profondeurs du souterrain. Chaque pas vers l'avenir devenant plus difficile que le précédent, à mesure que sa détermination faiblissait. La créature répondant jadis au nom de Maelicia errait dans ce qui paraissait être un labyrinthe de roche Ayléïde, sans trop savoir vers quel futur elle allait.

Le pâle minerai, timidement dérobé à l'obscurité par la lumière propre à l'élémentaire, se déroulait sans fin, dans une suite interminable de portes et de couloirs. Car une éternelle nuit s'était abattue sur ces ruines, que nul n'osait fouler depuis la colonisation impériale. Si l'existence de la cité souterraine était connue, les cyrodiils prenaient bien garde à ne pas s'aventurer sous la tour d'argent, partie émergée d'un trop dangereux iceberg.

Comme dans toute caverne, une venteuse respiration semblait secouer certaines issues, parvenant sous la forme d'un évanescent souffle d'air jusqu'aux excavations centrales. Tout, autour de l'élémentaire, n'était qu'ombre et froidure, derniers ossements d'une civilisation décédée. Et toujours les couloirs, interminables, solitaires...

Maelicia essuya une larme de feu, perlant au coin de son incandescent regard. Son existence était devenue étrangère à ce monde tiède et froid ; à ce monde hostile qui n'était désormais plus le sien. Arrachée à cette civilisation qu'elle voulait sauver, elle était désormais pourchassée, objet de peur aux yeux de ses pairs. Elle était maintenant seule au monde ; jusqu'au trouvère argonien l'avait menacée de son arbalète en la voyant changer. Sa mission échouerait probablement à son insu ; loin, là haut, chez ces inconscients d'attiédis.

La flamboyante atronach s'arrêta, et laissa errer son regard sur la poussière des sols, vitrifiée sur ses menues traces de pas. Déprimée, elle essuya encore un peu du liquide en fusion qui dévalait le long de ses joues. Ses larmes tombaient au sol, s'éteignant en touchant la roche, dans un crépitement sec suivi de fumée.

La daedra décida de s'arrêter. Se rapprochant de la paroi, elle se traîna dans l'une des ouvertures aménagées, et en passa le seuil. Une sorte de chambre, toute entière recouverte par une poussière millénaire s'offrait à elle. Il y avait même une source de chaleur, flamme blanche crépitant d'amitié dans un réceptacle pierreux.

Maelicia s'étonna : toute entière à son chagrin, elle n'avait pas senti la vie qui irradiait de la flamme ayléïde ? Dédaignant un lit de toute façon inutilisable, elle se rapprocha du flambeau mystique comme un enfant retrouvant un chien de compagnie. La flamme, bien que se consumant à partir d'étrange cristaux, répondit à son appel, et lui lécha affectueusement le visage.

Un semblant de joie paru regagner l'élémentaire, qui s'adossa au mur, caressant distraitement la lampe, tandis que les flammes lui faisaient une affectueuse fête. Puis, progressivement, la créature se laissa glisser le long du mur, ferma les yeux, et s'endormit.

Modifié par Trias, 27 février 2011 - 13:01.


#247 Ygonaar

Ygonaar

Posté 02 mars 2011 - 23:59

Gil  Grissom de Dessailly

  

21 Soirétoile 3E425, 14h35

   Les tâches noirâtres exhalaient un éclat verdâtre et malsain, sous l'effet du sort de Révélation du Sang qu'avait incanté la vieille Nermac. Des humeurs d'Argonien mâle avait-elle affirmé d'un ton péremptoire. Le Paullus Valens la croyait sur parole. Il s'intéressait plutôt à ce mince lambeau de derme de de kératine déchiqueté. Le saisissant à l'aide d'une pince, il l'exposa à la lueur des multiples Globes luminescents qui flottaient maintenant ça et là, éclairant avec ferveur les cavernes de la léproserie. Il y trouva une fine écaille encore intact, plus sombre que la nuit. Sa poche se mit à vibrer. L'enquêteur déposa le morceau de peau dans un fin sachet de coton avant de sortir sa Sphère de Communication.

Commissaire !
Oui, Monsieur Nirol ?
On me signale l'attaque d'un astronach de feu au sein même de l'enceinte du palais.
Les Magelames d'astreintes ne sont pas sur le coup ?
Si, mais il semble leur avoir échappé pour l'instant.
On arrive...
     soupira le chevalier de Dessailly.


  Il laissa se dissiper son Orbe Kairos. Les délicats entrelacs thaumiques de son sort de Haute Magie disparurent rapidement sous l'action entropique des Possibilités. Il était très fier de ce sortilège, sa spécialité, son sujet de thèse de troisième cycle. Il en avait conçu les premiers concepts lorsqu'il reçu l'autorisation exceptionnelle de consulter un Parchemin des Ancien. Cette faveur rarissime lui avait été accordé grâce à un inhabituel soutien de son père et à celui plus prévisible du professeur Traven, qui voyait en lui un élève prometteur. Et l'impétrant es mysticisme, spécialiste du Chronos, eut en effet une révélation. Il découvrit comment on pouvait rendre plus probables des futurs contenant des paramètres désirés . Un sortilège qui l'aurait immanquablement rendu célèbre s'il était resté à la Guilde des Magicien. Mais que les béotiens auraient à coup sûr nommé Sort de Chance.

I
l l'utilisait rarement, cependant. D'une part parce qu'il était fort délicat à réaliser et fort gourmand en influx, mais également car il ne se prêtait pas à toutes les situations. Il fallait en effet que le hasard garde une place importante si l'on voulait influencer efficacement la survenue d'un événement. Mais pour trouver des indices en un temps record dans maladrerie, cela lui avait semblé approprié. De fait, son apparente flânerie dans la maladrerie l'avait amené jusqu'à un cabanon démolie où il avait trouvé des fragments de tissus, d'esquille de bois et une fléchette empoisonnée sous une dalle massive. Elle l'avait fait passé par un tunnel où la roche avait été fracturée en ricoché, typiquement suite à une décharge télékinétique de force considérable. Elle l'avait amené à interroger des lépreux qui avaient souvent vu des faits intéressants. Les ladres étaient exceptionnellement coopératifs, après avoir crus un moment que la Manipule Funèbre était venue clore définitivement leur ghetto. Il en avait désigné cinq pour être transférés dans la Basse Fosse en vu d'un interrogatoire plus poussé. Son choix se basait sur un intuitif réseau de présomptions mais il laissait également une place au hasard. Cinq était un bon chiffre, il serait très étonnant qu'il n'y en ait pas au moins un qui ne soit un témoin capital. Si l'on ajoutait les menus indices et surtout les trois cadavres que Deirdre interrogerait probablement, il avait de bonnes chances de débroussailler cette affaire.  


  

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Tentations





  

21 Soirétoile 3E425, 14h35

  
La Chose les dépassa, leur tournant ostensiblement le dos. Elle cherchait probablement à les faire douter par son attitude, à affirmer qu'il n'avait rien à craindre d'eux. Avait-elle raison? Main-d'Ombre n'avait pas oublié avec quelle surnaturelle célérité elle avait esquivé les attaques des deux magicienne. Mais de dos, elle ne pourrait pas réagir avant d'entendre le bruit de la gâchette. Et à cette distance, même elle ne pourrait éviter un carreau d'arbalète. Sauf qu'elle était également une sorcière. Pouvait-elle lire leurs pensées et anticiper leurs réactions? Avait-elle un mur magique qui stopperait net le trait avant qu'il ne touche sa cible? Comment régiraient ses marionnettes s'il la navrait séance tenante, seraient-ils libérés de son emprise ou les chargeraient-ils aussitôt, entrainant d'autres gardes dans leur sillage? Le lézard n'avait aucun moyen de le savoir, aucun moyen de frapper à coup sûr, aucun moyen de truquer le jeu.


  
Il se contenta donc de l'observer en suivant ses gestes de son arme. Ce qui l'inquiétait le plus était l'ombrelle. La Stryge la manipulait trop négligemment, comme un accessoire dont elle voudrait les convaincre qu'il était futile. Or il pouvait fort bien camoufler dards, menus atouts alchimiques, mais surtout une de ces baguettes magiques qu'affectionnent les sorciers de la guilde. D'un autre coté,  ses vêtements ne lui laissait guère le loisir de dissimuler beaucoup de chose, même s'il était lui-même bien placé pour savoir qu'on ne pouvait pas exclure une lame plate entre les cuisses. Ce n'était pas un danger immédiat, trop long à extirper. Il vérifiait tout de même chaque plis que formait l'étoffe sur ces courbes harmonieuses, l'homogénéité de sa transparence qui laissait tout juste deviner cette peau satinée, promesse de douceur et de...

L'Argonien fut stupéfait de constater le pouvoir de séduction de la vampire. Il ne se connaissait aucun penchant zoophile et considérait généralement les handicapantes protubérances mammaires, les jambes auxquelles il semblait manquer une articulation, le ridicule manque de queue et les touffes de poils à la coiffure plus ou moins alambiquée comme de désagréables détails avec lesquels il fallait bien composer. Il nourrissait en outre une vive prévention envers les sorcières en général, si ce n'était pas toutes les femelles, et ce non-mort en particulier. Et voilà qu'il se surprenait à admirer sa plastique! Il se demandait alors comment pouvait réagir Drem, voir même Saerileth.


Elle semblait se focaliser surtout sur le Dunmer. La proie la plus évidente, bien sûr, mais aussi certainement la plus intéressante à ses yeux. Entre un Argonien à la vêture sobre et un flamboyant magelame elfe en armure, la hiérarchie était intuitivement vite établie. D'autant que l'aiglonne et lui-même ressemblaient fort à deux gardes du corps prudents entourant leur patron, avec leur arbalète à la main. Une situation qui convenait fort bien au lézard, qui fit tout pour paraitre insignifiant.

— Si j'ai fait en sorte d'éloigner l'adepte de la guilde, c'est parce que son fanatisme nous aurait empêchés de converser librement. À présent nous pouvons discuter... en tant qu'adultes. Alors, qu'est-ce que les Triamites ont bien pu vous promettre, chères choses mortelles ? De l'or ? L'ascension sociale, peut-être ?
Supposa-t-elle d'un air peu convaincu en le fixant.

S'emsyl impressionnait avec un naturel stupéfiant. Il ne savait plus trop quelle était la part de vérité dans son discours et quelle était celle de la suggestion. Elle semblait les jauger à tour de rôle, mais il avait du mal à estimer ce qu'elle pouvait deviner. Avait-elle été abusée par la présomption de son insignifiance? N'arrivait-elle à lire que ses personnages en lui? C'était possible. Car si Charbon-Agile, Danse-Mot, Four-à-Sable ou d'autre pourraient désirer être reconnus dans leurs domaines respectifs, Main-d'Ombre souhaitait quant à lui surtout disparaître. Il prit cependant bien soin de simuler une lueur d'envie à l'énoncé de cette hypothèse. Déjà qu'elle avait de toutes évidences deviné l'importance du registre et de la page manquante...

Elle recommença à travailler Séréthi, signe qu'elle voyait en lui la proie ou la faille la plus sensible. Avec succès, si on en jugeait à son regard fixe et sa mémoire béante. Il projeta d'ailleurs sa main vers lui. Était-il déjà sous contrôle ? Était-ce une attaque ? Le saurien résista à l'envie de lui planter une dague dans la gorge alors que Drem lui tapotait l'épaule en soupirant comme un guar éconduit. Quant est-ce qu'il comprendrait que cette manie finirait par le faire occire?


— Et s'ils ne vous ont pas achetés, et que c'est une juste cause que vous croyez servir en aidant ces monstres... posez vous cette simple question : à quoi sert notre sceptre ? Vous ne savez pas, n'est-pas ? Mais ignorez vous seulement la fonction du sceptre, ou bien également pourquoi l'on vous a laissés dans l'ignorance ? Savez vous vraiment ce que les Triamites font des âmes qu'ils capturent ? Êtes vous certains... de ne pas vous être trompés de camp ?

La Stryge n'avait plus besoin de subtils artifices pour devenir convaincante. Maelicia avait toujours éludé nombres de questions, même directes, même primordiales. Il n'avait jamais de contact avec d'autre membre de se Guilde et n'avait jamais entendu parler de ces Triamites. Un groupuscule de conspirateurs qui désirerait le sceptre pour eux seuls ? Était-ce pour cela qu'elle semblait vouloir mégoter sur leur salaire ? Des questions qui réclamaient assurément des réponses. Dans un travail classique, le saurien aurait déjà fait amèrement regretter à son employeur sa rétention d'information.


— Toute offre que le vieil homme avide et sa disciple vous aient faite, je peux vous l'offrir en double ou en triple ; Jusqu'à l'immortalité peut-être votre, si vous la désirez. Vous pourrez même sortir du palais sans encombres, ce qui vous sera impossible autrement. Alors soyez adultes, soyez raisonnables ; révélez moi où est le sceptre qu'on nous a dérobé...


Elle utilisait sa propre technique de ballotage mental, caressant dans le sens du poil pour se montrer aussitôt après menaçante. Ses comparses étaient mal préparés pour y résister, comme il l'avait lui même constaté. Elle risquait cependant de s'attirer l'hostilité immédiate de l'Aiglonne, à ce petit jeu là. Mais en dépit de sa compréhension du phénomène de manipulation et de la dangerosité, de la fourberie, du non-mort qui lui faisait fasse, en dépit des blocages mentaux qu'il s'était patiemment fabriqués, elle avait réussit à toucher juste. L'immortalité. Oh, dans sa bouche, cela voulait certainement dire être transformé en ces ignobles Écorchés dont le sort devait être pire qu'être digéré vivant par un voriplasme.

  Mais elle laissait entendre qu'elle pourrait partager le don de vampirisme. Un Argonien pouvait-il devenir vampire ? Il y avait probablement d'infâmes contreparties, mais en tous cas celle de craindre la lueur du jour ne semblait pas si fondée que les légendes le prétendaient. Et n'était-il pas déjà un paria pour ses congénères ? Ne tutoyait-il pas déjà les Ténèbres ? Et l'idée de saigner périodiquement quelques Peau-Molles ne le traumatisait pas outre mesure. Il pourrait devenir aussi fort et rapide que S'Emsyl. Il aurait le temps pour que chacun de ses personnages poussent leurs arts à la perfection. Il pourrait également explorer des aspects qui lui était interdit. Devenir un grand lettré. Un magicien ! Voir... Un amant des plus réputés...

— Mad… Mademoiselle,
balbutia Serethi, je ne sais que peu de choses sur cette histoire où j'ai échoué presque malgré moi. Mais en fonction de ce que vous pouvez me… proposer, en matière de récompenses, je serai heureux de vous révéler ce que je sais sur ces … individus … sur leurs actions ou tout autre chose que vous jugerez utile et que je sais…
— Tout ce que vous pourrez imaginer, bel elfe.
Curieusement, cette dernière phrase échauffa le saurien. Un improbable soupçon de jalousie, peut-être ? Ah oui, il avait en effet échoué, le pitoyable magelame ! Il était devenu en moins de deux minutes l'esclave servile du monstre. Et s'il y avait une chose que Main-d'Ombre ne supportait pas, c'était bien l'asservissement. Elles étaient bien belles, les promesses de l'hétaïre, mais n'impliquaient-elles pas qu'il se retrouverait dans un état de soumission total ? Et s'il pouvait faire jeu égale avec la stryge, qu'en serait-il vis-à-vis de leur fameux Sh'éam ? Cette seule idée lui faisait serrer les poings.

Ses griffes entaillèrent le derme intumescent de sa main blessée. La douleur irradia aussitôt, chassant les dernières volutes d'élucubration. Les tests qu'il avait réalisé enténébré le montraient bien, il n'y a rien de tel que la douleur ou le danger de mort pour forcer un esprit à briser une influence. Il savait bien que cette brulure risquait d'être utile.


Cependant, il vous faudra au préalable me révéler où est le sceptre... poursuivit la Créature.

    Drem allait complètement craquer, cela se sentait. Il fallait vite prendre un parti. Paradoxalement, le temps jouait en leur faveur. Des gardes, si ce n'est des magelames aguerris, finiraient bien par venir  trainer ici. La Stryge aurait alors du mal à garder les trois soldats sous son contrôle en toute discrétion. Et elle aurait bien plus à perdre qu'eux si sa véritable nature était révélée. C'est lui qui avait le feuille contenant les noms, mais il n'avait pas eut le temps de la déchiffrer. Même si elle pouvait lire dans les pensées, ce dont il commençait à douter, elle ne pourrait rien apprendre tant que lui-même ne serait pas neutralisé d'une manière ou d'une autre. En ce mettant dos à ce mur, il pourrait surveiller tous les protagonistes sans risquer de se faire surprendre. Cela pouvait se tenter. D'autant plus que les magiciens, Maelicia elle-même en avait bien fait la preuve, adorent se pavaner lorsqu'ils se sentent en position de force.  Il fallait la faire parler. D'autant plus qu'il y avait de bonne chance d'enfin apprendre des choses utiles. Voir que la vampire se laisse aller à un instant de distraction qui pourrait lui être fatal.

  Mais d'abord, tenter de récupérer le Dunmer. La douleur avait été efficace pour lui, peut-être le serait-elle pour l'elfe également. Et vu qu'il semblait apprécier les contacts tactiles.


Et, chef !
  apostropha l'Argonien d'une voie gouailleuse. Elle a p't être raison, cette gazille, On m'a rien dit qu'à quoi il sert, leur bâton, à moi. Et p't être aussi qu'ils sont pas si propres qu'ils veulent bien l'dire, pour s'qu'on en sait!

Tenant son arbalète de sa main valide, il saisit le coude du légionnaire de l'autre et exerça une légère pression pour qu'il se retourne vers lui, pour l'invectiver avec véhémence.

Pasque si y'a moyen d's'en sortir sans casse, d'avoir plus de flooze, et de bosser pour les gentils, moi j'dis que se s'rait ballot d'passer à côté, nan ? Alors moi j'vote pour qu'on écoute la poupée.


  Le visage du magelame n'était dans le champs de vision de S'emsyl. Le saurien en profita pour enfoncer vicieusement la griffe de son pouce dans sa saignée, à l'endroit où il n'y avait nulle armure rigide pour que le bras puisse se plier. Fait pas le con, Séréthi ! Songea-t-il avec ferveur. Ne régis pas violemment.



  

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Repositionnements géopolitiques
  

  

21 Soirétoile 3E425, 14H40

   Markal observait avec attention la colonne qui s'engouffrait dans la Porte du Pont. Il ne lui fut guère difficile de repérer la haute stature de son congénère. En tant normal, il aurait abusé de leur ressemblance physique pour faire croire à une quelconque parentèle rencontrée par hasard. Mais même les cousins éloignés évitaient d'interpeler un légionnaire lorsque sa cohorte était en ordre de marche. Et même s'il en avait pour l'instant repéré aucun, un éventuel observateur de la Wyvern aurait certainement été briefé sur les membres permanents du BIIM...

Et si les traqueurs étaient sur le coup, il y avait de bonne chance qu'ils aient un tour d'avance sur lui. Il avait du au préalable se rendre au bureau officiel des Lames afin de faire identifier la Poule, ce qui ne fut guère problématique au vu de sa morphologie et de ses activités professionnelles. Mais le reste de l'appareil bureaucratique impérial semblait en ébullition, après une longue période de léthargie pendant le blocus. Excédé, il en était même arrivé à user de magie sur les fonctionnaires pour obtenir leur complète et immédiate collaboration.


   Le Bureau des Affectations de la Légion lui avait appris que le chapelain de première classe Shura Gro-Yurgul officiait actuellement dans le fort impérial de Refuge. Ce n'était guère étonnant. Le vieil Edwyre commençait à décliner sérieusement. Elysana, sa fille et héritière légitime, risquait fort d'entrer en conflit avec l'impétueux caractère de Barenziah de Longsanglot, la deuxième femme du roi. Le roi Gothryd de Daggerfall, qui n'avait jamais encaissé le meurtre de son père et ferait tout pour rogner le pouvoir de sa seule vraie rivale en Hauteroche, attiserait à coup sûr les brandons. Il y avait là tous les ingrédients pour qu'une guerre civile majeure n'embrase les belliqueux peuples Brétons. Voir même ne s'étende à Morrowind, qui était particulièrement sous tension en ce moment... Oui, il était des plus logiques que l'Empereur affiche sa puissance en Refuge par les temps qui courent.

Mais beaucoup moins le fait qu'un légionnaire, encore cloitré dans une capitale en quarantaine la veille, y officie officiellement depuis un mois déjà. Le questeur du s'informer auprès de la Tutelle des Exemptions Spéciales pour découvrir que l'aumônier avait été mis en permission d'office durant le blocus, mais qu'il avait réintégré la Centrale, la grande caserne-prison au nord de la cité, dés la levé de celui-ci. En dépit de toute la célérité dont il fit preuve, sa cible était partie depuis dix minutes lorsqu'il parvint à la forteresse. A l'instar de nombre des soldats en garnison, elle avait été réquisitionné en urgence pour... régulariser la situation à fort Wyss.



  L'Orsmer s'était donc rendu au point de passage obligé de la cohorte, la Porte Ouest, afin d'y attendre le chapelain. Il se revêtit, une fois n'est pas coutume, de l'illusion de son uniforme officiel. Il repéra le gradé commandant son escadron , s'avança vers lui d'un air conquérant en lui tendant l'ordre de mission que lui avait fournit Valens.

Questeur Markal gro-Terashorm, du Bureau Impérial d'Investigations Magiques, mon Capitaine. Je viens réquisitionner de toute urgence le chapelain de première classe Shura Gro-Yurgul pour une mission hautement prioritaire.

Modifié par Ygonaar, 03 mars 2011 - 00:17.


#248 Arakis

Arakis

Posté 03 mars 2011 - 11:46

Le refus du don de paume


21 Soirétoile 3E431, 14h30


" Ces paumelles sont dangereuses, Saerileth, vous devriez me les confier"
En entendant cela Searileth se demanda si l'argonien se foutait d'elle, elle avait sans doute largement plus bourlingué que lui (en attestait le nombre impressionnant de cicatrices, traces de reprisages sur sa chemise et l'usure de certaines de ses armes), et cet argonien sorti de Les Neufs savaient où croyait bon de lui dire quoi faire ou ne pas faire. Et chose encore pire il bafouait une des pires règles du code de l'aventurier (à noter que Saerileth elle même y faisait sa part d'infractions, ledit code n'ayant jamais été couché sur un quelconque support il était donc aisément détournable de ses fonctions premières) ladite règle étant que c'est celui qui trouve qui garde, du moins jusqu'au partage, quoi qu'au vu de ce qu'avait fait l'argonien il y a peu elle n'avait guère envie d'un quelconque partage. Ignorant ses réclamations elle prit les gants et la gibecière et les glissa à sa ceinture et claqua des doigts de son bras mécanique en direction de l'argonien, une façon de dire "les objets magiques je crois que je sais me débrouiller avec coco" .

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Oignon soit qui mal en pense


21 Soirétoile 3E431, 14h35


Bien qu'elle n'arrivait pas à s'expliquer comment l'argonien faisait pour savoir ce genre de choses son inconscient assimila l'information avec facilité. Après tout, une fois qu'on a vu un lépreux torche humaine, un argonien qui change de personnalité comme de chemise, un bretonne qui se change en atronach quand elle reçoit une fleur, pourquoi pas une vampire ? N'en ayant jamais rencontré elle ne connaissait que les ouïes dires qui étaient déjà fort éloquent en eux même, plus rapides que des traits d'arbalètes, la force de trois orques, capable de vous envoûter d'une parole et ce n'était là que les plus plausibles (il est à l'humble avis du narrateur inutile de s'étendre sur les coeurs à dix sept ventricules, les ventres pourvus de crocs, les ventouses sous les coudes, les crocs de loup, les genoux dotés de pointe et autres prouesses sexuels invraisemblables qui parsèment les rumeurs). Si un combat avait lui face à une telle créature c'était quasiment la mort assurée à moins de savoir sérieusement comment s'y prendre et étant donné l'anarchie ambiante elle avait quelques doutes quand à ce fait. En un sens l'arrivée de S'emsyl la déçut presque, ce n'était qu'une femme, certes habillé via moult dépenses, ce qui provoqua un léger sentiment de jalousie à Saerileth quand elle jeta un oeil à ses bottes qui sentaient l'égout, son manteau mainte fois reprisé et sa chemise en lin qui lui semblait soudain sentir tellement qu'on aurait cru qu'elle y avait mit des rats morts. Ce fut quand elle commença à se balader dans la pièce que Saerileth tira sa première conclusion importante et déterminante selon elle, vampire ou pas cette fille avait tout d'une poufiasse de docks à trois sous de cuivre la nuit (et souvent morpions offert pour le mois à venir) peu importe les vêtements suggestifs, la classe toute aristocratique et ses mouvements pour aguicher le mâle. Cette réaction était autant imputable à la pique de jalousie qu'avait ressenti la mercenaire en la voyant qu'au fait que le sort de charme de la vampire jouait avant tout sur les attraits physiques, coup de chance pour Saerileth le saphisme ne l'avait jamais tenté.

En entendant la voix de la vampire quelque chose tinta dans son cerveau, une de ses nombreuses alertes inconscientes qui y reconnu une tentative de charme, repensant à ce que lui avait une fois expliqué Jarou elle se concentra sur la première chose débile qui lui passa à l'esprit, en l'occurrence une chanson de marin vantant de façon Ô combien paillarde les charmes d'une prostituée kajhiit. Aussi farfelu que cela puisse paraître cette méthode marchait bien (bien qu'elle suscitait dans son esprit des visions peu ragoûtantes). Etant sure de ne pas avoir un charme pour lui polluer le cerveau elle écouta attentivement ce que disait la disciple.

— Si j'ai fait en sorte d'éloigner l'adepte de la guilde, c'est parce que son fanatisme nous aurait empêchés de converser librement. À présent nous pouvons discuter... en tant qu'adultes.

C'était grotesque, Maelicia une fanatique .. Gourde, maladroite, immature, pas au fait du monde où elle vivait, mais fanatique ... Autant de dire que Saerileth était une jouvencelle effrayée.

L'allégation suivante faillit la faire hurler, cette richarde en robe de bal spécialement conçue pour se faire trousser par un riche libidineux dans un coin sans qu'il ait à déchirer quoi que ce soit osait dire qu'elle ne travaillait que pour l'argent, il était vrai que c'était son moteur principal, mais quand même ... Ce n'était pas juste l'argent, c'était ... une volonté de changer la donne dans le monde ... La justice peut être ... A vrai dire elle n'y avait jamais trop réfléchie, quand elle était dans la compagnie elle, comme les autres, suivait les directives de Gaël, qu'ils jugeaient le plus réfléchi pour ce genre choses. Une chose dans le discours de la vampire l'interloqua, elle avait parlé de Triamites, le nom ne lui disait rien mais c'était toujours ça de prit, vraisemblablement la vampire aimait s'écouter parler, tant mieux, c'était l'occasion parfaite pour en apprendre plus sur ce merdier. Visiblement la vampire essayait de rallier du monde à son râtelier avec moult promesses alléchantes. Un coup classique, offrir plus que celui en face pour rallier à sa cause ses brebis galeuses. Un coup foireux selon elle, c'était comme ça qu'on se retrouvait avec une réputation de retourne-veste, de vendu et de sans honneur. Or si il y avait bien une chose dans le boulot que Saerileth chérissait c'était l'honneur et la parole donnée fut-elle donnée à la guilde des voleurs.

Les propos suivants confirmèrent son impression, elle était bel et bien en train d'essayer de les rameuter par chez elle. Pitoyable, comme si on avait pas grillé ton jeu de poufiasse ma cocotte, retourne te coucher dans ton cercueil et bosse ta séduction pendant un petit siècle, au moins t'as du temps devant toi. Alors qu'elle s'apprêtait à se gargariser de la vampire elle vit Drem faire un pas dans sa direction, elle remarqua de suite sa main trop lâche sur la garde de son épée pour qu'il tente une attaque. Ce fut rapide de déduire ce qui se passait dans son petit cerveau masculin, encore un qui écoute sa quille plus que son cerveau, je le croyais plus intelligent que ça, néanmoins cette faillibilité de Drem l'a mit sur les dents, il y a peu c'était elle qu'il regardait d'un regard approbateur et voila qu'il partait à la course aux jupons autre part, qu'est-ce qu'il pouvait lui trouver à celle-là ? Il est certes fort mesquin d'être jaloux mais ce sentiment blinda définitivement Saerileth contre une quelconque tentative de charme. Histoire de ne pas hurler elle donna un léger coup de pied dans le sol en fléchissant et détendant vivement le genou. Ce mouvement anodin fit bouger quelque chose dans une de ses poches au dos de sa ceinture. Intriguée elle fourra la main dans son escarcelle et palpa la chose, c'était en forme de goutte, s'effritait sous les doigts et gros comme un oignon. Et c'était précisément un oignon, qu'est-ce que ça fout là ça ? Sans doute une vanne à la con de Calahan. Curieusement cet oignon lui rappela l'époque de la compagnie où Gakken lui vantait les vertus des oignons sauvages dans sa cuisine et de Hlaf riant à gorges déployées et déclarant que les oignons il se les foutait dans le nez pour ne pas sentir l'odeur de Dun.

Pareil à l'ampoule qui s'allume dans les bandes dessinées, Saerileth venait d'avoir, ce qu'elle estimait être, une idée de génie, elle dut se mordre la lèvre pour ne pas laisser apparaître un large sourire victorieux et fier de sa trouvaille. Occupé à se creuser le cerveau elle ne fit que peu attention à ce que disait la disciple, un sceptre ? Curieusement elle repensa à ce qu'avait dit Maelicia sur un cure-dent ou quelque chose du même genre, elle avait prit ça pour des élucubrations crétinoïdes comme la bretonne en avait le secret mais à y réfléchir ça se tenait. C'était sans doute après ça qu'elle courrait et visiblement elle n'était pas seul. Pour Saerileth le choix était vite fait, entre donner un sceptre magique à une bretonne un peu allumée et le donner à une bretonne allumeuse, vampire de son état, son choix allait vite vers la première. La réaction de Danse-Mots la prit de court, il avait prit du skouma ou quoi ? Pactiser avec cette ... chose, c'était hors de question, bien que bizarre et assez illogique l'argonien n'était pas assez stupide pour faire une faute de jugement aussi grave. Et d'ailleurs pourquoi prenait il un phrasé pareil ? Il se faisait encore une fois passé pour ce qu'il n'était pas. Une tentative de feinter la vampire ? Futé, futé, en faisant ça il se la met dans la poche, gagne du temps, augmente les chances de survie et de trouver le bâton pour ensuite doubler la poufiasse. Et comme pour confirmer ses pensées elle vit le saurien griffer Drem de façon à le ramener sur terre. Sans oignon pour une fois, se dit-elle avec un sourire en coin, et histoire d'asseoir la stryge dans ses certitudes elle dit d'un ton assuré.

« Je suis d'accord avec le lézard, on m'a rien dit depuis que j'ai les panards dans cette merdouille, qui plus est j'adore comment vous prononcer or, alléchant je dois dire »

Et voila, le beau cliché du mercenaire dans toute sa splendeur. Si tu crois m'avoir poufiasse, rien de ce que tu as à proposer ne me donnera ce que je veux.

Modifié par Arakis, 02 avril 2011 - 10:02.


#249 Trias

Trias

Posté 03 mars 2011 - 16:42

Ultimatum

21 Soirétoile 3E425, 14h35



« Eh, chef ! lança l'Argonien, en prenant son accent le plus commun. Elle a p't être raison, cette gazille, On m'a rien dit qu'à quoi il sert, leur bâton, à moi. Pasque si y'a moyen d's'en sortir sans casse, d'avoir plus de flouze, et de bosser pour les gentils, moi j'dis que se s'rait ballot d'passer à côté, nan ? »

— Je suis d'accord avec le lézard, on m'a rien dit depuis que j'ai les panards dans cette merdouille. Qui plus est j'adore comment vous prononcer "or". Alléchant, je dois dire...  renchérit la corsaire, dont les jointures pressées contre son arbalète cessèrent de blanchir.

S'emsyl resta quelques instants immobile, silhouette parfaite à l'expression indéchiffrable. Un bref, mais pesant silence s'installa alors que ses iris froides, calculatrices fixaient le reptile à la répartie si gouailleuse. Soudain, elle affecta de vérifier le lustre parfait de ses ongles, puis effectua quelques pas négligents vers l'angle de la pièce. Récupérant son ombrelle d'un geste gracieux, elle contourna le pupitre de l'intendant comme une mariée apprécieant le luxe d'un bien nouvellement acquis.

Tant et si bien qu'elle se retrouva de nouveau bien en vue du légionnaire et de ses comparses. Une petite dizaine de pieds de parquet les séparaient désormais. S'appuyant de manière impertinente sur son ombrelle, elle sonda de nouveau le regard de ses victimes.

— Vous me décevez beaucoup, vous deux, articula-t'elle enfin, sans se départir de son expression statuesque. Ne comprenez vous donc pas les non-sens que vous faites ? N'observez vous donc pas ce que vos yeux voient ?

Sa main libre prit une pose sensuelle, désignant d'un doigt effilé les vestiges carbonisés de la transformation de la brétonne.

— Votre « amie », qu'a-t'elle fait à l'instant ? Croyez vous vraiment que ma Rose était destinée à l'embraser ?

Ses phalanges se replièrent, tandis que d'un imperceptible coup d'œil elle s'assurait subrepticement de l'approche de ses mignons. Toisant à nouveau le lézard, un éphémère éclat de haine assombrit ses pupilles. « Chef » ? Cet elfe ignorant ?! Il se moquait d'elle ! Comme si elle pouvait oublier leur rencontre au Sang du Guar, bien avant que ce pion d'elfe ne suive les pas de la triamite. Comme s'il croyait pouvoir la berner. Comme si elle avait voulu en faire autre chose que des bottes...

Son regard glissa donc vers l'impériale, dont l'hémoglobine bouillonnait. Une femme, une ennemie donc, qu'elle n'avait pas pris la peine de considérer en entrant. Qu'en était-il de sa loyauté envers la guildiste ?

— Il s'agissait d'une fleur de Sithis. Un contenant magique inoculant sélectivement et intégralement sa cible, sans trace aucune.

Ses commissures se retroussèrent, dévoilant l'ivoire poli de sa dentition... et de ses canines.

— L'enchantement de la fleur... avait été obtenu à partir de l'âme d'un atronach de feu mineur, invoqué par mes soins.
Ses sourcils se haussèrent.

— Comprenez vous à présent ? Les Triamites dévorent les âmes de leurs victimes ! expliqua-t'elle, en s'animant. Et vous croyez que NOUS sommes des monstres ?  Qu'est ce qu'une vulgaire perte de sang quand on vous arrache votre propre âme ??  Qu'est ce que perdre la vie quand vous risquez le néant éternel ?

  Son expression se fit fiévreuse.

— Combien d'âmes croyez vous que le vieil homme avide ait absorbées ? Avez vous... la moindre idée de la puissance du monstre que vous servez, à travers sa disciple ?

L'attention des mortels était centrée sur elle, à présent. Peut-être même pourrait-elle compter sur son emprise sur l'elfe pour seconder les gardes, au cas où ses compagnons persévèreraient.

— Alors, je vous le dis, une dernière fois : le don noir, un millier de pièces d'or, des plaisirs au délà de la vie sont à votre portée si vous me révélez où est NOTRE sceptre. Maintenant. Autrement... vous mourrez.

La vampire se campa, empoignant cette fois solidement son ombrelle. Les sujets hypnotisés étaient sur le seuil de la consigne. L'elfe entre elle et ses deux compagnons. Et parmi eux, le destin.




ж ж ж
Crains la perfidie

Deuxième ère du temps des mortels




L'herbe de sang ployait sous le vent vide, s'abreuvant, se gorgeant des derniers restes sanguinolents abreuvant la terre de l'Oblivion. Lentement, dans de voluptueuses déglutitions, les filets végétaux épuraient le sol des giclées sanglantes émaillant les incessantes luttes des Daedra. Seules quelques gouttes de liquide sombre suffisaient nourrir les charognardes racines.

Les racines du royaume de la Destruction.

Une cavalcade de serres tripartites laboura soudain l'herbe sombre, l'arrachant à son insidieuse besogne dans un nuage de poussière. Des crânes écaillés largement arqués, un bec prédateur et des griffes effilées sur un corps dinosaure. Rugissant des sons suraigus de leurs becs dentus, les faucheclans chargeaient, aiguillonnés par la lame de leur puissant maître.

« Ne crains pas ».

Le premier élémentaire fut balayé, piétiné à mort malgré son mur de feu. Il s'éteignit dans un crépitement, aspergeant les stériles crevasses de son fluide refroidissant.

« Ne crains pas, petite nu'chaăn ».

Les faă'ran entrèrent en jeu, étoiles brulantes tombées du ciel. Ils fondirent sur les daedriques reptiles, et la Destruction advint de nouveau. Les flammes calcinant la chair chitineuse, la corne lacérant les chairs incandescentes. Atronachs mineurs et faucheclans s'affrontaient, dans une valse terrible où chaque faux pas était mortel. La Destruction s'abattait sans partage, labourant parmi les vies immortelles de l'oblivion.

« Ne crains pas, Midran'daă ».

Midran'daă était atterrée. Les reptiles tièdes et monstrueux labouraient les chairs des chaăns ; de son peuple ! Leurs écailles daedriques refusaient de partager la vie qui les animait. Ils ne se consumaient pas à leur contact. Et, à chaque coup de griffe acérée, un chaăn tombait, dispersant sa chaleur dans les plaines arides.

« Les Raïeden ne craignent pas le Faă des chaăns », expliqua la mère, tout en protégeant la nu'chaăn. Elle était une puissante faă'reeve, et avait adoptée l'élémentaire dès sa renaissance. La faă'reeve était sage. On disait que la  faă'reeve n'avait pas eu à renâitre depuis plus de cinq siècles mortels. Elle instruisait la nu'chaăn sur les mystères du Faă.

Soudain, Midran'daă sentit la vie affluer et tout autour d'elle. Derrière eux, l'océan de lave se contracta paresseusement, puis explosa, dans une ardente et mortelle pluie. Le patriarche était là. Partageant sa chaleur, les mortels faă'reeves dansaient dans les airs, plus rapides que des étincelles, chacun de leurs coups surnaturellement véloces faisant fondre la chitine désormais vulnérable. Même les faă'ran les moins brûlants s'animèrent, et le thêatre de la Destruction ne fut bientôt plus qu'une fervente ode au feu.

A travers les vapeurs de l'air surchauffé, Midran'daă perçut une massive silhouette, plus grande encore que celle d'un faă'reeve. L'immense créature poussa un terrifiant hurlement de dépit, agitant dans les airs une arme non moins gigantesque. Puis le colosse se détourna, abandonnant là le reste des faucheclans qu'il avait domptés.

Un doigt incandescent se pointa vers lui, guidant le regard de la néo-atronach.

« Xi'vilai est fort, reprenait la faă'reeve. Mais même lui tu ne dois pas craindre, Midran'daă. »

L'Atronach de feu nouvellement née tourna ses yeux incandescents vers sa mère.

« Madan'laă, que dois-je craindre ? »

L'ancienne élementaire contempla la nu'chaăn. Bien que petite par la taille, son Faă s'accroîtrait. Et bientôt l'éclat lumineux candide de ses yeux bleutés gagnerait en force et en sagesse. Elle se pencha sur sa fille adoptive.

« Crains la perfidie. Crains les mortels perfides. Car ils te piègeront pour toujours dans des pierres-prisons. Dans des prisons d'où tu ne pourras pas renaître... »

Modifié par Trias, 05 mars 2011 - 11:47.


#250 nood

nood

Posté 06 mars 2011 - 21:53

Savourons l'instant présent....

21 Soirétoile 3E431, 14h40

Une douleur appuyée au pli du coude le tira de ses confortables rêveries ; et les visions de puissances s'évanouirent pour laisser place au visage hermétique de Danse-Mot. Avant que Drem ne succombe à la tentation qui lui soufflait de molester ce foutu Argonien paranoïaque jusqu'à ce que mort s'ensuive – dernière suggestion voilée du sortilège de charme, qui s'évanouit comme une flamme privée d'air, l'humanoïde fit jouer sa voix grave, travestie d'accents populaires :

- Eh, chef ! Elle a p't être raison, cette gazille, On m'a rien dit qu'à quoi il sert, leur bâton, à moi. Pasque si y'a moyen d's'en sortir sans casse, d'avoir plus de flouze, et de bosser pour les gentils, moi j'dis que se s'rait ballot d'passer à côté, nan ?


Un instant d'incompréhension, une expression comique sur le visage de l'elfe submergé d'informations incongrues, puis Saerileth renchérit sur le même ton, à la différence qu'elle n'eut pas beaucoup à se forcer pour obtenir le même effet de langage que Danse-Mot.

- Je suis d'accord avec le lézard, on m'a rien dit depuis que j'ai les panards dans cette merdouille. Qui plus est j'adore comment vous prononcer "or". Alléchant, je dois dire...

Le Dunmer se tint coi par commodité mais aussi pour se remettre du flot d'émotions laissées dans son esprit par S'emsyl. Celle-ci fit quelques pas, exhibant toujours sa splendide plastique que Drem se garda bien de regarder. Le stress des événements des vingt dernières minutes lui avait fait monter un terrible manque de nicotine et tandis qu'elle reprit la parole en réponse à Danse-Mot et Saerileth, il rengaina fébrilement son épée et fouilla son baluchon à la recherche de son nécessaire à tabac.

- Vous me décevez beaucoup, vous deux, finit-elle par dire. Ne comprenez-vous donc pas les non-sens que vous faites ? N'observez vous donc pas ce que vos yeux voient ? Votre « amie », qu'a-t'elle fait à l'instant ? Croyez vous vraiment que ma Rose était destinée à l'embraser ?

Alors que la vampire enfonçait des portes entrouvertes, Drem bourrait sa pipe, tentant ainsi de se donner une contenance mais aussi de focaliser son esprit sur les barrières mentales qu'il s'efforça de reconstruire au mieux. Et, non, pensa-t-il, la transformation de Maelicia en Atronach n'était sans doute pas volontaire.


- Il s'agissait d'une fleur de Sithis. Un contenant magique inoculant sélectivement et intégralement sa cible, sans trace aucune.
L'enchantement de la fleur... avait été obtenu à partir de l'âme d'un atronach de feu mineur, invoqué par mes soins.
  

Il porta la courte pipe de terre cuite, à présent remplie convenablement, à sa bouche ; non sans avoir jeté un furtif regard aux canines de S'emsyl. Cette vision d'une dentition de créatures largement diabolisées dans son pays natal acheva de le tirer hors du filet de cette sorcière en robe d'hiver, si désirable soit-elle ; elle n'était plus à ses yeux qu'une mégère invocatrice et illusioniste (deux branches molles de la magie, qu'il ne portait pas dans son cœur), hématophage, et qui de surcroit avait abusé de lui. En arrière plan, trois gardes, apparemment hébétés, s'approchaient d'un pas lent mais décidé vers l'entrée de la consigne. Même si chaque seconde qui passait verrouillait un peu plus la nasse où lui et ses compagnons se trouvaient, il reprenait peu à peu ses esprits. Puisqu'il avait été provisoirement nommé "chef", il savait pertinemment que son prochain mouvement serait décisif, et nécessiterait tous ses moyens intellectuels.


- Comprenez-vous à présent ? Les Triamites dévorent les âmes de leurs victimes ! Le ton montait un peu plus à chaque phrase. Et vous croyez que NOUS sommes des monstres ? Qu'est ce qu'une vulgaire perte de sang quand on vous arrache votre propre âme ?? Qu'est ce que perdre la vie quand vous risquez le néant éternel ?

Arguments logiques, bien qu'un peu biaisés, pensa-t-il en allumant sa pipe d'un claquement de doigt. Un vampire est en effet fort mal placé pour parler de ce qui est monstrueux ou de ce qui ne l'est pas. C'est comme si un Dunmer se plaignait du racisme à son encontre…


- Combien d'âmes croyez vous que le vieil homme avide ait absorbées ? Avez vous... la moindre idée de la puissance du monstre que vous servez, à travers sa disciple ?


Etant donné qu'il avait largement sous-évalué la puissance de Maelicia (telle qu'elle avait pu altérer un enchantement de Sithis), la force d'un hypothétique maître aurait de bonnes chances d'être colossale. Quelles que soient les motivations profondes de Maelicia où de la personne à qui elle obéissait, Drem ne fut tout de même toujours pas convaincu du bien fondé de l'objectif de S'emsyl, eut égard à sa condition de vampire et à la manipulation dont elle usait ; n'était-ce pas l'arme des traitres ?   

Les bouffées de fumée se firent amples. L'Impériale et l'Argonien étant aussi tendus que les arbalètes qu'ils tenaient, derrière lui. La froide et blanche jeune femme lui faisait à présent face, elle-même secondée par les trois légionnaires encore profondément charmés. Il y avait de l'électricité dans l'air, et également d'élégantes volutes de fumée bleuâtres.


-
Alors, je vous le dis, une dernière fois : le don noir, un millier de pièces d'or, des plaisirs au delà de la vie sont à votre portée si vous me révélez où est NOTRE sceptre. Maintenant. Autrement... vous mourrez.


Drem tirait sur sa pipe par intermittence, impassible. Le dégout qu'il éprouvait pour cette femme vampire avait pris le dessus, tout comme l'impression que Maelicia leur avait caché bien trop de choses. Même Danse-Mot, qui semblait pourtant bien acoquiné avec cette magicienne, pouvait avoir été mené en bateau tout du long. Il se risqua enfin à soutenir rapidement le regard de la vampire, histoire de se donner du courage. Les étapes de sa tirade s'emboitèrent enfin dans son esprit, comme si il avait résolu le mystère du cube dwemer.


- Mourir, hein ? finit-il par dire en soufflant sa fumée par le nez. Soyez sûr que nous ne choisirons sûrement pas l'option qui mènera à notre propre destruction. Désignant les traces carbonisées par terre, il ajouta : Toute possibilité de rallonge sur salaire vient de prendre feu et de partir en courant. Du coup, on va être moins motivés à risquer notre peau.

Petite pause et petites bouffées, tentatives un peu trop appuyées, peut-être, d'avoir l'air détendu.

- Ecoutez, Mademoiselle. Toutes vos offres sont alléchantes, mais je n'aime pas agir sous la contrainte. Encore moins quand je commande à mes hommes. Le meilleur chef est celui qui ramène toute son escouade à la maison, pas vrai ?

Tapotage de cendres nonchalant, pour appuyer un peu plus le bluff.

- Voilà ce que je vous propose : congédiez vos trois suivants, sortons d'ici et nous vous mènerons à votre sceptre ; un millier de septims et une exfiltration plus tard, vous n'entendrez plus jamais parler de nous – encore plus sûrement que si vous nous supprimiez.


Dans l'affirmative, cela leur offrirait une porte de sortie plus acceptable pour prendre la tangente, en plus de rétablir la balance de la supériorité numérique ; dans la négative, la situation pouvait difficilement être plus problématique. Il ajouta un dernier argument après avoir calmement rangé sa pipe dans son baluchon.


- Je n'ai pas la prétention de rivaliser avec vos … talents martiaux, mais moi et mes camarades ne sommes pas du genre à nous rendre sans combattre. Et un combat en plein cœur du palais risquerait d'attirer du monde, bien trop pour vos pouvoirs, enfin, … j'imagine.

Modifié par nood, 03 avril 2011 - 11:21.





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