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[rp] Cité Impériale


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284 réponses à ce sujet

#176 Trias

Trias

Posté 17 octobre 2009 - 16:50

Bombe adoucissante
(ne pas agiter avant usage)

20 Soirétoile 3E425, 21H15



Une cascade de bulles dansaient à sa surface de l’onde, tourbillonnant en une valse turbulente au rythme de ses bras. Un pain de savon, évanescent chef d’orchestre, allait et venait, imprimant son tempo aux eaux, dans un bruissement musical. Quelle idée grandiose, ce bain ! Maelicia était aux anges.

Une telle délicatesse effaçait tout. Voilà qui la changeait agréablement de la pesante ambiance de l’après léproserie. Danse-mot avait en effet très mal porté son nom au cours de la dernière demi-heure, s’avérant aussi peu loquace que volubile, épargnant sa salive jusqu’au strict minimum. La brétonne, qui elle même ruminait encore les implications du dernier éclat, n’en avait pas fait davantage : à peine une ou deux exclamations indignées lors du remorquage le long des palissades, quelques protestations entre deux transports de brétonne-bagage, et ce fut tout.

Tout avait changé depuis la gifle. Ou plutôt, la façade maniérée que s’était forgé le lézard s’était-elle estompée, laissant entrevoir un individu rude, pragmatique et calculateur. Il s’était borné à appliquer les étapes d’une trajectoire prédéfinie, auprès de contacts précis et selon une procédure certainement déjà bien rodée. Son geste n’avait pas été sans conséquences, songea Maelicia, mais malgré tout le roublard restait correct.

Le lézard entra dès la neuvième minute, et trouva sa compagne propre, et enveloppée par la serviette de coton prévue à cet effet. Il déposa une gamme raisonnable d’atours féminins, puis s’en fut pudiquement, sans même répondre aux remerciements de la brétonne. Tout en revêtant l’épaisse robe brune brodée doublée d’une gorgerette de coton, les collants sombres, ainsi que ses bottes, elle continua à réfléchir. L’arrivée discrètement prématurée du lézard, de même que la mise hors d’usage de ses vêtements de mage, visaient certainement à s’assurer qu’elle ne recelle pas trop d’objets insolites. En effet, là où certains auraient vu une audace impudente, la rouquine y lisait un penchant avéré pour la  paranoïa.

Revêtant son châle, elle se trouva coincée avec ses gantelets : habituellement dissimulés par d’amples manches, ils juraient avec le reste de son nouvel ensemble. Gênée, elle se contenta de les pendre à sa ceinture. Le même scrupule lui vint pour ses binocles, qu’elle enfila néanmoins après une courte hésitation.

L’argonien entra sur ces entrefaites, s’attabla, et attaqua les divers mets qu’il avait lui même assemblés. Maelicia espérait que le caractère intact du pichet adoucirait quelques peu son humeur. Elle même grignota poliment une portion respectable du pain et de la tourte, et vida son propre broc d’eau.

— Essayons-nous d'établir une tactique d'approche dès ce soir ou aborderons-nous cette tâche l'esprit reposé ? lança-t’il en déplaçant mobiliers divers et variés, et en fixant les hamacs.

— On peut s’en occuper maintenant, si vous voulez, répondit-elle, en se levant de même.

S'approchant pour l'aider dans ses entreprises de ficelage mural, elle se pinça les lèvres un instant, puis baissa les yeux.
« ‘coutez, euh... d’abord, j’voudrais m’excuser pour tout à l’heure. La gifle, j’veux dire, déglutit-elle péniblement. Et puis pour la léproserie aussi. Mais... c’est juste que j’avais cru que... euh...

Elle leva les yeux au plafond, tout en entortillant distraitement un filament déjà solidement noué. L’effort était plus difficile que ce qu’elle n’avait pensé. On aurait dit qu’elle séchait en mysticisme devant le professeur Dreslobet.

« ... c’est juste que j’avais cru qu’c’était vous qu’aviez zigouillé les lépreux d’l’entrée ! Voyez, c’est bête, hein ? Mais z’êtiez à côté... et z’aviez l’air allumé, alors et j’ai sauté aux conclusions. Elle souffla un bon coup. Z’avez toujours été très correct jusqu’ici, et j’suis sure z’auriez jamais fait une chose pareille même pour des sous, donc j’m’excuse pour ma réaction. C'était... puéril.

Cessant enfin d’observer consciencieusement les moellons muraux, elle soupira. C’était dit.

« Bon, c’était les excuses nulles du soir. Maintenant, rapport à demain j’veux dire, j’pense qu’y faudra éviter d’parler du bâton à nos z’invités surprise. La mercenaire en particulier, elle était pas bien claire sur ce qu’elle faisait là. Elle eut une moue de dédain. A mon avis, faudra s’borner à leur décrire  les personnes qu’on cherche et puis c’est tout. C’est largement suffisant pour mener une enquête, z’en pensez quoi ?




ж ж ж
Jeux d'enfant – Partie I
Cache-cache

21 Soufflegivre 3E425 , 01H30



Ses solerets, tout de mailles et d'acier mêlés, ébranlant les lamelles de l'étriqué parquet à chaque pas. Son armure de mailles, ceinte du surcot à l'effigie du reptile ailé, éternel prédateur. Son regard, dur et métallique, lointain reflet du bréton qu’il était autrefois.

Le traqueur parcourait le hall, où s'entassaient prostituées forcées et clients honteux. Clothilde, accroupie dans sa robe de nuit blanche, adossée aux lattes murales, le suivait discrètement du regard tout en câlinant l’enfant. Elle sentait le rythme cardiaque de la bambine battre dans sa main, plus frénétique qu’à l’accoutumée. La petite nordique, sans doute, avait peur.

Soudain, un elfe vêtu richement mais en hâte dévala l’escalier du fond. La vampire reconnut son gibier. Celui-ci, poussant une exclamation de dépit bien sonore à la vue des soldats, se précipita vers le colimaçon menant aux égoûts et y disparut. L’imbécile, pensa Clothilde, tout en abaissant sa tête ainsi que celle de sa protégée.

Bien lui en prit : trois êtres en armes s’élancèrent à la suite du nobliau. Clothilde frémit en ressentant la formidable puissance du sang parcourant le dernier d’entre eux : un Visionnaire était là ! La palpitante présence s’éloigna, s’engouffrant dans les profondeurs des égouts.

Cependant, alors qu’elle relevait sur la scène ses yeux virides, le même magelame bardé de mailles gardait la pièce, ayant fait halte près du perron fatidique. Seul. Tout seul...

Sourire aux lèvres, elle se leva.
« Tu aimes jouer, Kathie ? Ecoute bien, je vais te montrer un jeu... », murmura-t’elle aux oreilles de l’enfant.


ж ж ж



Eddart tenait sa position dans le hall de la maison close. Tels étaient les ordres du Visionnaire. Telle était sa mission. Là s’arrêtaient le champs des possibles et des éventualités. Jusqu’à de nouvelles  instructions.

Une des catins entassées dans l’entrée se leva, poussant délicatement devant elle une blondinette en haillons. Il s’agissait d’une femme de sa race, sa peau d’albâtre à peine dissimulée par une nuisette aux allures de chrysalide, un étrange sourire accroché aux lèvres.

— Salutations, preux chevalier, commença-t’elle, sur un ton envoûtant.
— On ne passe pas, coupa séchement le traqueur, d’une voix bourrue, regagnez votre place !  

L’attention de la communauté bigarrée qui peuplait le rez-de-chaussée était désormais rivée sur eux.

— Bien sûr, immédiatement, beau bréton, continua la prostituée d’une voix étrangement sensuelle, qui donna des frissons au soldat. J’y vais de ce pas, acquiesça-t’elle rejetant l’une de ses mèches dorées en arrière. Cependant, cette enfant a oublié son peigne en... Kathie ? Kathie, reviens là !

L'incontrôlable môme, insensible aux négociations entamées par sa tutrice, venait de s’échapper de ses bras pour gravir les marches vers l’étage, et avait déjà disparu. Avec un cri de dépit, la femme s’élança à sa suite, et Eddart fut contraint de les suivre. Parvenu au premier, son regard se posa sur le dos de la prostituée, sur le galbe de ses hanches et la perfection de ses courbes, à peine voilés par une étoffe bien trop fine pour masquer quoique ce soit.

Cachant son trouble, il saisit l’indocile par la main et la ramena à lui, mais celle-ci trébucha et s’affala dans ses bras. Le contact sa chair, bien qu’atténué par son armure, affola le traqueur. Toutefois, loin de s’y refuser, celle-ci se lova contre son torse, braquant sur lui ses yeux froids et charmeurs. Si la voix qu’elle affectait recelait un rien d’étrange sur lequel il n’arrivait pas à mettre le doigt, l’abysse de ses yeux, invitants, incitants, était littéralement captivant.

Oubliant frères, missions et devoirs il caressa la tentatrice, et il lui fut répondu. Il oublia tout, bien trop rapidement troublé pour que ce soit naturel. Cependant, alors que ses mains gantées parcourraient impérieusement le corps de son égérie, les rivets de cuir qui maintenaient la cohérence de sa cotte de mailles se faisaient trancher un à un par des ongles griffus. Ils tombèrent au sol, enlacés.

— Combien pour tes services, ma belle ? lui demanda-t’il, fiévreux.
La succube lui sourit, avant de répondre.
— Cinq litres, chien !
— Hein ?

Le pauvre traqueur, à moitié hébété par l’envoûtement vampirique n’eut même pas le temps de comprendre que les jambes de la vampire lui emprisonnaient le bassin, et que des griffes aiguisées se plantaient invinciblement dans ses côtes. La morsure suivit immédiatement, privant en quelques violents instants sa proie de la quasi-intégralité de son hémoglobine.

Eddart retomba, mort.


ж ж ж



S’emsyl rajusta les plis de son vêtement, maculé par d’éparses gouttelettes de sang. Puis saisissant le cadavre d’une poigne étonnamment forte, elle  le traîna dans une chambre où elle le bazarda dans une profonde penderie. Elle s’accorda ensuite quelques instants pour revêtir son ensemble de cuir, et ceindre son arc, dissimulés dans sa propre loge.

Assistée par sa perception vampirique, il ne lui fallut ensuite pas plus de quelques minutes pour retrouver la petite nordique, cachée sous le lit d’une des alcôves.
— Je t’ai trouvée, lança-t’elle simplement, en soulevant l’un des pans du baldaquin.
— Ha ! Ha ! Tu as mis longtemps à me trouver ! J’étais bien cachée, hein ! Hein que je m’étais bien cachée !
— A merveille, Kathie.


Aidant la bambine à se rétablir de sous sa planque, elle entreprit ensuite de lui faire enfiler un épais manteau de laine. Tout en se laissant habiller, l’enfant lui toucha les joues.
— Je peux en avoir aussi ?
— Quoi donc ?
répondit distraitement Clothilde.
— Du maquillage. Moi aussi je veux du rouge à lèvres !

Les lèvres pulpeuses luisantes rouge grenat de la vampire se plissèrent en un sourire retors.
— Peut-être. Quand tu seras grande, Kathie... maintenant, ajouta-t’elle en prenant l’enfant par les épaules, on va jouer à un nouveau jeu : les Rois du Silence...

Modifié par Trias, 21 octobre 2009 - 06:43.


#177 Arakis

Arakis

Posté 18 octobre 2009 - 10:20

L'échappé borgne



20 Soirétoile 3E431, 21H15



Après que le dunmer et elle eut fait affaire, Saerileth resta un moment dans le bar, ce qu'elle avait apprit était troublant, le BIIM était sur la trace de quelque chose, et force était de croire que ce quelque chose c'était l'argonien ou quelque chose qui y était lié, ce qui impliquait que la guilde des voleurs s'y intéressait aussi. Après laissé filé un certain temps, elle descendit discrètement vers la calle du Flotteur Bouffi, s'assurant que personne ne venait elle enleva son manteau et le retourna, prit l'arbalète et tournant deux écrous près de la sortie de la gorge fit se rabattre les deux ailes de l'arbalète avant d'en enlever la crosse, avisant un sac en toile non loin elle fourra le tout dedans et repassa son manteau qui paraissait plus un manteau ordinaire un peu usé. Pour parachever le travail elle farfouilla dans son barda et en extirpa une bande de tissu qu'elle passa sur son oeil droit, chargeant le sac sur son épaule elle remonta.

Personne ne faisait vraiment attention à elle, elle sortit sur le quai et s'engagea dans les ruelles avant de tourner subitement, se penchant elle tira la grille d'égout et descendit aussi vite que possible avant de la remettre le plus silencieusement possible. Lâchant les barreaux grignotés par la rouille elle se laissa tomber et atterrit genoux fléchis, une main posée sur la garde d'une de ses épées, elle avança en tâtonnant avant de trouver ce qu'elle cherchait, c'était une chose peu connue mais les voleurs de la guilde laissaient de quoi se faire une torche à chaque entrée d'égout. Ramassant les bandes de tissu elle les entoura autour de son épée et ramassa la flasque posé à coté, l'odeur ne trompait pas : c'était de l'huile à lanterne, elle en enduisit les bandelettes et sortant son briquet à amadou mit le feu à sa torche improvisée.

Le caniveau était large et le niveau de l'eau permettait d'y marcher sans trop de problèmes, ses bottes empesterait pour un moment sans doute mais mieux valait sentir l'égout que de courir le risque d'être suivit. Continuant à patauger elle leva le regard vers le plafond, encore un truc de voleur que lui avait apprit Calahan, au sommet de la voûte était gravée différentes annotations indiquant les différents quartiers, très pratique quand il s'agit de fuir ou d'arriver discrètement quelque part. C'était justement cette dernière raison qui intéressait Saerileth, évitant de marcher sur divers choses dont elle n'avait pas vraiment envie de savoir la nature elle progressa jusqu'au quartier commerçant.

Juste avant de sortir de l'égout elle enleva le bandeau de son oeil droit, souleva légèrement la plaque et jeta un coup d'oeil, personne en vue, elle s'extirpa, découpa deux bandes du sac et enroula ses bottes avec pour ne pas laisser de traces, avisant une fontaine non loin elle courut vers, enleva ses bottes et les passa sous le filet d'eau puis les frotta avec le sac en toile donc elle sorti l'arbalète qu'elle remonta. Une fois ceci fait elle roula le sac en boule et le balança. Elle remit son manteau dans le bon sens et remit son arbalète dans son dos, elle était de nouveau l'Aigle, entrant dans la première auberge qu'elle vit elle paya une chambre et alla se coucher vite fait, pas question d'attirer trop l'attention sur elle, le blocus était levé depuis trop peu de temps pour que les gardes aient laissé entrer une mercenaire comme elle, ce qui impliquait qu'elle était entré avant la fermeture de la cité et à ce moment là comment expliquer que personne n'ait été au courant de sa présence. Elle s'enferma dans sa chambre glissa une de ses épées sous l'oreiller et calla la porte avec une chaise avant de s'abîmer dans un sommeil bien mérité.

Modifié par Arakis, 02 avril 2011 - 10:08.


#178 Ygonaar

Ygonaar

Posté 19 octobre 2009 - 17:30

Léthargie galopante




20 Soirétoile 3E425, 21H40


  
Le reptile s'adossa au mur carrelé, prés, très prés du brasero. Il se servit un gobelet de vin qu'il huma longuement. Il adorait sentir les bons crus, plus que de les boire, à la limite. La première raison en était qu'à l'instar de moult reptile, son odorat était bien plus performant que son goût. La seconde était son redoutable métabolisme d'Argonien métabolisait très vite l'alcool et qu'il n'avait jamais réussi à s'enivrer convenablement. La peau-molle, elle, semblait s'en méfier comme du plus redoutable des poisons.

Il l'observa à la lueur tremblotante, se demandant quelle était la vraie vie de cette oiselle quel était l'intérêt de faire partie d'une élite des plus reconnue si l'on se privait des plaisirs de la vie. Il avait écouté avec intérêt ces tentatives d'excuses, hésitant toujours entre la jeune mammifère engoncée dans ses ornières et la machiavélique sorcière aux talents de comédienne consommés. Un peu de deux, peut-être? Quoiqu'il en soit, son estomac en plein travail et la délicieuse chaleur qui envahissait son corps l'incitait à la bonhomie.

Ne revenons pas la dessus. Je vous l'ai déjà dis, tout est oublié. Je comprends tout à fait que voir quelqu'un sortir une lame puisse inquiéter. Et pour tout vous confesser, lorsque j'étais coincé sous ce tas de ladres et que l'un d'entre commença à me fracasser le crâne, je ne sais plus trop ce que j'ai fait... Enfin, je peux sûrement exclure d'avoir tiré un carreau avec d'une arbalète que je ne possédais pas... Bref, je voulais juste souligner que je connaissais cette Saerileth de réputation. Si elle s'était montrée agressive, il y a de bonne chance que je sois tombé raide mort avant d'avoir put tirer une arme. J'ai donc préféré anticiper, car cette possibilité ne m'avait pas parut si improbable, dans les grottes.

Le saurien ajusta son tabouret et déplia langoureusement sa queue vers le foyer. Il ne lui manquait plus qu'une moite humidité et le crissement lancinant de quelques insectes amoureux... Son discours, en revanche, était bien moins languide.

Ni maintenant, d'ailleurs. Il est possible que ce Drem fasse effectivement partit de la Garde Impériale, les meilleurs mensonges étant bien souvent étayés de vérité, mais cela n'explique en rien sa présence dans les caves de l'hôtel. Quant à la chasseuse de prime, elle a tout bonnement éludé la moindre explication. Ce qui me fait rebondir sur votre question. Si la prudence exige qu'on ne leur donne que le moins d'explication possible, il est aussi défendable de faire un pari osé. Je vous explique. Il semble assez vraisemblable que nos compères soient à la recherche du sceptre, voir travaillent pour S'emsyl. Ils en savent alors probablement autant que moi sur cette histoire. Le leur révéler à bon escient pourrait leur faire croire que nous leur faisons confiance, ce qui peut toujours s'avérer utile pour user ensuite de désinformation, feindre le manque de vigilance, voir provoquer le lapsus révélateur. Le principal risque, conclut Danse-Mot, est qu'ils vendent nos informations au premier venu si leurs malversations n'ont rien à voir avec Sh'éam. Et donc d'avoir à nouveau la Wyvern aux basques, ce qui peut se révéler pénible au beau milieu du palais impérial!


C
es paupières se fermaient progressivement au fur et à mesure qu'il parlait. Il ne resta bientôt que deux minces fentes rougeoyant faiblement dans son visage d'ébène. Le strict minimum pour observer la Brétonne.

— Après évidemment, ça dépend de ce que l'on recherche et des moyens à notre disposition pour ce faire. Pour ma part, je sais juste que vous êtes en quête d'un carrosse blasonné. Comment s'est passé l'entretien avec Causant? Il ne c'est pas trop fait tirer l'oreille? Et qu'a-t-il put vous apprendre?

Il se tut un moment, apparemment tout à son nectar vinicole, mais observateur très attentif remarquerait que ses pupilles ne quittaient pas les lèvres de sa compagne. Il fit ensuite part de ses dernières réflexions.


Dans tous les cas, il va nous falloir déjouer au moins l'éventuel piège grossier. Vous vous rendrez seule au rendez-vous, prétextant que je suis en train de me faire soigner au besoin. J'irai pour ma part inspecter les lieux bien plus tôt et je me tiendrai en couverture. Evitez, je vous pri,s de me chercher. Il y a peu de chance que vous y arriviez mais cela pourrait mettre la puce à l'oreille des autres. Nous conviendrons d'un signal si je dois vous rejoindre, ce qui se fera de toutes manières au palais au plus tard. L'idéal, bien sur, serait que vous ayez à votre disposition quelques sortilèges pour que nous puissions communiquer à distance, comme cet avertissement dans la léproserie. Et si en plus je pouvais entendre votre conversation...

Il gémit intérieurement lorsqu'il évoqua son besoin de soin. Il n'allait pas pouvoir se laisser glisser de suite dans les bras accueillant du sommeil. Il lui fallait encore faire appel à la Sève pour continuer de consolider ses os. Il n'en avait pas finit avec la souffrance.



ж ж ж


...Enfin, si vous le voulez bien.



21 Soirétoile 3E425, 08H17



- Hem... Écoutez, commissaire... Je ne suis pas contre le fait d'utiliser des sondages mentaux. Mais ceux que j'ai vus, quand j'étais en service en Morrowind, ne m'ont pas laissé des souvenirs très heureux. Cela m'a toujours étonné que l'Empire permette l'utilisation de tels procédés, dont il n'a jamais été prouvé qu'ils sont fiables et inoffensifs à cent pour cent pour le sujet sondé. Alors, je suis d'accord pour les utiliser sur des criminels, lorsque le besoin s'en fait cruellement et indiscutablement sentir, mais j'avoue que par conviction, je ne suis pas favorable à de telles pratiques sur moi ou l'un de mes pairs. C'est le scientifique qui vous parle, ici, commissaire. Surtout que j'imagine mal quel renseignement supplémentaire et utile on pourrait en tirer, dans la situation présente. Peut-être la couleur des bottes de cet Impérial, et encore...

  La réponse du Dunmer ne départit pas le Chevalier de son air inspiré.

Vous savez, avec un opérateur compétent, les risques d'incident sont des plus minimes, et avoir accès à vos perceptions me permettrait sûrement de reconnaître l'Orateur si je le croisais. Mais je comprends vos prévenances, d'autant plus qu'il est extrêmement difficile de ne pas percevoir quelques pensées intimes et hors sujets pendant la manœuvre. Bref, n'en parlons plus. Il vous faut en revanche impérativement quitter ses défroques sur-le-champ. Il ne manquerait plus que nous déclenchions une épidémie de lèpre! Je vous invite donc à vous rendre à notre cabinet de toilette. Usez-en comme bon vous semble, je vous fais parvenir de nouveaux atours juste avant de visiter les hospitaliers de Stendarr. Tissus ou pourpoint de cuir? Et où pourrais-je vous joindre au besoin, à votre caserne?

Modifié par Ygonaar, 19 octobre 2009 - 17:45.


#179 nood

nood

Posté 23 octobre 2009 - 20:58

Dernier aller-retour

21 Soirétoile 3E431, 08H17

- Vous savez, avec un opérateur compétent, les risques d'incident sont des plus minimes, et avoir accès à vos perceptions me permettrait sûrement de reconnaître l'Orateur si je le croisais. Mais je comprends vos prévenances, d'autant plus qu'il est extrêmement difficile de ne pas percevoir quelques pensées intimes et hors sujets pendant la manœuvre.

Drem fut soulagé de ne pas avoir à se défenestrer lui-même pour échapper au sondage mental. Soulagé d'abord parce que cela lui évitait toutes sortes de désagréments médicaux consécutifs à une telle acrobatie, mais aussi et surtout parce qu'il conservait sa couverture pour le reste de la journée. On ne pénètre pas dans le Palais Impérial comme dans un moulin, a fortiori si le BIIM lui avait fait l'honneur de lancer un mandat impérial sur sa tête.

- Merci de votre compréhension. Vous savez, je ne doute pas des compétences de vos orateurs, mais bien du procédé lui-même. Enfin, si quelques réminiscences me reviennent, croyez bien que je vous en tiendrai informé dans les meilleurs délais.
- Bref, n'en parlons plus, reprit Valens. Il vous faut en revanche impérativement quitter ses défroques sur-le-champ. Il ne manquerait plus que nous déclenchions une épidémie de lèpre ! Je vous invite donc à vous rendre à notre cabinet de toilette. Usez-en comme bon vous semble, je vous fais parvenir de nouveaux atours juste avant de visiter les hospitaliers de Stendarr. Tissus ou pourpoint de cuir? Et où pourrais-je vous joindre au besoin, à votre caserne ?
- Merci beaucoup. Pour ce qui est de mon programme de la journée, je pense rejoindre ma caserne ce matin, m'octroyer quelques heures de repos, et j'irai ensuite sûrement fouiner du coté des marchands et ensorceleurs du coté du Quartier du Marché. Cette petite bagarre magique m'a fait remarquer que mes sorts n'étaient plus si réactifs que jadis : il y a bien longtemps que je n'ai point pratiqué en situation réelle. Un peu de théorie auprès d'un initié, quelques chapitres de livres et un peu d'entrainement seront les bienvenus. Et pour les habits, je préfèrerai le tissu, s'il vous plait. Encore une habitude de mage qui me revient, sans doute.
- Fort bien.


***

21 Soirétoile 3E431, 08H40


Quelques minutes plus tard, Drem était nu comme un ver Dans le cabinet de toilette Du Bureau Impérial d'Investigations Magiques. Une bassine d'eau fumante, du savon à la lavande et des linges lui avaient été fournis, ainsi qu'une panoplie d'habit de bonne facture. Il se frotta méthodiquement : la sensation de propreté et de chaleur, après s'être trainé dans la poussière de la léproserie et avoir arpenté une bonne partie de la Cité Impériale, lui fit le plus grand bien. Equipé de ses nouveaux vêtements et lavé sous toutes les coutures, il a avait plutôt fière allure. Le pantalon ocre, taillé pour un Dunmer normal, probablement, était à peine ample : mais il était confortable et épais, parfait pour le climat hivernal qui rendait l'air extérieur froid et sec en cette matinée. Une chemise de lin beige à col lacé et une épaisse veste matelassée achevaient sa parure de vêtements, simples mais de bonne qualité. Il omit de d'obéir au code de tenue vestimentaire des légionnaires en laissant intacte sa barbe de quelques jours et en replaçant ses quatre petits anneaux cuivrés et dorés dans les lobes de ses oreilles d'elfe. C'est habillé comme un vrai citadin sur son trente et un qu'il quitta l'office du BIIM et prit la direction du quartier du port, du pas décidé de quelqu'un qui sait où il se rend. Il sortit de la porte où se trouvait l'enseigne du Bureau pour rejoindre quelques mètres plus loin la rue principale qui se dirigeait droit au sud. Il suivait une trajectoire erratique, se mêlant à un groupe de personnes, s'arrêtant de-ci, de-là, pour quitter la rue abruptement au moment où une carriole transportant des ballots de couverture le cachait à la vue des passants. Située hors de portée de voix de la rue principale (qui était à présent très animée), la petite ruelle déserte donnait sur les arrières cours de nombreuses maisons de pierres plutôt cossues dont le toit était à une bonne quinzaine de pieds du sol pavé et humide. Drem s'arrêta enfin, regarda furtivement à la cantonade pour s'assurer que personne ne l'avait suivi et leva les yeux et la main gauche. Un petit son caractéristique dérangea subrepticement le silence alors que l'elfe exécuta un léger sort de télékinésie, faisant tomber à lui un petit baluchon de toile usée, dissimulé dans un recoin de pierre de l'édifice qui lui faisait face. Lorsqu'il en vérifia le contenu, il fut soulagé de voir que l'anneau de forme d'ombre et les quelques dizaines de pièces d'or, soit le reste de son équipement de mission qu'il avait soi-disant "perdu" au fond de la léproserie, s'y trouvaient toujours. Il les mit dans sa poche et reprit son trajet vers la caserne du quartier du port de manière aussi discrète qu'avant.

***

17 hautzénith 3E380, 13H15

L'air moite de la jungle de la frontière entre Morrowind et l'Argonie était à présent caniculaire et affreusement humide. Empli des crissements incessants des espèces de grillons locaux qui s'évertuent à trouver une partenaire pour perpétuer l'espèce, il exhalait les relents des contreforts boisés et des marécages tout proches. Une senteur de charogne chatouillait les naseaux de Respire-En-Silence, qui pour une fois portait très mal son nom. Il suffoquait sous l'effet conjoint de la chaleur et du fardeau qu'il portait depuis déjà de nombreux milles : un elfe noir avec une vilaine blessure qui l'incapacitait sévèrement. Le Dunmer avait reçu un carreau d'arbalète foutrement bien tiré dans l'épaule gauche, et l'Argonien s'étonnait qu'il soit encore si vivace. D'autres auraient déjà péri de la perte de sang et de la douleur à sa place.

- Est-ce que tu veux qu'on fasse une pause, Drem ? demanda le reptile.
- Comme tu veux, répondit l'intéressé entre deux rictus de douleur mal contenus.

Il se laissa choir avec précaution sur un talus recouvert de mousse. Il sentait la flèche plantée dans son omoplate lui lancer une douleur tenace à chaque changement de position. Son compagnon d'infortune avait déjà brisé le projectile aux trois quarts de sa longueur, ne laissant qu'un court bâton sortant de la clavicule de Drem.  Le sang maculait sa tunique de mage et continuait à laisser une trace visible de leur passage sur le sol, malgré les nombreux sorts de cicatrisation qu'il s'était auto-appliqué depuis plus de trois heures. L'Argonien s'esquiva sans un mot dans les broussailles environnantes, laissant l'elfe seul avec sa blessure. Il ne reparut que quelques minutes plus tard, mâchouillant une plante inconnue de ses crocs acérés. Il cracha dans sa main une mixture vert sombre qu'il appliqua au mieux sur la blessure.

- Sans te mentir, j'en connais qui seraient déjà morts, à ta place, dit-il posément.
- Il faudra pas trop traîner à retrouver le fort, répondit Drem. Je commence vraiment à me sentir faible.

Son teint bleu gris avait en effet perdu de l'éclat et son regard se fit sombre, comme éteint. Il souffrait depuis maintenant quelques heures et ne devait sa survie qu'à sa présence d'esprit, ses connaissances en sorts de Guérison d'urgence, et aussi, avouons-le, à une bonne dose de chance. Les deux aspirants qui étaient venus avec eux n'en avaient pas eu autant : tout au plus avaient-ils pu constater que leur mort fut rapide et définitive. Partis en reconnaissance en petite formation à quatre lieues et demi du Fort Phyrène, leur quartier général, ils étaient tombés en embuscade sous de nombreux traits ennemis - un ennemi dont ils n'avaient pas réussi à voir ne serait-ce que la couleur. Constatant que les trois quarts de son unité était morte ou blessée, Respire-En-Silence avait pris à contrecœur la solution de la fuite, et s'était même résolu, chose rare, à laisser les cadavres derrière lui pour sauver sa peau écailleuse et celle, plus sombre et tendre, de son camarade d'escarmouche. Le moine Argonien avait littéralement tiré Drem d'un mort certaine, le transbahutant du mieux qu'il le put en direction du fort, avec toute la célérité et la discrétion permise.

- Tu tiendras, reprit calmement le moine, guettant alentours les bruit de sa forêt natale. Sous des aspects chétifs, tu es plus solide qu'un bout de bois. On a fait la plus grande partie du chemin, ce n'est certainement pas maintenant que tu vas me lâcher.

Le reptile était d'une espèce rare : celle des capitaines efficaces, attentifs et posés, le genre de chef élu par ses soldats, c'est-à-dire la meilleure partie d'entre eux. Chacune des paroles que distillait sa voix à la fois douce et autoritaire rassurait l'elfe noir. Il le savait de bon conseil et terriblement impliqué dans son travail de capitaine de section, place qu'il occupait depuis une bonne trentaine d'année. D'abord simple guide recruté parmi les autochtones, il avait prouvé sa valeur au combat à force de succès dans le pistage et l'arrestation de nombreux mafieux locaux, puis était monté en grade et dirigeait maintenant l'instruction des recrues et certaines patrouilles de reconnaissance. Il reprit la parole, coupant un silence de plusieurs minutes.

- Maintenant, ce que je vais te dire ne vas pas te plaire, mais tu auras tout le temps de le méditer pendant ta convalescence qui risque d'être longue. Et je prédis même que se sera une motivation pour toi. Si aujourd'hui, deux des nôtres ont péri, et que tu as été touché aussi gravement, c'est avant tout parce que l'on a laissé de côté la surveillance de cette zone ces derniers temps. Mais c'est aussi à cause de ton entêtement à ne pas vouloir mettre d'armure. Tu n'as pas mes capacités en esquive ou en détection pour pouvoir éviter les traits ; et tu ne les auras jamais, à mon avis. Ce n'est pas ta voie ; la tienne est celle d'un bretteur doublé d'un mage offensif. Sans armure, tu ne progresseras jamais, ou trop peu pour te donner l'avantage. Avec une armure, le carreau d'arbalète qui t'a touché aujourd'hui ne t'aurait pas tant blessé, et peut-être aurions-nous eu un avantage tactique qui nous aurait permis de contre-attaquer. Avec une armure, tu pourrais véritablement devenir un Magelame tout à fait correct, ne pas craindre le corps à corps comme tu le fais encore aujourd'hui, et survivre à ce genre d'attaque. Sous des dehors maigrelets, ta constitution physique est adaptée au port d'une armure, même incomplète. Remballe ton orgueil de mage, suie ta voie et enfile une armure.


***

21 Soirétoile 3E431, 09H05

Drem traversa sans bruits la cour de la caserne du Quartier du Port, fonçant droit vers son baraquement de pierre grise, en priant pour éviter de croiser son nordique de capitaine. Non pas que cela aurait contrarié ses plans, avoir à lui parler l'aurait contrarié tout simplement. Il pénétra dans la chambrée : deux recrues ronflotaient dans un coin, très probablement une partie de l'équipe de nuit en train de combler son retard de sommeil. Assis sur son lit, dans la chaude quiétude de la respiration régulière de ses deux co-légionnaires et des bruits étouffés de la ville traversant faiblement les murs, il se mit, pour la première fois depuis le début de la journée, à douter de ses choix récents. Il allait bientôt déserter, abandonner son poste, tenter de duper toute la bureaucratie et la hiérarchie de la Légion Impériale. Il allait s'exposer à tout un cortège de représailles judiciaires en cas de problème dans son plan. Qu'importe ; il n'avait que trop joué le larbin des Impériaux et avait donné trop d'années de sa vie à l'Empire, dont il n'avait reçu que mépris et réprimande depuis fort longtemps. C'est dans l'idée qu'il respirait dans les murs de cette caserne pour la dernière fois qu'il enfila fièrement son armure. Dégrafant les boutons du pourpoint matelassé fourni par Valens, il songea fièrement à cette armure qu'il avait eu tant de mal à faire accepter par ses supérieurs, à son arrivée en Cyrodiil. Drem n'avait jamais voulu, à la fois par esprit de contradiction et par incompatibilité corporelle, se plier à enfiler l'armure réglementaire du légionnaire de seconde classe. Il s'était battu bec et ongle, multipliant les requêtes auprès de la hiérarchie et du médecin de caserne, pour avoir le droit de porter son armure personnelle. Ce n'est qu'au bout de plusieurs mois qu'il avait obtenu l'aval de ses supérieurs, invoquant le fait que sa classe au sein de la Légion était bel et bien Magelame malgré sa rétrogradation, pour enfiler l'armure de "ceux qui sont le parfait équilibre entre l'esprit et l'acier." Le fardeau de l'épais manteau de cuir de guar doublé par une cuirasse et des épaulettes d'acier lui sembla réconfortant, rassurant même. Son armure, plus aussi éclatante mais bien plus seyante que dans ses premières années, était affublée d'une capuche de teinte ocre, s'harmonisant avec les tons discrets de du cuir, symbole des Magelames et des Mages de guerre. Il adorait son armure, réellement : elle lui rappelait sa (petite) victoire sur le dirigisme de ses supérieurs, son passé fait d'étude magiques et de vrais moments d'héroïsme au fond de la jungle du Sud de Morrowind, elle semblait lui dire qu'il était autre chose qu'un trouffion à la botte d'Impériaux encore plus stupides que lâches, recroquevillés derrière leur simulacre de civilisation parfaite, qui n'était qu'un pâle copie de celle des Aldmers. Il sangla ses protections d'avant-bras et mis ses gantelets en cuir, enfila ses bottes et mis dans son baluchon de toile le reste de ses effets personnels qui jonchaient le fond de son coffre. Dix heures sonnèrent à la chapelle des Neufs, non loin de la caserne, lorsque Drem s'en fut de celle-ci, bien convaincu que c'était la dernière fois qu'il foulait les pavés de la cour intérieure de ce quartier maudit qu'il détestait par-dessus tout.

Modifié par nood, 03 avril 2011 - 11:37.


#180 Trias

Trias

Posté 24 octobre 2009 - 23:54

Les yeux fermés

20 Soirétoile 3E425, 21H40




Les reflets rougeâtres des braises vacillaient, hypnotiques, à travers les ouvertures du brasero de fonte. Leur lueur, leur chaleur paraissaient issues d’un autre monde, et transformaient l’étrange cave dans laquelle ils logeaient en foyer accueillant.

Tout en assurant les lanières de son propre hamac, Maelicia écouta avec attention les explications du lézard. Elle éprouva une sourde sensation de joie en apprenant qu’il n’avait fait que se défendre contre des mézeaux finalement un peu trop audacieux ; son ami n’était donc pas un meurtrier. Ses réserves passées s’envolèrent, à présent vagues et lointaines, souvenir oublié d’un conflit détestable.

Soulagée, elle s’assit, puis s’accouda à la robuste planche de chêne qui, maintenue par de lourds tréteau, servait de table. Danse-mot évoquait, ou plutôt semblait réfléchir à haute voix sur la possibilité d’un double jeu vis à vis de leurs deux suivants.

—  Le principal risque, résuma-t’il, est qu'ils vendent nos informations au premier venu si leurs malversations n'ont rien à voir avec Sh'éam. Et donc d'avoir à nouveau la Wyvern aux basques, ce qui peut se révéler pénible au beau milieu du palais impérial !

— Plutôt, oui, renchérit l’étudiante, en reposant sa tête sur son bras accoudé. Seulement...j’crois pas qu’y bossent pour les disciples. Y z’auraient aucun intérêt à nous suivre si c’était le cas ; j’pense qu’y nous auraient tués quand y z’auraient pu, histoire d’être tranquilles une fois pour toutes. C’est plutôt l’inverse qu’ils ont fait, en fait...

Inconsciemment, elle s’affala encore davantage sur le meuble improvisé, analysant au fur et à mesure les informations dont elle disposait :

« Y z’étaient deux à nous avoir suivis et pourtant z’aviez pris vos précautions... Y sont donc sûrement membres d’une organisation bien informée, et qui chercherait à avoir davantage d’indices... ou même carrément le bâton, en nous faisant suivre. Comme... une sorte de police en fait. Ca expliquerait qu’y z’aient accès au palais... Du coup, autant faire attention à c’qu’y puissent pas nous doubler, non ?

—  Ca dépend de ce que l'on recherche et des moyens à notre disposition pour ce faire, tempéra le roublard. Pour ma part, je sais juste que vous êtes en quête d'un carrosse blasonné. Comment s'est passé l'entretien avec Causant? Il ne c'est pas trop fait tirer l'oreille? Et qu'a-t-il pu vous apprendre ?

— Oh, sourit la rouquine en se frottant les yeux, le barde brun avec la barbichette et le nez allongé ? Habillé en clown ? Il a tenté de décamper dès qu’il m’a vue...

Ses yeux s’ouvrirent de nouveau en grand, et l’émeraude de ses iris brilla de nouveau lorsqu’elle évoqua le souvenir.

« Vous saviez qu’il avait un anneau de renvoi de sorts ? Et pis il était pas galant avec ses fléchettes, l’a bien failli m’perforer l’derrière une ou deux fois ! Et même pas causant en plus !

Elle eut un rire perlé.
Vous savez qu’il m’a comparée à un pot, lui aussi ? Vous d’vez avoir des répliques préconcues, vous, les bardes... Enfin, l’a bien fini par me dire qu’y s’était fait soutirer le sceptre par un noble... et un valet, de taille moyenne, avec un accent, et en livrée du palais. Il arrêtait pas d’parler de Namira ! J’sais aussi qu’il a été payé en septims, et le quinze de Sombreciel. J’crois bien qu’c’est à peu près tout.

L’argonien ne pipa mot pendant qu’elle parlait. Puis, il lui exposa un plan consistant à le faire suivre leur nouveau groupe à leur insu. Maelicia, qui commençait à être sérieusement somnolente, s’était de nouveau avachie sur la table, son front reposant sur ses deux bras désormais croisés.

— L'idéal, bien sur, expliquait-il, serait que vous ayez à votre disposition quelques sortilèges pour que nous puissions communiquer à distance, comme cet avertissement dans la léproserie. Et si en plus je pouvais entendre votre conversation...

— Mmmhh, tout c’que vous *baillement* voudrez, Danse-mot. Vous faudra simplement deux amulettes... j’ai des pierres esprit dans ma poche *nouveau baillement*, j’les enchanterai pour qu’on puisse s’entendre...

Elle releva rêveusement la tête, observant le lézard, forme noire au fond de la salle, ses yeux réduits à deux filets rougeoyants à la lueur des braises.

— Bon, sur ce, ajouta-t’elle en se levant, j’vous dis bonne nuit *baillement* Danse-mot.

La rouquine se hissa dans son hamac, et s’y lova en se servant de son épaisse robe de mage comme d’une bonne couverture.

« Faudra qu’vous m’parliez du Marais Noir... un jour, murmura-t’elle rêveusement, les yeux clos, d’une voix ensommeillée. Ca *baillement* doit être un endroit bizarre....

A peine quelques instants après, et déjà, sa respiration devenait régulière. Son bras tomba mollement hors du hamac, témoin de la dissolution de son tonus corporel. Le petit bout de femme qui se faisait connaître sous le nom de Maelicia s’était désormais abandonné aux mains réparatrices de Morphée.




Jeux d'enfant – Partie II
Les Rois du Silence

21 Soufflegivre 3E425, 01H40





S’emsyl hasarda un regard inquisiteur par la fenêtre : la voie était libre. Trop libre même, les rues environnantes semblant avoir été désertées de toute vie. Elle jeta un coup d’oeil à l’enfant, assise à califourchon sur ses épaules. La bambine lui rendit son sourire : elle ne soufflerait pas un mot, pas si facilement du moins. Le moment était venu.

D’une détente agile, elle parcourut d’un bond la distance qui la séparait de la chartreuse en vis à vis, s’accrocha d’une main leste à un relief de la façade, puis se hissa d’une traction sur le toit. Une fois au sommet, elle inclina à nouveau la tête pour surveiller sa passagère : celle-ci retenait stoïquement son rire, amusée au plus haut point par l’exercice. Le silence était complet.

Rassérénée, un nouveau saut l’amena sur les tuiles d’un bâtiment voisin. S’immobilisant à nouveau, elle fit volte face et scruta attentivement la maison close. Les derniers traqueurs n’en étaient pas encore sortis, de toute évidence cet idiot d’Orvas devait essuyer un interrogatoire des plus cuisants. Elle effectua un geste obscène de la main, puis se souvint qu’elle avait une enfant « sur le dos », et s’empressa de le maquiller en recoiffage rapide.

Puis, toujours sans un mot, toit après toit, la stryge mit de la distance entre elle et son ancienne base d’opérations. Soudain, l’étrange sentiment d’être observée s’empara d’elle. Faisant halte sur l’une des toitures, elle observa attentivement les alentours, aux quatre points cardinaux. Quelque chose, un je-ne-sais-quoi d’indéfini clochait dans ces indistinctes bâtisses.

Brusquement, elle sentit l’enfant se cramponner à elle : levant la tête, elle aperçut une serre immense obscurcissant le ciel. Jurant, elle roula de côté dans un foudroyant réflexe de sauvegarde, puis se propulsa dans le vide de ses deux jambes. La gueule d’un lézard immense recouvert d’écailles s’ouvrit, béante, et un rugissement assourdissant en surgit : le Dragon du Visionnaire était sur eux.

L’enfant hurla de terreur alors que la gigantesque bête tendait une autre de ses pinces, mais la vampire réagissait vite, et les serres de la bête n’écorchèrent que le vide. Une course effrénée débuta alors,  poursuite sans issue entre un prédateur et sa proie.

La morte-vivante avait beau forcer de toute la vitesse de ses membres, faire des bonds magistraux et changer constamment de direction, elle s’avéra incapable de semer le monstre ailé. Puisant dans ses capacités vampiriques, forte du volume de sang ingéré, elle en consomma une importante quantité pour augmenter sa rapidité. Déjà surnaturelle, sa vitesse devint proprement hallucinante. Les éclats de terre cuite soulevés par ses réceptions sur les tuiles n’avaient même pas le temps de retomber qu’elle était déjà partie à l’assaut d’un autre bâtiment.

Mais rien n’y faisait, par larges bruissements d’ailes, le dragon maintenait sa cible en mire. Des lames enflammées frôlaient même désormais les deux fugitives, afin de les ralentir. Tentant par tous les moyens de le semer son adversaire, la morte alla même jusqu’à s’infiltrer dans les bâtiments, pour ressortir l’instant d’après dans une direction différente par une ouverture dérobée.

En vain : l’infernal souffle du monstre écaillé les poursuivait toujours. Ce ne fut qu’après un saut particulièrement élevé que S’emsyl en comprit la raison : solidement perché sur le col de la bête, Raegar, le Visionnaire, les suivait mentalement. La malheureuse comprit alors l’étendue de son erreur : le Dragon avait averti le Visionnaire de sa fuite depuis le ciel, tandis que le Visionnaire communiquait à la bête la position de son esprit dans les bâtiments. La Traque, était sans échappatoire.

Elle tenta alors l’attaque, mais ses éclairs étaient gênés par le transport de l’enfant, et contrés par les talents du traqueur. Son désespoir la mena par dessus le champs de bataille du quartier pauvre, puis près du lac. Là un violent revers de la queue de l’animal fit chavirer l’enfant, et, après une brève hésitation, S’emsyl n’eut d’autre choix que de se jeter au sol pour amortir la chute.

Le choc fut dur, même pour une Disciple, et la laissa épuisée. Se redressant légèrement, dos au dragon, elle regarda l’enfant dans ses bras : saine et sauve, mais terrifiée.

— Ne pleure pas Kathie, lui sussura-t’elle avec un sourire : c’est toi qui as gagné le jeu, tu sais.

Un choc lourd l’informa que le dragon venait d’atterrir. Elle sut sans même se retourner, qu’il se préparait à les consumer de son souffle.

— En récompense, continua Clothilde, je vais te dire un secret... la pression de ses bras s’accentua, et une larme perla au coin de ses yeux pâles : ma petite soeur... portait ton nom...

Un impact terrifiant fit vibrer leurs cages thoraciques. L’obscurité était venue, mais pas la mort : le titanesque géant d’ébonite connu sous le nom du Silence de Sh’éam avait jailli du lac et fondu sur le dragon du Visionnaire. Si la bête, toute de chair et d’os, était lourde, la masse du colosse était proprement inimaginable : la monture ailée fut renversée, et son cavalier ejecté.


Raegar se releva, pantelant, juste à temps pour assister au féroce affrontement entre le monstre d’ébonite et le dragon acculé. Le spectre cuirassé s’était emparé du crane du reptile, plaquant la tête de celui-ci contre son torse, une lame de chaque côté de son cou. Une trombe enflammée jaillissait de son heaume, alors que la bête piégée peinait pour se libérer, puis s’interrompit brutalement : le dragon venait d’être décapité. La pression conjuguée des deux lames s’était avérée excessive.

Le cri du Visionnaire, désespéré, s’interrompit tout aussi brutalement. Sa tête, choquée, retomba, l’ultime éclat d’un cimeterre ensanglanté s’imprimant dans sa rétine.

— Shar’hasmshir, te salue, S’emsyl, déclama le second disciple, en relevant la vampire.

Modifié par Trias, 28 octobre 2009 - 07:43.


#181 Ygonaar

Ygonaar

Posté 31 octobre 2009 - 16:32

Quiétude

  

  

20 Soirétoile 3E425, 21H50

  

  Ils s’étaient mis d’accord pour en révéler le moins possible à leurs mystérieux « alliés ». La tension entre Maelicia et lui semblait s’être dissipée dans leur havre rudimentaire. Dans cette probable mais provisoire sécurité, l’estomac plein et bien au chaud, les épreuves de la journée lui semblaient loin. Main-d’Ombre se méfiait d’un tel état, propre à abaisser la vigilance et se laisser aller à de malheureuses confidences. Pourrait-il en profiter pour en apprendre un peu plus sur la Brétonne ? Il lui restait un peu d’herbe de lune qui lui permettrait de tisser une subtile ambiance pour la faire parler. Mais c’était elle-même une illusionniste émérite. Pourrait-elle s’en apercevoir ? Résister ? Avait-il l’envie et la force d’affronter un nouveau conflit ? Non. Il allait devoir s’asseoir un peu sur sa prudence et accepter pour l’heure telle qu’elle l’était sa collaboration avec la sorcière…
  
— Oh, le barde brun avec la barbichette et le nez allongé ? Habillé en clown ? Il a tenté de décamper dès qu’il m’a vue... Vous saviez qu’il avait un anneau de renvoi de sorts ? Et pis il était pas galant avec ses fléchettes, l’a bien failli m’perforer l’derrière une ou deux fois ! Et même pas causant en plus !
  — Un anneau de renvoi de sorts ? Je ne sais même pas ce que vous entendez exactement par là… j’avais pressenti qu’il avait plus de ressource qu’il ne voulait bien l’afficher, mais je l’aurai cru moins véhément et plus courtois.

  La remarque la fit rire. Elle lui renvoya l’aspect fluctuant de sa propre aménité.
— Vous savez qu’il m’a comparée à un pot, lui aussi ? Vous d’vez avoir des répliques préconçues, vous, les bardes...
  — J’espère au moins ne point l’avoir trop plagié ?

  

Ai-je honte de mon fiel ou d’avoir été pris ?

  

Ô muses si cruelles que me voila réduit

  

Aux mauvaises pastourelles d’un rimeur malappris

  

Refusant à cette belle une discussion polie !


  — Enfin, l’a bien fini par me dire qu’y s’était fait soutirer le sceptre par un noble... et un valet, de taille moyenne, avec un accent, et en livrée du palais. Il arrêtait pas d’parler de Namira ! J’sais aussi qu’il a été payé en septims, et le quinze de Sombreciel. J’crois bien qu’c’est à peu près tout.
— Namira ? N’est-ce pas une sorte de démon ? Aurait-elle une trame à tisser dans notre écheveau ?

  
  

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Terreurs nocturnes

  

  

21 Soirétoile 3E425, 02H05

  

  Ils n’avaient guère tardé à se lover dans leurs hamacs, après avoir soigneusement barré la porte bien sûr. Le sommeil le happa presque aussi vite que sa compagne, bien qu’il n’eut à son grand dam aucun familier pour monter la garde. Il n’eut hélas pas la faveur d’une nuit sans rêve. Un hurlement de terreur tira Maelicia de son repos. Elle aperçue hébétée la sombre silhouette du reptile luisant faiblement à la lueur du brasero déclinant. Il était dressé, sifflant comme un nid de serpent, prêt à mordre ou à frapper de ses deux dagues quelques invisibles ennemis. Ou la première personne qui s’approcherait.

  L’Argonien reprit rapidement ses esprits et avoua, encore tremblant, que le monde s’était désintégré autour de lui dans ses songes. N’ayant pas retrouvé toute sa maîtrise de lui, il confia alors maladroitement la terrible sensation qu’il ressentait à chaque fois que la mage le téléportait. Il finit de dissiper son stress en mâchonnant les reliefs de leur dîner avant de se recoucher.

  
  

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L’ami Ricoré

  
  
  

21 Soirétoile 3E425, 09H40

  

  Les effluves du bol encore chaud lui chatouillèrent les narines. La jeune femme s’étira en baillant. Le saurien, qui était afféré à se peindre en bleu cobalt avec une quelconque mixture poisseuse posa son pinceau.
  — Bien le bonjour, ô Rayon de Soleil dans cette antre ténébreuse. Le petit déjeuner vous attend. Vous serez peut-être heureuse d’apprendre que le lait frais est à nouveau disponible dans la cité. Ainsi que les oranges ! Restaurez vous à votre convenance, nous ne sommes pas encore prit par le temps. Et je n’aurai certainement pas l’outrecuidance de vous rappeler que vous devez opérer à quelques sorcelleries…

  Alors que la jeune femme se sustentait, Main-d’Ombre entreprit de se parsemer de chatoyantes tâches de personnalité vertes. Il s’habilla ensuite d’une tenue anthracite, épaisse et plutôt austère, ceint un glaive court à la mode impériale et se coiffa d’une large faluche.
  — Hume-les-Bolets, négociant en champignon, aillant profité de la pénurie pour écouler avantageusement son stock. Lui expliqua-t-il d’un ton jovial. Ce qui ne l’empêcha  ensuite d’inspecter minutieusement une lourde arbalète et une douzaine d’épais carreaux. Il les rangea dans un sac à dos rigide, tout en longueur, à la mode des portefaix, la recouvrit de quelques mycètes et expliqua ses projets.

  Lorsque vous en aurez terminé avec vos enchantements, nous emprunterons la bouche d’égout opportunément située sous ce coffre. Précaution malheureusement nécessaire pour garantir la sécurité de cette planque et l’anonymat de nos hôtes. Notre point de sortie, un jardin assez isolé, pourra nous servir de point de ralliement au besoin. Nous y changerons de chausses et j’irai en reconnaissance, seul, à la Première Edition. Vous vous y rendrez pour votre part à l’heure convenue pour y traiter avec nos bons samaritains. J’interviendrais au moindre danger mais n’hésitez pas pour votre part à vous téléporter. Si tout se passe bien, je vous rejoindrais plus tard, je n’ai pas encore décidé des modalités exactes. Cela vous convient-il ? Et pourrais-je moi-même vous fournir de discrets conseils avec vos pierres ?

Modifié par Ygonaar, 17 novembre 2009 - 23:47.


#182 Trias

Trias

Posté 04 novembre 2009 - 13:40

Vulnérable

21 Soirétoile 3E425, 02H05



— RhhhssssssSSS !

L’électrifiant souffle de toute une armée de serpents s’abattit soudain sur la brétonne, la tirant instantanément de ses songes bucoliques et endormis. Instinctivement alarmée, la jeune fille sursauta dans son propre hamac, qui se vrilla sur son axe. Maelicia se retrouva inopinément projetée au sol, à quatre pattes, coiffée par sa propre couverture alors que ses bottes roulaient alentours.

Elle souleva le pan de toile qui lui obstruait la vue. Là, à quelques pieds à peine, se découpait la sombre et écailleuse sillhouette de l’argonien, à peine revêtu d’un pagne. Irrégulièrement éclairés par les ultimes lueurs rougeoyantes du brasero, ses traits prenaient des allures menaçantes : sa crête sombre dressée telle celle d’un cobra, ses pupilles animales dilatées, sa posture recroquevillée comme pour mieux bondir... ses rangées de crocs, dangereusement effilés. Une dague à chaque poing, en position de combat, il ne semblait pas percevoir sa présence.

Après un bref coup d’oeil vers la porte (magnifiquement barricadée), la mammifère fut spontanément tentée de rabattre la tunique de toile sur elle même afin de s’y cacher, mais son honneur de magicienne l’en empêcha. Ne comprenant pas vraiment quelle mouche avait piqué le lézard, elle prépara d’une main un rapide sortilège d’aveuglement, puis se découvrit de l’autre.

— Euh... Danse-mot... ça va ? hasarda-t’elle d’une voix minorée par la crainte, tout en se relevant très progressivement..

L’argonien parut reprendre ses esprits, et son regard cessa de balayer furieusement le vide. Il la reconnut, s’immobilisa, puis bredouilla une confuse histoire de disparition et de désintégration. Maelicia ne saisit pas pleinement ses propos ; mais ses capacités sociales hautement féminines lui permirent d’appréhender son état d’esprit sans même comprendre un traître mot de ce qu’il disait. Son regard paniqué, sa gestuelle et sa prosodie précipitées, ainsi que son accoutrement tout bonnement minimaliste étaient bien plus parlants à ses yeux : son compagnon était bouleversé. Il avait probablement fait un mauvais rêve, diagnostiqua t’elle, empathique.


— Bon, allez mon grand... C’est fini tout ça, faut s’calmer maintenant... commença-t’elle, maternante, en se rapprochant.

Elle parvint jusqu’à lui.
— Mais d’abord, vous allez lâcher ça, d’accord ?

Posant ses mains sur chacune des siennes, elle le regarda dans les yeux. Il semblait encore commotionné, comme s’il avait soudainement perdu ses moyens. Lentement, délicatement, elle saisit les dagues et lui fit lâcher prise, pour finalement les poser sur un meuble attenant. Hébété, il ne réagit même pas alors qu’elle le désarmait. Il lui semblait soudain tellement... vulnérable qu’elle en était touchée.

Timidement, elle l’épaula afin qu’il se redresse. Le contact de sa peau chitineuse, ni chaude, ni vraiment froide, coulissant sous ses doigts alors que jouaient les muscles du lézard, lui parut singulier. Alors qu’elle l’aidait à s’assoir devant la table improvisé, près du brasero, elle rassembla pour lui quelques victuailles et l’incita à manger pour récupérer.

— Ca vous f’ra du bien, vous verrez, argua-t’elle en se basant sur l’effet précédemment observé dans la soirée.


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Son stratagème basé sur la théorie du calme et ventre plein sembla efficace. Alors qu’il récupérait, son champs de vision, naturellement plus large que celui d’un homme lui permit de l’observer sans l’affecter. Sa musculature, vue de près, semblait très similaire à celle d’un grand bréton. Sauf pour la tête, bien sûr...

Finalement, Danse-mot put s’expliquer de nouveau. Avec étonnement, elle apprit qu’il ressentait intensément le passage dans l’Aetherius qui accompagnait les téléportations.  Étonnement, parce que d’ordinaire, la perception, essentiellement sensorielle des individus profanes se trouvait habituellement simplement interrompue lors du transit dans l’autre monde ; ceux-ci ne reprenant conscience qu’une fois parvenus à destination.

Ainsi en allait-il lorsqu’un néophyte faisait appel à un guide de guilde, avec l’impression de réapparaître instantanément en un autre lieu. Le mage averti lui percevait distinctement la disparition de l’espace environnant, et la brève exposition aux esprits daedriques immatériels qui suivait. Se pouvait-il que le lézard soit magico-réceptif ?

Touchant pensivement son nez de son index, elle s’accorda quelques instants de réflexion. Enfin, elle le fixa de nouveau, puis expliqua.

— J’pensais pas qu’vous sentiriez tout ça, vous savez ? Z’auriez dû m’en parler avant : y’a une astuce. Z’avez déja fait du bateau ? Z’avez vu qu’ça tangue, hein ? Et si vous r’gardez la mer, qu’est plate, et qu’vous faites attention à vos pieds, qui tanguent, eh ben vous êtes malade. Ben en fait c’est pareil dans le transport instantané multipers... euh, la télétransportation : votre corps perçoit plus rien, mais votre esprit plein de trucs. En gros, votre esprit tangue. Donc c’que j’vous conseille... c’est d’fermer les yeux, et d’penser qu’à l’endroit où vous allez aller. Comme ça z’aurez pas l’mal du vide...

Maelicia se leva, et l’observa un instant consommer les derniers reliefs du repas. Pour être musclé, il l’était. Cependant l‘étudiante était amusée par la discordance entre sa nature sauvage, et la stricte observance de la politesse de la table impériale à laquelle il se conformait en public. Entre ses rugissements animaux et son langage maniéré (dont les rimes qui l’avaient tant fait rire quelques heures plus tôt). Danse-mot était un modèle d’adaptation.

— Y faudra qu’vous m’fassiez penser à vous présenter à Nestor, à la guilde, Danse-mot. Enfin, si on finit pas en costume à rayures dans un cachot entretemps... Bonne nuit, Danse-mot !

Puis elle regagna son hamac et termina paisiblement sa nuit.




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Détour

21 Soirétoile 3E425, 09H40




— Hume-les-Bolets, négociant en champignons, ayant profité de la pénurie pour écouler avantageusement son stock, se présenta-t’il, en une pirouette.

L’argonien ficelait les derniers préparatifs pour leur expédition au palais. Alors qu’il examinait une arbalète, il reprit.

« Lorsque vous en aurez terminé avec vos enchantements, nous emprunterons la bouche d’égout opportunément située sous ce coffre. Précaution...

L’un des sourcils de Maelicia se releva, précédant un bref assombrissement de son regard. Quoi, il fallait encore ramper ce trou à rats gluant que constituaient les égouts ! Elle soupira profondément, capitulant. De toutes façons, elle commençait à se faire aux moeurs du lézard, s’il n’avait pas un ou deux détours un tant soit peu tortueux derrière lui, il paniquait.

« ... malheureusement nécessaire pour garantir la sécurité de cette planque et l’anonymat de nos hôtes, poursuivit-il, comme s’il lisait dans ses pensées

— Ben si c’est malheureusement nécessaire... acquiesça-t’elle, d'un ton pincé. Elle espérait du moins que la toile de sa robe brune à gorgerette, ainsi que ses collants et son châle s’en tireraient sans souvenir olfactif. Elle remettrait ses bottes après coup.

Tandis que le lézard poursuivait sa prose, elle même continuait à graver des motifs étranges sur les Pierre-esprits. Ayant perdu sa dague quelque part dans la léproserie, elle utilisait pour ce faire un poinçon miniature extrait de sa gibecière, gravant méthodiquement runes et arcanes de manière successive.

— Vous vous y rendrez pour votre part à l’heure convenue pour y traiter avec nos bons samaritains. J’interviendrais au moindre danger mais n’hésitez pas pour votre part à vous téléporter. Si tout se passe bien, je vous rejoindrais plus tard, je n’ai pas encore décidé des modalités exactes. Cela vous convient-il ? Et pourrais-je moi-même vous fournir de discrets conseils avec vos pierres ?

La rouquine releva le regard vers l’argonien, puis sourit.

— En matière de champignons ou de pierres ?

Elle éclata de rire.
« J’vous demande une minute, Danse-mot. Faut qu’j’finisse mon oeuvre !

La rouquine, s’absorba de nouveau dans la contemplation des pierres assemblées sur la table. Deux éclats de roche blanche, tantôt opaque tantôt veinée de quartz translucide, trônaient sur la rugueuse planche de chêne. Saisissant chacune d’entre elles alternativement, elle vérifia la disposition des sigles qu’elle y avait gravés. L’Oreille et l’Esprit créaient l’Oreille du mage, tandis que l’Intérieur et la Voix appelaient la Télépathie. Bien qu’il s’agisse d’arcanes simples de mysticisme, l’elfique délicat des symboles s’entrecroisait en un déjà complexe réseau.

Tout semblait en ordre. Elle soupira cependant : sa dépendance ne lui avait permit de sauvegarder que les deux plus faibles d’entre elles. Ils en feraient les frais à leur dépends, tant pis.

S’emparant de la première, elle en rapprocha une chaîne de laiton avec un pendentif de bois. C’était là tout ce que le lézard avait pu ramener. D’un décoratif rustique, au moins le bijou n’attirerait-il pas le regard....

Inspirant, elle encadra les deux objets de ses mains ouvertes. La timide lueur du brasero désormais mourant parut diminuer, tandis qu’une sourde pression se concentrait dans la paume droite de la magicienne. L’environnement revint presque aussitôt à la normale.

— Fiente alors, j’suis pas en forme, murmura-t’elle pour elle même.

Maelicia fit une nouvelle tentative, et Danse-mot ressentit encore la confuse oppression provenir des mains de la magicienne, plus longuement exercée cette fois. Mais lorsque le sortilège prit fin, les fins sourcils roux du minois de la brétonne s'étaient froncés.

— J’comprends pas c’qui marche pas, s’excusa-t’elle, en s'avachissant dans son siège. C’est bizarre...

Elle entortilla pensivement une mèche rousse, son regard oscillant d’une pierre à l’autre, sans vraiment les voir. Enfin, elle détacha les gantelets de mailles à son côté, et les enfila. Aussi invraisemblable que cela puisse paraître, Danse-mot crut effectivement voir le cerclage d’acier qui parcourait la manche du gant lui enserrer les avants-bras alors qu’elle les touchait.

Il n’eut pas le temps de s’en assurer qu’une violente bouffée de pouvoir s’échappait des mains de la magicienne. L’obscurité revint, oppressante, tandis que le roublard se sentait comme pris dans un puissant courant d’air, l’aspirant irrésistiblement vers le médaillon de bois. L’espace d’un instant,  il pensa percevoir la forme fugitive d’une créature glabre à oreilles fendues transiter de la Pierre-Esprit à l’amulette, mais l’enchantement cessa presque aussitôt.

— Tadaaa ! triompha la gamine, en brandissant la chaînette d’une main victorieuse, très contente d’elle même à l’évidence. Une Amulette de Communication, une !

L’apprentie magicienne surexcitée s’empressa de réitérer l’expérience avec un second pendentif de bois, taillé en losange, et Danse-mot crût revoir la créature à faciès de souris transiter sous la pression mystique.

— Quand professeur Delmar saura que la compagnone en mysticisme enchante sans autel, y va en faire une jaunisse ! pouffa-t’elle, volubile. Elle semblait au comble de la satisfaction

Lui tendant l’amulette rectangulaire, elle lui expliqua rapidement comment s’en servir. Un mot magique déclenchait le pouvoir du pendentif, qui devait être tenu au moins d’une main. Le porteur pouvait alors percevoir auditivement l’environnement de l’amulette soeur, voire même communiquer avec elle en parlant tout simplement à haute voix. La faiblesse du dispositif reposait cependant dans sa portée, limitée par les talents de l’enchanteresse et la puissance des âmes capturées : un rayon d’une lieue, tout au plus.

Se relevant, elle se prépara au départ.

— Ah, et pour le mot magique, c’est simple. C’est « Détour ». J’l’ai choisi pour qu’vous vous en souveniez facilement, ajouta-t’elle, d’un ton mutin.


*

Modifié par Trias, 04 novembre 2009 - 15:40.


#183 nood

nood

Posté 08 novembre 2009 - 12:07

***

            

Sociologie descriptive des militaires impériaux

    

20 Soirétoile 3E431,  21h35

        Il  y a, en simplifiant, trois grandes catégories de légionnaires qui composent la  force armée de l'empire de Tamriel.

        La  première, de la loin la plus importante en nombre, correspond au légionnaire  lambda. Généralement d'origine cyrodiléenne, bon père de famille ou mère et  fille aimante et dévouée, le légionnaire lambda est très souvent issu des  familles de classe moyenne de la Cité Impériale, a eu une enfance sans grandes  histoires, et sert sa patrie de manière humble et efficace. Le légionnaire  lambda est habile au maniement de l'épée courte et large et au port de l'armure  lourde, ainsi qu'aux stratégies militaires de grande envergure qui ont fait le  succès et la renommée de la Légion Impériale et permirent l'unification de  Tamriel. Au sein des troupes de maintien de l'ordre de la Capitale, ce type de  légionnaire est un fonctionnaire généralement plus enclin à la négociation qu'à  la répression bête et méchante, de bon conseil pour tout citoyen de l'Empire  pour peu qu'il soit un tant soit peu poli, et globalement très apprécié des  habitants.

        La  deuxième catégorie, qui, elle, est la moins répandue des trois, est celle des  carriéristes. Elle regroupe les "fils et fille de", des Impériaux  issus des familles bourgeoises qui forment l'élite intellectuelle de l'Armée  Impériale et plus globalement des divisions exécutives du gouvernement. Si les  personnages rencontrés dans cette catégorie jouissent quasiment tous  d'aptitudes rhétoriques et intellectuelles supérieures à la moyenne, certains  sont moins vertueux que d'autres. On peut en effet y rencontrer un certains  nombres de hauts fonctionnaires corrompus et calculateurs, habiles menteurs et  politiciens qui sévissent dans les hautes sphères du pouvoir de la Légion. Bien  entendu, un certain nombre d'entre eux sont des individus charmants et  honnêtes, sincèrement impliqués dans leur devoir pour la gloire de l'Empire.  Valens serait de cette catégorie, assurément.

        La  troisième et dernière catégorie correspond aux soldats les moins gradés, les  moins investis de leur mission, les plus fainéants, engagés dans la Légion plus  par défaut ou par décision de justice que par choix personnel. Ceux-là passent  leur service à être sous-performant et fiers de l'être, ont des connivences  avec les individus des quartiers mal famés, sont pour la plupart alcooliques,  bien que souvent plus bêtes que réellement méchants.

        Drem  appartenait à la troisième et dernière catégorie de par son comportement trop peu  souvent professionnel, et ce malgré des capacités évidentes qui auraient pu  faire de lui un soldat émérite. Adrian Villa, un de ses compagnons de frasques,  revendiquait quasiment le fait d'être une entorse au crédo du légionnaire. Pendant  tout son service en Cyrodiil, Drem et lui avaient écumé plusieurs tavernes, bu  chaque mois leur propre poids en cervoise, totalisé un nombre d'heures de  sieste pendant le service proprement gigantesque, insulté et molesté plusieurs  suspects au mépris le plus total de la présomption d'innocnce, et bien d'autres  choses encore. En tant qu'elfe noir repris de justice, Drem avait écopé de  nombreuses punitions que son comparse, Impérial et peut-être un peu plus fin  joueur, avait réussi à éviter. Si Adrian avait réussi à monter en grade  récemment, c'était au bénéfice de l'âge et également pour une présence  impressionnante un soir de bagarre dans le quartier du port. Ses relations  amicales avec certains habitants du quartier avaient en effet empêché à elles  seules le lynchage d'une recrue un peu trop zélée et par extension, une période  de forte hostilité entre gardes et autochtones dans les environs. Quoiqu'il en  soit, ce "haut fait" lui avait valu une promotion : il bénéficiait à  présent de l'horaire plus léger des adjudants de la garde dans son quartier,  d'une paye un peu plus conséquente et avait reçu certaines nouvelles  attributions, comme le fait de pouvoir signer des ordres de mission ponctuels.

        C'était  exactement ce dont Drem avait besoin, et ce pourquoi il avait hélé son camarade  de soirée alors que celui-ci s'apprêtait à entrer dans une taverne pour un  contrôle quelconque et pour tromper l'ennui d'une tournée de garde nocturne en  plein milieu du mois de Soirétoile.

        

- ... Drem ? Par  les Neufs, qu'est-ce que tu fous là, vieille crapule ?
  
  - Je te cherche, l'ami. Tu te rappelles tous les coups que tu me dois et toutes  les punitions que j'ai prises à ta place ? Tu m'avais dit que tu me revaudrais  ça.

        

- Qu'est-ce  que je peux faire pour toi ?

        

- T'es  au courant de ma nouvelle affectation ?

        

- Oui.  Le Bureau des Investigations Magiques ! Pas croyable, hein ! On s'en est bien  tiré, finalement, toi et moi…

        

- J'ai  une requête un peu spéciale, de la part des officiers du Bureau. Enfin… plus  discrète que spéciale. D'ailleurs ça serait bien qu'on en parle entre quatre  yeux, dans un coin un peu plus calme.

        

- Hem…  et bien écoute. Je finis mon service dans une heure et demie. On se donne  rendez-vous à la taverne des sœurs Scolari ?

        

-  D'accord. Rendez-vous là-bas à onze heures  passées.

    

        

***

        

Double  jeu. (ou peut-être triple, en fait.)

    

        

20 Soirétoile 3E431, 23h10

        Drem  était installé depuis quelques secondes à une table relativement isolée de  cette excellente taverne que tenaient les trois sœurs Scolari, trois Impériales  aussi agréables à l'œil que leur bière était fine et gouleyante, lorsqu'Adrian  poussa la porte. Un léger courant d'air plus que frais traversa la pièce. Adrian  ne manqua pas d'aller embrasser la joue de Sabinia, la cadette des tenancières,  avant de venir s'attabler en vis-à-vis de Drem.

        - Qu'est-ce qu'on  boit ?  lança l'Impérial.

        - J'ai déjà commandé  deux choppes de bière,  répondit Drem.

        - Alors,  raconte-moi. Qu'est-ce que le Bureau peut bien me vouloir ?

        - Il ne te veut rien  personnellement. Mais indirectement, tu peux nous être utile. Je t'explique. En  ce moment, il faut qu'on opère de manière très discrète et surtout très rapide  au Palais Impérial. Il faudrait que tu me fasses un ordre de mission, comment  dire…, factice, pour qu'on puisse entrer et opérer à l'intérieur du palais.

        L'elfe  scruta attentivement les réactions de son collègue. Il n'était pas idiot, mais  pas au point de céder immédiatement à une requête aussi particulière. Se  découvrant une habileté insoupçonnée au mensonge – et il en aurait besoin,  qu'il le souhaite ou non - Drem laissa Adrian découvrir lui-même les prétendues  raisons censées justifier cette demande.

        - Mais pourquoi vous  passez pas par la voie habituelle ? reprit le garde. Tes chefs, là, ils doivent bien avoir un moyen de s'en trouver facilement,  des ordres de mission, et des beaux, pas signés par moi, hein !

        - Alors… oui, t'as  raison. Mais là, pour les besoins de la mission qu'on fait, on doit être très  discret : d'ailleurs, cette conversation n'existe officiellement pas. J'ai été  chargé officieusement de me procurer un papier émanant d'un autre service, pour  ne pas qu'on y voie le sceau du Bureau Impérial des Investigations Magiques.

        - Mais c'est pareil,  tes bonhommes, ils peuvent en pondre un sacré paquet de papiers bidons.

        - Ouais, mais  sûrement pas pour demain midi. Tu sais aussi bien que moi que les institutions  sont un peu longues à réagir. Là, on a besoin d'être sur le coup au plus vite, c'est  pour ça que j'ai pensé à toi.

        L'impérial  sembla réfléchir, levant les yeux au ciel. Drem crut un instant qu'il devinait  son manège, et qu'il avait flairé le coup fourré. Il n'en était rien.

        - Ah, t'es gentil,  continua Adrian. Mais je risque gros, moi, à faire des ordres de missions au  premier venu pour des trucs secrets. Qu'est-ce qui me dit que ça va pas me  retomber dessus, ta magouille, là ?

        Drem  laissa échapper un éclat de rire sincère.

        - Et bien, les temps  ont bien changé ! Adrian Villa qui se soucie de sa carrière !

        Il  redevint immédiatement plus sérieux.

        - Blague à part, tu  me déçois. Ils ont bien réussir à t'avoir, avec leur règlements et leurs  responsabilités. Il est où, Adrian l'intrépide, qui agit d'abord et réfléchit  après ? Adrian qui se contrefout de la bienséance et du bon goût ? Adrian qui a  fait tellement de coups fourrés ? D'ailleurs, je tiens à te faire remarquer que  certains n'ont pas été encore élucidés. Ça serait dommage, hein, que le  détournement de matériel d'il y a quatre ans te retombe dessus ?

        L'intéressé  se sentit bien mal à l'aise. Drem en savait suffisamment sur lui pour le faire  rétrograder et affecter à vie dans  un endroit encore plus glauque que les recoins les plus sombres du quartier du  port. Le Dunmer ne le laissa pas longtemps avec des pensées aussi  inconfortables.

        - Je te demande pas  de trahir la nation, bordel. On a besoin, de manière non-officielle, d'un ordre  de mission. Tu me le donnes, ça reste entre nous, je l'utilise, tu n'auras pas de soucis. Et si ça nous aide  vraiment, j'oublierai pas de parler de toi au Bureau. Ils donnent facilement  des primes pour qui leur facilite la tache.  

        - Allez, reprit Adrian. Il  farfouilla dans son barda, contenu dans un petit sac de cuir accroché à sa  ceinture ; il en extirpa une feuille vierge, un petit encrier, une courte plume  et un poinçon. Celui-ci lui permettrait d'apposer le sceau sur le document,  transformant ainsi un vulgaire bout de papier en ordre de mission officiel et  conforme. Qu'est-ce que tu veux que je mette  sur ton passe-partout ?

     Drem soupira de soulagement. Avoir ce papier était  l'un des points sensibles de son plan.

        La  discussion entre les deux anciens collègues dura fort longtemps dans la nuit.  Ils restèrent les deux, assis confortablement dans la mi-pénombre de la  taverne, évoquant moult souvenirs et vidant choppes de bières sur choppes de  bière. Lorsqu'ils se quittèrent, la minuit étant passé, la tenancière accorda à  Drem le droit d'occuper une couche pour dormir quelques heures : elle le réveillerait  au tout petit matin, lorsqu'elle-même se lèverait pour recevoir les livraisons  quotidiennes de victuailles et autres biens de consommation.

            Le  Dunmer s'accorda quelques heures d'un sommeil bienvenu et c'est aux alentours  de cinq heures et demie du matin qu'il quitta l'auberge des trois sœurs. Il  avait encore quelques petites choses à faire avant d'aller faire son rapport,  notamment se prendre un coup de poing et cacher un petit sac sous les toits  d'une maison dans une ruelle calme. Un réveil aussi précoce lui servirait à  accentuer son apparence assez miteuse, lui qui était censé avoir passé un jour  et une nuit dans la léproserie.

        

  

    

***

    

    

Jonction

    

        

21 Soirétoile 3E431, 11h40

    Drem  avait passé avec succès toutes les étapes de son plan nocturne et avait mis la  matinée à profit pour arpenter les rues du quartier des marchands et dénicher  quelques petites choses qui lui seraient utiles pour la suite de la journée.

        Une  Khajit du nom de Radjiha qui vendait à la sauvette des produits d'importations  pas toujours légaux s'était montrée très réceptive au fait que Drem était un  garde impérial. Contre son silence, Drem avait obtenu à un prix défiant toute  concurrence quelques potions (notamment trois fioles de potion revigorante,  bienvenues après une nuit aussi courte et remplie.)

        Une  foule hétéroclite remplissait les ruelles. Ici, un vendeur de volaille avec ses  cages remplies d'oiseaux caquetants et bruyants ; plus loin, une matrone et ses  quatre gamins venus négocier quatre tuniques au prix de trois vers un chiffonnier  de passage ; encore plus loin, un Orque au faciès porcin mais néanmoins très  amical avec une roue de rémouleur qui aiguisait les couteaux et redressait les  fourchettes, et bien d'autres échoppes, temporaires ou non, où chaque  commerçant vantait les qualités de ses services et ou les badauds  s'attroupaient. Ambiance parfaite pour Drem, qui avait besoin d'une part de  faire quelques emplettes, et qui d'autre part passerait inaperçu lorsqu'il  aurait à retrouver ses compagnons devant la Première Édition.

        Alors  qu'il dégustait un gobelet de vin chaud délicieusement épicé accompagné de châtaignes  grillées, L'elfe noir arriva au point de rendez-vous à l'heure prévue. Il  portait toujours son armure, qu'il dissimulait partiellement sous une grande  cape gris-verte, et dans son dos son baluchon en toile contenant ses achats du  matin. Il ressemblait plus à un voyageur de passage qu'à un garde.

        Arrivé  à destination, Drem balaya du regard les environs à la recherche d'une jeune mercenaire  impériale au regard étincelant, d'une mage brétonne aux yeux verts protégés par  une paire de lunettes ou d'un argonien noir comme la nuit, voire de tout cela  en même temps. Une Femme, appuyée contre un mur à une vingtaine de pieds de là  avec un bandeau sur l'œil attira son attention. S'approchant, il reconnut sa  partenaire nouvellement acquise, bien que celle-ci aie camouflé ses attributs  peu communs et son arme dans un sac. Elle ressemblait elle aussi à une personne  du peuple quelconque, avec son blouson de cuir délavé et porté pendant de  nombreuses années et ses habits peu voyants.

        - Bonjour, très  chère,  s'annonça-t'il en arrivant vers elle. Comment  s'est terminé la nuit ? Pour ma part, J'ai réussi à faire et à obtenir tout ce  que je voulais. Y a plus qu'à, comme on dit.

Modifié par nood, 03 avril 2011 - 11:27.


#184 Arakis

Arakis

Posté 08 novembre 2009 - 15:15

En Attendant les ennuis à gogo


21 Soirétoile 3E431, 11h40


Saerileth avait passé la nuit à dormir semi éveillé comme elle l'avait fait de nombreuses fois dans divers missions. Bien qu'elle eut passé la nuit la main serré autour de la garde de son épée elle se réveilla relativement réparé de la journée de la veille. Elle mangea dans sa chambre avant de se préparer. Elle re-démonta son arbalète, et s'habilla, prit une chemise lacée aux manches de façon à ne pas montrer son bras par inadvertance pendant un mouvement un peu trop large ou trop brusque, en gardant la main dans sa poche sa passerait inaperçu. Repassant à nouveau son manteau à l'envers et son bandeau sur l'oeil elle sortit dehors en vitesse. Force était d'admettre que son déguisement peu élaboré la faisait passer à peu prés inaperçu, marchant lentement parmi la foule, elle se rendit dans l'entrée d'une petite ruelle. De là elle pouvait voir à peu prés tout le monde qui passait sans être trop visible. Constatant qu'elle avait encore un peu de temps elle se laissa distraire par l'activité du quartier, la levée du blocus faisait affluer toutes sortes d'individus que ce soit des commerçants, des voyageurs, des mercenaires, des errants sans le sous qui voyageaient dans l'espoir d'une vie meilleure et bien d'autre sortes d'individus. En scrutant elle reconnue quelques têtes familières dans la masse, ça faisait plaisir de savoir qu'elle n'était pas la seule mercenaire dans les murs de la cité, c'était comme savoir que vous n'êtes pas le seul à avoir fait des bêtises et que vos charmants petits camarades ne vous débineront pas (du moins ceux qui ont un peu de morale).

Alors qu'elle rêvassait elle ne vit pas le dunmer arriver jusqu'à elle, lorsqu'il lui adressa la parole elle manqua de sursauter. Lui aussi était presque méconnaissable par rapport à la veille, il avait troqué ses loques contre une armure impériale et une cape, mine de rien il avait une certaine présence, plutôt séduisante d'ailleurs. Elle se ressaisit, c'était pas vraiment le moment de penser à ce genre de choses, se tournant vers lui elle eut un sourire en coin et dit

"Ma foi la nuit a été bonne, je suis passé par un réseau peu accessible mais très intéressant, qui peu toujours resservir d'ailleurs, je doute que le palais impérial soit capable de se passer de voies d'évacuations en tout genre, c'est affolant comment on peut détourner quelque chose de son usage. Sinon pas de traces de nos deux larrons ?"

Modifié par Arakis, 02 avril 2011 - 10:05.


#185 nood

nood

Posté 15 novembre 2009 - 16:55

Parlons un peu...

21 Soirétoile 3E431, 11h43

- Non, toujours aucun signe.

Drem balaya une fois de plus la rue animée du regard. Il y avait bien tous ces gens, échangeant pièces sonnantes et trébuchantes contre marchandises diverses, il y avait bien les mendiants invoquant chacun des Neufs et tous les saints connus pour rendre les badauds plus enclins à la charité, il y avait bien les gardes qui regardaient cette agitation d'un air blasé, mais pas de magicienne Brétonne ou de barde sauroïde.

Puis ses yeux rouges sombres se posèrent à nouveau sur son interlocutrice. Elle devait avoir l'habitude de camoufler son œil gauche, car le bandeau qui le recouvrait ne choquait pas outre mesure. Mieux que ça, elle avait un port très agréable à l'œil : Il ne l'avait vu que partiellement, dans la pénombre de la léproserie puis dans l'ambiance feutrée de la taverne, un soir plus tôt ; mais à présent qu'elle se tenait devant lui à la lumière du jour, elle lui apparaissait d'une beauté froide et dure. Laissant son esprit vagabonder sur le profil de la jeune femme, qui scrutait la foule, il admira les trait marqués mais fins et élégants de Saerileth. Son teint légèrement bronzé s'accordait harmonieusement avec ses cheveux blonds. Drem était là, à divaguer intérieurement sur la beauté simple mais efficace de l'Impériale, quand il se rendit compte qu'il n'avait pas connu la chaleur d'une femme depuis fort longtemps. Il reprit ses esprits avant que d'autres souvenirs, à la fois bienfaisants et douloureux, ne lui reviennent et décida de poursuivre la conversation pour mettre un terme à sa contemplation.

- Bon, reprit-il, j'ai eu comme je te le disais tout ce qu'il nous faut pour s'infiltrer dans le palais. Il va falloir se travestir un petit peu - enfin, vous trois surtout - et se montrer persuasif ; mais globalement, ça devrait fonctionner. Par contre, je ne connais le palais que de l'extérieur : je n'y ai jamais mis les pieds, et j'imagine que toi non plus. j'espère que nos deux compères savent où chercher, sans quoi on risque d'avoir l'air un peu louche. Encore que...

Il soupira. S'il n'avait pas perdu toute foi en les différentes puissances divines que les habitants de Tamriel n'avaient de cesse de vénérer d'un bout à l'autre de l'année, il aurait sûrement prononcé une prière en pensée. Mais à présent qu'il considérait tout cela comme des bondieuseries bonnes pour les simples d'esprit, il décida de s'en remettre au destin, et à l'habileté de Malicia et de Danse-Mot. Il finit son gobelet d'un trait.

- D'ailleurs, j'espère qu'ils ne vont pas nous poser un lapin. Parce que sinon, je suis dans une sacrée merde.

Modifié par nood, 03 avril 2011 - 11:28.


#186 Ygonaar

Ygonaar

Posté 17 novembre 2009 - 23:33

Mission impossible




20 Soirétoile, 3E425, 18h15



Le crissement du diamant fut presque inaudible. Délicatement, le Khajiit décolla la rondelle de verre pour la poser sur les tuiles. Il passa le bras dans l'ouverture et huila consciencieusement avec une petite burette paumelles et meneau de la lucarne avant de l'ouvrir. Il loua intérieurement la politique impériale qui, à l'époque de la mise en chantier de l'allée D des entrepôts, avait exigé des ajours dans les toitures. Et quoiqu'en dise certains de ses collègues les plus rustres, consulter les plans d'urbanismes n'était jamais une perte de temps. Doucement, il laissa filer la corde dans le hangar ténébreux.

J'rhassa mettait un point d'honneur à effectuer son larcin dans les règles de l'art. Il n'avait plus guère l'occasion d'aller sur le terrain, maintenant qu'il était un faussaire estimé, mais il tenait à montrer aux jeunes qu'il n'était pas si rouillé et que rien ne remplaçait l'expérience. Il s'était donc spontanément proposé lorsque le petit Ragnemot avait transmit à Armand la localisation et la clé qui donnait accès au précieux or des mages. Cela arrangeait bien le Rougegarde, d'ailleurs, car la récupération du butin est toujours une étape délicate à ne confier qu'à des personnes de confiance. Surtout avec la quarantaine de la cité qui avait été levée aujourd'hui même. Il avait été décidé que laisser seuls cinq milles septims toute la nuit était indécent, bien que l'entrepôt soit fermé à cette heure.

Les pupilles du félin scrutèrent la moindre parcelle de luminosité. Le ballet des lanternes des deux vigiles s'était éloigné, mais on n’est jamais trop prudent. Surtout qu'un magelame était peut être de la partie. Personne. Il se laissa glisser jusqu'au sol de pierre, tous les sens en alerte. La travée neuf... Dix... Onze, maintenant, trouver la rangée trois... Une caisse marquée MGC 926, ça devait être celle-là. Le vieux voleur entreprit alors de déclouer le couvercle avec un petit pied de biche. Il se faufila carrément dans la caisse et entreprit de farfouiller à l'intérieur, écartant bouts de tissus et vieux nounours brétoniens. La  voilà! Il vérifia que sa clé correspondait bien à la cassette et constata avec dépit qu'elle ne faisait jouer qu'une des serrures. En tous cas, c'était la bonne, autant l'emporter pour l'ouvrir en toute tranquillité.

Il était encore athlétique, malgré son age et sa vie maintenant plus sédentaire, mais il eut beau tendre ses muscles à s'en faire rompre les jarrets, c'est bien Sanghin s'il la fit glisser de plus d'un pouce. Quant à envisager la sortir de la caisse, il ne fallait pas y compter. Tant pis, il la crochèterait donc sur place. Une serrure paracentrique, un simple raclage devrait faire l'affaire. Alors que J'rhassa en était à choisir sa sonde, un obscur malaise l'envahit. Quelqu'un s'approchait à pas feutrés.


Il jaillit hors de sa caisse en une de ses contorsions improbables qui sont l'apanage des Khajiits. Sans même un regard en arrière, il se précipita vers la porte principale et souleva la lourde barre d'un coup d'épaule. Il se mit à siffler et les six boucliers, qui attendaient au coin de la rue en cas de coups durs, accoururent au galop. D'aucun imagine tous les voleurs comme de fluets monte-en-l'air capables de vous soutirer jusqu'à vos bagues sans que vous ne vous en aperceviez. En réalité, la guilde embauchait également de solides gaillards privilégiant plus les mœurs martiales que les facultés intellectuelles. Outre une salutaire appétence à l'intimidation, ces malandrins servaient souvent à couvrir la fuite des cambrioleurs, d'où le titre de bouclier. Le félin les envoya tout droit vers la caisse, où les attendait un Bosmer.

Tu t'sens pas un peu tout seul pour rester là, avorton? tonna Emfrid Pattes d'ours.


Nedhelorn s'était à nouveau demandé s'il avait bien choisit sa spécialité. Sa maîtrise de l'invocation lui permettant de sortir sans équipement, il avait l'impression d'être affecté à toutes les missions d'infiltrations pourries. Ce jour-là, il devait se faire passer pour un vigile dans un entrepôt humide afin de surveiller une vulgaire caisse. Contenant un joli magot, il est vrai. L'après midi s'était écoulé, interminable, sans la moindre distraction que les insipides commentaires du vigile régulier. Il n'avait même pas eut le loisir d'observer la ronde des dockers, la levée de la quarantaine aillant prit de court les capitaines marchands.

L'elfe était allé boire une petite mazte au tonnelet que son compagnon d'infortune avait caché dans une des travées. Par acquit de conscience, il lança sa quatorzième Détection de Vie de la journée. Il avala de travers lorsqu'il perçut une aura supplémentaire... Au niveau de la caisse qu'il devait protéger, justement. Il s'approcha doucement de l'intrus mais celui se carapata avant qu'il lui mette la main au collet. Pour aller quérir six complices, des brutes à la stature imposante qui essayèrent de l'intimider.


Seul? Répondit nonchalamment l'Elfe des bois. Qui vous dit que je suis seul? En fait, mes amis Smyx (une arbalète de poing au profil torturé apparut dans sa main gauche), Wessom (une épée longue dont la sombre lame luisait de runes rougeoyantes se ficha dans sa dextre) et moi-même vous enjoignons vivement à dégager...

La prestation laissa les malandrins pantois. Mais ce fut quand J'rhassa leur cria « Magelame » qu'ils comprirent vraiment la situation. On laisse en général les sorciers tranquilles, par prudence. Qui sait ce dont ils sont capables. Mais si l'on aspire à vivre vieux, on ne s'attaque JAMAIS à un mage de guerre à moins qu'il ne soit endormi, et encore. Emfrid produisit son plus accorte sourire édenté.

— C'est qu'on voudrait pas s'imposer, Monsieur. Alors va vous laisser, hein? Le bonsoir à vot'dame...

  

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Incorrigible



21 Soirétoile 3E425, 02H20



  — Y faudra qu’vous m’fassiez penser à vous présenter à Nestor, à la guilde, Danse-mot. Enfin, si on finit pas en costume à rayures dans un cachot entretemps... Bonne nuit, Danse-mot !
Bonne nuit Maelicia et… merci.

Alors que la jeune femme remettait son hamac en état, il mordit vigoureusement dans une saucisse sèche, en arrachant un morceau conséquent qu’il entreprit de dilacérer de ses mâchelières tranchantes. Essentiellement carnivore, il goûtait fort la charcuterie des Peaux-Molles mais en ce moment précis, le poisson lui manquait. Du poisson bien frais, encore frétillant. En dépit de la carence de friture, son estomac commençait à se dénouer, signe que sa tension retombait. Il commença alors à réfléchir sur les récents événements.


Il constata tout d’abord avec un certain étonnement qu’il avait sincèrement remercié l’humaine. Sa présence l’avait curieusement réconforté et aidé à reprendre pied. De plus, elle l’avait touché à même les écailles de sa main moite sans qu’il à refréner un geste de retrait. Il s’était même laissé désarmer sans autre appréhension qu’elle ne puisse se focaliser sur ses lames gluantes de poison. Voilà qui ne lui ressemblait guère. De là à imaginer qu'en bonne sorcière, elle lui ait provoqué ce cauchemar... Mais dans quel but, si c'était le cas? Le mettre en position embarrassante? Commencer à le convaincre d'aller de lui même se livrer à se fameux Nestor?

Pourquoi irait-il donc s'exposer devant un mage? Pour le guérir de son mal de la télétransportation? Il est vrai que ce pouvoir possède des applications illimités qu'il pourrait... Il ne fallait pas s'emballer. D'une part il ne pourrait probablement jamais user de cette potentialité à son gré, d'autre part la rouquine n'avait pas annoncé le prix de cette éventuelle guérison. Car la méthode qu'elle lui avait indiqué ne semblait pas très sérieuse. Surtout qu'il n'était pas sensible au mal de mer, pour ce qu'il en savait. Et si cette technique n 'était pas une fumisterie, elle n'en était pas moins non opérationnelle. Imaginer la destination d'arrivée, pffff, alors qu'elle l'avait JAMAIS prévenu qu 'elle allait le plonger en Oblivion! Et qui sait si cette hypothétique thérapie ne détruirait pas son affinité avec les Ténèbres?


Son affinité ! Il avait stupidement révélé son don à la Brétonne! Car il ne fallait pas douter que la sorcière interpréterait judicieusement ses confidences. De là à se qu'elle extrapole sur ses capacités à s'enténébrer et autre talents. Il pouvait quasiment faire le deuil des atouts dans sa manche. Pire, elle pourrait faire le lien avec son thème astral. Les Nuits Véritables sont très rares, il ne devait surement y en avoir eut qu'une dans les Marais Noirs il y a trois décennies. Elle pourrait peut-être même calculer l'étroite bande de doubles éclipses lunaires, identifier sa tribu, trouver son nom...

Son estomac se rappelait à nouveau à lui. A en croire sa respiration paisible, l'humaine dormait elle d'un sommeil paisible. Il ferait bien d'en faire autant, puisqu'aucune de ses supputations n'amèneraient des projets d'actions immédiates. Il récupéra ses scramasaxes qu'il rangea soigneusement dans ses gaines de tibia et se lova dans son hamac. C'est presque rasséréné d'avoir des sujets d'angoisses plus habituels pour lui occuper l'esprit qu'il finit pas s'adonner au sommeil.


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Paraténèbre



21 Soirétoile 3E425, 10H00



La Brétonne semblait de bonne humeur et n'avait cesse de le taquiner. Le résultat d'une salutaire nuit de sommeil ou l'impression qu'elle le tenait maintenant au creux de sa main? Quoiqu'il en soit, il devait faire bonne figure, d'autant plus qu'elle semblait avoir l'obligeance de s'atteler à l'enchantement qu'il lui avait suggéré.
J’vous demande une minute, Danse-mot. Faut qu’j’finisse mon œuvre !
Je vous en pris, Mademoiselle. Faites donc à votre aise.

Il observait, fasciné, l'enchanteresse à sa pratique. Ses passes de doigt lui donnait une curieuse impression de chiqué, un peu comme lorsqu'il interprétait Voile-Regard au beau milieu d'un tour de passe-passe. Certainement parce qu'il n'en comprenait pas le sens. Il eut vite la confirmation que la jeune femme ne lui jouait pas la comédie, car il perçut une onde de Ténèbres étrangement polarisée sortir de ses paumes. Les braises du kanoun s'estompèrent un bref instant et le saurien sentit son propre corps absorber la quintessence d'Oblivion. Avait-il par là-même interféré sur le sortilège? Toujours est-il que l'humaine exprimait son désarroi.

  — Fiente alors, j’suis pas en forme, bougonna-t’elle entre ses dents, avant de se remettre à sa tâche. Une nouvelle vague de Ténèbres, un peu plus soutenue, surgit et traversa Main-d'Ombre, comme attirée par lui. Il sentait bien qu'elle était associée à de complexes impressions psychiques, dont une sourde oppression, mais sa résistance naturelle le desservait au final pour une analyse fine. La rouquine se rendait-elle compte qu'une partie de son charme était dévié du médaillon sur lequel elle se concentrait? Ou bien le faisait-elle exprès? Peut-être vérifiait-elle son affinité pour corroborer les supputations qu'elle devait avoir faite suit à ses malencontreuses confidences de cette nuit ? L'homme-lézard n'eut pas le temps de pousser ses délires paranoïaques plus loin, Maelicia avouant déjà son incompréhension.

J’comprends pas c’qui marche pas. C’est bizarre... constata-t-elle d'un air pensif.
Je crains hélas n'avoir guère de réponse à vous proposer. Mais ne vous tracassez pas trop, nous avons encore un peu de temps devant nous. Cela ne vous dérange pas si je le consacre à quelques échauffements? Répliqua l'Argonien. Il s'éloigna à l'autre bout de la pièce, posa une patte d'un souple mouvement dans l'angle, un peu plus haut que sa tête, et entreprit de s'étirer la jambe. Il impressionnait son attitude pour donner le sentiment qu'il se consacrait tout à sa gymnastique, mais il cherchait surtout à ce que la magicienne ne fasse pas de rapprochement entre le comportement de son rituel et la l'éloignement de son comparse.  


Précaution que lui-même avouerait comme probablement inutile, puisque la hie passa aux grands moyens et enfila ses gantelets magiques. La vague revint, bien plus puissante. Malgré les deux toises qui les séparaient, elle pénétra le corps et l'esprit du saurien. Elle cherchait à emprisonner son âme, à la terroriser pour la pousser à quitter son corps pour rejoindre le médaillon. Si Main-d'Ombre résistait bien à l'influence des Ténèbres, ces dernières étaient associées à diverses autre composantes magiques devant lesquelles il était fort démuni. Il eut un instant l'horrible impression qu'il allait se décorporer lorsqu'il perçut une fugitive créature quitter la pierre d'âme pour plonger dans le bijou. La vague reflua, au grand soulagement du reptile. Ainsi les mages s'étaient forgés des outils pour utiliser, consciemment ou non, les Ténèbres comme composantes de certains leurs sorts. C'était logique, à la réflexion, car qu'est-ce qui pouvait servir de carcan à une atma, immatérielle par essence, sinon la matière de l'Oblivion? Des procédés brutalement efficaces, loin des interminables rites auquel sa mère procédait même pour les enchantements les plus mineurs. A milles lieues du trouble de son vicinal, la Peau-molle exultait.
Tadaaa ! Une Amulette de Communication, une !

Alors qu'elle récidivait, Main-d'Ombre s'appliqua à expulser les Ténèbres de son être, de se rendre moins attractif, afin d'éviter de servir à nouveau de paratonnerre. Il faudrait qu'il travaille la chose car pour l'heure la proximité d'un enchanteur pourrait lui être dangereuse. Que serait-il advenu si son esprit avait effectivement quitter son corps? Serait-il devenu une sorte de spectre? Aurait-il été asservi par sa compagne? Perspective sinistre et difficile à croire si on n'en jugeait qu'au triomphe enfantin de la jeune femme qui lui tendait un des bijoux.
Quand professeur Delmar saura que la compagnonne en mysticisme enchante sans autel, y va en faire une jaunisse !  
Toutes mes félicitations, applaudit-il en essayant de faire bonne figure. C'était très impressionnant!

  Et ça l'était, se rendit-il compte alors qu'elle lui dévoilait le fonctionnement des artefacts.  Des outils aux applications prodigieuses, permettant de communiquer ou d'espionner à une lieue de distance, réalisés en un tour de main. Et la péronnelle minaudait en sus, se plaignant de la faible puissance de ses Pierres-Esprits ou de son manque d'expertise. Puisque les mages de la Guilde avaient la capacité de prêter leurs pouvoirs aux profanes avec une telle facilité, guère étonnant qu'elle soit si puissante. A se demander même pourquoi elle ne dirigeait pas ouvertement le monde. Peut-être par manque d'aptitudes politiques? Sa comparse, en tout cas, semblait pour l'instant plus préoccupée à l'asticoter qu'à devenir une terrible magiocrate.
  — Ah, et pour le mot magique, c’est simple. C’est « Détour ». J’l’ai choisi pour qu’vous vous en souveniez facilement.
Alors « péripétie » aurait aussi bien fait l'affaire. Mais puisque nous en sommes aux détours, il me semble temps de vous mener dans la fange putride des étroits et antiques boyaux serpentant dans les entrailles de la cité jusqu'aux insondables profondeurs hantées par quelques gluantes horreurs chthoniennes oubliées. Répliqua-t-il avec le plus grand sérieux, tout en dégageant la plaque d'égout.


En réalité, la damoiselle n'eut exceptionnellement guère prétexte à ronchonner. Car Maelicia avait pour une fois une lanterne pour l'éclairer et le trajet fut relativement bref. De plus, les tunnels disposaient de trottoirs émergeant largement du cloaque bien que récemment récurés par les pluies hivernales. Ils débouchèrent dans la cave d'une maison suffisamment vide pour qu'ils se permettent d'accéder au jardinet par la porte, sans se cacher. Main-d'ombre expliqua que c'était la résidence secondaire de riches marchands de Senchal préférant passer l'hiver sous le clément climat de la Baie de Topale. Comme ils ne laissaient pas de serviteurs derrière eux et qu'elle constituait donc un excellent point de sortie la moitié de l'année, la guilde des voleurs prenaient bien soin que la maison ne soit pas vandalisée. Alors qu'ils étaient affairés à changer leurs chausses, ils croisèrent un individu dégingandé à la mine fatiguée qui les salua de la tête, quelque obscur collègue de notre roublard entreprenant le chemin inverse. Ils passèrent le portillon de fer forgé le moins grinçant du monde et une fois dans la rue, le lézard prit congé.

Je vous quitte là, j'ai moult choses à faire pour sécuriser votre rendez-vous. N'y allez pas avant la midi, afin de ne pas me prendre au dépourvu. Et je vous conseillerai d'éviter le Grand Temple, la Guivre pourrait vous y attendre puisque vous vous y fîtes remarquer hier.


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Sniper



21 Soirétoile 3E425, 11H50



Main-d'Ombre braqua sa lunette sur l'oratoire de Zenithar. Pas de signal, rien ne clochait pour le moment. Bien qu'il est lui-même arpenté le quartier un peu plus tôt, il avait chargé une dizaine de gamins des rues de vérifier les attroupements inhabituels de légionnaires, sectateurs ou hommes en arme. Ses mouches faisaient donc le tour des échoppes sous prétexte de quémander quelques piécettes, une pomme ou un quignon de pain et envoyaient un émissaire à la statue dans l'affirmative. Le saurien laissait pendre une pièce de tissu pour indiquer au gavroche qu'il avait toute son attention, et ce dernier guidait alors son regard vers le groupe suspect. Il n'en manquait pas, à cette heure, car le quartier bouillonnait encore plus que de coutumes avec la levée du blocus. Nombre d'aventuriers et malandrins venaient prendre leur quartier d'hivers à la capitale pour y panser leurs plaies et y dépenser leur butin dangereusement acquis. Heureusement, ils étaient plus souvent attirés par les pesants articles de Tranche et Cogne que par les délicats incunables de la Première Édition.

Quand il n'essayait pas de soupeser le danger que pouvait représenter les honnêtes brigands que lui dénichaient ses garnements et de mémoriser leur trognes, souvent mémorables il est vrai, l'Argonien observait Drem et Saerileth. Quel dommage qu'il ne sache pas lire sur les lèvres, il aurait peut-être put découvrir leurs plans inavouables. Car il était difficile de les confondre comme sombres conspirateur à leur simple posture. La mercenaire faisait même presque discrète, à son grand étonnement. En fait, il aurait presque juré qu'ils étaient en train de... compter fleurette!

Mais il fallait pas qu'il relâche son attention pour autant. Ils n'étaient pas improbables qu'étant très subtils, ils aient anticipé ses précautions et lui jouent une farce de leur façon. Au besoin, l'arbalète était armée. Bien que ce modèle ne soit ni aussi précis; ni aussi puissant que la sienne, à moins de cent cinquante pas il était à peu prés sûr de faire mouche, d'autant plus que l'Aiglonne n'était pas lourdement armurée. Et son point d'observation était assez haut pour avoir quasiment tout le temps une bonne ligne de tir.  


Le lézard était très fier du point d'observation qu'il avait déniché. Il avait investi la chambrée de Gonk gra-Gulob, une jeune Orsmer servant à l'Assiette Troll, une gargote qu'il affectionnait lui-même pour la qualité de ses viandes saignantes. Non seulement il n'y avait guère de risque que la locataire ne revienne avant la fin du service du soir, mais le local sous le comble d'un haut bâtiment était idéalement situé. Il possédait même un petit balcon encombré par trois gros pots de genet écorcheur, arbuste antipathique au possible mais qui devait rappeler à l'Orc son Orsinium natal. Le saurien s'était enténébré sous l'étroit porche menant à la minuscule cours intérieure que se partageaient les bâtiments vicinaux. Il avait escaladé la façade au grappin avant de forcer le fenestron arrière. Une commère avait bien pointé le bout de son museau à la fenêtre de l'immeuble d'en face mais, dès qu'elle perçut les Ténèbres, s'était rappelée l'urgente mission d'aller vider son peau de chambre sur la tête de quelques malheureux quidams.  

Main-d'Ombre disposait donc des deux issues possibles strictement nécessaire à sa sérénité, sa corde et l'escalier de l'immeuble. Il avait emprunté une descente de lit en fourruree d'ours à mademoiselle Gulob pour s'isoler du sol glacial et  restaitallongéé par terre, la lunette glissée entre deux des faïences potagères. Il avait également volé un anneau d'oreille assez rustique. Il s'était percé un naseau pour compléter sa transformation. Une opération assez douloureuse mais il invoquait depuis régulièrement la Sève afin de cicatriser le trou et lui donner un aspect ancien. Il pensait avoir fait son possible pour préparer le rendez-vous, ne restait plus qu'à attendre Maelicia.

Modifié par Ygonaar, 18 novembre 2009 - 13:02.


#187 Trias

Trias

Posté 30 novembre 2009 - 02:06

La morsure de la Vouivre
ou La mort d'une Fleur

21 Soirétoile 3E425, 10H05




Hannibal Traven fronça les sourcils et se massa ostensiblement le front. Il se permit de s’affaler dans son siège, au sein de l’austère enceinte du Conseil.
— Un énième messager, Nestor ? La Wyverne est définitivement un animal entêté...

Son éternel ami, aussi rabougri et fripé que l'écorce d'un vieux chêne acquiesça.
— Ils sont casse-culs, Hann. Tout comme mon dos, d’ailleurs... grimaça le vénérable portier de la Guilde des Mages.

L’antique magicien se palpa douloureusement les lombes. L’archimage sourit.
— Ta franchise me réchauffera toujours, mon ami. Puisse t’elle être contagieuse....

— Ca en décoincerait certains, je pense. Mais pas comme mon dos, hélas...

Les commissures de l’archimage se retroussèrent davantage. Il appréciait au moins autant le naturel de son ancien camarade qu’il redoutait l’ambiance vérolée des Conseils. Les pupilles de Nestor pétillèrent en réponse, puis il s’effaça, heureux d’avoir apporté une vague de réconfort dans l’océan de responsabilités qui submergeait le bréton. Toutefois, avant de passer la porte, il se retourna, préoccupé.

— Tu te méfieras de celui-là, Hann. Il ne m’inspire rien de bon...

Il disparut, laissant l’archimage seul avec ses pensées. Traven laissa errer son regard le long des austères murs de magmatite, des éclats de l’immense table de marbre poli, et le reflet mat des sièges de pierre.

Un homme fluet entra. Sa chevelure, mi-longue et désordonnée, d’un noir d’ébène, ne soulignait que mieux la pâleur de son teint. Ses membres frêles étaient dissimulés par une ample robe de bure anthracite, avec pour tout ornements une simple ceinture de cuir passée à la taille ainsi que d'étranges zébrures en épousant les plis. Ses traits, bien que fins, étaient sans âge. Mais ce qui frappa le plus Traven, ce fut ses yeux : immenses, leur couleur était plus sombre que la nuit, à peine cerclés par un mince filet grisâtre. De profondes cernes creusaient encore ce visage qu’on aurait dit celui d’un malade à peine convalescent.

Il s’arrêta sur le seuil de la salle, semblant l’attendre qu’on l’invite à aller plus loin.
— Entrez, l’invita Traven.

Il avança, lentement, buvant du regard le moindre détail architectural de l’excavation. Il était suivi par un traqueur massif au visage fermé. Enfin, il s’arrêta, et effectua un salut profond.
— Archimage Traven, votre accueil vous honore. Je suis... le représentant de la Wyverne. Puis-je m’assoir ?

— Faites, je prie.
— Je vous en remercie, fit-il en s’installant. Mes facultés intellectuelles décroissent de 15% lorsque je suis debout, et je souhaite être optimal. Je voudrais évoquer avec vous la dernière mission d’une de vos compagnons, la jonction avec la guilde des voleurs du 20 Soirétoile.

http://img268.imageshack.us/img268/761/atonh.jpg


Ce faisant, il ôta de discrets gants de cuir sombre, puis croisa les bras. Il braqua ensuite ses yeux sur l’archimage, d'un regard qui ne cille pas. Il semblait observer le moindre détail, boire de ses pupilles la plus minime contraction des muscles faciaux de son interlocuteur. Celui-ci se redressa avec une lenteur étudiée, joignit calmement ses mains et afficha son expression la plus neutre.
— Naturellement. Je crains hélas de m’être éloigné de la formation de mes compagnons, et transmettrai vos requêtes à nos responsables dès que possible. Que désirez vous savoir ?

Le représentant resta un moment sans bouger, presque inanimé ; n’étaient ses yeux étrangement dilatés on aurait dit une statue. Traven commençait à se sentir mal à l’aise, lorsqu’il sembla reprendre vie et parla, toujours sans quitter le magicien du regard.
— Je ne désire rien savoir. Mon ordre souhaite présenter des excuses officielles.
— Des excuses ?
— Oui. Maelicia Marsoric est décédée. Nous sommes désolés.

Un tic infime, une minuscule contraction de paupières refléta l’espace d’un instant la surprise de l’archimage. Nombre d’experts diplomates l’auraient laissée passer. Pas son interlocuteur. Il inclina légèrement la tête sur le côté, comme pour guetter de nouveaux détails.
— Je vous demande pardon ? esquiva Traven, d’une voix raisonnablement interrogative.

L’homme pâle marqua une nouvelle pause. Il paraissait analyser la réaction de l’archimage, afin de déterminer la meilleure attitude à suivre.
— Excusez moi. La dénommée Maelicia Marsoric, qui exerçait en tant que compagnon en Mysticisme est décédée ce jour à 7H47 aux jardins elfiques, en s’opposant à nos services. Nos agents ont été la cible d’attaques magiques caractérisées, et ont répliqué en état de légitime défense. Malgré nos précautions, mort s'en est suivie.

Un poids sembla s’abattre sur les épaules de Traven. Aragir lui avait pourtant assuré que l’étudiante serait capable de fausser sans difficultés compagnie aux traqueurs. La perte de son élève était un échec désastreux pour toute cette opération. Si toutefois, ce n’était pas tout simplement du bluff de la part de l’inquiétant traqueur. Mais comment pourrait-il s’en assurer sans simultanément révéler son ignorance de la situation ? En quelques phrases, son mystérieux interrogateur venait de l’acculer. Il l’avait grandement sous-estimé.

— C’est là... une terrible nouvelle. Je suis surpris que les responsables du secteur mystique ne me l’aient pas transmis séance tenante... Pourrions nous récupérer la dépouille ainsi que ses effets personnels ?
Le traqueur aux cheveux d’ébène répondit cette fois immédiatement, comme s’il attendait cette question.
— Bien sûr...

Il inclina de nouveau la tête, puis fit un bref geste de la main gauche. Deux traqueurs en robes grises à capuche entrèrent, transportant un corps en civière.
— Je vous en prie, l’invita le représentant.

Cachant son dépit, le magicien se leva, et, après une courte hésitation, souleva le drap qui masquait le cadavre. Il n’eut pas à dissimuler une grimace de dégoût : atrocement défiguré par quelque brûlure, gisait le cadavre d’une femme rousse en pèlerine grise.

Son rythme cardiaque s’accéléra, bien que son visage restât impassible. Il ne décelait pas la moindre illusion. S’il eut dévié son attention des restes macabres, il eut remarqué que le « représentant » fixait le battement de ses artères temporales.

— Avait-elle... également son bâton de mage ? risqua-t’il.
— Elle avait le sceptre de Sh’éam, compléta posément le traqueur.

Traven fit volte face, et dévisagea l’individu qui lui faisait face.
« Elle l’a utilisé contre nos agents, expliqua aussitôt celui-ci, et nous l’avons récupéré. La présence de la Wyverne dans cette guilde, tout comme dans la cité impériale ne se justifie plus. Nous vous rendons la pleine possession de cette université, avec, encore une fois, nos plus sincères excuses pour ce terrible incident.

Un concert de questions se bousculèrent dans la tête de l’archimage. Etait-ce un meurtre ou une véritable légitime défense ? N’etait-ce pas du bluff ? Et si oui, d’où provenait ce corps ? La Wyverne allait-elle réellement se retirer ? Avaient-ils vraiment le sceptre comme ils l’affirmaient ?

— Il y aura une enquête... articula simplement Traven d’une voix rauque.

— Naturellement, confirma son hôte, tout en se permettant un sourire. Traven le dévisagea, voyant pour la première fois ses iris bleu gris : ce qu’il avait pris pour la couleur de ses yeux n’était en fait qu’une monstrueuse dilatation de ses pupilles. Celle-ci avaient dès à présent repris leur calibre normal, et sous le sourire de cet individu, Traven sentait sourdre une présence d’une insondable malice.

— Quel est votre nom ? demanda-t’il, agressivement.

Le sourire de son adversaire s’élargit.
— J’en ai plusieurs. Vous pouvez m’appeler Atonh. Mais... « Visionnaire » serait plus adapté.

Puis il se releva, salua poliment, et se retira, lui et ses traqueurs. Nestor rentra, et trouva son archimage en proie à de sombres pensées.

— Fais appeler Aragir, ordonna sobrement Traven. Rapidement.


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A peine le troisième visionnaire avait-il passé le pont de l’université arcane qu’il rejoignait une modeste escouade de traqueurs.

— Ils ne savent rien. D’après les réactions de l’archimage, il est probable à 86% qu’ils n’aient eu aucune liaison avec leur élément.  Lancez l’opération « Voile du Centre », colonel, ordonna-t’il en s’adressant à l’un d’entre eux. Surveillez discrètement toute tentative de contact de la cité vers la guilde, que ce soit par télépathie, courrier ou messager. Ah, et n’oubliez pas d’envoyer un détachement demander une commission d’enquête au palais impérial...




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Directives anticipées

21 Soirétoile 3E425, 12H15




La bretonne était morte de honte.

Non pas « morte » au sens propre, comme notre estimé lecteur s’en doute, mais bien confuse devant sa propre faiblesse. Elle était pourtant arrivée avec un peu d’avance sur place, dans le quartier du marché, afin de repérer les lieux dans ce qui promettait d’être une cohue sans nom vu la levée du blocus. Elle s’était pourtant promise de ne pas s’arrêter devant la boutique de Calindil.

Et puis, elle était passée devant, juste pour voir. Trainant un peu les pieds, elle avait reluqué avec envie la pancarte de « l’empire mystique », sa vitrine bien garnie, ses bibelots parés de couleurs et bien mis en évidence.

Elle était entrée.

Maelicia s’en voulait. L’honnête commerçant ne se doutait pas de l’usage qu’elle faisait de ses pierres-esprits. Accusant le coup de sa dépendance, elle en avait absorbé pas moins de deux à peine ressortie. Il ne lui en restait plus qu’une en poche, c’était du joli.

Bref, notre Maelicia se sentait abattue. A chaque fois c’était la même chose : de bonnes résolutions, puis plus rien. Elle soupira : contre mauvaise fortune bon coeur, c’était sa devise. Inspirant de nouveau profondément, elle se recomposa un sourire puis reprit son trajet.

Son attention se reporta sur la rue. Une multitude bigarrée s’y pressait, en un mouvant  mélange d’odeurs et de couleurs. Ici, de  vieux cyrodiils soupesaient divers fruits d’un air perplexe ; là un attroupement observait la prestation d’un mime khajiit ; ailleurs une femme énorme vantait la qualité de poissons à l’oeil vitreux et aux écailles gluantes ; là bas un bosmer maigre comme un clou lui proposait des bijoux en toc à prix d’or. Le piaillement affairé de la foule se mêlaient aux grouinements des porcs et autres caquètements.

Un crieur public vendait, comme tous les jours, une édition spéciale du « Cheval noir ». N’ayant guère envie de disperser ses économies en broutilles, Maelicia ne lui accordait habituellement que peu d’attention. Mais cette fois, un titre tonitruant en gros caractères noirs retint son attention.

Fronçant des sourcils finement épilés, l’étudiante s’arrêta. Leur angulation s’accentua encore davantage tout en payant le marchand ambulant. Après quelques pas d’une lecture fébrile, elle stoppa, le journal grand ouvert entre ses mains, abasourdie. Mais qu’est-ce que ceci pouvait bien signifier ?


Vrillant pensivement une mèche de cheveux roux, elle prit le journal d’une main, puis poursuivit sa marche en direction de Première-édition. Elle manqua de rentrer dans la cuirasse d’un garde impérial au coin d’une ruelle.

—Oh, excusez-moi, balbutia-t’elle avant de se rendre compte qu’il s’agissait de Drem, accompagné par Saerileth.

Elle les dévisagea un instant, l’air mi-inquiète, mi-ahurie ; puis enfin, n’y tenant plus, elle éclata.

— Z’avez vu ça, lança-t’elle en leur mettant le bulletin sous le nez, j'suis crevée !!

Et, effectivement, surmontant une esquisse de cadavre de femme, trônait le titre suivant :

Spoiler

Modifié par Trias, 07 décembre 2009 - 13:44.


#188 nood

nood

Posté 30 novembre 2009 - 20:34

Examen  en deux temps

    

21 Soirétoile 3E431,  12H15

    Drem avait venait de  terminer sa quatrième portion de tabac nibénéen en une demi-heure quand la  rencontre se produisit. Pour une raison ou une autre, Saerileth s'était montrée  peu loquace pendant la demi-heure d'attente : peut-être était-elle anxieuse de  la tache qui les attendait, soucieuse de la solidité de l'accord passé la nuit précédente  avec lui ou encore gênée de la façon dont l'elfe l'avait dévisagée : quoiqu'il  en soit, quand une jeune Brétonne, la tête flanquée dans l'édition du jour du  Courrier du Cheval Noir, manqua rentrer en collision avec lui, elle brisa un  silence d'une bonne vingtaine de minutes.

    — Oh, excusez-moi…

    La  jouvencelle sortit la tête de son journal. Des yeux verts à l'éclat à peine amoindris  par une paire de lunettes rondes, des cheveux roux : c'était bien Maelicia,  quoiqu'habillée de manière plus sophistiquée que la veille et ouvrant des yeux  hébétés. Avant qu'il ne puisse prendre la parole, Elle dit d'une voix à la fois  énergique et abattue :

— Z'avez vu ça, j'suis  crevée !!

    Drem se saisit sans tarder du papier qu'elle lui  tendait et le lut consciencieusement et avec intérêt. Saerileth  s'était levée et regardait par-dessus l'épaule du dunmer. Une vraie mine d'or,  ce papier, se dit-il : on y apprenait le vrai nom de la magicienne, qu'elle  avait fait partie des "sept de Bravil", même s'il ne se souvenait  plus exactement à qui ou quoi il se rapportait, et enfin, information du jour,  qu'elle était morte.

    Tendant le journal à  Saerileth qui n'avait pas fini de le lire, Drem tenta de vérifier la véracité  du contenu de cet article – et il avait vu suffisamment de annonces aussi  officielles que truquées pour se douter que c'était faux d'un bout à l'autre.  De son index droit, il tâta l'épaule de Maelicia ; elle semblait aussi  matérielle et concrète que n'importe quelle épaule vivante. Il coupa court aux réticences de la magicienne, qui semblait peu joyeuse d'être examinée  comme on jugerait de la maturité d'un fruit sur un étal de marché.

        -  Attend un peu, je vérifie quelque chose… répondit-il, avec un bref  sourire en coin.

        Il lança un léger sort de  détection de vie : pendant les quelques secondes avant sa dissipation naturelle,  il vit la forme de la jeune Brétonne s'illuminer de cette lueur rosâtre caractéristique.  La conclusion ne se fit pas attendre.

-  Mon examen en deux temps est formel : Typhaine  Elodie Gabrielle Marsoric, tu es bien vivante.

Il  ponctua sa subtile démonstration d'un sourire, et reprit.

- Ce qui m'amène à deux  questions : Pourquoi le premier journal de la Cité Impériale prétend l'exact  contraire, et surtout : pourquoi Danse-Mot n'est-il pas là ?

Modifié par nood, 03 avril 2011 - 11:28.


#189 Trias

Trias

Posté 01 décembre 2009 - 01:57

Voile du Centre

21 Soirétoile 3E425, 12H15




Alors qu’elle tentait de lire sur leur visage un effarement comparable au sein, l’elfe acheva sa lecture. Se composant un air concentré, Drem laissa le bulletin entre les mains de Saerileth et enfonça son index droit dans l’épaule de la brétonne. Maelicia avait déjà croisé des gens « tactiles », mais là ce type de contact semblait autant fasciner le dunmer autant qu’un hochet au dessus d’un nourrisson.

— Euh... commença-t’elle, sans trop savoir si elle devait ou non le gifler tant il semblait absorbé par ce nouvel exercice.

— Attends un peu, je vérifie quelque chose… s’expliqua-t’il, voyant qu’elle haussait un sourcil.

Il incanta ensuite une arcane que l’étudiante reconnut immédiatement : la détection de vie. L’expression étonnée de Maelicia s’accentua davantage, puis évolua vers une note de condescendance. Sa parfaite santé lui semblait tellement évidente qu’un tel fondamentalisme prenait à ses yeux des allures de comédie.

— Mon examen en deux temps est formel : Typhaine Elodie Gabrielle Marsoric, tu es bien vivante.
— Ah. Ben... me voilà rassurée maintenant... commenta-t’elle avec une pointe de raillerie dans sa voix fluette. Avant de se rendre compte qu’il avait employé son vrai nom, dissipant soudain l’expression moqueuse qu’elle arborait.

Le dunmer sourit triomphalement, et la brétonne se demanda lequel de l’agent ou du scientifique primait dans cette autosatisfaction.

— Ce qui m'amène à deux questions : Pourquoi le premier journal de la Cité Impériale prétend l'exact contraire, et surtout : pourquoi Danse-Mot n'est-il pas là ?

Typhaine soupira puis ramena ses deux compères un peu plus à l’écart dans la ruelle.
— Danse-mot est malade. L’a eu un peu d’mal a récupérer d’ses bleus au derrière, et comme y boitait toujours un peu, il est allé faire un tour chez le rebouteux pour se faire imposer les mains.

Elle marqua une pause, son regard passant de l’impériale au dunmer.
« Ensuite, j’vous serai reconnaissante de pas m’appeler comme ça en public. C’est pour pas causer  d’soucis à ma famille que j’ai choisi ce pseudo : Marsoric est un nom répandu en Hauteroche, mais des Typhaine Elodie Gabrielle Marsoric y’en a pas cinquante. Z'avez un avantage sur moi, donc soyez gentils, n'en abusez pas : motus !


« Par contre, poursuivit-elle, j’ai aucune idée des raisons de ma mort ! C’est vraiment bizarre. J’peux le reprendre ? Merci, fit-elle en examinant à nouveau l’imprimé fatidique.

L’étudiante le rouvrit, plissa les yeux, puis se mit à mâchonner distraitement une mèche de cheveux. N’ayant plus qu’un membre de disponible, la lecture s’avéra ardue, si bien qu’elle décida de s’adosser aux mur de moellons derrière elle, puis de s’y accroupir.

« C’qui m’ennuie c’est qu’y a l’portrait de Danse-mot en page deux. Si jamais y s’remet ça nous compliquera d’autant la vie. Moi par contre j’suis tellement défigurée là dessus qu’on...

Elle se tut soudainement, et ses yeux s’écarquillèrent. Le manteau de la victime ressemblait comme deux gouttes d’eau à sa pélerine. Le cadavre esquissé sur l’imprimé n’était pas le sien, mais bien celui de son « sosie » de la guilde des voleurs ! Un frisson lui parcourut le dos : quelqu’un dans cette cité était allé jusqu’à tuer pour assouvir ses objectifs. Mais qui ? Un disciple ? La Wyverne ? Jamais un traqueur ne l’aurait tuée pour si peu, et puis c'était un acte tellement insensé !  

« ‘Coutez, déclara-t'elle, je... euh... z’avez p’têtre besoin d’savoir que euh... notre... mission est dangereuse. Pour moi à priori y’a pas d’problème pisqu’on me croit morte, et vous on n’sait pas qu’vous êtres impliqués. Faudra juste que j’prévienne ma guilde, sinon y vont tout remballer. Mais... le blème c’est avec Danse-mot... il est recherché maintenant, faudra faire attention...

Typhaine releva la tête.
« Comment est-ce que vous comptiez rentrer au palais impérial, au fait ? »




ж ж ж
Un cadavre sur les bras

21 Soirétoile 3E425, 10H15




Nestor n'avait pas franchi le pas de la salle du conseil que le professeur Dreslobet déboulait en trombe, manquant de renverser le vénérable portier.

— QUI !? Qui était-ici ? rugit-il après un fulgurant balayage oculaire. Il semblait plus vif, tendu, plus rapide, plus grand que dans les souvenirs de son supérieur, comme si tout stigmate de vieillesse s'était soudainement dissipé en lui. Il évoquait un fauve, un loup aux aguets. L'archimage remarqua que même son accent, s'était évanoui. Son regard se porta sur la forme inerte recouverte par le drap. Il fronça les sourcils.

« Qu'est-ce que... commença-t'il.

— Atonh, le visionnaire de la Wyverne, était ici, expliqua calmement l'archimage — Aragir étrécit le regard en entendant le nom, mais ne sembla pas l'identifier —. Il a ramené ce corps, qu'il déclare être celui de votre disciple. Sauriez vous l'identifier ?

En quelques surprenantes enjambées l'enseignant se retrouva au chevet du cadavre. Relevant d'abord le drap du visage, semblant redouter ce qu'il y verrait, il ne broncha pas. Sans se départir de son expression fermée, il ota finalement complètement le drap, et releva d'un coup sec la robe de la morte jusqu'au flanc. Lequel était parfaitement indemne de cicatrice.

— Ce n'est pas elle, déclara-t'il, et ses épaules parurent s'alléger d'un poids.
— Dans ce cas c'est une mise en scène, conclut Traven. Ils étaient même allés jusqu'à insinuer qu'ils avaient le sceptre. Mais... pourquoi ? Pourquoi se donner tant de mal pour un effet aussi éphémère ? A moins qu'ils n'aient voulu s'assurer que nous ignorions la situation actuelle...

— Elémentaire, cher Hannibal, acquiesça Aragir, plus détendu. Il avait repris son accent et sa stature habituelle. Néanmoins, vous avez un cadavre récent sur les bras, ajouta-t'il en pliant l'un des bras de la macchabée.
— Est-ce là un meurtre ? Ou bien du simple opportunisme, réfléchit tout haut Traven. Voilà qui dépare avec le style habituel de la Wyverne, vous ne trouvez pas ?

Le professeur ne pipa mot, et se contenta d'un bref hochement de tête.
« En tout état de fait, nous devons en informer les autorités, continua Traven. Je ne peux malheureusement me déplacer, mais Raminus le fera.
— Attention aux bavures autoritaires, commenta Aragir. N'informez pas n'importe qui. Je tenterai pour ma part de retrouver mon élève. L'attentisme n'est plus de mise...

Il se dirigeait d'un pas pressé vers la sortie lorsque Traven l'arrêta. Ils étaient seuls à présent, le vieux portier ayant regagné son poste pendant l'examen mortuaire.
— Un instant, Aragir. Vous avez demandé 'qui' était venu, tout à l'heure. Pensiez vous à quelqu'un en particulier ?

Leurs deux regards se croisèrent, et s'affrontèrent un long moment, l'azur contre le brun, en un duel insondable. Finalement, ce fut Aragir qui baissa les yeux.
— J'ai cru qu'un très... très vieil ami était de retour parmi nous, Archimage.

L'archimage plissa les paupières.
— Bonne chance, Gabriel...

L'intéressé quitta la salle sans mot dire.

.

Modifié par Trias, 01 décembre 2009 - 02:10.


#190 Arakis

Arakis

Posté 01 décembre 2009 - 11:03

C'est tuant la mort




21 Soirétoile 3E431, 12H15




Saerileth et Drem avaient passés la demi heure précédente dans un silence d'enterrement, il fumait sa pipe et elle regardait alentour en cherchant vainement ceux qu'ils attendaient. Alors qu'elle levait le nez en l'air en regardant les nuages et essayant dans le loisir le plus puéril de leur trouver des formes, alors qu'elle commençait à voir une sorcière bossue quelque chose la tira de ses réflexions de haute volée. La Brétonne venait d'éviter la collision avec Drem et racontait quelque chose sur le fait qu'elle était morte, coupant toute demande d'explications elle leur tendit un article du courrier du cheval noir.

Le laissant à Drem qui le lui passa une fois qu'il en eu finit la lecture, elle lut brièvement l'article, toujours le même genre de truc, pourquoi les journaux ne parlaient ils que de meurtres et autre choses sordides ? Elle se mordit la lèvre en voyant le nom complet de la brétonne, elle avait bien fait de prendre un alias de voyage avant se rappeler qu'avant de se choisir le nom de Saerileth ce n'était guère glorieux de son coté non plus. Ayant fini sa lecture elle rendit le journal à la main tendue de Maelicia, lui collant une tape qui se voulait amicale sur l'épaule elle dit

"Te bile pas pour ça, si j'en crois ce qu'on dit je suis déjà morte plusieurs fois, sept ou huit fois je crois bien, j'avoue y avoir laissé les morceaux mais je suis encore là"



Visiteurs vivants, vous n'êtes pas bienvenue



14 VifAzur 3E415, heure difficile à déterminer étant donné l'endroit



La compagnie avançait depuis un moment, comme à l'habitué l'ambiance était bonne enfant, chacun se moquant gentiment des autres sur à peu prés n'importe quel sujet, Hlaf Demi-Nez, le nordique était sans cesse charrié sur la prétendue odeur d'hydromel de son plastron qui les ferait repérer à trois kilomètres à la ronde, Dun-Ilu Ilath-Pal, un cendrais que tout le monde avait choisit d'appeler Dun dans un souci de facilité de communication se voyait affubler du surnom de pieds noirs et de cul cendreux. Hlaf aimait à lui dire que les Terres Cendres le suivaient partout où il allait laissant derrière lui une traînée noire (à moins que ce soit la crasse de tes pieds, ajoutait il souvent après) ce qui entraînait souvent une rixe amicale mais féroce entre les deux compères, Gakken Magadb, l'orc du groupe friand de viande saignante et maître de la cuisine, bien que Hlaf l'accusait d'avoir un jour dévorer son cheval en plein milieu de la nuit (ledit cheval avait en fait fait le bonheur d'un troll errant affamé) . Et pour achever le tableau Gaël Valeiu jeune impériale, tous les membres du groupe lui répétaient souvent qu'il préférait lutiner le seul élément féminin de la troupe.

Le groupe perdit vite sa bonhomie lorsqu'ils furent en vue de la ruine qu'ils cherchaient depuis quelques semaines dans la région, chacun posant son paquetage pour se préparer pendant que Gaël donnait les instructions

"Hlaf et Gakken vous passez en tête, Dun et moi on s'occupe des arrières, Sae tu prends le milieu, si y'a quelque chose qui bouge tu l'alignes d'une flèche entre les deux yeux. Sinon on fait comme d'habitude, on progresse calmement et surtout on essaye de pas crever."

Le quintet s'engagea à l'intérieur, hormis le silence oppressant et l'humidité il fallait admettre que l'endroit avait un certain charme, les arcades sculptées avaient été lissés au fil des ans par l'humidité et reflétaient parfaitement la lumière des cristaux au sol ainsi que celle des torches des visiteurs.

"Je pourrais presque m'installer ici, s'il faisait un peu moins froid et qu'il y avait pas ce silence commenta Dun
-Mais c'est qu'il est froussard le pieds noirs, ricana Hlaf
-Ta gueule l'outre à vinasse, lui au moins il a une sensibilité artistique, lança Gakken
-Fermez la, on est là pour le boulot, on est pas là pour discuter de l'architecture et de l'art de mecs qui sont morts bien avant qu'on voit le jour."

Cette remarque de Gaël remit les pendules à l'heure et tout le monde reprit la marche en silence, avançant prudemment, la main cramponné sur leur armes dés que quelque chose semblait bouger ou faire du bruit. Ils s'enfonçaient peu à peu dans les profondeurs de la ruine, admirant les magnificences oubliés de la civilisation Ayleide bien que de nombreux squelettes jonchant le sol de certaines pièces leur fit comprendre que celle-ci n'était pas si magnifique que ça.

Alors qu'ils passaient une énième salle, quelque chose les fit tous sursauter, une sorte de bruit caverneux, un raclement, comme si on avait poussé une énorme dalle de pierre. En un sens cette image n'était pas si loin de la vérité, un énorme pan de mur sur leur gauche commençait à s'affaisser révélant derrière une flopée de ce que les Ayleides avaient créer il y a bien longtemps, des morts vivants. Garrek sortit son épée et sangla vite fait son bouclier tandis que Hlaf sortait son épaisse hache à deux mains qu'il avait baptisé Tranche Couenne (inutile de dire que le soir où il lui avait donné un tel nom il était passablement ivre). Dun extirpa sa lance cendrais en même temps que Gaël prenait son épée bâtarde.

Se campant de pieds ferme ils reçurent la vague d'assaillant de pleins fouets, cognant, frappant et découpant tout ce qui leur tombaient sous la main, le flot de cadavre semblait continuel et bientôt le visage de Garrek disparut dans une gerbe de sang quand un zombie se jeta sur lui, une fois à terre ils se jetèrent à la curée ne laissant que trés peu de choses reconnaissable de l'orc, Dun fut le suivant alors qu'il essayait de se replier vers la sortie, un squelette le transperça de son épée au poitrail.

Les trois survivants tentèrent de sortir , soudain Saerileth sentit quelque chose tire sur son bras, elle vit alors un zombie attaché de tous ses crocs à celui-ci, alors qu'elle tirait pour se libérer elle sentit une douleur atroce, la créature refermait ses crocs sur le muscle, le déchirant fibre après fibre, elle hurla de douleur quand son bras quitta son épaule, quelque secondes plus tard Gaël décapita la créature et la chargeant sur ses épaules se mit à courir laissant Hlaf au prise avec les non morts, la posant dans une salle ayant l'air déserte il lui fit jurer de rester ici et de ne rien faire jusqu'à qu'il vienne la chercher. Peu après elle perdit connaissance sans doute la perte de sang malgré le bandage de fortune qu'il lui avait fait.

Modifié par Arakis, 02 avril 2011 - 10:05.


#191 nood

nood

Posté 03 décembre 2009 - 12:04

Grandes manœuvres

    

21 Soirétoile 3E431,  12H20

    Maelicia  invita Drem et Saerileth dans un coin de ruelle un peu plus propice à des discussions  discrètes.

    - Danse-mot est malade.  L'a eu un peu d'mal à récupérer d'ses bleus au derrière, et comme y boitait  toujours un peu, il est allé faire un tour chez le rebouteux pour se faire  imposer les mains.

    L'elfe  noir eut la réaction de se dire que c'était plausible, autant que cela pouvait  être un beau mensonge ; réaction paranoïaque qu'il mit sur le compte d'une  déformation suite aux tractations secrètes de la nuit précédente. La jeune  Brétonne reprit rapidement la parole.

    - Ensuite, j'vous serai  reconnaissante de pas m'appeler comme ça en public. C'est pour pas causer  d'soucis à ma famille que j'ai choisi ce pseudo : Marsoric est un nom répandu en  Hauteroche, mais des Typhaine Elodie Gabrielle Marsoric y'en a pas cinquante.  Z'avez un avantage sur moi, donc soyez gentils, n'en abusez pas : motus !

    - Entendu, répondit-il, pas mécontent de son petit effet.

    Il  avait atteint son but : montrer d'une manière ou d'une autre qu'il la  connaissait maintenant un peu trop pour qu'elle puisse lui faire des coups bas  sans être inquiétée par de fâcheuses conséquences. Une façon de forcer la  loyauté, en somme…

    - Par contre, poursuivit-elle,  j'ai aucune idée des raisons de ma mort ! C'est vraiment bizarre. J'peux le  reprendre ?

    Saerileth  lui tendit le journal plié en quatre, et lui accordant une réconfortante tape  dans le dos, lui dit :

    -Te  bile pas pour ça, si j'en crois ce qu'on dit je suis déjà morte plusieurs fois,  sept ou huit fois je crois bien, j'avoue y avoir laissé les morceaux mais je  suis encore là !

    -  Merci. C'qui m'ennuie c'est qu'y a l'portrait de Danse-mot en page deux.  Si jamais y s'remet ça nous compliquera d'autant la vie. Moi par contre j'suis  tellement défigurée là dessus qu'on... 'Coutez, je...  euh... z'avez p'têtre besoin d'savoir que euh... notre... mission est  dangereuse. Pour moi à priori y'a pas d'problème pisqu'on me croit morte, et  vous on n'sait pas qu'vous êtres impliqués. Faudra juste que j'prévienne ma  guilde, sinon y vont tout remballer. Mais... le blème c'est avec Danse-mot...  il est recherché maintenant, faudra faire attention...

    -  De toute façon, reprit Drem, une infiltration dans le Palais Impérial  n'est pas une simple promenade. C'est une mission dangereuse. Je le savais,  avant que tu nous montre que quelqu'un est prêt à tuer pour faire croire à ta  mort.

    Et  il était sincère. Pour lui, c'était son dernier coup avant de partir  définitivement. Ce n'était qu'un risque de plus dans un plan qui en comportait  déjà une tripotée : l'échec n'était pas une option envisageable et ce depuis  son rapport au commissaire Valens. Maelicia releva la tête.

    -  Comment est-ce que vous comptiez rentrer au palais impérial, au fait ?

    - Bon, fit-il posément, je voulais attendre qu'on soit  au complet pour expliquer, mais je peux vous mettre au courant maintenant.

    Il  marqua une pause, guettant furtivement pour repérer les éventuelles oreilles  indiscrètes qui aurait pu entendre des choses compromettantes, puis, rassuré,  passa son regard rougeoyant à travers ceux des ses deux interlocutrices.

    - Pour pouvoir rentrer  sans trop être inquiétés, on va miser sur la mauvaise communication entre les  différents services de la garde impériale. En fait, vous pouvez me croire, on  reçoit souvent des ordres de mission, et quand on arrive sur place, les gardes  ne sont même pas informés : ou encore, ça arrive fréquemment de recevoir ordre  et contrordre à quinze minutes d'intervalle. Ça doit être la conséquence de la  taille de l'administration, ou simplement le fait que les fonctionnaires sont  planqués, ou fainéants, ou débordés de travail, que sais-je encore… Tout ça  pour dire que si on arrive à une entrée de service avec un billet officiel qui  nous donne le droit de rentrer, les gardes ne poseront pas trop de questions,  même s'ils n'ont pas été prévenus. Et j'ai un de ces fameux billets, signé par  un responsable, tout ce qu'il y a de plus conforme. En substance, cet ordre de  mission devrait nous permettre non seulement de rentrer dans le palais, mais  aussi de fureter dans les coins sans avoir l'air louche. Et aussi, j'ai  retrouvé ceci, qui nous aidera bien.

    Il  sortit une minuscule flasque de son baluchon, qu'il ouvrit : aux premiers  effluves, tous reconnurent le fumet caractéristique du musc d'insecte telvanni.

    - Avec ça, on aura l'air  aussi bienveillants et honnêtes qu'un prêtre de Stendarr.

    Il  marqua à nouveau une pause pour laisser le temps à Saerileth et Maelicia de  digérer l'information.

    - Bien, maintenant, c'est  là que ça se corse. Si ils décident de vérifier la véracité de l'ordre de mission –  et c'est ce qu'ils font généralement, surtout au palais, je suppose – ils vont  envoyer un messager là où l'ordre a été émis, en l'occurrence à la caserne du  port. Et comme cet ordre n'a pas été émis par ma hiérarchie, ils finiront tôt  ou tard par se rendre compte qu'on a pas le droit d'être à l'intérieur du  palais. Ça devrait prendre au grand minimum deux heures, mais faudra pas  traîner quand on sera dedans, donc j'espère que tu sais ce que tu cherches et  où tu vas. Deuxième chose : l'ordre est très précis quant à la teneur de la  mission. Sans rentrer dans les détails, il y a eu, avant le blocus, une  suspicion d'épidémie dans le quartier du port. Un navire qui avait fait un escale  imprévue au Marais Noir, avant de remonter le Niben, a accidentellement ramené  un genre de mycose qui provoque fièvres, courbatures, et tout un tas d'autres  choses dans sa cargaison. Toujours est-il que le risque d'épidémie n'a pas été  divulgué pour ne pas rajouter de confusion pendant le blocus : mais on s'est  aperçu que la cargaison avait déjà été livrée à de nombreux endroits partout  dans la cité. Pour notre couverture, vous serez un groupe d'experts en maladies  infectieuses venus contrôler différents points dans le palais – points d'eau,  réserves de nourriture, équipement, et même personnel, si on le veut. Toi,  Maelicia, tu seras une guérisseuse spécialisée dans ce genre de maladie :  Danse-Mot jouera le rôle d'un mage Argonien spécialisé dans les maladies de son  pays natal liées à des mycoses ; quant à toi, Saerileth, tu seras leur garde du  corps attitré. Et moi, je suis le légionnaire chargé de les accompagner et de  faire un rapport détaillé de leurs activités. Ça devrait faire illusion, si on  se débrouille bien ; mais si l'Argonien nous fait faux bond, tout mon plan  s'écroule.

Modifié par nood, 03 avril 2011 - 11:29.


#192 Ygonaar

Ygonaar

Posté 03 décembre 2009 - 15:00

Démarche délicate.




21 Soirétoile 3E425, 12H15]



L'Ordre de la Wyvern est généralement organisé et efficace. Ils avaient pour ainsi dire tous quittés l'Université des Arcanes. Avant midi et c'est dans son propre bureau que l'Archimage put recevoir le Commissaire Divisionnaire Valens. Ce dernier embrassa la pièce du regard lorsque Nestor l'introduisit. Elle était similaire à son souvenir. La Carte, en tout cas, n'avait pas changer d'un iota. L'immense tapisserie représentant Tamriel pendait toujours sur le mur du fond. Les pierre-esprits enchâssées,
une par guilde des Mages, luisaient faiblement d'une lueur opaline. Le Chevalier de Desailly avaient
longuement étudié leurs propriétés, alors qu'il préparait son expertise es Mysticisme. Elles devaient toujours contenir l'organigramme de chaque guilde et les coordonnées thaumiques de
leurs portails, mais il se demandait quelles autres informations l'Archimage pouvaient bien avoir ajoutées. Fut-ce à cause d'un élan de nostalgie ou bien parce que son ancien enseignant l'impressionnait
toujours, mais l'émissaire impérial employa spontanément l'ancien titre de son hôte.


Je suis ravi de vous revoir, Professeur Traven, bien que je déplore que ce soit en cette tragique circonstance. Je suis en effet mandé par l'Empereur pour essayer de faire le jour sur les étranges
circonstances du décès de mademoiselle Typhaine Elodie Gabrielle Marsoric, Compagnon es Mysticisme. J'imagine que vous devez déjà avoir diligenté une enquête interne et n'ai  nul doute sur la
qualité de notre coopération. Pourriez-vous me faire part des faits qui sont déjà en votre connaissance? Et...
le commissaire envoya un pâle sourire... Puis-je récupérer le corps, ainsi que l'adresse de la famille pour qu'elle prenne ses dispositions pour organiser les obsèques dans les plus brefs délais?

Modifié par Ygonaar, 03 décembre 2009 - 15:03.


#193 Trias

Trias

Posté 07 décembre 2009 - 16:33

Maladies magiquement transmissibles

21 Soirétoile 3E425, 12H20




— Te bile pas pour ça, si j'en crois ce qu'on dit je suis déjà morte plusieurs fois. Sept ou huit fois je crois bien, j'avoue y avoir laissé les morceaux mais je suis encore là !

La bretonne releva la tête, étonnée. C’était l’une des toutes premières fois que Saerileth lui témoignait de la sympathie, et il s’agissait là d’un comportement étrangement réconfortant de sa part. Elle aussi pouvait être considérée comme une aventurière, et savait de même mieux que quiconque ce que signifiait être une femme sur les routes.

Après l'avoir brièvement remerciée, Typhaine se replongea dans la lecture du journal, réfléchissant à voix haute. Saerileth et Drem le lui commentèrent également, puis l’elfe noir leur livra son plan. L’étudiante écouta très attentivement son exposé, son regard allant de la flamme éteinte de ses yeux à la texture parcheminée de l’ordre de mission, et s’étrécissant par moments. Et lorsqu’elle ne les dévisageait pas, ses doigts semblaient jouer sur la surface d’un bijou probablement en toc pendu à son cou, tout comme elle tripotait ses mèches un instant auparavant. Jusqu’à ce que le dunmer achève ses révélations :  

... Toi, Maelicia, tu seras une guérisseuse spécialisée dans ce genre de maladie : Danse-Mot jouera le rôle d'un mage Argonien spécialisé dans les maladies de son pays natal liées à des mycoses ; quant à toi, Saerileth, tu seras leur garde du corps attitré. Et moi, je suis le légionnaire chargé de les accompagner et de faire un rapport détaillé de leurs activités. Ça devrait faire illusion, si on se débrouille bien ; mais si l'Argonien nous fait faux bond, tout mon plan s'écroule.

Un silence suivit, pendant lequel ses deux auditrices ne prirent la parole. Au loin les caquètements, bruissements et autres brouhahas du marché se faisaient entendre, en une changeante atmosphère. Typhaine fut la première à répliquer, de sa voix fluette devenue étrangement douceureuse, tout en prenant bien soin d’éviter le regard de l’elfe.

— Drem... vous savez comment ça s’attrape les mycoses ?

Braquant soudain l’éclat pétillant de ses iris sur le dunmer, elle éclata d’un fou-rire perlé avant de se couvrir le visage des mains.

— Une guérisseuse...hihi... spécialisée dans les mycoses...hihihi ! C’est une blague !!! *rit* Ah là là, je m’demande bien pourquoi vous avez pensé à ça *pouffe de rire* ! Bon enfin, ce plan là vaut quand même son pesant de guimauve !

Elle se releva, se recoiffa d’un geste rapide, puis tenta de chasser le rose de ses joues.
Bon, continua-t’elle en s’essuyant les yeux, enchaînant rapidement pour éviter de paraître trop immature, deux heures ce s’ra p’têtre un peu juste mais j’pense qu’on a pas vraiment le choix, non ?  Bon, voici quel est notre objectif de mission :

Inspirant un bon coup, elle poursuivit, mais de discrètes fossettes animaient encore ses joues délicates.
« Ma guilde s’est faite détrousser un objet X que pour des raisons de commodités on appellera « le pot-au-roses ». Danse-mot et moi, on enquête sur les circonstances du vol dudit pot-au-roses, et on a découvert ça : le voleur, nom de code grand-méchant-bisounours, se cache qu’êque part au palais impérial. On connait pas le nom du bonhomme, on sait pas si il est beau ou pas, mais on sait à quoi y d’vrait correspondre : il  aurait un valet en livrée impériale, de taille moyenne, mais avec un accent pas cyrodiil. Et surtout, lui et son valet étaient derrière la bicoque des moines de Stendarr le 15 de Sombreciel. S’pas grand chose, hein ? On connait même pas sa couleur préférée ! M’enfin à priori ça doit probablement être un mage ou un collectionneur, sinon y s’intéresserait pas au pot-au-roses...

Elle se massa à nouveau le col, comme pour remettre en place son médaillon, puis continua, un sourcil levé :
« N’empêche que z’avez raison, Drem : si y’a pas de lézard, on a un problème. On aurait put faire deux groupes de recherche, vous et Danse-mot, Saerileth et moi, pour aller plus vite.

La rouquine parut réfléchir quelques instants.
« J’ai bon espoir qu’y soit allé s’retaper chez Boniface, à côté des boucliers de Pierremur. On a qu’à aller le chercher là bas ; si ça s’trouve, y s’ra toujours dans la salle d’attente...

Elle dévisagea alternativement ceux qui constituaient désormais ses complices. En dépit du furieux sentiment de sympathie qu’ils lui inspiraient, elle n’avait pas révélé plus que le strict nécessaire à leur entreprise. Trop peu d’éléments tangibles attestaient de leur bonne foi, tandis que la spontanéité douteuse de leur apparition de la veille jetait toujours un sérieux voile sur leurs motivations. Une fois de plus, il lui faudrait faire avec. Elle réalisa avec une pointe d’amertume que, des septs compagnons initialement lancés dans l’aventure Sh’éamite, sa propre personne en était la seule restante.

Revenant à elle, Typhaine leur adressa un sourire éblouissant.
— Bon ben y’a plus qu’à. Z’êtes toujours partants ?




Élève précoce

21 Soirétoile 3E425, 12H15




— Je suis ravi de vous revoir, Professeur Traven, bien que je déplore que ce soit en cette tragique circonstance. Je suis en effet mandé par l'Empereur pour essayer de faire le jour sur les étranges circonstances du décès de mademoiselle Typhaine Elodie Gabrielle Marsoric, Compagnon es Mysticisme. J'imagine que vous devez déjà avoir diligenté une enquête interne et n'ai nul doute sur la qualité de notre coopération. Pourriez-vous me faire part des faits qui sont déjà en votre connaissance ? Et... puis-je récupérer le corps, ainsi que l'adresse de la famille pour qu'elle prenne ses dispositions pour organiser les obsèques dans les plus brefs délais ?

L’archimage resta un instant impassible, dévisageant l’impérial aux allures de nobliau qui se tenait devant lui, une lueur jouant dans ses yeux bruns. La tignasse brune dont il se souvenait était à présent galamment arrangée, tandis que les traits naturellement fins de Valens se voyaient désormais maquillés d'un masque de diplomatie. Finalement, son regard dévia un instant vers la fresque derrière lui, puis revint à son interlocuteur.

— Elle est toujours là, sourit-il. Vous étiez déjà un élève curieux, il y a... quelques années de cela, Paullus. Et mention Bien, au diplome d’étude spécialisées de mysticisme.

Il sourit.
« Nous manquons de mystiques, savez vous ?

Son expression s’assombrit, et devint légèrement amère.
— Cependant, c’est le commissaire Valens qui vient me voir, et pour de sombres évolutions... son regard devint ferme. Nous attendions votre intervention, Paullus, bien qu’elle soit plus précoce que prévue.

Il se caressa un instant le menton, étrécissant le regard.
« Nos registres ne comprennent pas de Typhaine Elodie Gabrielle, mais il y a effectivement une Marsoric qui se fait appeler Maelicia parmi nos compagnons. Ladite étudiante était missionnée par nos soins de récupérer un artefact de la plus haute importance, le Sceptre de Sh’éam. Nous l’y avons envoyée seule, en raison des recommandations du professeur Dreslobet, son tuteur d’enseignement ; et parce que nous souhaitions être discrets... vis à vis de la Wyverne, dont la filature n’a cessé d’entraver nos recherches. Et jusqu’ici, nous étions sans nouvelles.

Il opposa les mains, puis reprit en regardant son ancien élève droit dans les yeux.
« La Wyverne nous a apporté un corps aujourd’hui même, prétendant qu’il s’agissait de celui de notre élément, laquelle aurait « attaqué «  leurs agents. Ils semblaient très curieux d’apprendre comment nous réagirions au décès. Pour être honnêtes, nous ne pensons pas qu’il s’agisse de notre compagnon ès mysticisme, mais d’une toute autre dépouille. Maître Buccano, notre thanatologue et Mage-légiste, est actuellement en train de l’examiner en salle deux, au troisième sous-sol du batiment A8, afin de l’identifier.

Son expression se fit plus inquiétante.
« Pour tout vous révéler, maître Polus était censé vous contacter une fois l’autopsie achevée. Et celle-ci est en cours. Dîtes moi, Paullus, par quel biais avez vous été appelé  ?




A crémation, crémation-et-demi

21 Soirétoile 3E425, 11H30




Au troisième sous-sol du bâtiment A8, gisaient trois rangées de cadavres, alignés sur des tables de dissection. D’opaques draps blancs recouvraient les dépouilles d’animaux, d’hommes, de mers et même de daedra dont l’étude était en cours, sans parvenir à en masquer une pénétrante odeur de liquide de fixation. Ledites tables ressemblaient à des grands éviers de métal, à ceci près qu’ils étaient plats, et que l’évacuation des sécrétions et autres liquides mortuaires se faisait sur le côté.

Naturellement, tout les corps étaient allongés. Seulement ce qui était moins naturel, c’était que le corps du prosecteur en anatomie multispéciée, le Mage-légiste Florius Buccano, l’était aussi. Le pauvre ancêtre gisait à terre, complètement sonné, aux pieds de Deneth.

L’assassin contemplait son travail avec satisfaction. La stratégie du nouveau Visionnaire l’avait immédiatement séduit : à l’occupation bruyante et tapageuse de la guilde des mages imposée par Raegar, s’était substituée une infiltration bien plus discrète depuis que le lointain Atonh s’en était mêlé. Il faut dire que le décès consécutif de deux Visionnaires aurait passablement désorganisé la Wyverne n’était la poigne de leur dernier meneur. Et celui-ci imposait de toutes autres méthodes à l’organisation. Ainsi, c’est vêtu comme un prestidigitateur de la guilde que le traqueur avait approché le centre de dissection. Et il l’avait assommé sans un bruit.

Longeant la file de cadavres, il avisa celui d’une femme de taille moyenne rousse, à moitié ouvert encore sous l’effet de l’autopsie. S’emparant de la pince à linge de Buccano, il s’occlut les narines puis chargea le corps sur une table à roulettes. Il la mena ensuite au premier four crématoire, puis l’y laissa lentement incinérer. Il transporta de même le vieux Buccano encore inconscient jusqu’au deuxième four, qui était éteint, et l’y enferma en tirant le loquet.

Conformément aux instructions d’Atonh, il n’alluma pas ledit instrument de cuisson, le Mage-légiste n’ayant même pas pu voir son visage. Il quitta la salle le sourire aux lèvres, et la capuche rabattue.




Pré-voyance

21 Soirétoile 3E425, 11H45




Nathael referma précautionneusement le dernier tiroir du bureau de Valens : il avait tout remis en place. Qu’importe la difficulté de l’infiltration, il ne devait rester aucune trace de la fouille. La subtilisation des documents relatifs à l’affaire Marsoric devait être à la hauteur de l’organisation du vol : le commissaire divisionnaire Valens était parti à l’heure prévue de son bureau, droit vers la guilde des mages.

L’agent de la Wyverne ne comprenait pas vraiment comment son Visionnaire avait pu prévoir l’heure à laquelle l’archimage implorerait l’aide du commissaire, et surtout le déplacement immédiat de celui-ci. Pour lui, plus que de l’anticipation, c’était de la voyance.

Abandonnant là une fausse signature mystique, à l’aide d’une baguette appartenant d’après son lieutenant à un mage-lame de la guilde des mages, il se désintégra magiquement le plus lentement possible près de la cheminée, avant de se reconstituer sur le toit et de prendre la poudre d’escampette.


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Modifié par Trias, 21 décembre 2009 - 00:15.


#194 nood

nood

Posté 10 décembre 2009 - 11:07

Petites rigolades entre partenaires

21 Soirétoile 3E431, 12H20


— Drem... vous savez comment ça s'attrape les mycoses ?

Drem aurait bien répondu que oui, il savait comment on attrape des mycoses, qu'il en avait lui-même connu quelques variantes très attachantes pendant son service en Morrowind et qu'il ne voyait pas l'intérêt de cette question, mais Maelicia éclata dans un éclat de rire cristallin, dans lequel on put toutefois discerner quelques paroles.

— Une guérisseuse...hihi... spécialisée dans les mycoses...hihihi ! C'est une blague !!! Ah là là, je m'demande bien pourquoi vous avez pensé à ça ! Bon enfin, ce plan là vaut quand même son pesant de guimauve !

L'Elfe noir prit la racine de son nez entre son pouce et son index droit, fermant les yeux. De nombreux sentiments aussi fugaces qu'irrépressibles lui traversèrent l'esprit le temps d'un battement d'aile de papillon.

Le premier, très pressant, lui suggérait d'imprimer le revers de sa main droite dans la joue rose de cette gamine de Brétonne qui avait surement moins de six fois son âge et qui faisait preuve d'un peu trop de moquerie à son goût : c'était sa fierté mal placée de Dunmer qui parlait.

Le deuxième, plus sobre, lui aurait fait déblatérer une de ses remarques assassines, indiquant en substance que si son plan ne convenait pas à Mademoiselle, il pourrait tout aussi bien aller chercher le premier garde venu, dénoncer toutes ces manigances et s'en tirer à bon compte ; et qu'il s'était démené toute la nuit pour échafauder un plan, courant ici, discutant là, feignant la fatigue encore ici, accusant le coup à peine plus tard ; et que tout ceci méritait un peu plus de considération même si tout n'était pas optimal, bien entendu.

Le troisième sentiment, le plus illogique mais pas le plus inintéressant, était une franche envie de rire, par contagion, par fatigue, pour évacuer le stress de la nuit qui avait été tout de même rude. C'est finalement cette option que Drem choisit, pour plusieurs raisons. Il aurait été assez malvenu de se disputer avec ses nouveaux partenaires, notamment Maelicia, puisqu'elle était censé lui donner une somme d'argent à trois chiffres qui lui permettrait quitter la Cité Impériale (ce qui était, à cet instant, son objectif et sa motivation principale.)  Mais aussi, et c'était au moins aussi important sur le moment, il fut pris de ce sentiment dérangeant qui habite quelqu'un, qui, après avoir passé du temps à créer quelque chose, se rend compte que son projet n'est pas exempt de défauts lorsqu'on prend du recul. Et, en dernier lieu, une bonne tranche de rigolade ne lui ferait vraiment pas de tort, après avoir passé une nuit à transpirer le mensonge à chacune de ses paroles...

Détournant la tête d'un air mi-gêné, mi-amusé, il eut un sourire assez franc en écho au rire de la Brétonne et dit :

- Bon, c'est vrai, il y a plus prestigieux comme plan... Mais celui-là, il va nous permettre de faire ce qu'on veut sans qu'on nous pose de questions. En tout cas, il a déjà réussi à te faire rire, c'est une victoire en soi, non ?

Ce discours sembla éteindre partiellement le fou rire de la Brétonne - à moins qu'elle ne se rendit compte que celui-ci ne jouait pas en sa faveur, si elle tentait de se donner une contenance d'adulte. c'est néanmoins avec une expression très joviale qui montrait une hilarité sous-jacente qu'elle reprit la parole, expliquant la suite de son plan.

Bon, deux heures ce s'ra p'têtre un peu juste mais j'pense qu'on a pas vraiment le choix, non ? Bon, voici quel est notre objectif de mission : ma guilde s'est faite détrousser un objet X que pour des raisons de commodités on appellera « le pot-au-roses ». Danse-mot et moi, on enquête sur les circonstances du vol dudit pot-au-roses, et on a découvert ça : le voleur, nom de code grand-méchant-bisounours, se cache qu'êque part au palais impérial. On connait pas le nom du bonhomme, on sait pas si il est beau ou pas, mais on sait à quoi y d'vrait correspondre : il aurait un valet en livrée impériale, de taille moyenne, mais avec un accent pas cyrodiil. Et surtout, lui et son valet étaient derrière la bicoque des moines de Stendarr le 15 de Sombreciel. S'pas grand chose, hein ? On connait même pas sa couleur préférée ! M'enfin à priori ça doit probablement être un mage ou un collectionneur, sinon y s'intéresserait pas au pot-au-roses...

Elle était peut-être très spontanée pour se moquer du plan de Drem, mais faisait preuve d'une prudence à l'épreuve des Daedras lorsqu'il s'agissait de ne pas trop divulguer d'informations. Pas de noms, pas d'informations compromettantes et monnayables en cas de retournement de veste : il faudrait faire avec, se dit le Dunmer. Bizarrement, il commençait à aimer l'inconnu dans lequel il se lançait.

- N'empêche que z'avez raison, Drem, reprit-elle, si y'a pas de lézard, on a un problème. On aurait put faire deux groupes de recherche, vous et Danse-mot, Saerileth et moi, pour aller plus vite.

Elle réfléchit quelques secondes.

- J'ai bon espoir qu'y soit allé s'retaper chez Boniface, à côté des boucliers de Pierremur. On a qu'à aller le chercher là bas ; si ça s'trouve, y s'ra toujours dans la salle d'attente...

- Et bien, maintenant qu'on a bien rigolé tous ensemble sur ce qui m'a occupé toute la nuit au point de me priver de la moitié de ma dose habituelle de sommeil et de me faire argumenter avec quasiment tous les gens que j'ai croisé, je pense qu'on pourrait s'y mettre - à moins que tu naies encore quelque chose à faire, du genre pouffer de rire comme une adolescente ou nous annocer qu'en fait tu es morte officiellement à la naissance ?

Il accompagna sa dernière réplique d'un sourire qui signifiait : "Maintenant on se connait assez pour se moquer gentiment l'un de l'autre, non ?"

Modifié par nood, 03 avril 2011 - 11:30.


#195 Ygonaar

Ygonaar

Posté 17 décembre 2009 - 01:01

La mort d'un barde

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21 Soirétoile 3E425, 12H20



L'estomac de Main-d'Ombre était maintenant plus tendu que la peau d'un tambour. Il était recherché et il y avait sa description dans le journal! Pour lui qui axait toute sa vie sur le secret, le coup était rude. Alors lorsque la Brétonne fut d'un inexplicable fou-rire à cause d'une histoire de mycose, une terrible rage froide le gagna. La tentation de presser la gâchette de son arbalète ne dura qu'un instant, mais il garda néanmoins un silence buté chaque fois que sa comparse tripotait son amulette magique. Pendant ce temps, sa raison luttait vaillamment contre sa colère.

Sa première victoire fut obtenu grâce à l'analyse du plan de Drem. Sans être parfait, il tenait assez bien la route compte tenu du temps imparti pour le préparer, du fait qu'il n'y avait pas légion d'Argoniens au Palais Impérial et que Maelicia au moins devait être une novice en matière d'infiltration. Il semblait même permettre de farfouiller un peu partout  en piétinant l'essentiel du protocole. Tout en restant un abominable guêpier où ils seront à la merci du Dunmer, cette expédition gagnait néanmoins une once de crédibilité. Dans un temps imparti affreusement court, tout du moins. Sauf si l'on s'arrangeait pour que l'estafette vérifiant leur ordre de mission en reçoive d'une manière ou d'une autre confirmation. Il faudrait savoir si une telle procédure était généralement confiée à un commis lambda ou un agent aguerri risquant d'être protégé contre l'influence mentale...

Son esprit occupé à disséquer la situation, il put dépasser son ressentiment initial voir, il finit par se l'avouer franchement, sa peur. Il ne connaissait pas bien le fou-rire irrépressible, qui n'était pas dans sa nature. Il avait toutefois constater que les Peaux-Molles en avaient parfois lorsqu'ils étaient très stressés, juste avant de mourir, par exemple. Et ça collait assez bien avec l'idée qu'il se faisait du caractère de la magicienne. Quelques soient ses réelles intentions, la diffusion du portrait de son complice ne pouvait que lui nuire, elle devait bien s'en rendre compte. Cette fable devait être destinée à l'identifier, lui.

De quoi disposaient-ils? D'un surnom fantaisiste, Mouise-Épaisse, dont il faudra qu'il demande l'origine à la rouquine, et d'une simple description physique, probablement. Il avait eut le naseau creux en se peinturlurant, ce matin. Les mammifères se focaliseront sûrement sur sa couleur, car c'est ce qu'ils identifient le mieux, étant pour la plupart incapable d'appréhender les subtiles différences dans la morphologie des hommes-lézards du même sous-type. Même ses propres congénères devraient se faire abuser. Tout d'abord car ils n'auront qu'un dessin sans doute très approximatif à disposition. Mais aussi parce qu'ils envisageront avec difficultés que l'on puisse maquiller ses tâches de personnalité, un acte encore plus tabou pour sa race que le travestissement chez les humains. Tous ses vêtements étaient différents, sa crête crânienne peu visible, l'anneau dans son nez semblait maintenant y être de longue date... Et cette damnée gazette ne donnerait certainement pas la clé de sa signature olfactive!

En revanche, touts Argoniens ayant des écailles noires risqueront de devenir suspects, celles-ci étant fort rares. Danse-Mot et Charbon-Agile devront sans doute disparaître pour un bon laps de temps, ainsi que Four-à-Sable, Cœur-de-Paon, et bien évidemment Vive-Dague, mais peu de risque que l'on ne le dénonce via ce personnage. Il était plus mitigé sur les cas de Vague-Profonde et Pas-de-Loup; s'il était de toute façon hors de question de les faire apparaître à l'heure actuelle, il y avait peu de risque que leur entourage n'est seulement entendu parler de cette annonce. Déménager son laboratoire sur le champ était de toute manière inconcevable. Autant se consacrer à la mission et aviser plus tard...

La Brétonne venait de faire allusion à Boniface et tripotait nerveusement son collier. Main-d'Ombre se morigéna lui-même. Il déplorait assez les fréquents actes irrationnels de son acolyte pour se permettre de l'imiter. Son mutisme boudeur devait l'affoler au plus haut point, car elle n'avait aucun moyen de savoir qu'il n'était pas tombé dans les griffes de leur poursuivant. Il se fendit d'un laconique:
Compris. Rien de suspect pour l'instant.


Il observa avec une minutie maniaque le petit groupe lorsque celui-ci se mit en branle. Aucun discret petit geste, aucune posture trop marquée, qu'il puisse interpréter comme un code. Aucune mouche à l'oratoire, non plus. Il n'aimait pas ça. Soit il n'y avait aucune entourloupe à déceler pour l'instant, soit les opposants étaient plus malins que lui, et donc très dangereux. Maelicia ne se pressait pas pour rejoindre le cabinet médical, certainement dans l'optique de lui permettre de les devancer aisément. Mais cela ne convenait pas au saurien qui tenait à vérifier que personne ne les suivait.

Ce n'est que lorsqu'ils disparurent complétement de son champ de vision qu'il quitta son poste d'observation. Il pendit un autre drap à la balustrade pour indiquer à son bataillon de mendigot la fin de leur mission. Il récupéra sa corde et laissa deux pièces d'argent sur la table, largement de quoi remplacer le carreau et l'anneau de laiton qu'il avait subtilisé. Cela intriguerait sûrement Gonk, mais elle n'était pas du genre à signaler la chose à la garde. Et il aimait bien cette fille, une exilée comme lui dans cette ville d'humain et l'une des rares personnes à qui il ne prêtait jamais d'intentions sournoises. Elle n'était pas précisément une lumière, mais elle était reposante.

Il sortit de l'immeuble par la voie conçu à cet effet et se dirigea vers l'officine du médecin d'un pas rapide. Il vérifia une dernière fois qu'aucun de ses espions ne l'attendait devant la statue de Zenithar, et acheta un exemplaire du Courrier du Cheval Noir. Ce qui le frappait, c'est la précision de la lithographie représentant le cadavre de « Maelicia ». Nul doute que l'artiste avait eut devant lui le cadavre. Le cadavre de Vinissia, recouvert de la pèlerine de la sorcière. Le saurien n'éprouvait pas vraiment de tristesse pour la malheureuse prostituée, mais plutôt de  la contrariété d'avoir mésestimé le risque qu'il lui avait courir. Il se demandait aussi ce qu'était devenu Tape-le-Carton, sans que le sort probablement funeste de son congénère ne provoque beaucoup plus de compassion. Son propre portrait correspondait à ses prédictions. Le museau était un peu trop court et large, les taches de personnalité mal situées, et il était figuré avec ce qui ressemblait assez à la rapière et au pourpoint de Danse-Mot. Quelle plaie qu'il n'ait pas le temps d'essayer de déchiffrer le texte! Il y avait peut être des détails cruciaux, mais il ne  pouvait se permettre d'en demander la lecture à sa compagne, cela reviendrait à lui avouer, ainsi qu'aux deux autres acolytes, son quasi illettrisme.

Il venait de dépasser les Boucliers de Pierremur. Trouver maintenant le cabinet du rebouteux...



ж ж ж


Pour qui la barbaque?



21 Soirétoile 3E425, 12H20



Elle est toujours là, sourit-il. Vous étiez déjà un élève curieux, il y a... quelques années de cela, Paullus. Et mention Bien, au diplôme d’étude spécialisées de mysticisme... Nous manquons de mystiques, savez vous ?
Cette simple phrase souleva une vague de nostalgie chez le fonctionnaire. Il aimait son travail, certes, mais il ne faisait guère que stationner dans l'étude des arcanes, il devait bien se l'avouer. Quid de ses enfiévrées nuits blanches à disséquer une théorie passionnante? De ses audacieuses expériences où il redéfinissait les fondements du monde? Il les avait troqué pour un univers de paperasse, de fourberie, de politique et de séduction. Et tout ça pour quoi? Il pouvait bien s'inventer de nombreux prétextes mais il connaissait bien la vraie raison : juste pour la fierté d'un père qui ne l'avait jamais vraiment aimé.

L'Archimage coupa court à ses états d'âmes en le remettant sèchement dans son rôle.
Cependant, c’est le commissaire Valens qui vient me voir, et pour de sombres évolutions... Nous attendions votre intervention, Paullus, bien qu’elle soit plus précoce que prévue.
Vous fûtes un captivant mentor, Professeur, et le Commissaire n'a pas de raison de l'oublier.

Néanmoins, le ton du vieil homme était devenu plus distant.
Nos registres ne comprennent pas de Typhaine Élodie Gabrielle, mais il y a effectivement une Marsoric qui se fait appeler Maelicia parmi nos compagnons. Ladite étudiante était missionnée par nos soins de récupérer un artefact de la plus haute importance, le Sceptre de Sh’éam. Nous l’y avons envoyée seule, en raison des recommandations du professeur Dreslobet, son tuteur d’enseignement ; et parce que nous souhaitions être discrets... vis à vis de la Wyverne, dont la filature n’a cessé d’entraver nos recherches. Et jusqu’ici, nous étions sans nouvelles.

La Wyverne nous a apporté un corps aujourd’hui même, prétendant qu’il s’agissait de celui de notre élément, laquelle aurait « attaqué « leurs agents. Ils semblaient très curieux d’apprendre comment nous réagirions au décès. Pour être honnêtes, nous ne pensons pas qu’il s’agisse de notre compagnon ès mysticisme, mais d’une toute autre dépouille. Maître Buccano, notre thanatologue et Mage-légiste, est actuellement en train de l’examiner en salle deux, au troisième sous-sol du bâtiment A8, afin de l’identifier.

Pour tout vous révéler, maître Polus était censé vous contacter une fois l’autopsie achevée. Et celle-ci est en cours. Dîtes moi, Paullus, par quel biais avez vous été appelé ?

Le chevalier écouta avec attention sans interrompre le vieil homme. Sans surprise, celui-ci gardait une emprise remarquable sur ses raisonnances auriques. Il n'imaginait pouvoir surprendre l'Archimage en flagrant délit de mensonge, mais il lui semblait que la Guilde voulait jouer franc-jeu. Enfin, presque totalement...

J'avais moi-même fait une demande de mission dès que j'ai fut informé de l'affaire par le Courrier du Cheval Noir. Ce qui a été très rapide puisque le Seigneur Faivre s'occupait du rapport de la Wyverne à ce moment même. Elle semble très pointilleuse sur les procédures administratives aujourd'hui, la Wyverne. Un rapport exhaustif le lendemain matin du drame, ce n'est pas commun. Tout comme un journal qui arrive à publier des lithographies avant même que les Lames ne soient informées.

Il laissa son vis-à-vis digérer l'information avant de reprendre.
Un miracle déjà fort susceptible de piquer ma curiosité. Mais je vous avoue que mes services s'intéressaient déjà à mademoiselle Marsoric depuis l'épisode du Sang du Guar. Par... précaution, nous désirons absolument éviter un nouveau Bravil, vous comprenez? Et je vous rejoints entièrement, Professeur. Si mademoiselle Marsoric semble être parfois un peu fantasque, je ne la vois guère en tueuse psychopathe!

  Il hésita un instant. Ce qu'il avait à dire maintenant lui coutait curieusement beaucoup. Il s'engonça dans tout le formalisme dont il était capable en poursuivant.
  — En revanche, ce je vous serais reconnaissant si vos positions philosophiques n'intervenaient pas dans cette affaire, Archimage. Je ne doute pas de la compétence de Maitre Buccano, qui était déjà brillant à mon époque, mais je vous serais gré si l'autopsie se poursuivait dans mes locaux. Le BIIM dispose de moyens efficaces dont... vous ne disposez plus, Archimage. Évidemment, votre thanatologue est invité à assister le notre s'il le désire.


ж ж ж


Bis repetita



21 Soirétoile 3E425, 12H35



Là, la petite plaque de cuivre typique de l'antre des meurtriers légaux. Il aborda une matrone qui s'apprêtait à y pénétrer aussi et lui montra abondamment les dents.

Tenez, j'vais vous tenir la porte, madame. Après vous.
Euuh... Merci bien...
Fait froid, hein? Pas un temps pour sortir quand on est gouteux comme moi. Mais bon, ce fichu blocus est enfin levé, on va pas trop se plaindre non plus!
Vous avez raison. Il reste heureusement juste le temps de se refaire avec le festival de l'Ancienne Vie...


Le saurien impressionnait massivement ce qui lui servait de sourire, sa vêture modeste mais proprette, son ton jovial et même le subtil fumet de champignon qu'exhalait sa hotte. Il était donc en pleine discussion à bâton rompu sur le cours du bolet lorsqu'ils pénétrèrent dans la salle d'attente. Drem et Saerileth devait rechercher un Argonien seul, son couple improvisé rajouterait peut-être à la confusion. Un bon test, se disait-il. Ils l'avaient vu avec une luminosité médiocre, sale, blessé et tout noir. S'il arrivait à faire illusion maintenant, même les Traqueurs de la Wyverne s'y laisserait peut-être prendre. Tout en s'approchant, il observait leur réactions du coin de l'œil, mais en prenant bien soin d'entretenir la conversation en cours. Soudain, il tata sa ceinture et s'écria:

Foutrentrailles! J'ai oublié ma bourse! Désolé ma chère, je m'en vais la quérir, nous poursuivrons plus tard...

Et de faire demi-tour aussi sec. Il était déjà arrivé à l'huis lorsqu'il perçut le mouvement de Maelicia tripotant son amulette.
C'est pourri. Le Dunmer a une balise sur lui! murmura-t-il.

Modifié par Ygonaar, 17 décembre 2009 - 01:14.


#196 Trias

Trias

Posté 21 décembre 2009 - 00:08

Salle d'attente

21 Soirétoile 3E425, 12H35




— Et bien, maintenant qu'on a bien rigolé tous ensemble sur ce qui m'a occupé toute la nuit au point de me priver de la moitié de ma dose habituelle de sommeil et de me faire argumenter avec quasiment tous les gens que j'ai croisé, je pense qu'on pourrait s'y mettre —  à moins que tu n'aies encore quelque chose à faire, du genre pouffer de rire comme une adolescente ou nous annoncer qu'en fait tu es morte officiellement à la naissance ?

Les traits réguliers de la jeune brétonne prirent un instant un masque d'incrédulité. Puis, percevant le sourire goguenard de l'elfe, elle y répondit en se composant une mine espiègle au possible :

" Euh... exactement ! J'vous avais pas dit qu'j'avais été trucidée par un nationaliste dunmer ? Drem Dupont qu'y s'appelait je crois...

Puis, elle éclata d'un rire perlé et les invita à la suivre. S'il fut une chose que Saerileth et Drem purent constater lors du trajet, c'est d'une part que l'étudiante ne manquait pas d'un humour parfois farfelu aux entournures — comprendre : qu'elle les abreuva de piques ironiques, allusions comiques et autres blagues de lycéenne — et que d'autre part qu'elle ne semblait pas particulièrement pressée d'arriver à destination. Elle paraissait même d'une parfaite insouciance, caquetant, riant et s'exclamant avec entrain ; et passait ainsi aussi complètement inaperçue qu'une adolescente en école buissonnière.

Les trois comparses descendaient le long d'une artère particulièrement animée lorsqu'elle stoppa devant une austère bâtisse ayant pignon sur rue. Trônant sur l'un des murs de pierre blanche vieillie par la mousse et l'humidité, une plaque de cuivre rectangulaire annonçait pompeusement l'office du Maître Guérisseur Boniface, Grand-clerc de l'école du Temple de l'unique, ex-Maître de conférence ecclésiastique, et ancien séminariste du couvent de saint Nitou. Traversant un hall exigu, ils pénétrèrent dans une salle aux dimensions respectables dont les quatre murs étaient ornés de bancs, et où deux tables basses de bois supportaient diverses éditions spéciales du Cheval Noir et autres imprimés affriolants périmés de longue date. S'emparant d'un exemplaire de “Voilà” avec Janus Depp en couverture, Typhaine s'assit sur l'une des plages les plus éloignées de la salle d'examen.

“ Y va certainement sortir dans deux-trois minutes”, leur confia-t'elle, optimiste, avant de se plonger avec désinvolture dans les colonnes people du magazine. L'étudiante sentait la tension monter chez ses deux acolytes, par leurs postures rigides, mais l'ignora délibérément.

L'attente ne fut pas longue : elle venait à peine d'apprendre la préparation d'une nouvelle pièce de théatre par l'artiste que l'argonien apparaissait, par l'entrée, accompagné par une volumineuse cyrodiile. Son anneau nasal attirait encore le regard de Typhaine qu'il faisait déjà volte-face et s'évanouissait à nouveau. Saisissant son amulette, la brétonne en oubliait de faire semblant de lire lorsque la voix grave et caverneuse de Danse-mot tinta dans sa tête.

“C'est pourri, lança-t'il. Le Dunmer a une balise sur lui !

Son visage refléta sa surprise, l'espace d'un instant peut-être masqué par la surface des pages de la brochure. Relevant celle-ci pour dissimuler son trouble, un concert de pensées contradictoires se bousculèrent dans sa tête. Calme toi Typhaine, calme-toi, se dit-elle intérieurement, en voyant les discrètes trémulations des feuilles qu'elle soutenait, rythmées par les pulsations affolées de son coeur.

Inspirant, elle referma le magazine d'un coup sec. Adressant un regard écoeuré à Saerileth, elle murmura :

“ Depp va s'marier”.

La fausse évaporée pianota quelques instants sur ses accoudoirs, d'un air agacé. Puis, soupirant de nouveau, elle s'empara d'un immense journal intitulé “ La virgule ” et en ouvrit largement les feuillets.


ж ж ж



" Danse-mot ?"

Les fulminations interieures de l''argonien s'interrompirent : voilà qu'au lieu de s'entendre penser une voix familière résonnait dans sa tête.

“ C'est moi, Danse-mot, expliqua télépathiquement Maelicia. J'utilise pas l'amulette parce que j'peux pas parler... Y faut qu'vous r'veniez dans la salle d'attente ! D'toute façon on savait qu'y z'étaient louches, c'est pas nouveau. Mais on n'a pas l'choix pour récupérer l'baton : y faut aller avec eux ! J'accompagnerait le dunmer et z'irez avec l'impériale, comme ça j'pourrais m'téléporter en cas de problème. Mais faut revenir, m'laissez pas toute seule !"




ж ж ж
Pyrolyse

21 Soirétoile 3E425, 12H20




— En revanche, ce je vous serais reconnaissant si vos positions philosophiques n'intervenaient pas dans cette affaire, Archimage. Je ne doute pas de la compétence de Maitre Buccano, qui était déjà brillant à mon époque, mais je vous serais gré si l'autopsie se poursuivait dans mes locaux. Le BIIM dispose de moyens efficaces dont... vous ne disposez plus, Archimage. Évidemment, votre thanatologue est invité à assister le notre s'il le désire.

Le visage du bréton, tanné par les années, se ferma soudainement. Son élève, son pupille, le jeune homme qu'il avait lui même formé, corrigé, inspiré, le voilà qui osait lui demander de pratiquer les Arts Noirs. Cette école qu'il lui avait coûté tant d'efforts de dénoncer, puis de proscuire, Ce qui avait constitué pour le mage Traven encore sorcier le combat de toute une vie, puis le défi de son mandat d'archimage.

— Êtes vous conscient de ce que vous me demandez, Paullus ?

Voyant que son interlocuteur allait répliquer, il éleva la main, détournant la tête.

«  Non. Ne dîtes rien. Vous faîtes votre métier, Commissaire. Les... méthodes nécromantiques ne font pas partie de celles de la Guilde des Mages ; mais il n'entre pas dans nos attributions de nous opposer aux requêtes de l'Empire.

Cessant enfin d'observer l'une des nombreuses étagères de son bureau, il regarda à nouveau son ancien élève, de son visage redevenu impassible.

« Je prendrai les dispositions pour que vos services puissent disposer du corps dès maintenant. J'espère... que vous vous épanouissez dans votre voie, Paullus, ajouta-t'il en le congédiant d'un geste.

Au fond Traven était déçu. Lui qui se faisait une joie de voir percer ses anciens élèves, maintenant tous hauts dignitaires, se sentait trahi. Une chape de solitude retomba sur les épaules de l'ancien professeur : il était Archimage, désormais. Les choses n'étaient plus simples comme autrefois.

Cependant son élève d'antan n'avait pas franchi la porte que Raminus faisait irruption, suivi de près par un Buccano essouflé et passablement secoué.

— Archimage, ils l'ont brulée ! s'écria le maître mage.

Traven resta immmobile quelques instants, interdit.

— Brulée ?

Buccano s'avança, une bel hématome ornant son crâne dégarni fripé par l'âge. Il agita un index indigné.
— Ils m'ont assommé ! Vous y croyez, vous, Hannibal ! Ils m'ont assommé, moi, en pleine dissection ! Moi, Buccano, quatre-vingt-sept ans ! En pleine dissection !

Il roulait de grands yeux sur ses auditeurs, mais Raminus observait lui Valens en chien de faïence.

— Vous pouvez vous expliquer, Raminus, l'invita Traven. Le commissaire Paullus Valens, bien que ne partageant plus nos voies, a toute ma confiance.

L'impérial hésita un bref instant, puis rapporta brièvement les faits.

— Personne n'a rien vu. Seuls des mages sont entrés au thanatorium, aussi nous pensons qu'il s'agissait d'un petit groupe voire d'une personne en uniforme de l'université. Ils ont assommé le professeur Buccano par derrière d'un unique coup, puis ont brûlé le corps sans laisser de traces, ni mystiques, ni physiques. Un travail de mage-lame professionnel. Mais, il y a quelque chose de plus...

Le vieux Buccano s'avanca, et prenant appui sur sa canne, il éleva de nouveau une main sentencieuse.
— Je ai pas eu le temps de finir mon autopsie, Hannibal. Mais de trois choses, je suis sûr: d'une part que cette femme n'était ni brétonne, ni pucelle, d'autrepart qu'elle est morte hier soir entre dix heures et minuit. Et il y a mieux : je jurerai qu'on lui a sectionné les cordes vocales et carbonisé le visage 'après' son décès, qui fut arcanique. Étonnant, hein ?

— Intriguant, en effet, renchérit Traven, en se soutenant le crâne d'une main pensive.

A cet instant, le vieux Buccano trottina sur sa canne vers Valens, lui attrapa le bras pour attirer son attention :
«  Et ils m'ont mis dans le four ! » s'indigna-t'il, les yeux écarquillés sous ses sourcils broussailleux.

#197 Ygonaar

Ygonaar

Posté 22 décembre 2009 - 01:07

Condition



21 Soirétoile 3E425, 12H36



A peine la porte de la salle d'attente fermée que Main-d'Ombre plongea sous les rayons lumineux qui filtrait des carreaux dépolis découpant le fronton de l'huis principal. Interface de Tènébre peu marquée mais néanmoins suffisante pour qu'il puisse s'enténébrer. Si quelqu'un voulait l'identifier à tout prix, il n'allait pas lui faciliter la tâche. Mais pour qui pourrait-il avoir une telle importance ? S'emsyl, pour se venger?  
Danse-mot ?
Il se retourna vivement, ses mains cherchant déjà ses fourreaux. Il... Il était pourtant enténébré...

C'est moi, Danse-mot. J'utilise pas l'amulette parce que j'peux pas parler... Y faut qu'vous r'veniez dans la salle d'attente ! D'toute façon on savait qu'y z'étaient louches, c'est pas nouveau. Mais on n'a pas l'choix pour récupérer l'bâton : y faut aller avec eux ! J'accompagnerait le dunmer et z'irez avec l'impériale, comme ça j'pourrais m'téléporter en cas de problème. Mais faut revenir, m'laissez pas toute seule !

  Quel stupide animal il faisait ! Maelicia lui avait pourtant déjà fait le coup de la télépathie, il aurait du y penser. Et dans l'autre pièce, son esprit était évidement hors de portée des flux Ténébreux qu'il émettait. Décidément, cette histoire le rendait bien trop nerveux. Que faire? En tout état de cause, il ne pouvait se permettre de fréquenter quelqu'un arborant une balise magique. C'était le meilleur moyen de se faire repérer malgré sa nouvelle apparence. De perdre sa dernière sécurité...

D'accord, je reviens, mais faîte lui ôter sa balise au préalable et essayez de voir s'il n'y a pas d'autres sortilèges. Pensa-t-il intensément, sans même savoir si la magicienne percevait quelque chose.


ж ж ж


Le pigeon de la farce.



21 Soirétoile 3E425, 12H22



Êtes vous conscient de ce que vous me demandez, Paullus ?

L'impérial en était bien conscient. Les résonances auriques de son ancien professeur, habituellement si maitrisées, venait de s'emballer brutalement. Il n'eut cependant pas le temps de choisir la réponse la plus adaptée qu'il se reprenait déjà.

Non. Ne dîtes rien. Vous faîtes votre métier, Commissaire. Les... méthodes nécromantiques ne font pas partie de celles de la Guilde des Mages ; mais il n'entre pas dans nos attributions de nous opposer aux requêtes de l'Empire.
L'opinion personnelle du Commissaire n'a pas à entrer en ligne de compte, Archimage.
Je prendrai les dispositions pour que vos services puissent disposer du corps dès maintenant. J'espère... que vous vous épanouissez dans votre voie, Paullus. Conclua-t-il d'un geste de deux doigts vers la porte qui n'invitait aucune réponse.

Le Chevalier était mortifié. Sa propre perception de la nécromancie avec quelque peu évoluée avec la fréquentation de la Vieille, passant d'une hostilité de principe à une attitude de méfiance envers cet outil dangereux mais ô combien indispensable dans sa profession. Il avait vu trop de psychopathes ou de sectateurs nihilistes, souvent intouchables car rejetons de puissantes familles, pour condamner de facto les nécromants. Il aurait voulu justifier sa position à Traven mais... celui-ci ne l'écouterait pas... Lui répliquerait qu'il devait assumer ses choix... Et de toute manière, il était trop oppressé pour s'expliquer clairement. Mais pourquoi fallait-il toujours qu'il cherche l'approbation de ses pères? Lentement, il fit demi-tour, la tête engoncée dans les épaules.


Il n'eut pas à ouvrir la porte, celle-ci s'effaçant devant l'irruption d'un impérial grisonnant et un vieillard ahanant.
Archimage, ils l'ont brulée ! Dit le premier.
Brulée ?
Ils m'ont assommé ! Vous y croyez, vous, Hannibal ! Ils m'ont assommé, moi, en pleine dissection ! Moi, Buccano, quatre-vingt-sept ans ! En pleine dissection !

Si l'honorable Mage-Légiste, tout affolé qu'il était par son aventure et sa commotion, ne prêtait guère attention à l'enquêteur, ce n'était pas le cas de son compagnon. Son attitude ouvertement glaciale chassa immédiatement le vague à l'âme du fonctionnaire.  

Vous pouvez vous expliquer, Raminus, répliqua Traven. Le commissaire Paullus Valens, bien que ne partageant plus nos voies, a toute ma confiance.
Personne n'a rien vu. Seuls des mages sont entrés au thanatorium, aussi nous pensons qu'il s'agissait d'un petit groupe voire d'une personne en uniforme de l'université. Ils ont assommé le professeur Buccano par derrière d'un unique coup, puis ont brûlé le corps sans laisser de traces, ni mystiques, ni physiques. Un travail de mage-lame professionnel. Mais, il y a quelque chose de plus...

Le corps, brûlé? Toutes les précieuses révélations, voir les preuves, qu'aurait put fournir la victime envolées en fumée. Traven aurait-il avoir pu organiser cela, prit de cours par son arrivée impromptue? Oui, certainement, si c'était vraiment primordial. Mais le Commissaire avait du mal à y croire.

Je ai pas eu le temps de finir mon autopsie, Hannibal, poursuivit Buccano. Mais de trois choses, je suis sûr: d'une part que cette femme n'était ni brétonne, ni pucelle, d'autre part qu'elle est morte hier soir entre dix heures et minuit. Et il y a mieux : je jurerai qu'on lui a sectionné les cordes vocales et carbonisé le visage 'après' son décès, qui fut arcanique. Étonnant, hein ?
Intriguant, en effet, avoua l'Archimage.
—  Et ils m'ont mis dans le four ! Protesta le thanatologue en interpelant Valens de sa canne.

—  Désirez-vous poser une plainte officielle, Maitre Buccano? Lui répondit poliment le policier. En ce faisant, il se demandait quel pouvait bien être l'intérêt de trancher les cordes vocales d'un cadavre. Peut-être pour empêcher que l'on puisse questionner son âme? Il faudrait qu'il questionne Deidre à ce propos.

—  Cette agression, au sein même de l'Université des Arcanes, prouve que l'affaire est d'importance. Si un groupe suspect vient immédiatement à l'esprit, il ne faut pas oublier d'explorer toutes les autres possibilités. Et sans preuve formelle, je... Excusez-moi un instant.

La Sphère de Contact se mettait en effet à vibrer avec véhémence dans sa poche. Il empoigna la petite orbe d'ébonite et perçu un laconique visage d'Orsmer qui lui dit.

—  Le Coquelet est allé courtiser une poule mais aussi la Bécasse. Du coup, il semblerait que le Dindon fasse la gueule.
—  Bien, vérifie qui est connu au poulailler.

Markal gro-Terashom et sa manie des noms de code stupides!  Enfin, l'information lui suffisait pour le moment, même s'il se demandait qui pouvait bien être la Poule. Cela attendrait le debriefing, il fallait pour l'instant soigner ses relations avec la guilde.

—  Messieurs, j'ai le plaisir de vous confirmer que mademoiselle Marsoric est vivante. Et pour l'instant localisée.

Modifié par Ygonaar, 22 décembre 2009 - 01:14.


#198 Trias

Trias

Posté 23 décembre 2009 - 00:15

Jusqu'à sa chemise

21 Soirétoile 3E425, 12H35




— D'accord, je reviens, mentalisa l'argonien, mais faîtes lui ôter sa balise au préalable et essayez de voir s'il n'y a pas d'autres sortilèges.

Typhaine grommela en réponse quelque chose d'incompréhensible où il était question de paranoïa et de lézards pétochards mais se garda bien de le retransmettre télépathiquement. Très bien ! Danse-mot voulait qu'elle se charge du sale travail. Qu'à cela ne tienne ! C'était si facile, d'aller demander poliment à Drem de se laisser fouiller, en public et sans préavis ! A moins qu'il n'aie une vocation cachée de stripteaseur, elle avait entendu parler de dunmers étranges parcourant les routes du lointain Morrowind...

La rouquine se pinça les lèvres, puis esquissa une moue pensive. Abaissant sèchement les imposants feuillets du quotidien qui la dissimulait, elle fixa l'elfe noir, en face d'elle. Assise à sa gauche, près d'une porte ornée d'une vitre de verre trouble, se tenait la mercenaire impériale, apparemment victime des prémices de l'impatience. A sa droite, une place vide ; puis, assez loin d'eux, une femme rebondie à la mine contrariée accompagnée d'un gamin ascétique, lequel ne devait pas de beaucoup excéder les six ans. En vis à vis une impériale d'âge respectable entrait en trotinnant sur sa canne, et examinait d'un oeil critique les diverses brochures à disposition.

Il était temps de passer aux choses sérieuses.

Typhaine se leva. Inspirant profondément, elle posa son journal, contourna la table basse, puis vint s'assoir ostensiblement juste à côté de l'elfe noir. Entre la petite brétonne fluette en robe d'automne à gorgerette et le fier dunmer dont l'armure mêlait acier et cuir, le contraste ne pouvait être plus grand. Soudain, elle se lova contre les reliefs du plastron de l'elfe, se cambra ensuite vers son oreille, et murmura dans un souffle :

«  Drem, j'voudrais qu'vous vous déshabilliez s'il vous plait »

Sentant un sursaut de tétanie abasourdie s'emparer du pauvre légionnaire, elle s'expliqua par chuchotements, à l'instar d'une messe basse entre fiancés ; dans un souffle à peine assez fort pour que la mercenaire, toute proche, le perçoive aussi :

«  Z'avez un mouchard sur vous, Drem... et j'sais pas si c'est vot' capuche brunette ou vot' p'tite culotte. Alors, c'est simple, on va aller tous les deux dans l'bureau du guérisseur, et z'aurez terriblement mal au bidon. J'fouillerai vos fringues là bas. L'impériale vous servira d'écran ou restera là c'est vous qui voyez. C'est ça, ou bien tout est fini tout de suite et maintenant. »

Et comme pour mieux souligner ses propos, elle lui mit la main sous le menton : extérieurement, on aurait pu croire à une caresse, comme elle l'aurait prodiguée à Briséadius bien des mois auparavant. Sauf qu'en réalité, il n'y avait aucun contact entre leurs peaux. L'elfe ressentait l'intense flux d'énergie mystique parcourant, vibrant et ondulant le long de ses fines phalanges, que pareille proximité rendait aussi palpable que la foudre hésitant à s'abattre.

Le guérisseur Boniface ouvrit la porte menant à la salle d'examen, le regard distant, sans doute hanté par la magicienne.

Le regard de Maelicia se fit interrogatif, passant rapidement dans celui de Saerileth pour revenir vers les iris  rougeoyantes du dunmer. Son sortilège, de quelque nature qu'il soit, était armé et ne demanderait qu'une fraction de seconde à être exécuté.

L'orgueilleux dunmer allait devoir faire un choix.

Modifié par Trias, 23 décembre 2009 - 00:25.


#199 nood

nood

Posté 24 décembre 2009 - 15:30

Proposition un descente


21 Soirétoile 3E431, 12H36


Drem ne se disait qu'une seule chose, à cet instant : la journée du 21 Soirétoile serait pour lui, jusqu'à la fin des temps, "la journée aux douzaines de surprises" ou encore "le jour où les gamines Brétonnes contrôlent Nirn", bien qu'il eut hésité aussi avec "le jour le plus con."

En un quart d'heure, Maelicia était en effet passé par bon nombre d'émotions, à commencer par son fou rire, dans cette ruelle ; elle avait ensuite feint une joie de vivre spontanée et un petit peu idiote durant le trajet jusque dans ce cabinet de guérisseur ; là, elle s'était intéressée avec une désinvolture trop marquée pour être honnête à des journaux bon marchés distillant des informations faussement importantes. Il aurait juré qu'elle s'était caché derrière les colonnes du périodique (habituellement remplies de déclarations aussi capitales que la dernière tendance vestimentaire à la cour de l'empereur ou la couleur des sous-vêtements de Hieronymus Lex) pour dissimuler quelque chose... puis elle était venu se coller à lui ; et maintenant, elle ressemblait fortement à une lycéenne, ce genre d'adolescente sous hormones qui a, de manière très ostentatoire, d'autres plans en tête que de potasser les manuels scolaires. Elle s'était lovée contre lui, de la même manière qu'une amante désire user de ses charmes sur sa dernière conquête.

L'elfe, à qui cette proximité corporelle rapellait une fois de plus les désagréments du célibat prolongé, essayait de donner libre cours à son sang-froid et son pragmatisme, mais ceux-ci furent gravement mis à mal lorsque Maelicia lui annonça sans sourciller, d'une voix quasi-suave, qu'elle voulait qu'il se déshabille.

Il eut un bref susaut plus ou moins bien contenu, et fixa Saerileth, qui, sur son siège tout proche, lança un regard noir dans leur direction. Il répondit tardivement, utilisant une de ses techniques favorites : dans le doute, se retrancher derrière un humour un peu débile. Il murmura assez fort pour que son coéquipière puisse saisir la teneur de la discussion.

- Hum, Je trouve que ça va un peu trop vite entre nous... Je préfère qu'on en reste à échafauder des plans d'infiltrations bancals...

- Z'avez un mouchard sur vous, Drem... reprit-elle succintement. Et j'sais pas si c'est vot' capuche brunette ou vot' p'tite culotte. Alors, c'est simple, on va aller tous les deux dans l'bureau du guérisseur, et z'aurez terriblement mal au bidon. J'fouillerai vos fringues là bas. L'impériale vous servira d'écran ou restera là, c'est vous qui voyez. C'est ça, ou bien tout est fini tout de suite et maintenant.

Elle plaça sa main sous son menton, suffisamment pour avoir l'air de le courtiser, aux yeux de tous ; mais l'elfe, qui sentait l'éclair prêt à lui traverser une bonne partie de la boîte crânienne, savait qu'il en était tout autre. Il se revit, le matin même, dans les locaux du Bureau Impérial des Investigations Magiques, alors que Valens lui proposait des vêtements de cuir ou de tissu. c'était l'un d'eux qui portait la balise, assurément. ou peut-être même son armure personnelle, que Valens aurait le loisir de faire marquer pendant la veille. Ou peut-être même, encore, l'Anneau de forme d'Ombre, qu'il aurait mieux fait de ne pas subtiliser. Voire même tout cela à la fois. Ses yeux cherchèrent une faille dans ceux de la rouquine, puis du soutien dans ceux de l'Impériale. Il ne put s'empêcher de voir Saerileth porter insensiblement sa main dans son barda, à la recherche d'une lame ou autre chose : puis il décida de mettre fin à cette situation par la voie pacifique. Une anicroche en pleine journée avec autant de témoins ne pouvait pas être la meilleure des solutions ; et aussi, il se sentirait plus en sécurité en sachant qu'il n'était pas épié par le BIIM.

- Allons-y, murmura t'il. On va voir ce mouchard. Saerileth viendra avec nous : tu comprendras que j'aie quelques réticences à rester seul juste avec toi.

Il prit la main de la Brétonne avec douceur, comme il prenait la main de sa femme, jadis, puis il l'écarta fermement mais calmement de son visage.

- Et c'est pas la peine de se montrer menaçante, gamine. Suffisait de se montrer polie. La prochaine fois, je te ferai regretter ton geste. Vu ?

Il manquait quelquechose pour rompre la tension ambiante, pour finir sur une note légère et enchaîner sur la suite les idées claires. Dans le doute...

- Et n'insitez plus, Mademoiselle ! fit-il, haussant la voix pour que les autres clients qui patientaient dans la salle d'attente puissent capter la conversation. Nous ne coucherons plus ensemble ! La dernière fois, c'était trop désastreux. Allez assouvir vos bas instincts avec quelqu'un d'autre !

Il y eut une brève rumeur outrée dans l'assistance. Une demi-douzaine d'yeux convergèrent vers Maelicia ; la matrone impériale mit les mains sur les oreilles de sa marmaille. La salle d'attente fut bien silencieuse, jusqu'à ce que le guérisseur Boniface entr'ouvre la porte vitrée qui menait au cabinet. c'était un Bréton entre deux âges, appuyé sur une canne, habillé d'une toge en étoffe bleue nuit à carreaux brodée de l'insigne de l'ordre des guérisseurs, le tout recouvert par un tablier blanc. Sa barbe négligée et ses cheveux hirsutes n'enlevaient cependant rien à un regard azur très vif : le genre de regard qui analyse et note le moindre détail. Et des détails cocasses, il y en avait à voir, à cet instant précis, tant et si bien qu'il esquissa un large sourire amusé en avisant les visages outrés des patients de la salle d'attente.

Drem se leva à la vue du médecin.

- Désolé, messieurs-dames, dit-il en s'adressant aux autres clients, nous allons devoir resquiller. Légionnaire en mission.

- Oui, je préfère que vous soyez partis le plus vite possible,
reprit Boniface, sans quitter son air très amusé.

- Ces deux demoiselles m'accompagnent, fit Drem en désignant Maelicia et Saerileth.

- Bien entendu, répondit le guérisseur. Son sourire se fit encore plus grand et contagieux. Drem peina ranchement à ne pas rire. Entrez seulement.

Il disparut dans son cabinet, puis Mealicia entra la première, suivi par la mercenaire. Alors qu'elle passait à sa portée, Drem lui glissa dans l'oreille "Surveille-la." Elle répondit par un hochement de tête et un regard approbateur. Leur pacte était manifestement toujours d'actualité.




***





Effeuillage dans les règles


Un peu plus tard, dans le cabinet du guérisseur Boniface. Celui-ci, assis derrière son imposant bureau, observait avec une surprise non dénuée d'amusement le groupe dépareillé de patients qui s'offrait à lui.

- Qu'est ce qui amène un légionnaire aussi loin de l'infirmerie de sa caserne ? Sûrement quelque chose de trop embarrassant pour en parler aux officiers de service ?

- Pas vraiment, répondit Drem. En fait, je suis en mission dans le quartier avec ces deux civils, là, et j'ai des crampes d'estomac assez gênantes. si vous aviez juste un petit truc pour calmer tout ça, que je puisse tenir jusqu'à ce que je rentre au baraquement ce soir...

- Voyons cela. Déshabillez-vous.

Se levant, Drem observa la pièce. un poèle en fonte surchauffait l'ambiance, à gauche du bureau, de l'autre côté de celui-ci, quatre squelettes (un humain, un Orque, probablement, puis un Khajit, à en juger par le faciès du crâne et finalement, celui d'un Argonien).

Diverses tapisseries présentant des schémas d'anatomie recouvraient les murs de pierres grises, et opposée à la porte d'entrée du cabinet trônait une table d'auscultation en bois. Un petit cabinet très coquet, véritablement, mais qui possédait un défaut que Drem nota bien vite : pas l'ombre d'un quelconque paravent ou rideau pour se dévêtir pudiquement. Drem passa silencieusement son regard dans celui de ses deux suivantes, d'un air désabusé, sembla hésiter, puis se résigna. Il se mit à nu, au sens propre du terme.

D'un geste ample, il défit son baluchon et le lança à Saerileth, puis ses protections d'avant bras, qu'il jeta à Maelicia. Les deux demoiselles, debout fâce à lui, reçurent chacun alternativement la moitié des habits et de l'équipement du Dunmer : armure, pantalon, chaussettes, bottes, ceinturon et fourreau ; épée, dague, potions, chemise, tout ce qu'il portait fut enlevé et cédé. Puis vint le moment fatidique où celui-ci n'arborait plus que son caleçon long en lin, dernier rempart contre sa nudité.

Ce modeste sous-vêtement était malencontreusement l'un des candidats les plus plausibles à l'hébergement de la balise, puisqu'aimablement fourni le matin même par Valens. Soupirant, il délaça rapidement le noeud de la cordelette et abandonna son caleçon, n'arborant maintenant rien d'autre que sa peau bleutée, sa barbe de trois jours et ses boucles d'oreille. Boniface, qui était jusque là plongé dans sa paperasse, releva le nez et lâcha :

- Il n'était pas nécessaire de vous déshabiller complétement...

- J'ai très chaud,
répondit Drem d'un air légèrement excédé.

- Allongez-vous sur la table.

Alors que le vieux docteur Bréton lui tâtait l'abdomen à plusieurs endroits, Drem pouvait apercevoir ses deux acolytes commencer à fouiller dans les moindres recoins de ses effets personnels. Il se consolait d'avoir du être nu devant elle en se disant qu'au fond, c'est ces demoiselles qui devaient se sentir le plus mal à l'aise, et que pour Maelicia au moins, elle l'avait bien cherché.

Modifié par nood, 03 avril 2011 - 11:25.


#200 Trias

Trias

Posté 02 janvier 2010 - 15:26

Gogo-avenger

21 Soirétoile 3E425, 12H45





— Et n'insistez plus, Mademoiselle ! pérora ostensiblement l’elfe, en guise de vengeance. Nous ne coucherons plus ensemble ! La dernière fois, c'était trop désastreux. Allez assouvir vos bas instincts avec quelqu'un d'autre !

Maelicia reprit ses distances, à demi satisfaite : Drem coopérait inconditionnellement. Il avait été étrangement doux lorsqu'il avait éloigné sa main, puis très violent dans ses propos, avec un menaçant « La prochaine fois, je te ferai regretter ton geste. Vu ? » on ne peut plus direct ensuite. De même, sa capitulation trop facilement acquise pouvait tout autant signifier une certaine habitude de l’espionnage magique que l’hébergement volontaire de la balise.

C’est perdue dans ses réflexions qu’elle s’aperçut qu’elle était devenue le nouveau centre d’attention de la salle : regards scandalisés, observations discrètes, scrutations curieuses à peine dissimulées ; la brétonne devenait la victime de son propre jeu. Ce qui arriva devait arriver, et Typhaine sentit l’afflux de chaleur caractéristique gagner ses joues, envahies par un rose coupable. Le pire étant bien évidement l’hostilité à présent patente de ses pairs. L’expression féroce de Saerileth se trouvait ainsi magnifiquement assortie aux réprimandes orgueilleuses de l’elfe.

Typhaine réalisa alors pleinement que du haut de son mètre soixante cinq, de sa frêle constitution et de sa superbe robe à gorgerette, elle n’aurait probablement que peu de répondant face à un légionnaire en armure, une boucanière armée jusqu’au dents d’arbalètes anti-brétonnes, et d’une foule bien-pensante au penchants lapidaires. Insensiblement, elle se recroquevilla, et ses fragiles épaules se resserrèrent tandis que son regard se portait ostensiblement sur ses propres chausses. Le feu aux oreilles, miséricordieusement dissimulées par sa crinière cuivrée, la petite magicienne connaissait un grand moment de solitude.

Naturellement ce fut l’instant que choisit le guérisseur pour apparaître. La mine coupable de Maelicia associée à l’empressement du légionnaire eurent tôt fait de le dérider, attisant le brasier ardent qui consumait ses joues. Lui aussi se moquait, la jeune femme en était persuadée.

— Bien entendu. Entrez, seulement, les invita-t’il, restant professionnel malgré un sourire qui lui faisait deux fois le tour de la figure.

Typhaine ne se fit pas prier : elle fonça, la tête basse, et se réfugia promptement dans le bureau du soignant, à l’abri des regards. La présence vigilante de Saerileth lui fit l’effet d’un chien de garde affamé depuis deux jours. Hélas, comment Dagon aurait-elle pu deviner que l’elfe et l’impériale étaient amants ?


ж ж ж



L’ambiance surchauffée du cabinet du médecin s’abattit sur eux, accablante. Accolée à l’un des renfoncement de la pièce, une table d’examen en hêtre renforcée par un revêtement de cuir attendait, incontournable, autel fatidique où l’innocent Drem s’immolerait, premier martyre du joug de l’indigne Maelicia.

— Qu'est ce qui amène un légionnaire aussi loin de l'infirmerie de sa caserne ? attaqua Boniface, de ses yeux bleus étincelants derrière ses lunettes rondes. Sûrement quelque chose de trop embarrassant pour en parler aux officiers de service ?

— Pas vraiment, réfuta Drem. En fait, je suis en mission dans le quartier avec ces deux civils, là, et j'ai des crampes d'estomac assez gênantes. si vous aviez juste un petit truc pour calmer tout ça, que je puisse tenir jusqu'à ce que je rentre au baraquement ce soir...

Le guérisseur arbora une expression amusée, signe qu’il n’était pas dupe. Puis, il lui indiqua l’angle de la salle.
— Hum, vraiment ? Voyons cela. Déshabillez-vous.

Typhaine sentit le dunmer se retourner, mais esquiva son regard, s’absorbant consciencieusement dans l’observation de l’agencement régulier des lattes du parquet. Du hêtre aussi, probablement ?

Tandis qu’elle se retournait vers le mur opposé, soudainement devenu plus accueillant elle sentit un dans un mouvement d’air un objet lourd tomber dans les bras de Saerileth. Alors qu’elle pivotait précautionneusement, l’acier de brassières voltigeant dans sa direction lui heurta le front, et la força à achever sa rotation : le dunmer leur lançait ses fringues ! Quoi, en plus il fallait regarder ! Elle tenta une solution alternative, contemplant une fenêtre latérale pour n’apercevoir les projectiles vestimentaires que du coin de l’oeil ; mais elle ne pouvait distraire complètement son regard d’un Drem de moins en moins légionnaire, et de plus en plus sable chaud à chaque instant qui s’écoulait.

Si bien que lorsqu’il fit valser son caleçon de lin, Typhaine était pivoine, faute d’expériences antérieures en matière d’hommes nus.

Abaissant un feuillet administratif, le guérisseur haussa un sourcil :
« Il n’était pas nécessaire de vous deshabiller complètement... »

S’approchant ensuite il l’invita à s’allonger et entreprit de lui malaxer méthodiquement le ventre, cadran par cadran. Mais la brétonne avait déja fait volte face, et s’affairait elle à examiner les frusques du sacripan. Elle marmonna un étouffé « J’suis désolée, j’savais pas... pour vous deux... » à l’adresse de Saerileth, puis commença la fouille. Elle passa rapidement en revue l’armure, la parcourant d’une main — tremblante, hélas — tout près de sa surface. Puis virent la chemise, les bottes, les chaussettes à pois, le ceinturon orné de motifs bizarres....

Alors qu’elle faisait les poches du pantalon (de cuir, sans un mot), l’ l’honnête guérisseur profitait de sa palpation pour interroger le malade imaginaire :
« Ca fait mal ici ? Et là ?  Depuis quand ? »

Typhaine s’épongea le front, dépitée. Restait le superbe caleçon de lin à boutonnière à la mode bosmer — élément du plus mauvais goût s’il en était, comment pouvait-on porter des vêtements aussi voyants ? —, abandonné non loin. Ce ne fut que lorsqu’elle saisit — du bout des doigts —  que le tout dernier bouton de nacre vibra légèrement.

Rapprochant davantage sa paume tendue de celui-ci, un léger bourdonnement, un tintement subtil se fit entendre alors que le bouton semblait presque attiré par sa main. La brétonne fronça les sourcils : qui que soit le zigoto qui avait ainsi placé la balise, il avait un humour des plus douteux !

— C’est le mouchard, souffla-t’elle à l’impériale, à qui l’étrange magnétisme n’avait pas échappé.

Simultanément, Boniface, palpant désormais les régions cervicales, puis axilaires et enfin inguinales de l’elfe, affinait son interrogatoire
« Pas de brûlures urinaires ? Les urines ne sont pas troubles ? Il n’y a pas d’autres personnes atteintes ? »

Ce faisant il plongea ses yeux dans ceux du dunmer, puis lança un regard appuyé en direction des deux femmes, avant de s’interrompre, ébahi. L’une des deux suspectes venait d’arracher d’un coup sec quelque chose à l’extravagant caleçon de son patient.

Il hésita un instant, sourcil haussé, puis dévisagea de nouveau le militaire, peinant franchement à ne pas éclater de rire.

— Cela peut être asymptomatique chez la femme, vous savez ? expliqua-t’il, avant d’enchainer sur un « rhabillez vous, va » complice.

Typhaine, elle, était écarlate.  Elle allait tuer cette mouise de lézard ! Elle en ferait des brochettes, le rôtirait puis l’enverrait en conserves en Argonie ! Ca lui apprendrait à baliser, tiens !

Elle explora rapidement la salle du regard, serrant l’ornement fautif dans sa main tandis que Drem revêtait ses effets. De multiples tables à tiroir recouvertes d’outils et d’ustenciles, divers schémas et... deux ou trois poubelles déjà bien entamées. S’assurant que le sagace médecin était toujours plongé dans ses papiers, elle abandonna discrètement la balise dans l’une d’entre elles : ainsi les espions les penseraient toujours chez le médecin, et mettraient du temps à dévoiler la supercherie.

Alors qu’elle se félicitait intérieurement, elle se vit fourrer dans les mains un parchemin constellé d’écritures illisibles par le guérisseur.

— Pour vous aussi mesdames. Guérison des maladies bactériennes, tous les apothicaires en ont. Et pour vous, un baume pour les joues ! Allez ; et soyez prudentes la prochaine fois ! le congédia-t’il en les raccompagnant dans la salle d’attente, avant d’appeler le malade suivant.


ж ж ж



Une fois dehors, la jeune fille observa le parchemin d’un air outré, mais hésitait manifestement à le déchirer en raison du remède contre la tendance à rougir dont elle souffrait. Finalement, elle le plia en quatre et le glissa dans sa poche, sans se départir de son air boudeur. Elle se mordit les lèvres, signe manifeste de l'élaboration d'une réplique cuisante :

— C’était très amusant, Drem, très, le piqua t’elle tout en observant les passants, évitant le regard de l’elfe. Génial le coup d’la salle d’attente ; j’vous en demandai pas tant. En attendant qu’Danse-mot — elle fit une pause puis défit violemment son collier, et le balança contre un mur d’un geste rageur — s’pointe, pourriez p’têtre m’dire c’que vous foutiez avec une balise magique ? Uniforme réglementaire, c’est ça ?

De toute évidence le sang-froid de la jeune fille avait pris un sérieux coup dans l’aile. D’ordinaire plutôt joueuse, elle avait conscience que son ton acerbe agressait un Drem déjà sérieusement ébranlé. C'était injuste de sa part, mais elle se sentait tellement excédée que cela ne lui importait plus. Fallait-il croire que la personne la plus secouée des trois n’était pas celle qu’on pensait ?

Modifié par Trias, 02 janvier 2010 - 15:44.





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