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"Bon. Que faire ?" se demanda-t-elle en scrutant les marécages qui s'étendaient à perte de vue.
Elle s'éloigna du village par le Nord puis bifurqua vers l'Ouest. Elle avait relu ses notes sur la flore de la côte de la mélancolie la veille. Les coprins violets et les russules lumineuses se pressaient au pied de chaque arbre, mais elle n'arriverait pas à en tirer grand chose d'autre que du poison...
Elle contourna une mare de fange malodorante et s'engagea sur une sorte de petite presqu'île. A côté du rivage poussaient des fougères des marais. Elle saisit sa dague et coupa leurs bulbes sporifères en soupirant. Il allait probablement falloir qu'elle s'en contente. Elle arracha également des coprins violets et les mit dans sa sacoche. Ces ingrédients ne lui serviraient à rien, seuls. Et d'après ses souvenirs, elle ne trouverait pas grand chose de plus dans la région.
Elle revint sur ses pas et s'approcha de la mare de fange. En son centre se dressaient fièrement des souilletiges. Avec leurs tubercules lumineux, elle pourrait faire quelque chose... Mais elles étaient inaccessibles.
Elle les contempla. Elles brillaient d'une jolie lueur bleutée.
Elles la narguaient.
"Oh, et puis zut !" pensa l'alchimiste.
Elle avait besoin de ces maudites plantes ! Elle fit le tour de la mare et tenta un pas hésitant sur les rochers glissants. Elle s'aggripa à la branche basse d'un arbre pour ne pas tomber, avança centimètre par centimètre puis se pencha au dessus de la boue. En équilibre précaire, elle tendit la main vers la souilletige et tira de toutes ses forces. Cette horreur était bien accrochée ! Elle recula, reprit sa dague et se pendit à nouveau à la branche. Elle coupa difficilement le tubercule lumineux, alors que la sueur perlait à son front.
Et elle le fit tomber.
Il atterit dans la fange avec un bruit répugnant. Aëana faillit s'évanouir. Ses mains tremblantes de fureur ôtèrent ses chaussures. La brétonne souleva sa robe et posa un pied dans le liquide en décomposition. Elle posa l'autre en réprimant un frisson de dégoût. Elle étouffa un cri lorsqu'elle crut sentir quelque chose bouger contre son mollet. Elle se hâta de couper tous les tubercules lumineux et se précipita sur la terre ferme. Elle resta assise plusieurs minutes, au bord de la crise de nerfs.
Enfin, elle s'essuya les pieds comme elle le put, remit ses chaussures et retourna à l'auberge avec un sac rempli.
Modifié par Timalk-Ae, 23 juillet 2007 - 18:34.