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[rp] Cité Impériale


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284 réponses à ce sujet

#126 Trias

Trias

Posté 23 juin 2009 - 23:20

Main-d'Ombrelle


20 Soirétoile, 3E425, 18h40

  
  
L'argonien, habile poète et néanmoins joueur lui prodigua quelques alexandrins promptements improvisés. Pour la bretonne, il était inouï  qu'un étranger tel que lui ait été capable de maîtriser ainsi le langage commun. Cependant, bien qu'appréciant la rimaille, elle le travailla au corps. Les résultats furent passablement décevants : il paraphrasa la question de la destination, éluda celle de l'apparence du fameux Causant et justifia même son goût prononçé pour les cachotteries par un funeste principe de précaution.

Maelicia était déçue. Étant donné qu'il n'avait répondu clairement sur la physionomie de leur cible, elle n'avait pu vérifier s'il la menait ou non en bateau. L'ignorance anxieuse dans laquelle elle l'avait maintenu au sujet des disciples, lui servait maintenant d'excuse pour lui rendre la monnaie de sa pièce. Mais là où Maelicia souhaitait que le lézard se sente menaçé par les Shéamite, et donc recherche la protection des mages, elle ne voyait absolument pas où lui voulait la mener. Cherchait-il donc à la droguer, dans le but de lui soutirer ces informations une à une ?

— Qu’est-ce qu’y’a dans vot’ fiole à cidre ?, acheva-t'elle, dans son dépit.
— Dans la fiole que vous avez bue ? Permettez-moi de conserver encore le secret une dizaine de minutes, mais je vous promets de vous donner la recette ensuite.

La bretonne poursuivit sa marcher, mais une discrète contraction de ses muscles faciaux fut perceptible lorsqu'elle tiqua. Elle s'éclaircit de nouveau la gorge, rajusta sa houppelande autour de son cou, et répondit en regardant droit devant elle, de manière à éviter les yeux du roublard.
— *Hem* euh, j'vais vous d'mander un p'tit effort d'imagination, m'sieur l'lézard. Y fait nuit. Z'êtes petit, frêle et désarmé. Z'avez de jolies écailles roses parce que z'êtes une magnifique argonienne, et que vous soignez votre apparence. Vous valez pas un clou physiquement, mais z'avez quelques capacités magiques qui peuvent vous éviter des ennuis. Et vous vous z'êtes déjà retrouvée ligotée des pieds à la tête dans des bouges mal fâmés, par un voleur qui collectionne les cachotteries, et change de nom comme de chemise, quand ça lui chante.

La rouquine se tut un instant, et s'arrêta. ; puis plongea son regard dans les fentes pupillaires de l'argonien. Évidemment, le reptile la fixait avec la plus grande attention.

— Ben, j'vais vous dire, vous la boiriez pas, vot'fiole. Et j'l'ai pas bue non plus. Et si vous voulez que j'la boive, c'est simple : z'avez qu'à en boire la moitié d'abord. Devant moi. J'boirais le reste ensuite.

Produisant le récipient du fond de sa gibecière, elle l'observa, guettant ses réactions, une moue de défi sur les lèvres...

Modifié par Trias, 23 juin 2009 - 23:39.


#127 Ygonaar

Ygonaar

Posté 23 juin 2009 - 23:43

Impasse logique

  

  

  

20 Soirétoile, 3E425, 18h40

  

  — Ben, j'vais vous dire, vous, la boiriez pas, vot'fiole. Et j'l'ai pas bue non plus. Et si vous voulez que j'la boive, c'est simple : z'avez qu'à en boire la moitié d'abord. Devant moi. J'boirais le reste ensuite.
C’était bien cela ! Le révélateur emploi du présent n’avait pas menti, l’humaine n’avait pas prit sa potion. Il fallait rattraper les pots cassés au plus vite.

  —Vous m’avez pour votre part également prouvé que vous pouviez être dangereuse, et que vous n’êtes pas stupide. Croyez-vous vraiment que j’emploierai une méthode aussi hasardeuse si je devais m’en prendre à vous ? Alors que vous étiez tantôt sans défense dans mes bras ? Mais s’il n'y a que cela pour que vous me fassiez confiance, donnez-moi cette flasque.

  Il but alors une rapide gorgée du récipient de grès, avant de le tendre à la Brétonne.

  —Voilà ! J’espère qu’il en reste assez pour que la dose agisse efficacement, et surtout que le temps d’activation ne soit pas trop long. Allez-vous maintenant me rétorquer que ce test n’est plus valable car les Argoniens ont la réputation de résister à de nombreux poisons, ou allez vous considérer que j’ai tout intérêt de collaborer au mieux avec vous ?

Modifié par Ygonaar, 23 juin 2009 - 23:52.


#128 Trias

Trias

Posté 24 juin 2009 - 00:05

Au shaker

20 Soirétoile, 3E425, 18h40




—Voilà ! J’espère qu’il en reste assez pour que la dose agisse efficacement, et surtout que le temps d’activation ne soit pas trop long. Allez-vous maintenant me rétorquer que ce test n’est plus valable car les Argoniens ont la réputation de résister à de nombreux poisons, ou allez vous considérer que j’ai tout intérêt de collaborer au mieux avec vous ?

Maelicia n'était qu'à moitié satisfaite. Certes, son stratagème s'était avéré efficace, mais l'argonien s'était aussitôt empressé de le démonter en lui rappelant les dons de son espèce.

Elle fit la moue.
— Mmmhhh, j'sais pas, après tout c'est vrai, z'êtes un métaboliseur rapide, non ? Pourriez y avoir déjà pensé et pris l'antidote, aussi ? Ou avoir fait semblant d'boire ?

Puis, voyant le dépit transparaître même au travers de l'épais épiderme de chitine de son interlocuteur, elle éclata de rire, et saisit la fiole. Enfin, inspirant un bon coup, elle but d'une lampée la liqueur restante... puis se plia en deux. Car il s'agissait bel et bien de liqueur, l'amer et brûlant liquide lui dévorant ses entrailles, peu habituées aux assauts de l'alcool.

— Arrrrggghhh *gloup*, déglutit-elle, péniblement, la voix rauque. Dire... que *gloup* z'avez bu ça comme du p'tit lait ! Savez pas diluer à l'eau ou quoi ?!

Puis, s'apercevant qu'elle se donnait en spectacle, elle reprit contenance et se redressa.

— Et maintenant... où qu'on va, m'sieur Danse-mot ? rempila-t'elle, sourire forçé au lèvres, tentant de dissimuler les raucités blessées de sa voix.

Modifié par Trias, 24 juin 2009 - 00:08.


#129 Ygonaar

Ygonaar

Posté 28 juin 2009 - 22:14

De la destination.



  

20 Soirétoile, 3E425, 18h40

  
  
  Les rouges iris du saurien flamboyèrent à la lueur d’une torchère d’un éclat rehaussé par sa face d’ébène. Ses muscles dorsaux se détendirent. L’humaine avait finalement bu son philtre après un rire strident. Hilarité qui ne dura guère longtemps, d’ailleurs.
  — Arrrrggghhh *gloup*, déglutit-elle, la voix rauque. Dire... que *gloup* z'avez bu ça comme du p'tit lait ! Savez pas diluer à l'eau ou quoi ?!
  — Le choix du solvant dépend des ingrédients, comme vous le savez certainement. Je vous déconseille vivement de réaliser cette recette dans de l’eau, à moins que vous ne soyez immunisée à la digitale… De plus, l’alcool dissout également la couche de mucus de votre palais, permettant le dépôt d’un film de substance active. Quant au fait d’être un « métaboliseur rapide », je ne saurai vous dire, ne sachant pas ce que cela veut dire… Ni pourquoi votre pauvre Argonienne doit être rose, à la réflexion…
  — Et maintenant... où qu'on va, m'sieur Danse-mot ?
  — Vague-Profonde, s’il vous plait ! Pour l’heure, on tourne à droite.
  — Comment z’avez prévu qu’on rende mes affaires ??
  — On vous l’amènera à l’endroit où vous nous laisserez le solde du contrat, j’imagine.

  Après un bref instant de réflexion, la rouquine poursuivi.
— Ah, et pis j’voudrais bien savoir d’où vous l’avez tirée, l’autre vache rousse, là...
  —Malicieuse ? Il s’agit d’une de ces nombreuses campagnardes venues se chercher un destin à la capitale et se retrouvant vite dans une misère plus noire qu’à leur début. La faim les pousse aux dernières extrémités, puis c’est la honte qui les claquemure dans leur détresse. Celle-ci est très courageuse, acceptant de jouer votre rôle pour changer de condition, malgré les risques non négligeables. Je n’en sais guère plus, elle a été choisie car elle ne me connaît pas.

  
  Le reptile enchaîna les ruelles, s’éloignant des grands axes. Malgré la nuit et le froid hivernal, les passants devinrent plus nombreux. Et nettement plus misérables, également. La raison leur apparu rapidement en la massive silhouette d’un austère bâtiment. De grandes lettres anguleuses gravées à même la pierre du fronton indiquaient sobrement « HOSTEL DES FRERES HOSPITALIERS DE STENDARR ». En effet, les cénobites de cet ordre monastiques faisaient non seulement vœu de pauvreté, mais également celui d’assistance envers les laïques. Ils hébergeaient, nourrissaient et soignaient donc gratuitement qui se présentait à eux, dans la mesure de leurs ressources. Il était bien vu de leur faire quelques aumônes et la Couronne comme le Culte des neufs leurs versaient une modeste rente, revenus bien insuffisants devant l’importance des sollicitations. D’autant plus en cette glaciale période où nombres de miséreux étaient près à s’entasser dans les couloirs pour un peu de chaleur et une louchée de brouet clairet. D’autre avaient subi quelques accidents de charrette ou avaient été retrouvés estourbis et sans le sou, l’indigence les poussant à attendre des heures avant qu’un moine fatigué ne les panse avec des bandages des plus douteux, mais gratuitement.

  Vague-Profonde se fraya un chemin dans la foule encombrant le bâtiment, non pas en jouant des coudes, mais en faisant exactement l’inverse. Il se laissait bousculer sans résistance, se glissant dans l’espace nouvellement dégagé, fuyant tous les regards, marmonnant quelques vagues excuses inaudibles. Le contraste avec le très voyant Danse-Mot était saisissant.
  — Z’êtes sûre d’pas vouloir vous faire tripoter par l’bon père alors, m’dame ? s’enquit-il tout de même pas acquis de conscience lorsque Maelicia parvint enfin à le rejoindre.

  Il s’arrangea un peu plus loin pour être bousculé, s’affalant dans le mouvement contre la Brétonne et la plaquant contre le chambranle d’une petite porte. Cette dernière s’ouvrit mystérieusement et ils se retrouvèrent dans un étroit escalier de pierre. Le vantail se referma, les laissant dans une obscurité humide, toute la scène ayant eut cette étrange fluidité paraissant naturelle du mouvement bien préparé. Une main retint la magicienne à la taille, pour lui éviter de dévaler les marches, l’autre au menton pour assourdir un éventuel cri intempestif. Apparemment, leur escapade avait laissé la populace indifférente, conformément aux suggestions du roublard. Guidant sa compagne, ils descendirent à tâtons jusqu’au palier, où Main-d’Ombre alluma une minuscule lanterne sourde.

  Ils se trouvaient dans une cave emplie d’un invraisemblable capharnaüm d’objets en fin de vie attendant un hypothétique recyclage. Contournant une roue de fiacre brisée dont certains rayons servaient déjà d’attelle, ils se dirigèrent vers une rude tenture de laîche arborant le sinistre emblème de la patte de canard rouge. La toile était une portière, masquant une poterne barrée d’un lourd verrou. Un verrou sans serrure, qui s’activait uniquement de la cave. Le passage donnait sur un étroit tunnel grossièrement taillé à même la roche. Il s’évasait au bout d’une trentaine de verges autour d’un puits central s’enfonçant dans les ténèbres. Une échelle de corde était roulée, une extrémité attachée à deux anneaux d’acier, prête à l’emploi. Une poulie accrochée au plafond permettait de descendre un volumineux sceau.

  — Nous y sommes. Désirez vous descendre la première ou en second ?s’enquit le saurien.
  

  

жжж

  

Du dessous des choses.

  

  Main-d’Ombre était assez satisfait de son petit effet. Il ne lui avait été guère facile de dénicher Causant, mais il n’avait eut qu’à se féliciter de ses choix stratégiques.

  Le premier était que le mendiant fut encore en ville. Il avait plusieurs arguments pour étayer cette hypothèse. Le blocus venait en tête, bien sûr, car sortir de la ville était devenu une gageure, plusieurs contrebandiers parmi les plus émérites l’ayant appris à leurs dépends. Même ses congénères avaient abandonné l’idée de transporter de menues mais précieuses marchandises en plongée profonde, car la légion quadrillait le secteur sur des bateaux de guerre avec des Traqueurs de la Wyverne embarqués. Ces derniers repéraient souvent les intrus grâce à leurs pouvoirs, qui se faisait alors cueillir par un commando de nageurs de combat Argoniens. De plus, ce mirliton semblait avoir une fonction hiérarchique importante chez les mendiants de la cité impériale, et ne devait certainement pas pouvoir se couper complètement de ses troupes. Enfin, qui pouvait mieux fournir anonymat et cache discrète que la plus grande ville du continent ?

  Le second choix vint du constat que la Guilde des voleurs était incapable de dénicher Causant. Le « pickpocket » nouvellement promu n’était pas assez naïf pour s’imaginer être seul sur cette tâche, tous les mouchards devant être en alerte. Cela voulait dire qu’il était presque inutile de s’attarder sur les refuges habituels de la cible et qu’il aurait toutes les chances de ne pas le reconnaître si par hasard il le croisait. Presque, puisque son enquête préliminaire lui avait tout de même permit de découvrir un précieux indice, une frette de luth. Or il avait put examiner son instrument, lors de leur rencontre aux Parterres de  Val-Boisé. Un profane n’y aurait probablement pas prêter attention, mais lui remarqua que l’objet était dans un exceptionnel bon état de conservation pour un habitant des rues, mais que ses frettes commençaient à s’user. Cela signifiait certainement que la musique avait une importance considérable pour le mendiant, mais la frette tombée indiquait qu’il n’avait pas put les changer avant de devoir disparaître.

  C’est pour cela que Danse-Mot, Voile-Regard, voir même Vague-Profonde arpentèrent périodiquement les alentours de tous les luthiers de la cité, à l’affût de la moindre rumeur mais surtout de la chose la plus difficilement masquable à long terme, l’odeur. C’est grâce à cela que Dame Bouclette lui permit de remonter la piste, voilà deux jours.

  
  Le saurien avait été impressionné par la qualité de la cachette. Non seulement il y était ravitaillé de manière implicite, mais aucun espion ne viendrait jamais le chercher ici. Et si d’aventure l’un d’eux le faisait tout de même, il serait bien en peine d’identifier son objectif parmi tous ces individus recouverts de bandage. Pansements qui ne donnent guère l’envie d’être retirés, dans une ladrerie.

  La légende prête l’apparition de la lèpre de Malacath à une sorcière des Marais Noirs qui aurait voulu se venger d’esclavagiste  Dunmer ayant décimés sa tribu. Les versions varient quant au Prince Daedrique recevant l’âme de la malheureuse,  mais il est certain en revanche, que ce mal ne se cantonna pas à Morrowind. Il s’étendit à tout Tamriel, touchant indifféremment les races, bien qu’exceptionnellement les Argoniens, il est vrai. Il ressemble fort à la lèpre classique, et n’est que modérément contagieux à l’instar de cette dernière. Une fois contractée, cependant, il n’existe nul moyen d’en guérir. Cures, potions, magies, prières aux Neuf comme sacrifices aux Daedras, rien ne s’avère efficace. Ces malades deviennent donc des parias, confinés dans des lieux clos à des fins de prophylaxie et devant impérativement porter l’infamante patte de canard rouge, insigne de leur état.

  Les cités environnantes fournissent généralement le minimum vital aux léproseries, souvent en échange de produit manufacturé en bois, car ce dernier ne propage pas le mal comme tout le monde le sait bien. Il existe aussi de très bonnes recettes pour éviter de contracter le mal, ces dernières s’avèrent toxiques à la longue. Les contacts avec les populations saines s’avèrent des plus sporadiques, le plus souvent en la personne d’un moine Argoniens rendant une visite hebdomadaire.

  Celle de la capitale ne faisait pas exception à cette règle. Le manque de place l’avait recluse dans des grottes naturelles sous le quartier du temple. Bien que de larges fissures s’ouvraient sur les flancs de la falaise que surplombaient les remparts, le seul accès réellement  était celui que venait d’emprunter nos deux héros. Et encore, la lourde poterne et le puits sans prise étaient d’efficaces précautions pour que les malades ne puissent sortir sans contrôle. Ils s’organisaient en revanche à leurs grés dans les cavernes, se fabriquant de rustiques casemates de bois ou de pierres sèches. Causant, qui avait du trouver un moyen de s’immuniser ou qui était porteur sain, avait installé la sienne tout près d’un filet d’eau suintant de la roche.

Modifié par Ygonaar, 28 juin 2009 - 22:18.


#130 Trias

Trias

Posté 30 juin 2009 - 22:17

L'art, mais pas les manières

20 Soirétoile, 3E425, 19h




De la digitale. Une plante herbacée assez commune, répandant ses pousses en de sauvages colonies de Haute-roche jusqu’à Val-boisé, et très commune en Cyrodiil. Les paroles de mage Fanis, enseignante en alchimie revenaient à Maelicia, en dépit de la pauvreté de ses dons pour la discipline. Et ce pour une raison simple : la digitale était un poison, hautement toxique à fortes doses, et dont le maniement était « des plus délicats, en raison du polymorphismes des profils métaboliques des individus », avait-elle mentionné.

Or, du haut de ses cinquante kilogrammes de jeune brétonne, on ne pouvait vraiment la comparer à la biologie d’un argonien mâle d'au moins soixante pour cent plus lourd. Et la conscience aigue de ce fait tourmentait notre étudiante, si bien qu’elle ne prêta qu’une attention modérée à son environnement, suivant d’instinct les vagues mouvements de la foule. En fait, il lui même semblait que son estomac allait amorcer une révolte,  lorsque la voix de l’argonien la héla, tout près d’elle.  

— Z’êtes sûre d’pas vouloir vous faire tripoter par l’bon père alors, m’dame ?
— Hein ? Euh...qui ? Tripoter quoi ? s’éveilla-t’elle, sortant de sa torpeur, réalisant soudainement l’oppressante présence de la populace, tout autour d’elle. Mais le roublard semblait déjà accaparé par quelque autre tâche, jouant dangereusement d’un équilibre étrangement précaire pour sa nature. Soudain, il s’étala de tout son long, entraînant avec une force surprenante Maelicia dans sa chute.

La rouquine tenta brièvement de reprendre un quelconque point d’appui, mais ce diable de lézard faisait pression de son épaule contre la sienne, si bien que son dos buta contre le rigide battant d’une porte. A son grand désarroi, celle-ci céda, plongeant les deux acrobates dans l’obscurité. Une main étouffa le hoquet qu’elle poussa en perdant l’équilibre, tandis qu’une solide poigne venait retenir sa taille.

Cet afflux d’informations tactiles inhabituelles couplé au puissant catalyseur que le stress exerçait sur la brétonne se traduisit par un brusque dégagement latéral, accompagné de ce qui aurait dû être une gifle cuisante. Cependant, elle retint son geste à mi-course, son cerveau reprenant un zeste d’activité. La curieuse question de Danse-mot visait certainement à l’avertir de ce « changement » de destination, et la promiscuité de la manœuvre était sous-tendu par la nécessité d’une prompte évasion. Maelicia détestait qu’on la manipule sans prévenir, et le comportement cavalier de l’argonien dépassait les bornes. Toutefois il parvenait toujours à excuser ses actes par le biais d'un quelconque objectif, plus ou moins obscur et lointain.

— J’apprécierai qu’on m’prévienne un peu plus clairement, à l’avenir... bougonna-t’elle simplement, alors qu’ils descendaient avec précaution jusqu’à ce qui devait être une sorte de dépotoir souterrain.




ж ж ж
Le don de Malacath




Son guide parcourut la décharge avec la circonspection d’un éclaireur, paraissant reconnaître graduellement les signes de piste qui les mèneraient à destination. Le théâtre souterrain était l’image même de la désolation, jonché d’ustensiles divers à l’abandon, à demi recouverts de poussière et de mousse. Les restes d’une charrette, le cadavre d’un poêle, les ossements de meubles craquelés. Maelicia ne sut bien identifier l’odeur qui y régnait, de vagues relents d’humidité... et de décomposition peut-être, certainement imputables aux énormes blattes peuplant le souterrain.

Par contre, elle reconnut du premier regard le symbole brodé sur la teinture fatiguée. Les pupilles de la bretonne s’agrandirent sous l’effet de la terreur, vacillant sur les contours de l’emblème du mal de Malacath. Son visage devint en un instant plus pâle encore que la blancheur fantomatique des murs qui l’entouraient.

— Dîtes, vous... murmura-t’elle en un souffle, mais l’appel mourut dans sa gorge : le reptile s’éloignait déjà.

Elle le suivit le long d’un corridor de roche mal dégrossie, prise de vertiges. L’odeur, devenait plus tenace. Sa vue se troublait, ou la pénombre se renforçait, elle ne savait. Ils débouchèrent dans une excavation circulaire, centrée par un sombre orifice béant, surmonté par une poulier et une échelle de corde.

— Nous y sommes. Désirez vous descendre la première ou en second ? chuchota l’argonien, de sa voix rauque curieusement assourdie.

Maelicia déglutit, sans répondre. Elle fit un pas en direction du puits, et s’aperçut que sa main tremblait. Elle en fit un deuxième, en se recroquevillant, et hasarda un regard vers le fond de la cavité. Son coeur battait à tout rompre dans poitrine. Ne parvenant qu’à distinguer des roches informes et lointaines, faiblement détourées par une faible et malsaine lueur de phosphorescence, elle se pencha davantage. L’une des roches bougea : horrifiée, l’étudiante parvint à distinguer l’éclat d’un oeil unique, tandis qu’un bras difforme agitait une sorte de gamelle.

La rouquine poussa un cri de terreur, et se recula précipitamment contre la paroi rocheuse derrière elle, se ramassant sur elle même. Haletante, blanche comme un linge, il lui fallut quelques secondes avant de pouvoir ne serait-ce que relever la tête de ses genoux. Du fond du puits, divers grognements, tantôt bestiaux, tantôt étrangement humains leurs parvenaient.

Elle inspira profondément, mais de manière saccadée, ce qui informa son compagnon sur la présence probable de sanglots. Enfin, elle le regarda dans les yeux, un triste sourire d’autodérision accroché au visage, mais sa voix était ferme, bien qu’un peu éraillée.

— La lèpre, hein ? J’suppose que c’est pour ça, toutes ces cachotteries, hein ? Et la fiole c’est pour résister aux maladies, j’me trompe ?  Pensiez qu’vous accompagnerai pas si j’le savais, hein ?

Elle sourit de nouveau, et le clapotis d’une larme s’écrasant sur le sol tinta aux ouïes de Main-d’ombre.
— Ben z’aviez raison *snif* ! Comprenez... j’ai d’ja fait des trucs durs *snif*. Des assassins, *snif*, des  gobelins *snif*, et même des zombies *snif*. Mais là... c’est des lépreux ! *snif* Moi... j’suis pas comme vous *snif*, si j’la chope, j’guérirai jamais *snif* ! Potion à deux drakes ou pas ! *snif*

Elle jeta vers lui un regard implorant.
— J’veux pas y aller *snif*, pleurnicha-t’elle. J’peux pas !

Puis la rouquine se couvrit le visage de ses mains et continua à sangloter. De toute évidence, l’associée du roublard avait ses limites.

Modifié par Trias, 05 juillet 2009 - 11:25.


#131 Ygonaar

Ygonaar

Posté 01 juillet 2009 - 16:16

Un désastre évité

  

  

20 Soirétoile, 3E425, 19h

  

  L’humaine s’arracha de son étreinte. Il devina à son mouvement qu’elle armait le bras. Si une lutte s’engageait dans cet escalier plongé dans les ténèbres, une dangereuse chute était à craindre et il pouvait dire adieu à la discrétion. Le coup ne vint heureusement jamais, avantageusement remplacé par une acerbe récrimination.
  — J’apprécierai qu’on m’prévienne un peu plus clairement, à l’avenir...
  — Vous avez à nouveau milles  fois raisons ! Mais c’est que vous êtes d’une nature…franche et entière. Vous expliquer trop explicitement mes intentions, outre le fait qu’ils y avaient des oreilles indiscrètes, aurait put vous faire changer de comportement, générant un stress, un regard trop soutenu vers la porte, une démarche trop mesurée, … De menus détails, mais qui s’avèrent capitaux pour éviter de focaliser l’attention des témoins lors d’un escamotage. Mais le glas des petits secrets va bientôt sonner.

  
  

ж ж ж

  

Ayez confiance…

  

  

20 Soirétoile, 3E425, 19h10

  

  Maelicia avait apparemment reconnu d’emblé le sinistre symbole. Elle semblait prête à élever une protestation mais son guide évita soigneusement de lui laisser l’occasion de s’attarder. En revanche, le puit lui imposait d’accepter la discussion.
  — La lèpre, hein ? J’suppose que c’est pour ça, toutes ces cachotteries, hein ? Et la fiole c’est pour résister aux maladies, j’me trompe ? Pensiez qu’vous accompagnerai pas si j’le savais, hein ?
  — Effectivement, ce sérum vous évitera de contracter le mal de Malacath. La raison principale de mon silence, comme je vous l’avais dit, était  de prendre par surprise un éventuel observateur. Si un limier nous prend en chasse, il hésitera à deux fois avant de nous suivre en ce lieu. Et le temps qu’il puisse s’immuniser, s’il en a les capacités, nous aurons probablement terminé cette affaire. Même S’emsyl devrait être dans l’embarras, si l’on en croit les légendes, car il est dit que les vampires peuvent transmettre ce fléau. Et comme vous l’avez deviné, je ne voulais pas vous inquiéter inutilement, d’autant plus qu’il fallait que vous ayez l’air naturel tout à l’heure.

  Son discours ne semblait guère convaincre la Brétonne. Il s’y attendait un peu, les léproseries étaient un réel tabou dans la zone d’influence de la Guilde de Magie, où les arts mystiques étaient à même de résoudre la plupart des problèmes majeurs. L’idée même de dégénérer inéluctablement en un monstrueux infirme, paria de facto quelque fut sa situation, provoquait un tel traumatisme qu’elle était confinée au plus profond de leur mémoire. Des sanglots commencèrent à secouer la jeune femme.
— Ben z’aviez raison *snif* ! Comprenez... j’ai d’ja fait des trucs durs *snif*. Des assassins, *snif*, des gobelins *snif*, et même des zombies *snif*. Mais là... c’est des lépreux ! *snif* Moi... j’suis pas comme vous *snif*, si j’la chope, j’guérirai jamais *snif* ! Potion à deux drakes ou pas ! *snif*

  Il fallait la calmer avant qu’elle ne crise vraiment. Main-d’Ombre adopta sa voix la plus chaleureuse, la plus rassurante, et montra ses crocs avec conviction.
  — Des Argoniens sont déjà tombés malades, vous savez. Je suis donc sensible à votre dilemme. Et si je peux bien vous promettre une chose, c’est l’efficacité de ma recette. Croyez moi, j’ai été… à bonne école.
— J’veux pas y aller *snif* J’peux pas ! implora-t’elle.

  Ca allait être difficile. Il allait falloir détourner son esprit de sa peur, le focaliser sur des arguments, sur son apparente assurance, sur le sentiment qu’il maîtrisait parfaitement la situation. Il observa le puit en silence quelques instants, afin de s’astreindre à une bonne humeur tranquille… et de mobiliser une considérable quantité de fluide pour impressionner la demoiselle.
— Je vous comprends bien, la journée fut des plus épuisantes et cette épreuve en ferait fléchir plus d’un brave. Mais les chansons vantent votre courage légendaire, et je n’ai nul doute que vous allez vous ressaisir ! Nous allons attendre quelques instants afin de reprendre des forces et d’être assurés que votre immunité soit efficiente. Vous pesez certainement moins de cent vingt livres et votre masse graisseuse me semble plutôt réduite. Votre médication aura tôt fait de saturer tout votre organisme, soyez en assuré. Catalysées par deux drachmes de bergamote, les six minimes de digitale que j’y ais mis à votre attention détruira assurément les vecteurs du mal. La liqueur d’ail a permis une absorption optimale par vos entrailles et une un gonflement de vos artères assurant la bonne circulation de vos humeurs  jusqu’à la moindre de vos extrémités. Et le soluté assure lui que le remède ne devienne pas un poison, du moins tant que vous n’en prenez pas régulièrement.

  Le saurien observa sa compagne quelques instants, afin de laisser le temps à son esprit de s’imprégner des informations et des sensations rassurantes. Et pour lui-même de rassembler de nouvelles forces, avant d’enfoncer le clou.
  — Quant aux ladres, savez-vous, se sont des individus comme vous et moi. Si leur affliction s’attaque aux nerfs et provoque des douleurs cuisantes, elle n’altère point leur pensée. Ils ne seront que trop heureux de notre visite dans leur cruel ostracisme, et n’auront nulle raison de vous faire du mal. Surtout avec les présents que je leur apporte. Un simple linge sur votre visage vous évitera de respirer leurs miasmes et je vous jure d’empêcher quiconque de vous approcher de trop près. Et songez que la quarantaine de la ville est maintenant levée. Il faut absolument résoudre cette affaire maintenant avant que les Sh’éamites ne puissent agir. Me faites-vous confiance ?

  En attendant que la volonté de la rouquine ne reprenne le dessus, l’Argonien palpa la tunique de son sosie. Ses recommandations avaient été scrupuleusement suivies et les poches intérieures étaient garnies de ses commandes. Il commença à remplir le seau de flasques d’alcool, de tabac et de sucre.

Modifié par Ygonaar, 05 juillet 2009 - 17:06.


#132 Trias

Trias

Posté 05 juillet 2009 - 00:37

La rouquine carmélite

20 Soirétoile, 3E425, 19h30




...songez que la quarantaine de la ville est maintenant levée. Il faut absolument résoudre cette affaire maintenant avant que les Sh’éamites ne puissent agir. Me faites-vous confiance ?

Toute la question était là. Avachie, le dos contre l’arête rocheuse, Maelicia maintenait caché son visage de ses mains. Elle savait qu’il avait raison, elle le savait. Mais pourquoi Dagon fallait-il que ce soit elle qui brave autant d’horreurs ? Un seul de ses aînés s’était-il douté de l’ampleur des sacrifices à consentir ?

Lentement, elle laissa glisser ses paumes, dévoilant à l’argonien des yeux trop humides pour être courageux.  Pour une compagnonne en Mysticisme, envoyée de la guilde, sa réaction était honteuse. Mais il n’y avait qu’un seul témoin... Elle dédia à celui-ci une trop éphémère tentative de sourire, puis inspira, sa respiration redevenant régulière.

— Bon. *snif*. Ben, on va dire que j’vais vous faire confiance, m’sieur Danse-mot... euh, Vague-profonde, se reprit-elle, devinant le tressaillement du lézard. Simplement... j’vois pas trop comment on pourrait trouver ce Causant, après tout si y s’cache, y peut très bien rester planqué sous un tas d’bandelettes, et c’est pas moi qui irai l’déloger...

Main d’Ombre pouvait se féliciter : son impression, appliquée sur une cible sans méfiance et en détresse, avait fonctionné à plein. Cependant, un nouvel obstacle se présentait : la cachette était inouïe, et Causant n’avait aucune raison de se soustraire à sa sécurité.

Sa suivante soupira à nouveau, déglutit, puis redevint silencieuse. Elle resta ainsi accroupie quelques instants, le regard rivé au sol, prostrée. De temps en temps, elle se passait une main distraite dans sa chevelure, paraissant absorbée par une profonde réflexion. Enfin, elle se leva.

— Bon écoutez, j’pense qu’si  l’sieur Causant avait une quelconque raison d’vouloir nous rencontrer, y se s’rait pas terré dans ce trou à rat, vous pensez pas ? Donc, y nous fuit. Donc y va fuir quand j’vais aller l’débusquer, et vous, z’allez rester près de l’échelle pour le cueillir. Pas trop près hein, j’veux qu’il pense pouvoir décamper sans attirer l’attention. J’surveillerai la zone psychiquement... et j’vous avertirai si une âme approche vot'cordellette.

L’étudiante se leva enfin, soupirant bruyamment. Jouant ensuite un curieux manège, elle ôta sa houppelande et en découpa télékinétiquement la doublure interne. Puis, lissant ses cheveux par le biais d’un léger sort de flamme, elle s’en enveloppa, se constituant ainsi une sorte de voile. Ôtant finalement ses lunettes, elle parcourut de la main la bure de sa robe de mage, qui devint brune. La vision d’une de ces nonnes, sillonnant les hospices, s’imprima fugitivement dans l’esprit de Main-d’Ombre.

— M’sieur Vague-profonde, z’avez d’vant vous Soeur Ariane Delpont, acolyte de Mara ! Lui lançant sa houppelande, elle ajouta : et une fois qu’z’aurez enfilé ça, vous s’rez Panse-les-plaies, de l’ordre de Stendarr....

Attrapant à son tour le linge qu’il lui tendait, elle s’en confectionna une sorte de cache-nez, puis attendit. Elle patienta même ostensiblement, promenant avec application son regard sur un plafond aussi morne qu’uniforme, de sorte que Main-d’ombre comprit parfaitement qu’il devrait descendre... en premier.      




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Comité d'accueil

20 Soirétoile, 3E425, 19h45




Deux masses informes et boiteuses, recouvertes de loques brunes frappées de rouge, rampant vers eux. Trois loqueteux en guenilles, affublés de la patte de canard, trotinant d’un pas mal assuré vers le seau. Leurs silhouettes se dessinant, à peines illuminées par la phosphorescence nocturne de la caverne. Les gémissements de quelques damnés, rendus à moitié fous par la douleur, clopinant vers le puit. Trois formes plus frêles, leurs visages tuméfiés masqués par de poussiéreuses étoffes, parvenant à peine à saisir l’unique écuelle qu’on leur donnait en toute leur carrière de lépreux.

Car tel était le mal de Malacath, jumeau putréfié de la lèpre de l'ancien temps. Incurables, ses victimes étaient frappées d’exil, et regroupées sans ménagement dans des léproseries tenant plus de l’asile que de l’hospice. Une écuelle, un barillet, des gants et la tunique à l’emblème du canard rouge, voilà quels devenaient leurs uniques biens à l’issue du diagnostic fatidique. Un bref examen par un guérisseur dégoûté, un simulacre de cérémonie religieuse des mains de compatissants ecclésiastes, et on les enterrait vifs et à jamais. Morts aux yeux de la société, ils étaient condamnés à vivre loin du jour pour le restants de leur vie, tintant de leurs crécelles pour ne jamais revenir auprès des vivants.  

La crécelle, dont les terribles tintements hantaient les ouïes de Maelicia, raidie près de son échelle de corde. Une petite douzaine de lépreux approchaient, quêtant leur manne quotidienne, ayant repéré les visiteurs. La bretonne, prise de vertiges, sentait son coeur protester dans sa poitrine. La crécelle et la patte de canard...  la mort, laide et difforme, se rapprochait d’elle. Que ne pouvait-elle fuir comme la peste ?

— Si on s’en sort, y m’faudra au moins un litre d’votre meilleure bibine pour oublier ça, sussura-t’elle à Danse-mot, occultant mal sa fébrilité.

Attendant quelques instants de plus, elle laissa l’intronisé « Panse-les-plaies » distribuer les précieuses denrées du monde d’en haut, et observa. Aucun des pauvres hères ici assemblés ne correspondait à la description du barde. Se rapprochant précautionneusement de ce qu’elle pensait être une femme, elle l’interpella.

— Mara vous bénisse, ma soeur...

La créature releva la tête. Mi-écoeurée mi-bouleversée, Maelicia constata que la détresse de son regard, elle, était humaine.
— Mmm ma soeur ?
— J’suis soeur Ariane, de Mara. La mère Anumiel m’envoie. Nos frères de Stendarr nous on dit qu’y avait un nouveau venu parmi vous, qu’avait pas été béni et qui souffrait terriblement d’un ulcère à la cheville. Je suis chargée d’aller lui bander ses plaies.


La misérable parut hésiter quelques instants, puis ses paupières tuméfiées s’embuèrent.
— Enfin ! se lamenta-t’elle, d’une voix cassée par la fatigue. Enfin nos prières ont été entendues, Akatosh — Maelicia tressaillit — soit loué ! Depuis des semaines, des mois... que nous attendons ! Des mois que nous demandons ! Vous voulez nous soigner ? Je suis Marthe Francois, et mon vieux époux, Gaspard, souffre également ! Ses pieds suintent, et les humeurs coulent au sol et même lui peut sentir la douleur de ses plaies ! Vous êtes une envoyée d’Akatosh, Akatosh vous envoie !  

La bretonne se sentait toute chose, son coeur étreint par une sourde émotion. Non seulement la lépreuse vénérait le même Dieu qu’elle, mais en plus était-elle aussi originaire d’Hauteroche, preuve en était de son accent. Mais elle n’était pas venue l’aider dans sa misère...

— Menez moi d’abord au nouveau-venu, insista Maelicia. Il est de taille moyenne, brun et jouerait d’un instrument. Z’êtes sûr que l’avez pas vu ?

— Oh, madame, mon mari ! gémit la lépreuse, en voulant se jeter aux pieds de la fausse religieuse. La réaction de celle-ci ne fut pas celle qu’elle attendait : elle poussa un cri aigu et bondit vivement en arrière, épouvantée, laissant la ladre retomber au sol.

— Madame... continuait celle-ci, pleurant de plus belle.

Maelicia se mordit la lèvre. Son stratagème était un peu trop convainquant à son goût. Elle baissa le ton, puis souffla.

Menez moi d’abord au barde. Je suis là, et il n’y a rien d’urgent. Mara s’occupe de tous ses enfants. Menez moi d’abord au barde.

Les intonations de l’illusionniste se fondaient à merveille dans ses propos, mêlant subtilement l’injonction au message, pénétrant au coeur de la psyché de sa victime sans que celle-ci s’en aperçoive. Langue de vipère, c’était ainsi qu’Illuvanar avait surnommée son apprentie, la funeste nuit de sa disparition.

Sa victime obtempéra.

Maelicia et la lépreuse traversèrent le village souterrain, silencieusement. Sans mot dire. La magicienne, nerveuse, se tenait prête à influencer, voire à dominer qui que ce soit sur son passage, mais le périple se fit sans encombres. Parvenant enfin à un pitoyable assemblage de branchages pourris aux allures de cabanon, les deux femmes constatèrent qu’il était vide. La rouquine ramassa un objet traînant au sol : un luth.


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Beaucoup trop évident. Personne dans le clergé ne savait qu’il était là, personne. Et pour cause : il n’y avait pas eu de cérémonie lors de son passage, puisqu’il était clandestin. Une bonne-soeur... qui qu’elle soit, elle aurait aussi bien pu se déguiser en catin qu’il ne se serait pas laissé approcher.

Le grêle individu au pourpoint bariolé, presque entièrement dissimulé sous des haillons de lépreux, se redressa légèrement.
— Je t’en dois une fière, très serviable, admirable et incroyable frère !
— Mouais, répondit un bossu difforme à ses côtés. On dirait qu’y t’cherchent. Même ici. Z’ont sacrément du cran, nan ?
— Ce qui ne m’arrange guère, je le concède. Il est temps pour Causant de disparaître, de s’évanouir, et de prendre à jamais l’escampette de ce funeste recoin de paradis. Sois assuré que je le regretterais éternellement...
— Hein ?

Le barde jeta un coup d’oeil malicieux à son compagnon.
— Toi et tes fidèles larrons allez distraire le lézard pendant que je prendrais la tangente.  Ne le rossez pas trop fort surtout. Peu m’importe ce que vous ferez de la brétonne, du moment que je suis lo...

Il s’immobilisa soudain net, interdit.
— Diantrefeu, mon luth est toujours dans la cabane !




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De l'avenir du métier d'acteur

20 Soirétoile, 3E425, 19h30



Vinissia avait un mauvais pressentiment. Il n’y avait plus personne dans cette maudite ruelle, et sa traversée n’avait rien d’engageant.

— On pourrait pas rev’nir, demanda-t’elle à son compagnon argonien. Prenez pas d’risque, qu’ils ont dit, non ? Alors euh.... on pourrait pas...

Elle ne devait jamais finir sa phrase : une silhouette souple venait de se jeter du toit au dessus d’elle, défonçant d’un coup de pied magistral l’abdomen du récemment nommé Sent-le-bourrin, qui s’encastra dans une fenêtre voisine. La seconde d’après, et Malicieuse interceptait une décharge électrique telle que tous ses membres se tétanisèrent, la jetant à bas d’une monture épouvantée.

Le visage sévère d’un grand blond coupé court apparut au dessus d’elle, menaçant.
— Je regrette, Maelicia, mais tu ne me laisses pas le choix...

Il dénuda son poignet d’un geste sec, puis lui enfila une sorte de bracelet qui se scella autour de ses avants bras avec un clic sonore. Enfin tranquilisé, il la retourna, presque délicatement, et contempla son visage. Une expression d’incrédulité se dessina sur ses traits.

— Que ? Quoi ? Mais qui êtes vous ? Traqueurs, ce ne sont pas eux !!

Les trois autres individus qui traînaient au sol l’argonien menotté s’interrompirent.
— Hébrard !
— Oui, aspirant !
— Le pendule pointait bien sur ce canasson ?
— Oui, je confirme, la balise était sur le fer de sa patte arrière gauche. Je l'y ai placée moi même. Il n'y a pas d'erreur, c'est bien le cheval de Marsoric.


La mâchoire de Jeraselm se contracta.

— Bien. Dans ce cas ma chère, vous allez nous fournir quelques explications. Et rapidement...

Relevant sa victime sans plus aucune douceur, il l’entraîna dans l’entrepôt voisin, suivi par le reste de son escouade. Le leurre, venait d’être éventé.

Modifié par Trias, 05 juillet 2009 - 18:12.


#133 Ygonaar

Ygonaar

Posté 07 juillet 2009 - 23:35

Peptidases linguales



  

20 Soirétoile, 3E425, 19h30

  

  — Bon écoutez, j’pense qu’si l’sieur Causant avait une quelconque raison d’vouloir nous rencontrer, y se s’rait pas terré dans ce trou à rat, vous pensez pas ? Donc, y nous fuit. Donc y va fuir quand j’vais aller l’débusquer, et vous, z’allez rester près de l’échelle pour le cueillir. Pas trop près hein, j’veux qu’il pense pouvoir décamper sans attirer l’attention. J’surveillerai la zone psychiquement... et j’vous avertirai si une âme approche vot'cordellette.

  Il l’avait peut-être trop bien rassurée. Voilà maintenant qu’elle voulait prendre la direction des opérations et lui donner des ordres ! Le fameux orgueil des mages qui ressortait… Il eut une brève velléité de la recadrer mais s’abstint finalement. Voir comment une mage s’y prend pour faire bouquer un individu qu’elle était censée ne pas connaître se révèlerait certainement instructif. Et si lui connaissait fort bien le refuge du mendiant rien ne garantissait, après tout, qu’il ne soit pas en train de se promener ailleurs dans les cavernes.  
  — Bien Madame, ce contenta-t-il de répondre, avec peut-être une once d’ironie dans la voix. Et par qu’elle méthode envisagez vous de me prévenir ?

La sorcière entrepris alors de se donner l’apparence d’une  nonne et de transfigurer sa houppelande en bure pour lui-même, avant de déclarer triomphalement :
— M’sieur Vague-profonde, z’avez d’vant vous Soeur Ariane Delpont, acolyte de Mara ! Et une fois qu’z’aurez enfilé ça, vous s’rez Panse-les-plaies, de l’ordre de Stendarr....
  —Je… Bien Sœur Ariane. Une idée excellente.

  Panse-les-plaies ! Un nom correspondant à une tâche. Un nom d’esclave... Il y avait de bonne chance que cette Peau-Molle ne comprennent même pas l’insulte qu’elle venait de lui faire, toute fière qu’elle devait être de son stratagème. Et dire qu’il n’y a pas une heure, elle lui avait reproché de « changer de nom comme de chemise » et de « collectionner les cachotteries ». Malgré ses discours moralisateurs et naïfs, on pouvait dire qu’elle s’adaptait vite. Enfin, pas au point de descendre la première.


  Il dévala l’échelle de corde d’un rythme rapide, sans un regard vers le haut. Trois lépreux s’approchaient déjà. Panse-les-plaies récupéra la corde du sceau, qu’il enroula autour de son buste, puis les denrées qu’il commença à distribuer. Il avait choisi à escient des denrées de luxe que les ladres ne devaient jamais obtenir, de quoi leur apporter un minimum de plaisir et d’évasion. Si le blocus avait été levé plus tôt, il aurait même opté pour du skouma. Il espérait acheter ainsi la coopération des parias. Au pire, la convoitise que susciteraient ces présents les accaparerait suffisamment pour qu’ils ne leurs prêtent guère d’attention. Ils semblaient même intéresser sa compagne, d’ailleurs.
— Si on s’en sort, lui souffla-t-elle, y m’faudra au moins un litre d’votre meilleure bibine pour oublier ça.

  L’Argonien se mura dans son rôle, éparpillant ses précieuses fournitures au hasard des attroupements, apparemment indifférent à sa consoeur. Il écoutait néanmoins son dialogue avec une malheureuse. La magicienne lui posait des questions directes sur Causant, pressée d’arriver à ses fins. Une approche beaucoup trop franche au goût de Main-d’Ombre. Elle indiquait clairement son objectif, détruisant toute crédibilité qu’aurait put avoir leurs nouvelles couvertures. Pourtant il n’intervint pas. Cela fut bien sûr à cause de ses mouvements d’humeurs actuels, résultantes de sa fatigue, du stress et du manque de compréhension avec sa partenaire, mais surtout parce qu’il était troublé.

  La tribu de Main-d’Ombre vivait dans un des recoins les plus reculés des Marais Noirs, entre bayous et mangroves. Les ressources y étaient rare et la faune, voir la flore, éminemment dangereuses. Un milieu où l’on ne pouvait ignorer aucun mécanisme de survie. C’est donc tout naturel qu’une espèce principalement carnivore, résistante à la majorité des germes comme des toxines, y fut également charognard. Or cela commençait à faire longtemps que le reptile n’avait pas mangé, d’autant plus que la froideur de Soirétoile et les épreuves traversées dans l’après-midi augmentaient considérablement ses besoins. Il salivait donc abondamment à cause de cette délicieuse odeur de putréfaction et la vue de ces membres tuméfiés, promesses des plus goûteux sucs, excitait ses instincts le plus primitifs.

  Il savait bien sûr que mordre à pleines dents dans le bras d’un quidam, même lépreux, était difficilement justifiable. Il avait également tôt fait de comprendre que l’on ne s’attirait que des réactions négatives si l’on dégustait une bonne charogne devant une Peau-Molle, bien qu’on ne le prive en rien et qu’il soit finalement assez content d’en être débarrassé. Et il était convaincu que s’il ouvrait la bouche, ses appétits seraient immédiatement décelés. Il se tint  donc coi, laissant l’humaine faire à son idée. Ce qui ne l’empêcha de remarquer qu’un s’éloignait avant de recevoir son aumône.


Il commença par réveiller l’Œil du Rat, afin de suivre la suspecte progression en dépit de la faible luminosité. Le tapetum lucidum de ses rétines se mit à flamboyer, réfléchissant la lumière sur la cinabre fluorescéine de ses iris.

  

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Déluge d’aveux

  

  

20 Soirétoile, 3E425, 19h40

  
  
  Cognez pas, mon bon sir ! J’vais tout vous dégoiser. Parole, c’était prévu, supplia la jeune femme en essayant de se protéger le visage de ses bras menottés.
  — Prévu ? Que me dites vous là ! Je ne suis pas d’humeur à ce qu’on se paye ma fiole !
  — C’est le lézard, pas ç’uis là, le petit, qui nous à dis de tout déballer avant qu’vous vous fâchiez.
  — Et bien vide ton sac, et commence par le début, la pressa Jeralsem, optant pour un impératif menaçant.

  — Mon blaze, c’est Vinissia. C’était y à deux jours. Riton l‘ borgne, il est passé dans… la rue des Fleurs de Nuits, avoua-t-elle en baissant les yeux. Tard le soir, alors qu’il est plutôt du jour, vous savez ? Y cherchait une rousse courageuse pour un travail spécial. Moi j’aime pas trop ça mais y’avait dix septims à la clé, alors j’y ai d’mandé c’que c’était. Et y m’dit qu’il fallait juste m’ballader avec certaines frusques. Qui pouvait y avoir des risques mais qu’normalement, on s’frait que secouer un peu. Dix beaux jaunets, vous vous rendez compte ! Sans même avoir à…éluda-t-elle en rougissant de manière curieusement naïve.

  — J’ai compris. Allez enchaîne, dépêche toi.
  — J’devais attendre au Café des Gladiateurs, avec ce Sang-gourd là, dit-elle en désignant l’Argonien prisonnier. Même qu’on nous avait ouvert une ardoise. On d’vais juste n’pas s’pinter ni causer d’nous même. Et tout à l’heure, y a un marmot de pas dix ans qu’est venu nous dire de nous rendre fissa à l’écurie du Temple principal. Le pa-la-fri-nier, articula-t-elle lentement, ch’ais pas s’il a été graissé ou s’il était simplement pas là. Mais par contre, y avait le lézard, l’autre, le petit, et parole que c’est la première fois qu’j’l’entravais, votre honneur. Il à échanger ses fringues qui pues avec celle de Sent-le-bourrin, c’est comme cela qu’il a appelé le lézard, celui qui dort encore. Même que moi j’étais Malicieuse, ce qu’est plutôt sympa je trouve et…

  — Tu vas finir tes putains de conneries et cracher ce que je veux savoir ?
  — D’accord, d’accord, ne cognez pas ! Ben, j’ai bientôt fini. C’est là qu’il a donné les consignes. Qu’on devait vous balader à travers la ville, en étant discret mais pas trop. Qu’on devait faire quêques détours, r’venir sur nos pas et entrer dans des tavernes pour sortir par derrière. Fallait juste pas qu’on retourne aux arènes, c’est tout. Et pis moi, j’devais mettre ces gantelets qu’j’avais avec mes fringues et jamais les enlever. Alors il a payé le boulot, tout d’avance, vous vous rendez compte ? Et pis on a dut attendre un peu et il est r’venu avec une Damoiselle. Défiante qu’elle s’appelle, j’me souviens bien. J’ai du changer mon vieux manteau avec elle contre celui-là, qui est bien plus joli alors j’étais contente. Mais elle avait peur qu’j’l’abime et elle a bien dit que je devais lui rendre. Maintenant, elle va être furieuse car il est tout froissé et crotté de partout, mais c’est que vous m’avez fait tomber, c’est pas de ma faute. Et je devais prendre son bidet aussi, qui s’appelle Chillot mais j’sais pas ce que ça veut dire. Et elle avait peur qu’je lui fasse mal, car c’est celui d’son seul copain, qu’elle disait. Mais je sais pas si c’est du lézard qu’elle causait, je crois que non.


  La prolixe délatrice reprit sa respiration, estima qu’elle ne se ferait sûrement pas trop démolir ce soir-là, et osa s’enquérir d’une voix toute timide.
  — Voilà, j’vous ai tout dis, parole. Dites, j’pourrai garder mes pièces ? J’ferai ce que vous voulez…

Modifié par Ygonaar, 01 août 2009 - 20:41.


#134 Trias

Trias

Posté 14 juillet 2009 - 01:22

Toucher du bois

20 Soirétoile, 3E425, 19h50



La menue silhouette de la jeune femme fit quelques pas, puis s’évanouît, se fondant dans l’ouverture de son propre taudis.

Causant ne se l’expliquait pas. Pourquoi une femme ? Pourquoi avoir choisi une femme là où un deuxième pseudo-frère de Stendarr eut tellement mieux convenu ? Voyons, qui était susceptible de lui en vouloir ces temps cis ? D’avides collectionneurs, il en avait déjà vus ; la garde impériale, il ne souhaitait point les revoir ; la catin vampire, qui jamais n’oserait s’aventurer ici ; la guilde des voleurs et... ahhh, oui, la guilde des mages !

Une moue de déplaisir se composa sur ses joues. Machinalement, il joua de ses doigts sur son anneau : il lui faudrait être méfiant, désormais. Néanmoins, il n’abandonnerait pas son instrument. Il lui fallait poursuivre sa réflexion.  

La crécelle du bossu retentit, en un son rauque, rustre et rude, trop habituel en ces lieux pour que l’on s’en soucie. Mais Causant savait que le message de son complice ne tomberait pas dans sourdes oreilles. Une diversion, voilà ce qui l’aiderait à récupérer l’accompagnant de ses ritournelles. La neutralisation de l’argonien cadrerait parfaitement dans ses besoins.

Il sourit à son complice.
— Distingué Lazare... un ultime, héroïque et admirable sauvetage m’attends...
Ledit Lazare plissa les yeux, comme si le décryptage des propos du barde accaparait soudain des capacités cognitives. Enfin, il lorgna vers lui, puis lança, dubitatif.
— Ca s’mange, ça ?

La rouquine était ressortie du cabanon, scrutant les alentours tandis que sa guide lépreuse regagnait son propre refuge, d’un pas hanté. L’heure de consommer du varan en brochette était venue.


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Le son de la crécelle retentit, rauque, rustre et rude. Mais ses échos ne retombèrent pas dans les oreilles de sourds. Parmi les nombreux ladres qui s’étaient assemblés, quatre échangèrent un regard. Le frère argonien était devant eux distribuant denrées et autres douceurs d’en haut à leurs pairs.

L’un d’entre eux s’écarta, contourna le prodigue lézard puis le héla.
— Hé, vieux ! Y’a t’y pas que tu aurais pas de l’herbe des fois ? Hein ?

Les deux autres redressèrent leurs écuelles à hauteur de leurs bouches, puis soufflèrent. Rares auraient été ceux qui auraient pu repérer la sarbacane sculptée dans le bois des gamelles, idéale dissimulation pour une arme aussi simple.

Deux dards filèrent vers le dos de Main-d’Ombre pendant que le quatrième larron gagnait l’échelle de corde, dans une course boiteuse et clopinante. L'argonien ressentit à la seconde même une injonction pressante, urgente et alarmée résonner dans son esprit, alors que l'emplacement des trois malandrins lointains s'imposait mystérieusement à lui.  

« Attention ! »


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La magicienne s’était retournée, aux aguets, scrutant la lointaine entrée du puit d’un oeil anxieux. Les frères-bots, comme on les appelait, remplissaient leur rôle dans un tumulte certain.

Le mendiant se précipita vers le cabanon, usant de toute la célérité et de la discrétion dont il était capable. La magicienne ne bougea pas. Il fallait continuer. S’il avait été un tant soit peu plus observateur, peut-être aurait-il remarqué l’éclat laiteux de ses cornées, tournées vers lui.

Là, il y était presque, le Luth était devant lui. Tendant la main, il s’en empara d’un geste brusque, fébrile. Cependant sa paume ne rencontra que le vide, traversant l’image de l’instrument comme s’il s’eut agi d’un fantôme. Soudain l’instrument se déforma, une sombre et hideuse liane en jaillissant pour enserrer l’avant-bras qui lui était offert.

Le ladre hurla.

La magicienne se retourna, sourire jubilatoire aux lèvres.

— J’te tiens, mon gros ! Et sans plus attendre elle éleva la main. Le bossu sentit sa langue se coller à son palais, ses bras, devenus rigides comme du bois se plaquer contre un torse déjà raide. Il tomba au sol, paralysé.

Maelicia eut à peine le temps de réaliser que sa victime ne pouvait être Causant qu’une fléchette effleurait sa poitrine, manquant de peu son bras. Elle fit immédiatement volte-face, déviant d’un geste un tir de rattrapage qui l’eut autrement atteinte à la tête.

Causant, sarbacane à la main, jura : il avait parié que la sorcière s’avancerait vers son leurre. Peine perdue. Il n’aurait probablement pas de troisième chance. Et de fait, son troisième dard ricocha dans les airs, comme s’il avait heurté quelque surface dure et invisible.

Confiante, la fausse acolyte éleva de nouveau le bras, droit vers le barde cette fois. L’anneau que portait Causant à sa main droite émit alors une intense lueur violacée tandis qu’une Maelicia éberluée se retrouvait projetée dans les airs, victime de son propre sortilège.

Elle resta ainsi au sol quelques instants, sonnée, avant que sa conscience ne reprenne le dessus et ne l’incite à rouler sur le côté. Bien lui en prit : un autre projectile heurtait déjà la roche, juste là où sa jambe se trouvait auparavant. Le temps de regarder autour d’elle qu’un pouilleux frêle au nez pointu se jetait sur elle, une sorte d’écuelle percée d’un tube à la main. Instinctivement, elle voulut le repousser d’une onde télékinétique. Comble de la surprise, elle se retrouva de nouveau quelques mètres plus loin, le corps endolori et raidi par le choc.

Autour d'eux, une supersticieuse panique gagnait les mézaux, fuyant de toute la vitesse de leurs insensibles membres les mystérieux et violents phénomènes qui se produisaient. Certains se signaient, d'autre se plaquaient à terre ou encore détalaient dans d'irréfléchies directions. Il fallut quelques secondes à Maelicia pour se mobiliser à nouveau, chacun de ses bras lui semblant transformé en manches douloureux. Quelques secondes de trop : le damné mendiant bondit, elle était faite. Un ultime éclair lumineux illumina les gantelets de l'étudiante tandis qu’une aiguille se plantait dans son torse.

— Ventre saint-gris ! Te voilà faite qui croyait prendre, sorcière ! exulta Causant.

Il n’avait pas fini sa phrase qu’un lourd rocher en forme de dalle venait lui aplatir les membres, l’immobilisant. La frimousse poussiéreuse de la magicienne, à qui il n’aurait pas donné plus d’une vingtaine d’années, se dressa au dessus de lui.

— On dirait que non. J’touche du bois, comme on dit.

Les pupilles de Causant se dilatèrent alors : sous la houppelande de la magicienne, se dessinait la forme d’un Luth. Une courte fléchette de métal était fichée dans le bois de ce dernier. La rouquine, bien que plissant un peu les yeux, sourit.

— Alors m'sieur Causant, pourquoi qu’vous voulez pas chanter ?

Modifié par Trias, 15 juillet 2009 - 21:41.


#135 Arakis

Arakis

Posté 26 juillet 2009 - 17:21

Cap' ou pas Cap' ?

20 Soirétoile, 3E431, 19h50




Saerileth était debout devant le bord du puit, hésitant sincérement à s'engouffrer dedans, si on lui avait dit qu'elle arriverait jusque là ... Tout avait commencé d'une façon banale, un type habillé en loques lui avait remit une lettre cachetée, celle-ci l'invitait à la Cité Impériale pour un contrat, proposé avec des termes alléchants tels que "rétribution conséquentes", "nous ne lésinerons pas sur votre récompense", "vos efforts seront récompensés à leur juste mérite". Impossible de résister à ça, elle s'était tout de suite mise en route, le hic c'était qu'en arrivant non loin de la Cité Impériale elle avait eu la désagréable surprise de voir la ville sous blocus mais un contrat était un contrat, elle avait donc fait appel à un vieil ami contrebandier répondant au nom de Calahan, elle les revoyaient encore sur le bord du lac ils avaient récupérés la carcasse de la barque du Vieux Thom, celui-ci avait tenté de forcer le blocus en essayant de prendre les galères impériales de vitesse, il s'était fait détruire son embarcation par les balistes montées sur lesdites galères, voyant son navire couler il avait prit la fuite à la nage laissant couler sa cargaison, depuis la coque brisée et renversé de la barque flottait sur la surface du lac. Calahan avait suggéré de prendre les restes de la barque pour se dissimuler aux yeux des marins et son amulette de brouille-magie pour passer inaperçu aux sorts de détection, si ils avançaient relativement lentement ils passeraient inaperçus.


Le soir même ils avaient tractés la barque grâce à un carreau relié à une corde qu'elle avait planté dans la coque, ils s'étaient dévêtues avant de glisser leurs effets dans des sacs étanches, ils avaient poussés la barque à l'eau et s'étaient glissés en dessous, battant légèrement des pieds pour donner une impulsion faisant glisser la barque comme si elle dérivait au gré du courant. Tous deux avaient retenues leurs souffle quand ils avaient entendu le bruit de l'étrave des galères qui fendaient l'eau prés d'eux, une fois celle-ci passée ils avaient accélérés le rythme pour rapidement rejoindre la berge, ils avaient abandonné la barque et s'étaient dépêchés de se mettre à l'abri des regards d'éventuels guetteurs avant de repasser leur effets et de se séparer, elle se rendant à son rendez-vous et Calahan à ses affaires louches.


La rencontre avait été brève, un rougegarde nerveux lui avait donné une enveloppe dans laquelle elle avait trouvé ses informations ainsi qu'une clef à laquelle était accroché une plaquette numérotée, elle avait relu trois fois la lettre histoire d'être sur que ne se moque pas d'elle, on lui demandait de faire le gué et si elle le voyait de suivre un argonien aux frasques étranges, de trouver ce qu'il cherchait, une fois que ce serait fait elle ferait son rapport, à ce moment là elle devrait se servir de la clef à la consigne du port, le casier correspondant à la clef contiendrait sa récompense, on lui avait assigné la surveillance de l'Arborétum. Après tout un contrat était un contrat et puis pour que l'employeur prenne le risque qu'elle puisse se sauver avec sa récompense sans avoir rien fait piquait sa curiosité, elle avait donc fait le gué à l'Arborétum, s'ennuyant royalement, astiquant chacune de ses armes dans une tentative de tuer l'ennui pour le moins vaine.


Alors que la nuit commençait à recouvrir la cité elle s'apprêtait à aller à une auberge pour y passer la nuit quand elle avait vu ledit argonien accompagné d'une brétonne, elle les avait suivit, se demandant pourquoi ils se rendaient à l'hospice, elle avait failli les perdre de vue quand l'argonien s'était esquivé par une porte dérobée, restant à bonne distance elle les avait suivit jusqu'au puit, maintenant qu'elle était devant elle hésitait, un contrat était une chose mais la lèpre ... Farfouillant dans son barda elle en sortit une vieille chemise défraîchie et en découpa deux longues bandes avec sa machette, elle passa la première autour de son visage et enroula son bras vivant avec l'autre bande de tissu, malgré cette protection improvisé elle hésita, elle s'apprêtait à tirer à pile ou face pour savoir si elle descendait ou pas quand elle entendit un bruit qu'elle connaissait bien alors qu'il retentissait sur les parois de pierres, le bruit d'une sarbacane, elle jura entre ses dents, enleva son manteau pour ls poser dans un coin, le camouflant comme elle pouvait, défit l'une des boucles qui retenaient son arbalète, d'un seul mouvement du bras elle pourrait la dégainer et faire feu. Elle empoigna le premier barreau de l'échelle et commença à descendre dans les profondeurs.

Modifié par Arakis, 02 avril 2011 - 10:18.


#136 Ygonaar

Ygonaar

Posté 27 juillet 2009 - 21:25

Lézard tartare


  

  

20 Soirétoile, 3E425, 19h50

  

  Le contact de la pâte au phosphore rassurait quelque peu le reptile. Il la maintenait depuis déjà quelques minutes au creux de sa paume, tel un prestidigitateur masquant une pièce de monnaie. Il répugnait en général utiliser deux fois le même procédé dans la même ville à des intervalles de temps trop court. Il était toujours hanté par l’obscur appréhension qu’une intelligence supérieure est bien renseignée fasse le rapprochement avec ses vicissitudes du Sang du Guar, qu’il y ait un dossier « l’Argonien à la boulette éclair ». Mais la foule l’entourant était acclimatée à une éternelle pénombre, voir une franche obscurité. Il n’y avait guère de doute qu’un flash lumineux fut extrêmement efficace.

  Les angoisses de Main-d’Ombre tenaient également de son indécision. Il sentait confusément que la situation devenait malsaine, surtout depuis le retour du lépreux qui s’était esquivé sans recevoir de présent. Ce dernier avait trop d’assurance, semblait trop le jauger, pour qu’il n’ait pas quelques solides renforts et projets de traquenard. D’un autre coté, il se méfiait de ses instincts carnivores et de sa propension à l’attaque préventive parfois injustifiée. Une action violente malencontreuse briserait peut-être toute opportunité de négociations éventuelles avec Causant. Et pourrait se transformer en émeute généralisée, avec une magicienne diminuée au beau milieu…

  
  — Hé, vieux ! Y’a t’y pas que tu aurais pas de l’herbe des fois ? Hein ?

  Pourquoi le ladre suspect lui demandait cela, alors qu’il distribuait justement du tabac ? Etait-ce un code ? Que fallait-il…Bruit d’air expulsé… Sarbacane ! Les réflexes patiemment affûtés du saurien jouèrent. Il se laissa tomber au sol, fracassant sa boulette qui illumina la caverne comme elle ne le fût probablement jamais auparavant. Prenant appuis sur sa main maintenant libre, il pivota horizontalement sur lui-même, projetant vigoureusement sa queue dans les jambes du lépreux suspect.

  « Attention ! » Un sentiment de danger curieusement étranger émergea dans son esprit, associé à la présence de trois quidams particuliers dans la foule des parias qui l’entouraient. En temps normal, le matois aurait détalé à toutes jambes pour rejoindre la magicienne, mais dans la situation présente, il vaudrait peut-être mieux neutraliser les assaillants. Ouvrant enfin les paupières, il projeta sa lanterne dans le dos du malandrin qui entreprenait l’ascension de l’échelle de corde. La flasque d’huile se brisa et s’enflamma sur le malheureux. Sans attendre de voir le résultat de son tir, Main-d’Ombre se précipita vers les virtuoses de la fléchette encore éberlués et assena un violent coups de pied dans le genou du premier.

  
  Mal lui en prit. La stupeur laissant la place à la panique, l’assemblé de malade se mit à fuir à l’aveuglette. Un jeune ladre percuta l’Argonien, le faisant choir. Ce dernier n’eut pas le temps de se retourner qu’une femme obèse lui tomba dessus. Le saurien mordit vainement ses moignons tuméfiés pour la faire dégager. Il extirpa finalement un bras pour lui fouailler les reins avec une dague. Il n’eut guère le loisir de réitérer son geste, le quatrième forban lui écrasant les doigts d’un coup de sabot vengeur. Alors que le pendard assurait sa prise, son complice vint en renfort malgré sa jambe présentant un angle insolite et se mit à marteler consciencieusement la tête de sa victime avec sa lourde gamelle de bois…

Modifié par Ygonaar, 27 juillet 2009 - 21:29.


#137 Arakis

Arakis

Posté 28 juillet 2009 - 17:17

Il faut sauvez l'Argonien Main D'Ombre


20 Soirétoile, 3E431, 19h50



Saerileth descendait l'échelle en serrant les dents, l'échelle bougeait un peu trop à son goût et les parois de pierres lisses comme une savonnette ajoutait encore à son angoisse, elle n'aurait même pas de quoi freiner sa course, elle savait que son bras droit était suffisamment fort pour soulever son arbalète sans problème mais de la à se planter dans la roche et y rester fixé en supportant son poids ... Elle n'était pas pressé de le découvrir.


Arrivé aux trois quarts des barreaux elle sentit que l'on tirait sur le bas, jetant un oeil en bas bien qu'elle sentait qu'elle allait le regretter et en effet une lumière aveuglante monta des profondeurs, secouant la tête elle coinca son bras pourvu d'un gant improvisé dans un bareau et se frotta l'oeil vivant, l'autre n'en avait guère besoin, elle pappillona des paupières, une fois qu'elle eu l'impression de revoir correctement elle rejeta un coup d'oeil en bas, ce qu'elle vit lui colla un frisson, en contrebas se tenait une torche humaine, une seconde elle hésita à remonter l'échelle à toute vitesse, foutu Arkay de m.... dans quoi je me suis embarqué moi. Serrant encore plus les dents elle continua à descendre, les hurlements de l'homme se consumant résonnaient dans le puit et donnaient l'impression qu'un peuple entier se consumait, voyant qu'elle était suffisamment prés du sol elle lâcha prise et se réceptionna en pliant les genoux,décidément dans quoi je me suis fourré moi, je sens que je vais le regretter.


Dégainant son arbalète elle l'arma et regarda alentour, une confusion ambiante régnait, ce qui retient le plus son attention fut l'argonien qu'on lui avait demandé de suivre en train de se faire bastonner par plusieurs lépreux, elle leva le bras, ferma son oeil droit et tira, l'écuelle que le lépreux à la jambe cassé avait détourné de son usage premier pour s'en servir comme outil contondant lui fut arrachée des mains, voila pourquoi elle avait toujours préféré les arbalètes, le rechargement était certes plus long (malgré le dispositif qu'elle avait installé sur la sienne) mais la puissance du tir compensait largement ce désavantage. Appuyant sur la gâchette mais cette fois vers l'avant elle déclenchât le mécanisme qu'elle avait fait monté sur la gorge, celui-ci libérait deux ressorts qui repoussait l'encoche vers l'autre extrémité du fût où son autre main l'attendait, elle y insérait un nouveau carreau et au passage enclenchait le mécanisme qui empêchait l'arc de se détendre et donc en même temps de tirer, le mécanisme du ressort requierait pour une personne normale l'usage de ses deux bras, c'était plus un inconvénient quand on pouvait retendre à main nues mais dans son cas c'était différent et elle exploitait cette avantage.


Visant une deuxième fois elle tira à nouveau, l'ancien possesseur de gamelle contendante se retrouva un carreau planté dans l'épaule, de son autre main elle prit deux couteaux de lancers, les soupesa puis les lança garde la première en plein front chacun, ce n'était pas ça qui allait les assommer, d'autant qu'elle avait lancé avec la "mauvaise" main, elle avait fait ça histoire d'avoir le temps de ranger son arbalète, une fois ceci fait elle dégaina sa machette, depuis qu'elle en avait fait l'acquisition lors d'une expédition au Marais Noir, les gens du peuple étaient toujours impressionnés par une lame pareille, l'effet serait peut être encore meilleur si je mettais un masque avec mais bon on verra si j'arrive à sortir vivante d'ici, comme à l'habitude la large lame fit son petit effet et les deux truands semblaient hésiter à se jeter à l'assaut d'un adversaire armé de cette façon, elle même ne tenait pas à les tuer, non par pure éthique et moralité mais c'était toujours un moyen d'en savoir plus, si seulement cet argonien voulait bien se bouger, en cas de combat il serait dans ses pattes.

Modifié par Arakis, 02 avril 2011 - 10:18.


#138 Trias

Trias

Posté 31 juillet 2009 - 14:24

Présence facultative

20 Soirétoile, 3E425, 19h50




Merelin sentait les phalanges meurtries de l’homme bête, résistance sourde sous son pied, le manteau de ses écailles glissant au contact du sabot. Il haïssait les argoniens, et les hurlements  de Crito (qui se consumait encore, à quelques pieds de là !) exacerbaient son ire. En l’espace de quelques instants le prétendu moine venait de brûler vif un complice de longue date, et d'éviscérer la grosse Baeabiana, une aveugle vieille et obèse, mais toujours prompte à se mobiliser à l’heure des repas.

Serrant les dents, ignorant les cris de panique des autres lépreux, il prit appui sur le membre prisonnier de l’argonien et entreprit de lui démolir les côtes de son autre sabot. Après quelques instants — il n’aurait su dire lequel du poids de Baebiana, du matraquage de Fior (son complice) ou de son propre déchaînement en était responsable — l’agitation de leur victime sembla diminuer, signe tangible de son affaiblissement.

Il allait pousser un grognement de satisfaction lorsque le terrifiant sifflement d’un carreau d’arbalète retentit juste à sa gauche, emportant la gamelle-sarbacane de Fior, le manquant de peu. Les trois ladres eurent à peine le temps de sursauter qu’un impact  monstrueux ponctuait un deuxième tir, emportant l’un des malheureux. La vision troublée des deux derniers conspirateurs s’accommodait à peine à la frêle silhouette d’une sorte de pirate, étrangement charpentée et armée jusqu’aux dents que deux projectiles contondants heurtaient douloureusement leurs fronts.

Alors que ce qu’ils identifièrent comme les manches de dagues de lancer retombaient au sol, les deux lépreux encore valides n’en comprirent que trop bien le message : ils détalèrent à toutes jambes, avec un ensemble touchant.

Désormais, seuls les râles du brûlé et les gémissements agoniques de l’imposante matrone retentissaient sur l’entrée dévastée. Même la cible de l'arbalète de Saerileth s'éloignait lentement, rampant malgré sa blessure. Le théâtre de la brutale escarmouche avait été déserté.




ж ж ж
Causeries de coin du feu

20 Soirétoile, 3E425, 19h55




— Oh ! Mais c’eut été avec grand plaisir, au contraire, Ô perle de la Brétonie. Quel laiüs le grand Jeremius pourrait entonner pour ravir, rafraichir et faire pétiller vos oreilles ?

Maelicia cilla. Une vaste dalle de pierre, plate mais relativement lourde clouait le barde au sol, pesant sur ses membres, l'immobilisant. Une anfractuosité naturelle du terrain dégageait quelque peu son thorax. Il était fait, et se riait d’elle malgré tout.

— Arrêtez vos conneries, le coupa-t’elle sèchement. Z’êtes Causant , j’le sais. Et c’est moi qui vais poser les questions d’accord ? Comment vous savez qu’j’suis brétonne, d’abord ?

Causant s’humecta les lèvres et scruta le minois méfiant qui l’observait, tendu. Le visage de la rouquine était empreint d’une naïveté certaine, à peine démentie par l’éclat de ses pupilles. Mage, elle était certainement intelligente à titre studieux... mais peut-être lui faisait-il défaut la vivacité requise dans ce type de situation. Ainsi qu’un certain degré de maîtrise de soi...

— Simple supputation, avoua-t’il alors, testant son interlocutrice. Vous ne l’avez confirmée qu’à l’instant. La mâchoire d'albâtre de la bretonne se contracta alors.
— Vous m’prenez pour une cruche ?
— Une jolie, magnifique et désirable cruche dans ce cas. Je dois avouer que dans le domaine des pots, vous êtes la fine fleur... modula le roublard, qui commençait à croire qu’il pourrait vraiment gagner autant de temps qu’il l’espérait.

La péronnelle parut alors ruminer quelque chose d’inintelligible, puis se tut. Soudain, elle se pencha sur la droite, et Causant sentit son poignet agrippé par des mains gantées, puis qu’on lui ôtait son anneau d’une manière qui se serait sans doute voulue brutale. L’instant d’après, la Bague de Namira scintillait entre les griffes de sa geôlière. Alors qu'elle en jouait nonchalamment entre ses doigts, un fugitif éclair de désespoir passa dans le regard du mendiant, aussitôt réprimé. La brétonne s’assit en tailleur sur la dalle, juste au dessus lui, accentuant la pression de la roche.

— Pas mal, ce bijou, souffla-t’elle, à nouveau calme. Bien utile en tout cas.
— Simple cadeau de famille, rétorqua aussitôt Causant, Ô prunelle des cavernes...
— Ce s’rait dommage... qu’elle s’abîme... répliqua-t’elle, ignorant sa dernière pique.
Causant se permit un reniflement méprisant. Son anneau était rien moins qu’un artefact daedrique. Il était inconcevable qu’une péronnelle dans son genre soit capable de l’endommager.

— Surtout pour un cadeau de famille, renchérit la damnée, comme si elle lisait ses pensées. J’ai toujours aimé les choses qui brillent,...

L’anneau s’éleva dans les airs, à quelques pouces seulement des paumes de sa tortionnaire, avançant pour léviter doucement jusque sous le nez du barde. La monture était particulièrement épaisse, faîte d’un alliage d’or particulièrement costaud, sertie  d’un joyau violet aux reflets irisés. Une flamme orangée apparut, léchant les glyphes en ornant le pourtour. Comme le roublard l’avait prévu, l’objet se teinta alors d’une lueur violacée, mais résista.

La rouquine fronça alors les sourcils, et la chaleur s’intensifia tandis que des flammèches bleutées dansaient autour du joyau. Ses yeux se plantèrent dans ceux de son captif.
On n'peut pas détruire un artefact daedrique, hein ? C'est c'que vous pensez, n'est-ce pas ? Ben j'vais préciser votre pensée : on n'peut pas détruire son essence tant que le Prince qui l'a créé n'est pas détruit. Mais son enveloppe, oui. Et dans ce cas l'essence de l'artefact se perd dans l'Oblivion, puis réapparait lorsqu'un porteur plus digne se montre. Ce que vous n'êtes plus....

Et, à la grande surprise du mendiant, l’anneau rougit, puis blanchit lentement. Alors que la température devenait insupportable, Causant sentit ses poils se racornir, et sa peau se parcheminer sous l’effet du feu magique, tout proche. La magicienne abaissa de nouveau son regard vers le sien

— J’avais jamais réalisé comme vous étiez... brillant, tout à coup...

Sous les yeux horrifiés du mendiant, la partie inférieure du montant de la bague, chauffée à blanc, commença à se liquéfier.
— Arrêtez ! Arrêtez ! hurla-t’il, mais trop tard. Une goutte de métal en fusion perla puis tomba sur sa joue, la perçant dans une atroce douleur accompagnée d’une discrète volute de fumée noire.
— Oups, lâcha simplement la magicienne. Alors, z’en êtes où, Jeremius ?
— Aaarrggg ! Haaaaaarg ! hurla-t’il en se démenant vainement. Arrêtez ! ARRÊTEZ ! Je vous en conjure, arrêtez ! Je vous dirais tout !

— Où est le Sceptre de Sh’éam ?
— Je... je ne l’ai plus ! Une autre goutte de liquide brûlant s’écrasa sur le visage du mendiant.
— Ouarrrgggg ! C’est vrai ! Je le jure sur Namira ! Je l’ai déjà vendu ! A un type en carrosse, le quinze de Sombreciel !

La vente du bâton expliquait parfaitement le comportement  évitant du mendiant, mais Maelicia n’abrégea pas immédiatement son supplice. Elle se fit préciser les personnes présentes lors de la vente (un valet encapuchonné, de taille moyenne, avec un accent du nord, en livrée impériale), le fait que le mendiant n’avait point vu le visage de l’homme du carrosse (dissimulé derrière un rideau), l’apparence du véhicule (fermé, des armoiries évoquant curieusement un dragon présentes sur le châssis) et le lieu ainsi que le montant de la transaction (les jardins du quartier du temple, de nuit, contre un millier de septims sonnants et trébuchants).

Lorsqu’elle eut obtenu satisfaction, elle le fixa avec une moue étrangement amusée, puis claqua des doigts. L’illusion de l’anneau se consumant et la douleur de la peau faussement brûlée se dissipèrent d’un seul coup, et la magicienne éclata de rire. Magnanime, elle remit la vraie bague au doigt de Causant (après quelques hésitations, il est vrai). Alors que le talisman protecteur retrouvait son propriétaire, l'influence de l'illusionniste se dissipa instantanément. Le barde réalisa qu'il avait été manipulé de bout en bout.

— Z’apprendrez à pas sous-estimer une mage, la prochaine fois, m’sieur Jérémiade, fanfaronna-t'elle. J’laisse vos copains vous sortir de là dessous. Au revoir !

Et elle repartit, satisfaite d’elle même, vers l’entrée de la léproserie, ignorant les ladres qui se terraient dans leurs cabanons, terrifiés.


ж ж ж



Alors qu’elle était à mi-chemin, elle s’aperçut que sa démarche devenait instable, curieusement chaloupée, et que les paupières lui pesaient. Alors qu’une envie irrésistible de s’endormir l’envahissait, elle se rappela que l’une des fléchettes du mendiant l’avait éraflée. Soudainement inquiète, elle se palpa la poitrine : un liquide chaud, sombre et gluant avait imprégné le tissu. Sans doute avait-elle saigné plus qu’elle ne le pensait, sous l’effet de l’adrénaline.

A son corps défendant, l’étudiante se força à reprendre le chemin de l’échelle de corde. Il lui fallait rejoindre Danse-mot. Mais à chaque pas, ses paupières devenaient un peu plus lourdes, son champs de vision s’obscurcissait davantage et le murmure des vents souterrains se muait toujours plus en berceuse. Alors que l'amplitude de ses foulées diminuaient, Maelicia se prit à rêver d’un bon lit...

Modifié par Trias, 24 octobre 2009 - 22:58.


#139 Arakis

Arakis

Posté 01 août 2009 - 18:10

Docteur S grille un plomb



20 Soirétoile, 3E431, 19h51



Saerileth eu un demi sourire en voyant les lépreux se carapater, c'était déjà une bonne chose de faite, elle rengaina sa machette tout en la laissant à moitié sortie histoire de dissuader les curieux d'approcher, de toutes façons au vu de ses prestations de tirs il y avait peu de chance qu'on vienne lui chercher des noises, la plupart du temps voir une femme tenir une arbalète lourde à une seule main et tirer juste à chaque coups suffisait à faire taire les protestations ou tentatives d'intervention.


S'agenouillant auprès de l'argonien qu'elle venait de sauver elle le regarda en ensemble après avoir repoussé la grosse bonne femme qui semblait avoir élue domicile dans son inconscience sur lui et ramassé ses dagues, malgré leur état de malade les lépreux l'avaient copieusement passés à tabac, elle n'avait jamais soigné d'argoniens et ignorait royalement si il y avait des différences ou pas vis à vis de leur système sanguin ou musculaire, autrement dit elle ne pouvait faire que le minimum sans risquer de le mettre plus en danger qu'il ne l'était, elle se contenta de découpait une nouvelle bande de la chemise qu'elle avait déjà découper auparavant pour se confectionner un masque et l'enrouler autour d'une blessure qui semblait avoir percé la couche d'écailles au niveau du bras gauche. Une fois qu'elle eu finit ça elle l'achemina le plus doucement possible vers une paroi solide pour l'y adosser. Alors qu'elle contemplait ce qu'il restait de sa chemise, c'est à dire par grand chose vu qu'elle avait dù amputer les deux manches et jusqu'au milieu des reins, je me demande si je la remettrais celle-là, dommage c'était Jexfarel qui me l'avait offerte.


Un bruit la tira de ses pensés, avisant la gamelle sarbacane non loin, elle en extirpa son carreau et le chargea dans son arbalète, progressant prudemment, l'arme braquée là où portait son regard. Après une petite minute de recherche elle trouva enfin la raison de ce bruit, une jeune brétonne allongé par terre, habillé d'une robe bleu comme celle que portait les compagnon de la guilde à l'Université Arcane (elle avait déjà du aller là bas pour un cambriolage avec Calahan et une voleuse un peu bizarre dotée d'une chance indécente à tous les jeux de hasard, la mission avait d'ailleurs failli être un fiasco totale quand Calahan avait ouvert une serrure à sa façon, c'est à dire en versant de l'acide dans le mécanisme, ce qu'il n'avait pas prévu c'était que le mécanisme de la serrure avait fondu, mais pas le penne lui même, elle avait été alors forcé de casser l'angle de mur avec son bras droit pour pouvoir soulever le penne avec sa dague.) Ladite robe était complété par un morceau de tissu découpé qui se voulait ressembler à un voile de nonne mais qui, aux yeux de Saerileth, la faisait plus ressembler à une de ses vieilles femmes austères vêtues intégralement de noir.


Alors qu'elle approchait toujours silencieusement elle entendit un autre bruit, un bruit rythmique, relativement léger, un peu comme une sorte de petit grognement, puis soudain elle comprit, la brétonne affalée par terre ronflait. Pou une raison étrange cela eu le don de la mettre sur les nerfs, elle descendait dans un putain de puit de l'enfer peuplé de lépreux et elle ne savait quoi encore, blessait mortellement un homme qu'elle ne connaissait même pas et qui avait eu juste le défaut d'avoir tapé sur la mauvaise personne, pour pas mal de mercenaire sa n'avait aucune différence mais elle sa en avait une. Empoignant la dormeuse par le col elle la retourna et lui asséna une paire de claques, voyant que sa ne suffisait pas elle continua de plus belle, histoire de ne pas lui déboîter la mâchoire sans le vouloir elle utilisa sa main gauche, une fois qu'elle eu donné une série qui aurait fait honte à une ménagère nordique en colère elle laissa retomber la brétonne, attendant de voir si sa avait son petit effet.

Modifié par Arakis, 02 avril 2011 - 10:19.


#140 Trias

Trias

Posté 02 août 2009 - 10:16

La bataille des douze chiffons

20 Soirétoile, 3E425, 20h00




Le souffle du vent, froid et pénétrant faisant voltiger les éléments. La poussière, blanche et humide, omniprésente, jouet du cyclone. Des cieux sombres et obscurs, en proie aux Zéphyrs. L’océan, uni tel un lac d’encre, et pourtant agité.

Maelicia était en plein milieu d’une tempête tropicale. Le sable fin et blanc de la plage valsait jusque dans ses narines sous l’effet du vent, accompagné d’une désagréable sensation d’humidité. D’ailleurs, les plus hautes vagues de cette mer déchaînée grimpaient jusqu’à elle, étrangement chaudes, lui détrempant tout le haut de son bliaud.

La tempête devint progressivement plus violente, comme si Talos lui même cherchait à l’engloutir. Mais la brétonne restait murée dans son carcan de sable, à plat ventre, narguant la furie du typhon.

« Cogne, vas-y cogne... » vitupéra-t’elle, splendide, pétrie d’orgueil, à l’encontre de ces nuages vengeurs.

Le vent lui hurla sa rancune, projetant sur ses joues une nuée de grêlons. Une première rafale heurta sa pommette gauche. Biblique, drapée dans sa dignité, Maelicia tendit sans un mot la joue droite. Ce fiéffé d’ouragan n’en éprouva nul remords, assénant une deuxième volée à sa cible ainsi offerte.

« Muffle » pensa Maelicia, mais la fureur de son assaillant élémentaire ne s’en démentit pas moins. En fait une sourde mais cuisante brûlure commençait à lui lacérer les joues, et allait en s’amplifiant. La tempête émit un ricanement  sonore (du moins, il lui sembla), puis reprit la flagellation.

L’étudiante se réveilla brutalement, les joues en feu.


ж ж ж



La chasseuse de prime écumait. Saisissant l’impudente par le col comme s’il se fut agit d’un fêtu de paille, elle la souleva et la retourna sans douceur. Le visage de la dormeuse resta étrangement serein, narquois lui sembla-t’il même. A voir sa peau pale et ses cheveux roux, fort peu communs en Cyrodiil, il s’agissait très probablement d’une étrangère, à peine entrée dans l’âge adulte.

Le crâne de l’étrangère, suspendu dans le vide par la prise de Saerileth, pencha alors vers l’arrière et sa bouche s’ouvrit toute grande pour résonner d’un discret, ténu mais néanmoins fantastiquement incongru ronflement. L’impériale, hors d’elle, asséna une première paire de claques à l’effrontée. Comble de l’humiliation, il lui parut que l’ensommeillée allait jusqu’à l’insulter.

« Cogne, vas-y, cogne... » provoqua-t’elle, dans un murmure presque inaudible. Puis elle reprit son ronflement.

Ceci, devait être l’évènement déclencheur de ce qu’on appellerait plus tard « la bataille des douze chiffons », évènement sans cesse commémoré par les individus les plus féminins de l’espèce humaine, mer et même Akaviroise : une volée de gifles s’abattit, drue, sur les joues de l’insultante dormeuse. Celles-ci, jusqu’ici d’une blancheur parée d’étudiés reflets de rose, se teintèrent d’un rouge beaucoup plus franc.

« Muffle »

Le bras droit de la dormeuse, jusqu’ici rétracté contre son torse, se détendit soudainement et heurta d’une ouverture la pommette gauche de Saerileth. Certes, le coup n’était ni puissant, ni bien ajusté ni vraiment volontaire ; néanmoins, la main attaquante était gantée, et c’est donc contre une plaque de métal que s’écrasa la joue de l’impériale.

Le visage en feu, Maelicia s’était éveillée en sursaut. Le première chose qu’elle vit fut un visage de femme aux traits durs, ses cheveux blonds militairement plaqués contre son crâne, sa peau basanée et couverte de cicatrices et d’éraflures diverses. Elle avait la tête tournée vers la gauche, et avait encore le poing gauche plaqué contre la (douloureuse) mâchoire de la bretonne, enveloppé en même temps dans des bandes blanches qui lui rappelèrent fortement les protections utilisées lors des pugilats. Elle semblait surprise.

Les yeux de Maelicia étincelèrent. N’écoutant que son courage, notre experte pugilliste administra un revers  en plein sur la joue opposée de sa correspondante, ce qui lui remit la tête droite. Avec un hoquet d’horreur notre étudiante constata qu’un objet brillant  scintillait sous la paupière gauche de son adversaire. Sa réaction, irréfléchie, fut trop rapide pour être évitée pour une opposante encore sous le coup de la surprise : alors qu’elle se recroquevillait sur elle même, les veines des gantelets de Sul-Narsil se parèrent d’éclats bleutés.  Tandis qu’un grondement subit annonçait la décharge, une brusque onde télékinétique propulsa soudain la boxeuse quelques mètres plus loin.

L’étudiante se releva d’un bond, apeurée, haletante. De fantasques créatures mythologiques surgirent dans sa cervelle embrumée.

— Quu qu quue... arrière, Sainte-dorée ! Foutez l'camps, tas d'mouise daedrique !

Une irrésistible envie de se dresser face à la Daedra, en un « Vous... ne passerez... pas ! » retentissant lui vint, mais elle songea qu'il lui aurait fallu avoir sous la main un pont et une barbe grise, éléments dont elle était fondamentalement dépourvue.

#141 Ygonaar

Ygonaar

Posté 02 août 2009 - 12:16

Bilans

  
  

    

20 Soirétoile, 3E425, 20h00



Boum… Boum… Boum… Ses tempes semblaient résonner sourdement à chaque pulsation cardiaque, se confondant avec le souvenir des coups assénés avec la lourde gamelle de bois. Son esprit essaya confusément de rassembler des brides de souvenirs… Le bâton… Causant… La sorcière… Les lépreux… Il ouvrit péniblement un œil à moitié tuméfié. Du sang commençait à goûter d’un bandage de fortune sur son front. Plusieurs épines de sa crête sagittale devaient être arrachées, s’il en croyait la douleur. Le liquide moite et chaud commençait à lui couler dans l’œil.

  
  L’Argonien se mura à nouveau dans son monde de douleur. Il fallait qu’il se concentre, qu’il se rappelle la démarche à suivre dans les conditions les plus critiques. Le sang d’abord, il fallait garder son sang pour ne pas perdre conscience, ensuite venait les plaies et enfin les os. Pour les os, se sera long et douloureux, il le savait. Il se mit à marmonner un mantra que sa mère avait patiemment gravé au cœur de son apprentissage, le conditionnement palliant heureusement au défaut de lucidité. La Sève se réveilla dans ses veines, les plaquettes proliférèrent de manière stupéfiante, parcourant les plus grandes artères comme la plus petites veinules pour colmater toutes les brèches, et stopper enfin la vicieuse hémorragie qui grandissait dans ses branchies intercostales.

  Main-d’Ombre sentait sa peau le tirailler de partout, sous l’effet de la cicatrisation et de l’inflammation. Le sang ne semblait toutefois plus disposer à lui noyer l’orbite. Un bonne chose, il pourrait essayer d’analyser son environnement le temps de pouvoir à nouveau faire appel à la Sève. Il ouvrit à nouveau son œil le plus valide. Il mit un certain à s’adapter à la pénombre maussade des mousses phosphorescentes, n’ayant plus la sensibilité lumineuse que lui conférait de l’Œil du Rat. L’assemblée des ladres s’était égayée mais il restait néanmoins trois corps dans son champ de vision. Son bourreau, tout d’abord, facilement reconnaissable à sa jambe tordue. Il était étendu non loin de là dans une flaque de sang, un carreau fiché dans l’épaule. La mare s’agrandissait vite, d’ailleurs, le cœur devait battre encore, mais pour combien de temps ? Et a quoi bon vouloir sauver un lépreux condamné à une vie de misère ? Pas loin se tenait un monstrueux tas de viande, une vieille énorme. On voyait bien son visage, maintenant, car elle s’était griffée les bandages alors que le poison l’asphyxiait. Ce qui restait de son visage, plutôt, au vu du trou purulent qu’elle avait à la place du nez et de ses lèvres cyanosées figées en un rictus dément. Enfin, non loin de l’échelle de corde se tenait un corps noircit, encore fumant et fleurant bon la viande grillée.

  
  Le saurien se replongea dans son monde intérieur. Il n’avait guère envie de réfléchir à ce qu’il venait de contempler et se focalisa donc sur la Sève, dégonflant ses hématomes et cicatrisant sa peau éclatée de son mieux. Puis, vidé après plusieurs minutes de ce traitement, il dut bien se confronter avec ses pensées. Il ne pouvait que conclure à un échec cuisant qu’il  disséquait sans complaisance. D’abord parce qu’il se serait fait occire sans une mystérieuse aide dont il ne connaissait pas la contrepartie, mais qui risquait pour le moins le rendre beaucoup trop célèbre à son goût. Ensuite parce qu’il ne voyait pas la Bretonne, ce qui voulait probablement dire que cette mission dans laquelle il avait tant investi avait avorté, compromettant du même coup son avenir dans la guilde des voleurs. Enfin parce qu’il avait tué deux personnes…

  Ce n’est pas vraiment d’avoir occis des Peaux-Molles qui le chagrinait, d’autant plus que dans le cas présent cela relevait presque du geste charitable, mais de l’avoir fait sans contrôle. Il pouvait à la limite se trouver des excuses pour le brûlé, ne lui ayant jeté qu’une petite lanterne ne contenant que peu d’huile. Le malandrin aurait du s’en tirer avec quelques graves brûlures, mais certainement pas entrer en combustion comme il semblait l’avoir fait. La lèpre de Malacath devait rendre les corps bien plus facilement inflammable, et il n’avait aucun moyen de le deviner à l’avance. Mais pour la grosse, s’était une autre histoire. Il n’aurait tout d’abord jamais du se faire surprendre. Il s’était tellement focalisé sur ses assaillants qu’il en avait négligé les autres malades, ce qui était une grave erreur. Il n’aurait ensuite jamais du la mordre pour se dégager. D’abord, il s’en rappelait maintenant, car la lèpre avait tendance à insensibiliser totalement les membres, ce qui rendait cette approche inefficace. Ensuite parce que le sang et le morceau de chair à moitié pourri qu’il avait arraché, associé au stress d’être immobilisé avec des assaillants qui approchent, avait contribué à lui faire perdre son sang-froid. Il avait tiré d’instinct une dague empoisonnée, la seule accessible dans sa position du moment, mais cela ne lui aurait de toutes façons rien apporté. Il allait devoir faire très attention s’il commençait à tuer de manière irréfléchie.

  
  Le lézard fourragea dans sa besace. Il en sorti une petite flasque métallique. Sa dernière potion de mana. Il répugnait de l’utiliser, même dans cette situation catastrophique… Mais qu’il était stupide ! Il avait oublié que le blocus de la capitale était enfin levé et qu’il pourrait refaire ses stocks d’ingrédients. Il avala donc l’épais liquide bleuté qui provoqua comme d’habitude ce curieux sentiment de réalité exacerbé de l’instant. Il allait de nouveau pouvoir nourrir la Sève. Malgré la douleur que ces opérations provoquaient systématiquement, il remit en place ses côtes cassées, se ré-encra les crocs dans la mâchoire, souda ses épinces sur leur base, renferma ses métatarses fissurés. Des réparations de fortune. Il lui faudrait encore de nombreuses séances pour que les ostéocytes puissent générer correctement les microstructures assurant la solidité de l’os, pour remettre en état les cartilages et éviter les douleurs articulaires, pour régénérer ses écailles abîmées. Au mieux, il aura peut-être terminé le lendemain…

  
  Des éclats de voix. La brétonne. Qui s’opposait à des créatures daédriques qui plus est! Péniblement, Main-d’Ombre se releva.

Modifié par Ygonaar, 02 août 2009 - 12:18.


#142 Arakis

Arakis

Posté 02 août 2009 - 14:19

Maelica Vs Saerileth, le cauchemar continue



20 Soirétoile, 3E431, 20h00



Saerileth s'appliquait consciencieusement à réveiller cette mage endormie qu'elle ne la vit pas son bras se relever et percuter sa pommette, mais nom d'un Nix galeux c'est qu'elle me frappe cette espèce de petite gar.. . Histoire de bien marquer son mécontentement elle y allât de l'autre main, c'est à ce moment là que la brétonne choisit pour se réveiller, son expression fut incrédule avant de virer vers quelque chose qu'elle n'aurait su définir, de toute façon elle n'eut guère le temps de disserter quelque chose la poussa quatre mètre plus loin, elle tenta de pirouetter comme le faisait ces saltimbanques qu'elle voyait si souvent sur les foires et autre lieux de réjouissances populaires, ce fut une semi réussite et elle se réceptionna violement sur sa partie postérieure.


Grimaçant à l'idée de ce qu'allait être les prochains jours à s'asseoir après un impact pareil, elle se remit sur ses jambes en grognant, que la peste emporte tout ces damnés magiciens et leur sortilège de malheur, comme si j'avais besoin de ça, dans un accès d'élégance elle tapa quelques coups sur son manteau et son pantalon histoire d'en faire partir toute la poussière et autres gravillons qu'elle aurait pu récolter dans cette envolée improvisé. Une fois cette menue toilette faite elle reporta son attention sur quelque chose de plus important, à savoir la magicienne qui lui avait offert le vol plané, celle-ci s'était relevé et marmonnait quelque chose d'incompréhensible, après avoir repassé plusieurs fois le message dans sa tête pour essayer de lui donner un sens elle comprit que la brétonne visiblement encore bien ensommeillé la prenait pour une sainte doré, vive les préjugés, j'ai un oeil qu'est pas de la bonne couleur je suis un deadra, pourquoi est-ce que je me suis fourré dans une merdasse pareille moi ? Résistant à l'envie de descendre la brétonne d'un shiruken en pleine tête, elle s'avança les mains en évidence pour prouver que ces intentions n'étaient pas hostiles et dit



"Espèce d'abruti de magicienne, y'a autant de sainte dorées dans ce trou qu'il n'y a de guar dans le cul de Vivec donc tu calmes tes sorts, tes babioles magiques et tout le fracas de maléfices ou je te montre comment je matte les indisciplinés"

Histoire de se donner de la contenance elle lécha le fil de sa machette manquant de se couper à moitié la langue, la dernière partie de sa phrase était un pur baratin, elle n'avait jamais réussi à tirer quelque chose de quelqu'un en le soumettant à la question, la plupart du temps elle laissait ça à d'autre comme cette espèce de brute épaisse de Roggar qui savait si bien jouer de son couteau, d'ailleurs la plupart du temps il ne touchait guère le bonhomme de sa lame qu'une fois ou deux, le type se pissait dessus parce qu'il savait qu'il lui ferrait subir tout ce dont il parlait, ce n'était pas le cas avec Saerileth, on voyait clairement qu'elle parlait largement plus qu'elle n'aurait pu infliger, enfin face à une magicienne lunetteuse qui sait, sa pouvait toujours marcher.

Modifié par Arakis, 02 avril 2011 - 10:11.


#143 Trias

Trias

Posté 08 août 2009 - 21:52

Influences

20 Soirétoile, 3E425, 20h00




« Espèce d'abrutie de magicienne, y'a autant de sainte dorées dans ce trou qu'il n'y a de guar dans le cul de Vivec donc tu calmes tes sorts, tes babioles magiques et tout le fracas de maléfices... » pesta la femme basanée, à quelques pieds de là.

— Quoi, vous avez visité Vivec ? répondit faiblement Maelicia, d’une voix ensommeillée, baillant et dormant encore à moitié.

— ... ou je te montre comment je matte les indisciplinés, poursuivit son vis à vis, sur un ton inquiétant qui n’échappa en rien à la brétonne. Puis, elle dégaina un ustensile large mais effilé... et le lécha ostensiblement. Le fil acéré de la lame luisit sous sa langue, précisant d’alarmants contours : ceux d’une machette.

La manoeuvre eut l’effet d’une décharge électrique sur l’étudiante : dans une brusque libération d’adrénaline, elle fit un impressionnant bond vers l’arrière, à présent complètement vigile.

— Bordel de fiente de lucio... jura-t’elle, sur le qui-vive. Elle sentait son muscle cardiaque bombarder des canonnades dans sa poitrine, irradiant vie et chaleur au reste de son corps. Dagon ! Sur quel genre de psychopathe était-elle donc tombée ?  

Ses mains s’entrecroisèrent en d’obscurs motifs mystiques, puis s’arrêtèrent sur une position de défense. Soudain, Maelicia réalisa que ses mains tremblaient. Elle s’efforça de réfléchir.

L’être qui se tenait devant-elle la surpassait d’une tête. Dans la pénombre, ses traits étaient difficiles à distinguer, mais même au sein des brumes de son réveil, Maelicia se souvenait de cette peau tannée, couturée de cicatrices, et surtout de cet éclat vermeil scintillant dans son orbite gauche. Si son opposante était humaine — et à en juger sur ses manières bourrues, c’était le cas —, il s’agissait probablement d’une sorte d’oeil de verre. Une autre blessure. Ses yeux s’égarèrent sur sa silhouette athlétique, autrement plus trapue que la sienne, devinant l’ombre d’une arbalète qui lui parut immense dans son dos, accompagnée d’innombrables carquois et autres fourreaux à sa ceinture.

Une mercenaire ? Que faisait-elle dans pareil trou à rats ? Quoiqu’il en soit, Maelicia ne se sentait pas en état pour un combat en règle. Une approche plus subtile lui vint à l’esprit.


ж ж ж

17 Vifazur 3E425, 23H, quelque part dans le Weald-Occidental




« Suivez-moi ? fit la brétonne, de sa voix la plus suave. Comme ça ? »

« Non », fit Illuvanar.

Autour d’eux les moellons rocheux et saillants de la salle d’observation de Fort Raison suintaient, reflétant de leurs minéraux la danse de quelques chandelles, éparpillées dans le local.

« Non. »


Il y eut un silence. Illuvanar prit le temps de rassembler ses pensées. Il y avait fort longtemps qu’il n’avait pas enseigné, et la soif d’apprendre de cette humaine était... Il joua un instant, pianotant de ses doigts sur une boule de cristal, puis poursuivit.

« Voyez l'Influence comme un jeu de stratégie, Marsoric. Contrairement à la domination, elle n'impose pas une conduite à autrui. Elle en développe certaines et en réduit d'autres, en agissant sur le subconscient, par le biais de modulations vocales. Il faut donc d'abord passer par ce que le sujet veut, puis lui suggérer une conduite. Il l’exécutera ensuite de son plein gré, si la suggestion est suffisante. C'est ça, influencer. Et cela suppose de deviner les centres d'intérêt du sujet.

L’intonation, vous l’avez. Vous savez parler à l’inconscient, et distraire le conscient. Ce qui vous manque, Marsoric, c’est une prise, qui amène l’emprise.

Je vais prendre un exemple...»


Il s’empara d’un manuel ouvragé, qui traînait sur la table. Il s'était avisé que la brétonne le lorgnait depuis un moment déjà.

« Vous désirez ce savoir, n'est-ce pas ? Alors, suivez-moi... »

Avant même d'y avoir réfléchi, inconsciemment, Maelicia fit un pas en avant.

« Vous voyez... résuma-t'il. Si vous parvenez à deviner ce que le coeur désire, vous serez obéie par le corps tout entier. C'est ça, le Charme d'Influence »

Il la toisa un instant, et eut une moue désabusée.

« C'est pourquoi la plupart des illusionnistes femelles soignent leur apparence... — il désigna la gorge de l'étudiante, de l’index, l’inclinant de haut en bas —

Ainsi disposent-elles presque toujours d'un élément d'emprise sur les sujets du sexe opposé »

L’étudiante rougit. Le regard du mage devînt dur, cinglant.

— Ne soyez pas immature, disciple. Cette chair n’est qu’un moyen parmi d’autres dans le champs des possibles. Le "paraître" est le mode de défense de l’être lambda. Vous, magicienne, pouvez en faire un moyen d’attaque. Une illusion, un mensonge parmi tant d’autres...


ж ж ж

20 Soirétoile, 3E425, 20h00



Maelicia réfléchit. Quelle serait sa prise sur cette mercenaire ? Illuvanar, c'était l'amour. Causant, sa cupidité, une gageure pour un mendiant. Cette femme, ce serait... peut-être aussi la cupidité. A moins que comme elle, ce ne soit le pouvoir ? Elle semblait vouloir la soumission de la brétonne. Qu’à cela ne tienne...

Les pupilles de la magicienne s'agrandirent soudain démesurément, restreignant ses iris à une mince ellipse périphérique, scrutant les moindres micro-réactions de la mimique de sa victime. La distance et l'obscurité rendaient cependant cette tâche ardue, mais peu lui importait. Maelicia obtempéra : baissant les bras, elle se fendit d'un lent, et respectueux salut de la tête.

— Oui, bien sûr, ma dame. Veuillez excuser ma réaction. Elle était irréfléchie. Je vous promets de ne plus rien tenter de la sorte. Mais avouez qu’votre compagnie ici est des plus surprenantes. Que faites vous donc dans un endroit pareil ?

Saerileth n’avait jamais entendue pareille voix. De la première à la dernière syllabes, dans ses moindres consonances, toutes les tessiture du phrasé de la brétonne prenaient des allures délicieuses, hypnotiques et langoureuses. Une voix telle qu’on aurait désiré que chacun de ses mots vous soit sussuré, répété et chuchoté à l’oreille pour l’éternité.

Les intonations mystiques, résonnaient dans ses ouïes, se propageaient dans ses tympans, galvanisaient son cortex auditif. Les neurotransmetteurs dopaminergiques, libérés par le sentiment de triomphe initial de la mercenaire, furent détournés vers les aires thalamiques. Une envie furieuse, au delà du conscient, de confier à la brétonne le pourquoi de sa présence dans un aussi funeste lieu s’empara d’elle.

Saerileth n’avait jamais entendu pareille voix.


Un crissement de griffes mordant le sol se répercuta dans la grotte. Maelicia détourna la tête : Danse-mot se tenait, mal assuré, ses crêtes déchiquetées, et surtout couvert de sang. Les pupilles de l’étudiante reprirent instantanément leur calibre normal.

— Danse-mots ! laissa-t’elle échapper, sous la surprise, de sa voix habituelle, criarde et étriquée en comparaison. Mais qu’est-ce qui vous est...

Elle se précipita vers lui, mais c’est alors qu’elle vit les cadavres. Sa bouche se referma puis se rouvrit plusieurs fois. Elle blêmit puis tendit un bras vers le reste des trois lépreux.

— Y... y... y sont quand même pas crevés, si !?

Modifié par Trias, 29 août 2009 - 21:15.


#144 Ygonaar

Ygonaar

Posté 09 août 2009 - 14:36

Réputation

  

  

20 Soirétoile, 3E425, 20h05

  

Une tignasse blonde et drue, un bras de métal à l'épaulière et la coudière effilées, une arbalète lourde au mécanisme modifié battant sur un monceau de projectiles, un gilet de cuir où l'on devinait une tête d'aigle… Et, le lézard en mettrait sa main à couper, un étrange œil de verre devait luire dans une orbite de la femme qui lui tournait le dos. Maelicia faisait donc bien face à une créature daédrique ! Vierge-de-Dagon, Poing-d'acier, Saerileth-un-seul-coup, ses surnoms étaient nombreux dans les petits cercles des chasseurs de prime, et sa réputation avait couru jusqu'à celui de Leyawiin, et même celui de Gideon. Une traqueuse des plus efficace, bien que travaillant souvent seule. Et dont les carreaux étaient les jumeaux de celui fiché dans l'épaule du lépreux.

  
Pour une fois, la magicienne semblait tenter une approche subtile, utilisant la Voix. Il dut admettre qu'elle impressionnait son discours avec un talent certain, d'ailleurs. Las, Main-d'Ombre lui était bien trop éprouvé pour gérer convenablement la situation. Concentré à rassembler ses souvenirs et à guetter les moindres mouvements de l'intruse, il en oublia de redresser convenablement les orteils, démarche qui lui était pourtant familière lorsqu'il progressait à pas de loup sur un sol dur. Ses griffes accrochèrent une pierre, un crissement négligeable, mais assourdissant dans le silence des cavernes. La brétonne se focalisa aussitôt sur lui.

  — Danse-mots ! cria-t-elle sans réfléchir, abandonnant du même coup son charme patiemment tissé. Mais qu'est-ce qui vous est...
— Damoiselle Défiante, heureux de vous voir saine et sauve. Pourriez-vous me présenter votre…
— Y... y... y sont quand même pas crevés, si !? l'interrompit-elle, livide, se focalisant apparemment sur les cadavres des lépreux.
— L'âme de l'un d'entre eux  se cramponne peut-être encore à son corps. En vain, si vous voulez mon opinion. Abréger ses souffrances serait certainement charitable, mais votre cri m'a alerté. Je crains avoir hélas raté un épisode, si vous pouviez éclairer ma lanterne. Lui expliqua le saurien en essayant d'adopter une voix calme et apaisante. Mais gardant un œil sur Saerileth  et profitant de l'écran que constituait la jeune mage pour faire glisser discrètement une dague de son bras à son poignet.
—Danse-Mot pour vous servir, enchaîna-t-il en s'adressant à la mercenaire, dédaignant stupidement les cadavres en une attitude trop ouvertement vigilante. A qui ai-je l'honneur ?

Modifié par Ygonaar, 09 août 2009 - 14:38.


#145 nood

nood

Posté 09 août 2009 - 15:17

Insertion

20 soirétoile 3E431, 20h00


Dix heures d'attente, recroquevillé dans un recoin sombre d'un obscur escalier de l'hôtel des frères hospitaliers de Stendarr, avec pour seul fond sonore les bruits de crécelles et de plaintes étouffées émanant de l'autre coté du mur. Drem Serethi n'était pas né de la dernière pluie, avait déjà roulé sa bosse dans des endroits reculés, dangereux et insolites, mais jamais il n'avait pensé un jour qu'il se retrouverait en planque dans la leproserie de la Cité Impériale. Dans le bruit sourd mais continu des malades adjacents, il attendait à l'affut, silencieux, tâtant son anneau de Forme d'Ombre qui décorait son index droit, s'efforçant de maintenir son sort de détection de vie. les événements de la semaine précédente lui revinrent en tête fréquemment pendant que les minutes s'égrénaient, et qu'il n'avait toujours aucune piste.




***





11 soirétoile 3E431, 18h00



Une semaine plus tôt, dans la caserne des gardes au quartier du port.

Il était 18 heures lorsque Drem regagnit ses quartiers. Sa tournée de garde, morne, ennuyeuse mais surtout frigorifiante venait de prendre fin. La relève venait les remplacer, lui et ses collègues : dans la caserne, les hommes fatigués échangeaient des commentaires sur les repas chaud qui les attendaient au domicile conjugal et sur les autres avantages en nature que procure le fait d'être marié. Drem ne s'impliquait que très peu dans ces discussions hautement spirituelles. Dunmer parmi les cyrodiléens, mage parmi les gardes impériaux bourrus, l'intégration était difficile, quand bien même il l'aurait souhaitée. De plus, à l'heure où certains iraient profiter de la chaleur d'une épouse aimante et d'un bon repas (chose appréciable en cette période de l'année), Drem écopait d'une corvée de latrines supplémentaires pour une énième histoire de passage à la taverne pendant les heures de service.

Du moins, c'est ce qui était prévu. Alors qu'il savourait son quart d'heure de pause, assis sur son lit, son bien-aimé capitaine, Rovngar, s'avança vers lui avec sa tête des mauvais jours. Les nordiques et les dunmer ne sont pas connus pour leur affection les uns envers les autres, et ces deux-là ne faisaient pas exception à la règle. Depuis qu'il était sous ses ordres, Drem avait reçu plus de punitions que le reste de la compagnie. Certes, certaines étaient justifiées, mais pas toutes, loin de là.

- Bouge-toi, Serethi, dit le nordique avec un ton encore plus glacial que le temps. Je dois t'amener voir quelqu'un d'important.
- D'important comment ? lui répondit le dunmer.
- Dépèche-toi. On nous attend.

S'executant, Drem suivit son supérieur. Ils traversèrent toute la caserne à pied jusqu'au bureau des officers, où ils arrivèrent devant la porte du chef de caserne. Drem fut invité, seul, à pénétrer dans la pièce : encore un événement inhabituel. La porte se referma derrière lui, et il passa son regard tout autour du petit bureau, chaleureusement réchauffé par un petit feu joyeux qui crépitait dans l'âtre. Son responsable de caserne, ainsi que deux autres impériaux en habits de ville, buvaient une infusion au bureau, entourés par des épais dossiers. Dès son arrivée dans la pièce, Drem vit les trois paires d'yeux converger vers lui. Il n'était sûr que d'une chose : il n'était pas ici pour servir le thé.

- Asseyez-vous, fit l'un d'entre eux en désignant une petite chaise inoccupée. Je me présente : comissaire Valens, du Bureau Impérial d'Investigation Magique. Je parie que vous me connaissez au moins de nom, fit-il avec un sourire.

Drem mit plusieurs secondes à enregistrer l'information. il était assis à la même table que l'un des plus hauts fonctionnaires d'un bureau d'un des services les plus discrets de l'Empire. Bien rares étaient les citoyens de l'Empire ayant eu à faire avec cette division. Son étonnement atteint un niveau rarement égalé depuis des mois.

- Bien entendu,
finit-il par répondre.

- Très bien,
reprit Valens. Figurez vous que nous aussi, nous avons entendu parler de vous. Et pas seulement à cause de vos états de service, ajouta t'il, sans doute en réponse au regard peu rassuré que venait de prendre le visage de Drem. Avant toute chose, j'aimerais que vous me racontiez votre parcours, disons ... professionnel, depuis votre plus jeune âge.

Drem sourit. il y avait deux-trois passages peu avouables devant un supérieur hiérarchique. Mais au vu de l'épais dossier marqué de son nom qui trainait ostensiblement sur le bureau, il y avait fort à parier qu'il était déjà au courant de tout. Il soupira et se lança.

- Hé bien... je suis né et j'ai grandi en Morrowind. j'ai intégré assez jeune la guilde des mages, avant de la quitter vers l'âge de soixante ans environ. J'ai par la suite intégré l'unité anti-contrebande menée par Trentius Benirius, toujours en Morrowind. A sa dissolution, j'ai eu quelques différents avec mes supérieurs, j'ai fait quelques mois de prison et on m'a envoyé ici. il me reste environ trente années de service à fournir à la Légion.


Valens écoutait Drem, les yeux rivés sur une feuille de papier, il hocha la tête pendant quelques instants. Il semblait réfléchir ; puis il reprit calmement.

- Votre parcours atypique nous intéresse. Croyez-le ou non, mais nous avons besoin de types comme vous, des légionaires familiers de la magie. Nous employons, à l'occasion, toutes sortes de personnes : des mages, bien entendu, mais aussi des agents, de lames noires, des mages de guerre et des magelames. Vos aptitudes tant martiales que magiques sont un atout recherché. J'ai eu vent de quelques unes de vos recherches en Altération, et j'ai lu quelques rapports émanant des votre ancienne unité. Si la moitié de ces choses sont vraies, vous seriez assez qualifié pour nous être utile. Qu'en dites vous ?


L'elfe noir commençait à entrevoir le but de la discussion. Le Bureau Impérial d'Investigation Magique avait des besoins en personnels et des méthodes de recrutement très singuliers, tout comme les missions qu'il effectuait. A sa connaissance, ce service disposait d'informations et de matériel thaumaturgique qui feraient envie à tout magicien normalement constitué. Ce qu'il ignorait, c'est que ces deux organisations, bien que n'étant pas ennemies, ne collaboraient que peu, en vertu de l'indépendance voulue par la guilde des Mages. Ainsi, rares étaient les membres de la guilde qui travaillaient ouvertement avec le Bureau Impérial des Investigations Magiques, et les transferts d'informations entre ces deux services étaient sciemment occultés à l'ensemble de la population..

- J'avoue que c'était il y a longtemps. je suis un peu rouillé, mais je pense avoir de bons restes.


- Nous allons voir ça. Je pense que votre potentiel serait mieux exploité dans nos services que dans de simples tâches de garde. Nous vous offrons une chance de montrer que vous êtes capable de vous occuper de missions plus importantes que nettoyer les latrines des casernes. Si vous acceptez, on vous confiera quelques petites missions pour notre bureau, mais qui sait ? vous pourriez enfin monter en grade.


Valens regardait à présent fixement Drem. Il semblait sonder la moindre de ses réactions. Le dunmer fit mine de réfléchir pendant quelques minutes, mais la simple perspective de se sortir du train-train peu excitant de garde le motivait grandement. Tout comme les possibilités offertes par cette nouvelle fonction. Il se revit, l'espace d'un instant, entouré de ses camarades légionnaires de "la bonne époque", puis, souvenir encore plus lointain mais néanmoins encore très net dans sa mémoire, il se rappela ses années d'étude à la guilde des Mages. Epoque bénie où il était écouté, respecté, où le quotidien ne se résumait pas à chasser les ivrognes dans les quartiers mal famés de la Cité Impériale.

- J'accepte,
finit-il par dire.
Comment aurait-il pu refuser une telle offre ?

- Excellent,
répondit Valens. Considérez-vous comme intérimaire du Bureau Impréial des Investigations Magiques. Nous pourrions vous faire passer une batterie de tests complets, mais je suis féru de l'ancienne méthode qui consiste à éprouver les nouvelles recrues sur le terrain. Pour l'instant, vous allez reprendre vos occupations de garde. Vous recevrez dans les jours qui viennent un ordre de mobilisation temporaire, que vous viendrez nous présenter pour recevoir les effets nécessaires à la réussite de la mission et les directives de ladite mission. Avez-vous compris ?

- C'est très clair.
répondit Drem.

- Bien entendu, selon les résultats de cette première mission, nous déciderons si vous êtes effectivement capable de nous servir efficacement. A vous de faire vos preuves. Toujours suivant vos résultats, vous pouvez recevoir des primes, diverses récompenses matérielles, des permissions supplémentaires ou encores d'autres ... avantages. Votre dossier fait état de différents épisodes peu glorieux au sein de la Légion. Ces mentions pourraient être, à terme, tout simplement oubliées.


Drem jubilait intérieurement. On peut dire ce que l'on veut des Impériaux, pensa-t-il, mais ce sont des négociants très habiles. Personne d'autre que ces humains, avec leur armée et leur société bien huilée, n'aurait pu unifier Tamriel aussi efficacement.

- Je suis à votre disposition.


- Alors, vous êtes à partir de maintenant lié à notre bureau. Vous pouvez partir : gardez cette entrevue et notre arrangement secret. A l'instant même où vous recevrez votre convocation, vous serez exceptionnellement détaché de votre compagnie pour la durée de la mission - vos supérieurs seront informés de vos nouvelles affectations. Il ne vous restera qu'à vous montrer digne de celle-ci.

Valens arborait un air satisfait.
- Vous pouvez disposer.


Drem se leva et salua les officiers. Avant qu'il n'ouvre la porte, Valens le héla un dernière fois.

- Bien entendu, nous attendons de vous un comportement irréprochable. Dans le cas contraire, les conséquences en seraient très fâcheuses pour vous.


Instinctivement, il comprit que le commissaire était au courant des ses frasques un peu trop fréquentes. Il en conclut qu'il était largement temps d'avoir à nouveau un comportement qui lui ferait mériter sa solde de légionnaire.

- Bien entendu,
répondit Drem. Bien entendu.

Au sortir de la pièce, il avait le visage fendu d'un large sourire de satisfaction, tant pour avoir été reconnu pour ce qu'il était réellement que pour frustrer encore plus son nordique de capitaine. Celui-ci, au vu de sa mine déconfite, avait manifestement été mis au courant de la teneur de la discussion qui venait d'avoir lieu. Ils rentrèrent à la caserne silencieusement, traversant les volutes de brouillard qui emplissaient la cour.

- Considère que toutes le punitions sont levées,
dit Rovngar, rompant un silence gêné. J'ai ordre de te maintenir en forme jusqu'à nouvel ordre. Tu t'en tires bien, comme d'habitude. Si tu te plantes, je serai là pour le voir, ne t'en fais pas.

- Raison de plus pour me surpasser,
répondit Drem.
Il aurait bien accompagné sa réponse d'un pamphlet en hommage à l'incompétence et à l'étroitesse d'esprit de son interlocuteur si cela n'avait pas entâché le "comportement irréprochable" dont Valens lui avait parlé quelques minutes plus tôt. Le simple fait d'être recherché en personne par un des services spéciaux de l'Empereur était une victoire plus qu'écrasante.

La fin de la nuit fut beaucoup plus reposante que prévu.




***






20 soirétoile 3E431, 20h00


C'est ainsi que Drem s'était retrouvé dans ce caveau infecté par un des fléau les plus terribles existant. le Bureau l'avait chargé de surveiller la léproserie, suite à quelques allées et venues inhabituelles de mendiants. Ils soupçonnaient cet endroit d'être une couverture pour des affaires de contrebandes, ou un point de rendez-vous de malfaiteurs.

Pour sa première mission, Drem avait écopé du gros lot : cotoyer la lèpre de Malacath, rien que ça ! Il avait heureusement été bien équipé. Un anneau de Forme d'ombre, bienvenu, lui avait été cédé ; ainsi que plusieurs fioles de serums censés empêcher la contamination par la lèpre, dans leur forme la plus concentrée (nonobstant une étiquette portant la mention "l'usage fréquent peut causer diverses maladies neuro-dégénératives".) Drapé dans une tunique sale et miteuse, Drem s'était aventuré, le visage emmitouflé dans une écharpe en toile et coiffé d'une capuche, comme une simple mendiant, dans l'hôpital des frères de Stendarr. Avec d'infinies précautions pour ne pas attirer l'attention sur lui, il s'était glissé dans le petit escalier qui menait au puit de la léproserie. Usant de quelques sortilèges de plume et d'un soupçon d'escalade, il s'était hissé sans bruit dans une petite cavité naturelle surplombant ledit escalier ; de là, il surveillerait aisément les allées et venues.

Il était en planque depuis le début de la matinée quand il aperçut le premier signe de fréquentation étrange de l'endroit, par la présence d'une jeune femme - Brétonne, à n'en pas douter - et d'un Argonien, en fin d'après-midi. Ayant traversé la porte d'accès sans bruits, les deux personnages s'étaient retrouvés enlacés sur le pas de l'escalier. Drôle d'endroit pour se faire des calins, se dit Drem. Mais visiblement, à partir de ce qu'il avait pu saisir de leur conversation, ils étaient à la recherche de quelqu'un d'autre dans le quartier des lépreux. De peur de trahir sa présence, il n'avait pas bougé, pensant qu'il était préférable de les appréhender à leur retour. Il était resté immobile, tentant de camoufler au mieux les crépitements magiques qu'il émettait et qu'un sort de détection de vie aurait tôt fait de démasquer : observant lui même la progression des deux individus dans la léproserie, il avait été surpris par l'arrivée d'une troisième personne.

Autant les deux premiers suspects avaient un comportement bizarre, ayant ergoté au bord du puit pour savoir qui descendrait le premier, s'étant travesti en Soeur et en Frère de l'ordre de Mara la guérisseuse pour passer justifier leur présence au milieu des malades, autant le nouvel arrivant (la nouvelle arrivante, en fait) était étrange.

Cette jeune impériale avait, au vu de son équipement (une arbalète modifiée, une tenue digne d'un corsaire, une machette accrochée dans le dos), une expérience certaine du combat. Elle semblait appartenir à un groupe de mercenaire ou quelquechose d'approchant, au vu de l'aigle qu'elle arborait fièrement sur son manteau en cuir. Mais l'étrange lueur de son oeil droit et son bras, ne répondant pas à un sort de détection de vie, étaient autant de questions. La femme avait donné l'impression d'être à la poursuite du lézard et de la magicienne. elle hésita longuement à descendre - sans doute le mal qui règnait dans les cavernes y était pour quelquechose. Puis vint ce qui tira Drem de son immobilité. Des cris de douleur, des bruits de combat, un intense flash lumineux et l'odeur de la viande carbonisée exhalèrent du puit. Drem aurait sauté en bas immédiatemment si la jeune femme n'avait pas été là : craignant un assaut direct sur elle, il lui laissa trois minutes d'avance après qu'elle s'y soit engouffré et sauta en bas de sa cachette.

Les bruits de combat s'était tus : cela pouvait être de mauvaise augure. Enlevant sa capuche, il courut en direction du puits. Ses mains formèrent de nombreuses passes, présageant un sort de chute ralentie : sans hésitation, il se jeta dans le puit, et atterrit confortablement. Au détour d'un premier couloir, il aperçut la source de l'odeur âcre de chair brûlée mélée à celle du sang. L'odeur de la mort fraîchement et violemment survenue ne manqua pas, une fois encore, de le replonger dans des souvenirs d'escarmouches en bordure du Marais Noir. Pour quelqu'un qui, comme lui, a déjà combattu, cette odeur de fluide vitaux et de chair ouverte, provoquant la sensation de dégoût comparable à celle qu'inspire une vieille bourgeoise impériale trop parfumée, qui réveille des instincts de survie et avive les sens, cette information sensorielle éveilla des réflexes inconscients chez Drem. Son myocarde s'excita, tout comme le reste de son système nerveux sympathique : le sang fut reflué vers ses muscles, chassé des viscères, son coeur se mit à battre plus rapidement, effectuant des cycles diastoliques amples ; sa peau prit de l'éclat sous l'effet d'une vasodilatation périphérique importante. Sa glande surrénale se mit à déverser des louches entières de neuromédiateurs excitateurs dans la circulation sanguine ; la faim, la peur et la fatigue disparurent, laissant leur place à l'excitation, à la clairvoyance et à la vigueur. Il tira fébrilement l'épe de son fourreau, observant les trois ou quatre cadavres (il ne pouvait en conjecturer un nombre plus précis) de lépreux. L'un d'eux semblait encore vivant bien que léthargique, l'autre avait brulé vif ; une troisième masse informe ne montrait plus aucun signe de vie.

Des bruits de claques interrompirent son autopsie visuelle, puis des cris (émanant probablement de la jeune Brétonne.) Une autre voie féminine prit le relais, autoritaire et ferme : c'était l'impériale à la drôle d'arbalète, à n'en pas douter. Drem découvrit le troisième larron, l'Argonien, qui avançait bruyamment dans le couloir, à quelques pieds de distance devant lui : à en juger par sa démarche lourde et maladroite (accentuée par des crissements de griffes contre les dalles du sol), il devait être mal en point.

Quelques répliques, malheureusement peu audibles, lui parvint encore alors qu'il s'approchait du couloir avec toute la discrétion permise par son équipement : il finit par apercevoir les trois protagonistes.

— Danse-mots ! fit la voie fluette de la Brétonne, changeant étrangement d'intonation. Mais qu'est-ce qui vous est...

— Damoiselle Défiante, heureux de vous voir saine et sauve.
L'Argonien parlait calmement pour quelqu'un qui était aussi visiblement blessé. Pourriez-vous me présenter votre…

— Y... y... y sont quand même pas crevés, si !?
reprit la brétonne. Elle regardait quasiment dans la direction de Drem, mais l'effet de dissimulation du à son anneau et la présence de quatre cadavres alentours lui permit de rester inaperçu.

— L'âme de l'un d'entre eux se cramponne peut-être encore à son corps. En vain, si vous voulez mon opinion. Abréger ses souffrances serait certainement charitable, mais votre cri m'a alerté. Je crains avoir hélas raté un épisode, si vous pouviez éclairer ma lanterne,
reprit l'Argonien d'une voix trop mielleuse pour être honnête.

— Danse-Mot pour vous servir. A qui ai-je l'honneur ?
Cette dernière réplique s'adressait à l'impériale à l'oeil vitreux.

Drem se dit qu'il était plus que temps d'agir. La brétonne avait l'air sous le choc de la promiscuité de plusieurs cadavres ; la mercenaire avait manifestement perdu toute la détermination qui animait ses gestes quelques minutes plus tôt ; quant au lézard, seul sa langue semblait encore fonctionner normalement. Le moment était rêvé pour une entrée en fanfare, à défaut d'une approche plus subtile.
Il retira son anneau et franchit en quelques enjambées les derniers mètres qui le séparait des trois individus. L'épée luisante de la lumière phosphorescente qui irradiait l'endroit, la main gauche recroquevillée, paume vers le ciel, prête à brûler, à dissiper ou à parer, il s'avança brusquement et s'écria avec force :

- Par tous les dieux des impériaux, des rougegardes et des nordiques !! Qu'est-ce que vous foutez là ?

Si ses anciens collèguent avaient assisté à la scène, il n'aurait pas reconnu leur Drem, habituellement paresseux, alcoolisé et démotivé. Ils auraient contemplé Drem Serethi, Magelame de son état, recouvrant sa force et sa prestance d'autrefois, le regard déterminé, prêt à en découdre s'il le fallait. Du moins en apparence.

Modifié par nood, 03 avril 2011 - 11:40.


#146 Trias

Trias

Posté 15 août 2009 - 14:37

Prise « en main »


20 soirétoile 3E425, 20h00




— L'âme de l'un d'entre eux se cramponne peut-être encore à son corps, fit le lézard. En vain, si vous voulez mon opinion. Abréger ses souffrances serait certainement charitable, mais votre cri m'a alerté. Je crains avoir hélas raté un épisode, si vous pouviez éclairer ma lanterne.

La commotion entraînée par la vue des cadavres s’estompa, à la faveur du calme du saurien. Il avait débité cet épitaphe, cette sorte de laïus nécrologique purement descriptif avec un tel détachement qu’elle en fut choquée. Ce damné Danse-mot ne perdait décidément jamais le Nord. Toujours subtil, toujours concentré, il tissait déjà ses filets verbaux autour de la mercenaire, entremêlant ses pièges, calculant dès maintenant un réseau de répliques destinés à percer l’identité de l’intruse. Maelicia eut la vision fugitive d’une araignée tissant une toile, à échelle humaine.

Elle même était bien sûr capable de rouerie, mais ses mensonges étaient plus spontanés, plus immédiats, moins réfléchis que l’entrelacs perpétuel de complots  qu’élaborait sans cesse l’argonien. Et toujours si froid, si détaché...

Profitant de l’angle mort que constituait Maelicia entre lui et la mercenaire, il fit  discrètement coulisser un poignard jusqu’au creux de sa main. La brétonne eut soudain la certitude qu’il n’était pas étranger au meurtre des trois ladres gisant tout près.

— Danse-Mot pour vous servir, continua-t-il en affermissant sa prise sur sa lame. A qui ai-je l'honneur ?

L’étudiante craignit soudain qu’il ne profite d’une ouverture pour lancer son arme. Une telle froideur, un tel goût pour l’ombre et le calcul, Danse-mot ne pouvait être qu’un assassin. Qu’attendre d’autre d’un survivant du Marais Noir ?

Négligeant sciemment l’impériale hébétée par son charme, elle marcha résolument sur l’argonien interloqué, et lui saisit fermement le poignet. Elle faisait toujours obstacle entre lui et Saerileth, de manière à ce que celle-ci ne puisse percevoir la dague. Ce faisant, elle sortit son autre main de son aumônière, d'où elle venait de puiser les dernières réserves d'énergie spirituelle dont elle disposait.

— C’est juste quelqu’un qui veut discuter, continua-t’elle à voix haute. Vous vous z’appelez comment, au fait, ma dame ?

Ce faisant, elle foudroyait du regard le roublard, sans ciller, avec une expression qui voulait tout dire sur le visage.
— Trois c’est bien suffisant, siffla-t’elle entre ses dents, dans un murmure discret, mais chargé de reproches. Elle savait bien ce qu’il penserait de ses naïves leçons ; mais pour le moment, elle n’en avait que faire.


ж ж ж



C’est alors que sous ses yeux, à même pas vingts pieds de Danse-mot, qu’un homme grand et grêle jaillit du néant, emmitouflé dans des loques brunes tellement constellées de taches qu’on en voyait à peine la couleur. La stupeur fut telle que Maelicia en lâcha l’argonien, une expression de surprise soudaine tendant ses traits.

— Par tous les dieux des impériaux, des rougegardes et des nordiques !! déclama en fanfare l’hystrion, s’avançant sabre au clair. Qu'est-ce que vous foutez là ?

L’étudiante n’avait pas eu à faire volte-face pour apercevoir le nouvel intrus, de sorte qu’elle fut à même de réagir plus rapidement que le reptile.

— De la prospection immobilière, ça s’voit pas ? répliqua-t’elle, hors d’elle.

Combien de types planqués en tapinois y avait-il dans cette foutue léproserie ? Elle l’ignorait, mais deux choses étaient pour elles certaines : à deux invités surprise, il était d’une part évident qu’ils étaient suivis ; et d’autrepart, que les précautions de Danse-mot avaient fait long-feu. Le stentor des catacombes était même peut-être un traqueur, même si cette interpellation résonnait bizarrement dans ce cas. Bref, avec l’argonien flageolant sur ses jambes et deux mouchards collés aux basques, il était urgemment temps qu’elle prenne la situation en main.

Profitant  de l’intervalle laissé par le décodage de ses propos, elle agrippa Danse-mot par derrière, et, passant un bras par dessus son épaule, envoya une onde télékinétique large aux pieds de l’intrus. L’onde ricocha bruyamment vers le plafond, soulevant un nuage de poussière et d’éclats de roche mêlés les dissimulant au Don Quichotte de la maladrerie.

Aussitôt, elle se téléporta devant la bouche du puit, loin au dessus d’eux. Ceci s’avéra être une erreur stratégique capitale : s’il existait en effet un sortilège de téléportation rapide, à caractère plus ou moins instinctif, celui-ci ne pouvait s’appliquer que sur des destinations à portée de vue de l’enchanteur. La combinaison d’arcanes requise pour une téléportation sans ligne de vue était bien plus complexe et exigeante en termes de concentration pour un délai aussi bref que celui qu’elle s’imposa. L’incantation de la compagnonne de la guilde des mages échoua : les deux voyageurs apparurent bien devant la lourde porte de pierre surmontant l’excavation, mais Maelicia ne put maintenir la cohérence du sortilège jusqu’au bout. L’espace se dilata brutalement sous l’arrivée de leur matière, tout comme l’aurait fait une explosion. L’argonien se retrouva violemment projeté dans le couloir rocheux, tandis que la magicienne valsait en direction... du puit.

Une terrifiante sensation de chute s’empara de Maelicia, qui se ressaisit aussitôt sous le coup de l’instinct : elle empoigna le monceau de cordes qui défilait à côté d’elle, râpant son bliaud. Une douleur fulgurante s’empara de son épaule droite alors que sa descente se voyait brutalement interrompue. Etouffant un gémissement, elle tenta de remonter un à un les barreaux de l’échelle, mais son bras droit ne lui semblait plus être qu’un étau douloureux et lancinant.

— "Une mission simple dans un cadre exotique" qu'y disait, grommela-t'elle. Tu parles !

Le simple fait de pester la soulagea, et lui permit de se remettre à penser. Si elle pouvait ne serait-ce qu’arriver à la porte à verrou avant d’être rattrapée, elle et Danse-mot seraient durablement débarrassés de leurs invités. Et ce, sans égorger qui que ce soit d’autre. Se cramponnant à cette pensée, elle redoubla d’efforts et poursuivit son ascension.




ж ж ж
Une offre impossible à refuser

20 Soirétoile, 3E425, 19h45




« ...Défiante qu’elle s’appelle, j’me souviens bien. J’ai du changer mon vieux manteau avec elle contre celui-là, qui est bien plus joli alors j’étais contente. Mais elle avait peur qu’j’l’abime et elle a bien dit que je devais lui rendre. Maintenant, elle va être furieuse car il est tout froissé et crotté de partout, mais c’est que vous m’avez fait tomber, c’est pas de ma faute. Et je devais prendre son bidet aussi, qui s’appelle Chillot mais j’sais pas ce que ça veut dire. Et elle avait peur qu’je lui fasse mal, car c’est celui d’son seul copain, qu’elle disait. Mais je sais pas si c’est du lézard qu’elle causait, je crois que non. »

L’incroyable déluge verbal s’interrompit enfin. Hésitant, la pauvre damnée osa poursuivre sur une ultime question :
— Voilà, j’vous ai tout dis, parole. Dites, j’pourrai garder mes pièces ? J’ferai ce que vous voulez…

Jeraselm était écoeuré. Un regard lui aurait suffi pour constater que ses hommes partageaient son indignation, mais sa déception allait bien au delà. Il avait été confronté à bien des femmes par le passé. Et toutes l’avaient plus ou moins trahi, à un moment, ou à un autre. Le récit de la catin diminuait encore son estime pour l’espèce féminine.

— Tu veux gagner de l’or, c’est ça ? répondit-il enfin, en la toisant, paraissant réfléchir. Eh bien tu vas retrouver ta « Défiante » et son ami. Tu ne nettoieras pas ton manteau. Tu auras l’air catastrophé. Tu te jeteras sur elle, tu pleureras, tu lui expliqueras que ton ami a été capturé. Et dès qu’elle se penchera vers toi tu lui planteras ceci... — il produisit un petit stylé de pierre gravée de glyphes étranges, fin et court, dont le manche ressemblait étrangement à une sorte de pieuvre — ...dans le ventre, de toute tes forces. Ne l'utilise sur personne d'autre. Nous ne serons pas loin, tu n’auras pas à te préoccuper du lézard. Cent septims bien dorés pour ça, tu n’auras même plus besoin de faire les trottoirs, tu seras une dame...

Il s’interrompit, et se rapprocha.
— Si tu refuses, il se pourrait que les gardes impériaux passent effectuer quelques contrôles... dans la rue de la Fleur des Nuits, hmmm ?

Lui fourrant l’objet dans les mains, il se redressa et jeta un regard menaçant sur l’argonien, démoli, qui reprenait conscience non loin de là.

— Quant à toi, tu vas nous mener à ton ami, Riton le borgne, sinon...

Modifié par Trias, 16 août 2009 - 15:06.


#147 nood

nood

Posté 17 août 2009 - 09:15



Ascension

***



20 soirétoile 3E431, 20h00

"De la prospection immobilière ?"

Cette phrase résonna dans la tête de Drem, le temps qu'il mesure l'absurdité du propos. Très peu de temps, à vrai dire, mais cette poignée de secondes fut suffisante pour que ses interlocuteurs aient l'initiative. Sans crier gare, une vague de télékinésie lui arriva dans les pieds. Un bien beau geste technique, qui fit décoller quelques livres de poussières et de graviers dans l'air déjà lourd de la léproserie. Et qui, accessoirement, fit choir un dunmer de tout son long dans le couloir. Drem ne fut pas tant affecté par sa chute (somme toute inoffensive) mais bien par le bruit de verre cassé qui émana de son sac. Ce put être l'indice que ses potions de magie n'avaient pas résisté au choc ; ou peut-être son excellent alcool de coing (plutôt rare à trouver) ; ou encore ses potions de préventions de la lèpre. L'une comme l'autre des options le chagrinèrent : rester dans un souterrain envahi par la lèpre, un peu trop visité à son goût, sans remontant, sans fortifiant ou sans protection contre une maladie aussi peu enviable. Il n'avait pas prévu autant d'inconnues dans cette simple mission de surveillance.

Ce fut un bruit de téléportation qui le sortit de sa réflexion. Pour avoir cotoyé nombres de mages, il connaissait ce son distordu très caractéristique qui accompagnait la pliure de l'espace, lorsqu'un mage tente de l'astreindre à sa volonté. Nettement moins évident mais tout aussi révélateur, il entendit également le bruit d'une téléportation ratée, non loin du couloir dans son dos. A coup sûr, la gamine brétonne avait tenté une téléportation rapide ; elle ne devait pas être loin, eut égard à la portée locale de ce sort.

Drem analysa rapidement la situation : il y avait bien la mercenaire impériale, mais elle semblait encore sous le choc du sort de charme. L'argonien s'était volatilisé avec la brétonne. Il n'hésita que peu avant de se lancer à grandes enjambées vers le puits, en direction du bruit sec et soudain d'une warp manquée.

Lorsqu'il leva les yeux dans la pénombre du puit, il y vit une petite forme féminine vaguement accrochée à la corde de celui-ci. La demoiselle semblait en difficulté, vu à l'allure à laquelle elle montait les barreaux qui l'amenerait vers le haut du puit - et peut être vers une exfiltration tout aussi rapide que la précédente, qui laisserait Drem aux prises avec une mercenaire impériale apparemment peu diplomate et sans indices à rapporter au bercail.

Rassemblant tout ses souvenirs et sa détermination, il lança un imposant sort de plume qui lui coûta une part non négligeable de ses potentialités thaumaturgiques du moment. Son corps, se faisant léger comme celui d'un enfant, eût bientôt la plus grande aisance à être mis en mouvement par des muscles habitués à soutenir le poids d'un adulte. Sa remontée sur la jeune Brétonne fut fulgurante ; de barreau d'échelle en barreau d'échelle, il fut bientôt jusqu'à elle avec une rapidité stupéfiante. Le reste de sa Magicka fut mis à contribution en un deuxième sort de plume destiné à la Brétonne, qui n'opposa que peu de résistance à se faire transporter d'un bras jusqu'à l'extrémité supérieure du puit, une ou deux brasses plus haut. Le retour à un sol ferme fut un soulagement pour l'un comme pour l'autre.

Drem n'était pas mécontent de son mouvement, qui lui rappelait que effectivement, sa maîtrise de l'Altération n'était pas encore un souvenir éteint des temps jadis. Mais toute cette agitation lui avait couté la majeure partie de ses ressources magiques. Il réalisa que l'estocade magique de la jeune brétonne, qui était à présent assise sur le sol devant lui, ainsi que cette ascension magique imprévue étaient les conséquences de son manque de tact. Une approche un peu plus diplomatique s'imposait.

- Mademoiselle, fit-il, s'efforçant le plus possible à paraître amical et attentionné, je pense que nous sommes partis sur de mauvaises bases, et que c'est en grande partie ma faute. J'espère que - considérant le fait que je vous ai évité une chute d'une vingtaine de pieds - nous allons pouvoir discuter de manière un peu plus reposée. Vous et votre ami Argonien êtes des citoyens impériaux, protégés de ce fait par la Loi Impériale, qui inclut entre autres la présomption d'innocence. Etant garde impérial, vous n'avez donc rien à craindre de moi ; mais je dois savoir pourquoi des personnes telles que vous choisissent de venir en cet endroit inhabituel - et mon chef ne se contentera pas de l'excuse de la prospection immobilière. Je vous serai donc gré de bien vouloir décliner vos identité et le motif de votre présence ici, à vous, à votre accompagnateur Argonien, et si possible, à cette femme avec qui vous discutiez, en bas.

Modifié par nood, 03 avril 2011 - 11:41.


#148 Arakis

Arakis

Posté 22 août 2009 - 16:49

Confessions ?



20 soirétoile 3E431, 20h00



Un serpent, voila à quoi on aurait pu comparer le sortilège de Maelicia dans sa façon de progresser, il se glissait insidieusement dans les oreilles de Saerileth, se posant sur chaque cellule grise pour y laisser son venin puis repartait vers une autre jusqu'à que l'ensemble du cortex cérébral de la mercenaire soit gagné par l'envoûtement. Comme la plupart de ces sortilèges la cible ne sent pas son influence, malgré ses attributs peu communs Saerileth n'échappa pas à la règle, l'énervement provoqué par sa chute et la réaction de la brétonne se dissipèrent comme une pincée de sable emportée par le vent, à présent elle lui paraissait resplendissante, il se dégageait d'elle une prestance semblable à celle d'une impératrice. Comment ne pas faire confiance à une telle personne ? Elle ouvrit la bouche pour parler, après tout pourquoi cacher la raison de sa présence ?

"Je m'appelle Saerileth Elun, on m'a donné de nombreux surnoms dans ma carrière mais personnellement je préfère L'Aigle, je ..."

Alors qu'elle allait expliquer tout quand à pourquoi et comment elle était arrivé ici elle entendit un grincement, la brétonne aussi car visiblement elle détourna son attention d'elle pour regarder par là d'où venait, au nom qu'elle prononça il s'agissait de l'argonien qu'elle avait sauvé des lépreux, en un sens l'arrivé de l'argonien lui sauva la mise, les arcanes d'illusions comme celle que Maelicia nécessitaient une attention constante, son report d'attention subite sur Danse-Mots fit que l'arcane se brisa, un arcaniste confirmé doté d'un sort de perception de l'Arcanium aurait pu voir les délicates spirales et arabesques à rendre fou de passion artistique un peintre où un sculpteur (d'ailleurs cela s'était déjà vu) se briser avec une mélodie évoquant des millions de vers de cristal purs tintant au rythme de coups de doigts et de baguettes innombrables.

Saerileth ne voyait que la partie visible aux yeux du commun du peuple et de tout ceux qui ne cherchaient pas forcément à percevoir tout ce qui n'était pas inclus dans le sceptre visuel normal, en fait elle percevait tout d'une façon étrangement déformé, la rupture subite de l'arcane avait eu un effet inattendu sur elle, sans doute à cause de ses parties corporels magiques, l'envoûtement à moitié disloqué fut altéré ce qui donna une illusion complètement désorganisée et surtout extrêmement convaincante.

Elle eu l'impression de s'envoler d'un seul bond avant de plonger dans un tunnel mouvant de couleur chaire pour atterrir dans quelque chose de mou et rempli d'un liquide étrange, comme un cheveux dans une bassine pendant une fuite d'eau elle se sentit absorbé vers le bas pour être expulsé brutalement emballé dans quelque chose de malléable et d'une odeur douteuse. Ses pieds touchèrent ce qu'elle crut être le sol, regardant en dessous d'elle, elle vit ce qui ressemblait à une barque retournée, elle était perchée dessus, ballotté par la tempête qui faisait rage sur une mer composée ... d'yeux de verre, des cachalots verts bouteille jaillissaient parfois des globes oculaires artificiels, la barque se retourna soudain sous l'effet d'une vague plus forte de petites sphères, cette étrange marée la fit chuter en arrière.

Elle atterrit cette fois-ci sur un sol en pierre, grognant à cause de son postérieur endolori, elle reconnu la léproserie, elle avait le crâne comme si elle était sorti d\'une nuit bien arrosée comme on en faisait à Thirsk, foutue magicienne, elle a du me lancer un sortilége ou je ne sais quoi, par contre quel genre va savoir ? Se relevant elle regardât autour d'elle, les cadavres étaient toujours là, l'argonien et la brétonne avaient disparu, jetant un oeil vers l'échelle où elle y vit un spectacle incongru un dunmer portant des guenilles semblables à celles des lépreux gravissait l'échelle avec une vivacité pour le moins impressionnante, attraper la bretonne et la remonter avec une facilité déconcertante.

Sa va pas se passer comme ça, je me suis fait suer à les suivre et suis descendu dans ce merdier, on va pas me les piquer sous mon nez. Elle courut vers l'échelle de corde et en entama l'ascension le plus rapidement possible, la colère et la pensée de sortir de cet endroit de malheur lui donnait des ailes, alors qu'elle gravissait les barreaux elle entendait parler le dunmer du haut du puits

"Mademoiselle, je pense que nous sommes partis sur de mauvaises bases, et que c'est en grande partie ma faute. J'espère que - considérant le fait que je vous ai évité une chute d'une vingtaine de pieds - nous allons pouvoir discuter de manière un peu plus reposée. Vous et votre ami Argonien êtes des citoyens impériaux, protégés de ce fait par la Loi Impériale, qui inclut entre autres la présomption d'innocence. Etant garde impérial, vous n'avez donc rien à craindre de moi ; mais je dois savoir pourquoi des personnes telles que vous choisissent de venir en cet endroit inhabituel - et mon chef ne se contentera pas de l'excuse de la prospection immobilière. Je vous serai donc gré de bien vouloir décliner vos identité et le motif de votre présence ici, à vous, à votre accompagnateur Argonien, et si possible, à cette femme avec qui vous discutiez, en bas."

Se hissant en haut du puits elle dégaina son arbalète et l'arma le plus vite possible, la gardant vers le bas elle interpella le dunmer

"La politesse implique que quand on demande le nom d'une dame on le fasse à la concernée, en l'occurrence je suis là bien que je ne vois pas comment qu'un dunmer lépreux peut faire parti de la garde impériale sauf dans ses actifs passés"

Elle serra le poing autour de la crosse de son arme tandis que l'autre allait chercher la garde d'une de ses épées courtes, si le dunmer essayait de frapper par surprise mieux valait être prudent.


Modifié par Arakis, 02 avril 2011 - 10:13.


#149 Trias

Trias

Posté 23 août 2009 - 21:06

Règle Maelicienne °28 : Joindre l'utile aux désagréables


20 soirétoile 3E425, 20h10




La corde se tendit, une pesanteur nouvelle venant ajouter à la traction qu’exerçait déjà la brétonne. Le dunmer était déjà à sa poursuite ! L’escalade de Maelicia se fit plus frénétique, ignorant au mieux les lancements de son épaule invalide. Dix secondes, les fibres tressées vibraient. Vingt, les impulsions se faisaient plus pressantes.

A la vingt-septième seconde, une main d’homme s’empara du barreau de chanvre juste au dessus d’elle. Tandis qu’il se hissait, Maelicia put apercevoir son visage, sa chevelure sombre et raide dissimulée derrière une capuche de lin, ses yeux ardents brûlant du feu de sa race. Ses traits, creusés par les sillons du quotidien, restaient fins comme tous ceux des elfes. Comme pour tous ses pairs, l’étudiante n’aurait su dire son âge. Soudain, ses lèvres bougèrent, et sa main s’ouvrit, libérant une décharge de pression magique.

Instinctivement, la magicienne tenta de dévier le sortilège, mais son bras blessé s’avéra incapable de la soutenir seul, et elle tomba. Une prise solide s’affermit autour de son poignet, retenant sa chute, et la souleva avec une étonnante facilité. Maelicia comprit alors à qu’elle était sous l’effet d’un sort de plume. L’elfe n’était pas hostile. Cessant de se débattre, elle se laissa porter, jusqu’à ce qu’ils parviennent à l’étage supérieur, en sécurité.

Touchant le sol, elle s'y laissa tomber, réalisant son épuisement. Elle s'était comportée en enfant. L'attitude mature du dunmer ne mettait que mieux en évidence sa propre puérilité. Sans relever les yeux, elle hasarda un « merci » véritablement sincère.

Le dunmer hésita quelques instants. Enfin, il répondit :

— Mademoiselle, fit-il d’une voix posée, je pense que nous sommes partis sur de mauvaises bases, et que c'est en grande partie ma faute. J'espère que - considérant le fait que je vous ai évité une chute d'une vingtaine de pieds - nous allons pouvoir discuter de manière un peu plus reposée. Vous et votre ami Argonien êtes des citoyens impériaux, protégés de ce fait par la Loi Impériale, qui inclut entre autres la présomption d'innocence. Etant garde impérial, vous n'avez donc rien à craindre de moi ; mais je dois savoir pourquoi des personnes telles que vous choisissent de venir en cet endroit inhabituel - et mon chef ne se contentera pas de l'excuse de la prospection immobilière. Je vous serai donc gré de bien vouloir décliner vos identité et le motif de votre présence ici, à vous, à votre accompagnateur Argonien, et si possible, à cette femme avec qui vous discutiez, en bas.

Il y eut un bruit d’arc que l’on tend, et Maelicia tressaillit en voyant de nouveau luire l’éclat doré de l’oeil de la mercenaire, à six pieds derrière l'homme. Elle tenait son arbalète armée droit vers eux, et porta une main menaçante à sa dague.

— La politesse implique que quand on demande le nom d'une dame on le fasse à la concernée, fit sa voix rauque et rude. En l'occurrence je suis là bien que je ne vois pas comment qu'un dunmer lépreux peut faire parti de la garde impériale sauf dans ses actifs passés.

Un lépreux ? Maelicia avait pu observer son visage de très près... non, il était improbable que cet homme, qui semblait n’avoir rien su de sa visite au barde, soit un simple ladre bien armé. Mais il avait dit être garde impérial, et ceci, interessait la brétonne au plus haut point.

— Stop ! s’écria-t’elle en voyant le dunmer porter la main à sa ceinture. On s’calme ! Y’en a d’ja trois qui r’froidissent en bas, on s’calme !

Elle attendit quelques instants, puis, comme un semblant de trêve semblait intervenir, elle se reprit et poursuivit sur un ton plus serein.

— Je m’appelle Maelicia. J’vous l’dis parce que vous — elle glissa un oeillade vers le dunmer — m’avez évité une fracture du popotin ; donc j'vous dois bien ça. Quant à mon ami lézard, y saura surement s’présenter lui même.

Un bref instant, elle se demanda ce que pouvait bien faire l'argonien, étrangement silencieux. Sortant de sa réflexion, son regard dériva vers la mercenaire, puis revint instantanément sur l’elfe.
— J’suppose que z’êtes pas des locaux non plus, hein ? Et z’êtes pas venus pour cueillir des champignons, hein ? Pis c’est un coin bizarre pour un tour de garde aussi, non ?

Ses yeux s’attardèrent sur le fourreau lié à la ceinture de l’elfe. La garde de l’épée semblait en effet dessiner les contours d’un aigle impérial.

— Z’avez dit qu’z’avez un chef qui veut savoir c’qu’on fait ici, moi et mon copain. S’pas un crime d’entrer dans une maladrerie, qu’je sache. Y’a pas d’panneau « défense d’entrer » ou « propriété privée ». Donc, z’avez dû nous suivre. Vous, et la pirate.

Elle prit un bref instant avant de continuer, comme si elle soupesait le pour et le contre de ses propos avenirs.

— J’vais p’têtre vous dire c’qu’on fabriquait ici. Mais d’abord j’voudrais être sûre qu’z’êtes bien d’la police et... — ses yeux s’étrécirent — ...si votre champs d’enquête pourrait aussi s’étendre au palais impérial, des fois ?  

Modifié par Trias, 23 août 2009 - 21:12.


#150 nood

nood

Posté 25 août 2009 - 17:14



Présentations

***




Bureau Impérial des Investigations magiques

19 Soirétoile 3E431, 19h15.


- Vous êtes venus rapidement. C'est bien, dit calmement le commissaire Valens.

Drem se tenait debout dans la pénombre des quartiers dudit commissaire, au siège même du Bureau Impérial d'Investigations Magiques. Devant lui, Valens et un des ses bras droits, le questeur-lieutenant Markal gro-Terashom, le sondaient du regard. Mais Drem était habitué aux regards accusateurs, moralisateurs, ou  examinateurs, comme c'était le cas en ce moment. Il en fallait plus pour le démonter. Lui aussi avait les yeux rivés sur ses interlocuteurs. Valens. Un Impérial propre sur lui, paré d'habits simples mais élégants, bien coiffé, d'une trentaine d'années, l'air sagace. Il faisait partie de ses hommes qui sont appelés à faire de grandes choses, à commander ; son regard vif et pénétrant et sa prestance naturelle ne trompaient pas. L'Orque, debout à coté de lui, semblait d'un âge indéterminé, et avait le regard calme de ceux de sa race. Pour avoir servi dans les basses couches de la Légion, Drem avait cotoyé plusieur(e)s légionnaires Orques, et avait appris à apprécier leur sens de l'honneur et leur camaraderie, durs à acquérir mais sans faille.

- Je suis venu dès la réception de ma convocation, répondit Drem.
Un peu de zèle ne gâcherait rien.

- Votre première mission commence demain matin à neuf heures. Elle consistera en une infiltration et une surveillance.

Drem pris un regard étonné.

- Quelque chose vous dérange ?

- C'est que ... l'infiltration n'est pas ma spécialité, avoua Drem.

Le questeur-lieutenant Markal gro-Terashom s'avança, présentant un petit baluchon de couleur sombre.

- Ne vous inquiétez pas. Il ne s'agit pas de voler le Bâton de l'Archimage, fit-il. Vous allez simplement vous mettre à l'affut dans un endroit sombre et tenter de ne pas vous faire repérer. Rien d'insurmontable, mais vous allez laissez ici votre armure et vous servir de ce matériel. Ne gardez que votre épée.

Drem prit le baluchon et l'inspecta : des habits décrépis, un foulard de la même couleur indéfinissable, un anneau de forme d'ombre, un pain de seigle, de l'eau, un plan, deux potions de regain de magie et cinq fioles inconnues. Il lut l'étiquette : "Sérum de résistance à la lèpre de Malacath. L'usage fréquent peut causer diverses maladies neuro-dégéneratives." L'expression de son visage changea.

- Je vais devoir m'infiltrer dans une maladrerie ? Avec des lépreux ?

- En théorie, non, reprit Valens. Vous allez simplement en surveiller l'entrée et appréhender toute personne suspectes. La mission ne prévoit pas que vous y descendiez, sauf pour en ramener un suspect. Les fioles sont juste une précaution : n'oubliez d'en boire une tous les trois, quatre heures.

- Que se passe-t-il de si important dans une léproserie pour qu'on m'y envoie ?

- Ce sera à vous de le déterminer. Nous suspectons qu'elle sert de point de rendez-vous pour des contrebandiers ou d'autres personnes ayant trait à des activités illégales. D'autres informations vous seront données en temps utile. Sachez juste que rien dans cette mission ne semble hors de votre portée. Suivez le plan qu'on vous a fourni et revenez après-demain matin faire votre rapport. D'autres questions ?

- Si j'appréhende quelqu'un, qu'est-ce que je lui fais ?

- Tentez d'en savoir un maximum sur lui, sur ses occupations, sur la raison de sa venue. Il n'est pas nécessaire que vous rameniez un prisonnier, le but de la mission est de ramener des informations.

Drem réfléchit quelques secondes. Il ne s'attendait pas un ce genre de mission, mais plutôt à des arrestations musclées dans les bas quartiers de la Cité Impériale. Cela ne fit que raviver son intérêt : du changement, enfin.

- Vous avez une grande latitude de mouvement. Tant que vous nous ramenez matière à travailler, vous pouvez prendre les décisions qui s'imposent, même dégainer votre arme et vous battre, s'il le faut, ou encore soutirer des informations de la manière qu'il vous plaira. Vous êtes seul juge, et seul responsable.

- C'est noté. Je ferai mon maximum, dit-il après une courte pause.

- Je n'en attends pas moins. Donnez-moi raison de vous avoir choisi, répondit Valens avec un sourire en coin. Votre mission commence demain matin à huit heures : d'ici là, bien entendu, interdiction d'en parler à qui que ce soit.





***



20 Soirétoile 3E431, 20h10

— La politesse implique que quand on demande le nom d'une dame on le fasse à la concernée. En l'occurrence je suis là bien que je ne vois pas comment qu'un dunmer lépreux peut faire partie de la garde impériale sauf dans ses actifs passés.

La mercenaire impériale venait de surgir du puits ; elle semblait à présent tout à fait libérée de l'emprise de la Brétonne et avoir retrouvé son énergie. Manifestement, elle avait aussi retrouvé son arbalète, qu'elle pointait fermement d'une main vers lui. De très mauvais souvenir de douleurs dans l'épaule gauche lui revinrent rien qu'à la vue de cette arme. Il eut un mouvement de recul quasi instinctif, et leva les deux mains en signe de complaisance. Peu de gens savent, par ailleurs, que cette position est également le point de départ pour les passes de nombreux sorts de Destruction. L'Impériale n'en démordait pas, le visant fixement : sa main gauche commençait insensiblement à chercher les gardes de ses dagues de lancer. Drem se voyait déjà avec un carreau à travers la poitrine ; ce fut la gamine brétonne qui mit fin à la tension ambiante par une interjection bien sentie.

— Stop ! On s'calme ! Y'en a d'jà trois qui r'froidissent en bas, on s'calme !

Elle marquait des courtes pauses, mesurant chacun de ses propos.

— Je m'appelle Maelicia. J'vous l'dis parce que vous m'avez évité une fracture du popotin ; donc j'vous dois bien ça. Quant à mon ami lézard, y saura surement s'présenter lui même. ... J'suppose que z'êtes pas des locaux non plus, hein ? Et z'êtes pas venus pour cueillir des champignons, hein ? Pis c'est un coin bizarre pour un tour de garde aussi, non ?

Elle le dévisagea furtivement ; Drem compris qu'elle cherchait à mieux l'identifier.

— Z'avez dit qu'z'avez un chef qui veut savoir c'qu'on fait ici, moi et mon copain. S'pas un crime d'entrer dans une maladrerie, qu'je sache. Y'a pas d'panneau « défense d'entrer » ou « propriété privée ». Donc, z'avez dû nous suivre. Vous, et la pirate. J'vais p'têtre vous dire c'qu'on fabriquait ici. Mais d'abord j'voudrais être sûre qu'z'êtes bien d'la police et ... si votre champ d'enquête pourrait aussi s'étendre au palais impérial, des fois ?

Il ne répondit pas tout de suite, réfléchissant à ses prochains mots tout en dévisageant les deux demoiselles. Maelicia était jeune ; facilement six fois moins âgée que moi, se dit-il. Elle possédait un visage commun, bien que non dénué d'une beauté simple et de l'éclat de peau et de regard propre aux Brétons. Des cheveux bruns, mi-longs, des yeux verts émeraude, une paire de lunettes. Ces Brétons, si facilement enflammés, aux réactions vives, joyeuses, passionnées... Elle ne dérogeait pas à la règle. Elle ne dérogeait pas non plus à la règle qui dit que tous les gens issus de Hauteroche sont de puissants manipulateurs de magie : pendant les quelques minutes d'observation, il l'avait vu accomplir une télékinésie assez peu courante et une téléportation locale. Deux sorts qui démontraient une maîtrise certaines du Mysticisme, la plus hermétique des écoles de Magie ; elle devait probablement se débrouiller dans d'autres sorts.

L'Impériale était nettement plus atypique. D'abord par son teint basané et par les cicatrices qui ornaient ses avant-bras. Enfin, son avant-bras gauche seulement, le droit semblant être un peu plus qu'humain de par son aspect métallique. Elle avait le visage dur de quelqu'un qui a déjà vu de nombreux combats. Son regard, inflexible, était rendu irréel par son œil droit. A ce qu'il pouvait en conjecturer, il n'avait plus rien d'humain mais dégageait une lueur semblable à celle d'une topaze de grande pureté. Son équipement, cette arbalète curieusement améliorée et sa tenue évoquant celle des corsaires, ne corrigeaient pas l'idée qu'il avait à faire avec un quidam plus coriace qu'une simple mercenaire. La prudence s'imposa à lui tout naturtellement.

Il avait déjà de quoi les identifier de manière très précise. Le Bureau Impérial d'Investigations Magiques aurait tôt fait de pouvoir retrouver la piste de la brétonne : Drem aurait parié sa solde qu'elle avait déjà été en relation avec la Guilde des Mages. Quant à la mercenaire, quelqu'un qui avait de tels atours d'origine suspecte aurait sûrement déjà été repéré par les autorités. Seul l'Argonien ne s'était pas manifesté : encore sous le choc de la téléportation manquée, probablement. Les Argoniens résistent mal à ce genre de magie. Drem décida de gagner du temps - et par la même, des informations à ramener.

- Désolé, mademoiselle. Ma politesse n'est plus qu'un souvenir quand on me braque une arbalète dessus. Et mes actifs passé datent, pour certains, de bien avant votre naissance, probablement. Mon nom est Drem, je ne suis pas lépreux et je suis bien "de la police", Maelicia. Voyez mes armes.

Il déboutonna le fourreau de sa ceinture et le montra, ainsi que la garde de l'épée, aux deux demoiselles. Ils étaient tous deux marqués du sceau de l'Empire : l'aigle impérial. Tous le savaient : seuls les gardes impériaux ont l'accès à de telles armes. Quelqu'un qui ne ferait pas partie de le Légion, retrouvé avec ça entre ses mains, irait au devant de sérieux ennuis.

- Mon champ d'action, pour aujourd'hui, c'est ce couloir, jusqu'à ce que le soleil se lève. Après, tout est faisable si vous me laissez un peu de temps. Mais avant toute chose, j'aimerai savoir à qui j'ai l'honneur de parler dans ce cadre accueillant et idyllique ?

Un peu de temps. C'était exactement ce qu'il était en train de faire. Gagner un peu de temps pour essayer de glaner la moindre parcelle d'informations utiles. Dire ce que Maelicia voulait bien entendre pour lui délier la langue. Soutirer le nom de cette Impériale au parler franc et tranchant comme son regard. Attendre l'intervention de l'Argonien.

Modifié par nood, 03 avril 2011 - 11:41.





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